BISTRO(T), OTE, (BISTRO, BISTROT)subst.
A. Fam. Petit café, petit restaurant sympathique et modeste. Courir les bistrots :
1. Il allait se faire de bons copains des gars qui seraient allés au front comme lui il dénicherait un petit bistro convenable pour manger à midi, il trouverait une chambre pas trop loin, pour pouvoir se lever tard. DORGELÈS, Les Croix de bois, 1919, p. 312.
2. Après le meeting on est allé dans un bistro manger de la choucroute et boire de la bière, ... S. DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 553.
B. P. méton. Le patron de cet établissement. Tulacque était bistro à la barrière du Trône (BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 22) :
3. Ils ont un compte au cabaret, et se décident à travailler deux ou trois jours de temps en temps, lorsque le bistrot menace de se fâcher. ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, p. 199.
Au fém. Bistrote. Femme qui tient un café : 4. Avec un long épi, il [Vieublé] était occupé à chatouiller de loin le creux de la main de la bistrote, qui faisait la belle avec ses compagnes. DORGELÈS, Les Croix de bois, 1919, p. 178.
PRONONC. ET ORTH. : []. Lar. 20e écrit bistro, DUB. et Lar. encyclop. Suppl. 1968 écrivent bistrot. ROB., Lar. encyclop., QUILLET 1965 et ROB. Suppl. 1970 admettent bistro ou bistrot ; ce dernier ajoute la forme bistrote ,,n.f. Femme qui tient un café.`` ÉTYMOL. ET HIST. 1884 arg. pop. bistro « cabaretier » (G. MOREAU, Souvenirs de la Petite et de la Grande Roquette, t. 2, p. 3) ; 1892 bistrot (TIMM.) ; d'où le fém. bistrote [1914 d'apr. ESN. sans attest.] ; 1919, supra ex. 4. Orig. obsc. ; à rattacher au poit. bistraud « petit domestique » d'orig. inc. (cf. FEW t. 22, 2, p. 61a ; v. aussi ESN., s.v. bistaud) si l'on suppose que le mot a tout d'abord désigné l'aide du marchand de vin, plutôt qu'à relier à bistingo « cabaret » 1845 (RAISSON, Une Sombre histoire, I, 40 dans Fr. mod., t. 19, 1951, p. 203), bustingue (avec coquille ?) « hôtel où couchent les bohémiens » 1848 (A. PIERRE, Arg. et jargon, ibid.) et bistringue, bastringue*, tous d'orig. obsc. ; l'hyp. qui voit dans le mot, l'adaptation du russe bistro « vite » remontant aux cosaques assoiffés occupant Paris en 1814 n'est pas suffisamment fondée. Le -t final qui permet le fém. bistrote (cf. supra prononc. et orth.) est dû aux nombreux mots fr. en -ot à valeur affective (cf. NYROP t. 3, § 287-291). STAT. Fréq. abs. littér. : 217. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) néant, b) néant; XXe s. : a) 35, b) 901.
BBG. BERNELLE (A.). La Langue leur a fourché... Vie Lang. 1960, p. 485. ESNAULT (G.). Bistro. Fr. mod. 1951, t. 19, p. 203. ESNAULT (G.). Généalogie de bistro. Vie Lang. 1954, pp. 175-177. GALL. 1955, p. 230. LE BRETON GRANDMAISON. Le Monde de la limonade. Vie Lang. 1971, pp. 548-551. SAIN. Lang. par. 1920, p. 111, 268. SAIN. Sources t. 3 1972 [1930], p. 71. (tlfi:bistrot)
- Origine provinciale ; le mot a probablement désigné au début l'aide du marchand de vin et ensuite la patron lui-même. (SAINXIX)
- D'origine confuse : certains le datent de l'arrivée des Cosaques à Paris lors de l'invasion de 1814 (les hommes de troupes qui n'avaient pas le droit d'y entrer officiellement faisaient rapidement en criant bistro = vite) mais GIR pense que le terme est d'origine française et que c'est une déformation de mastroquet, lui-même issu de la constraction de stroc = setier (cf. Vidocq, les voleurs) et de demi : mi-stroc qui a donné mistroquet ; ce mot devient listroquem en louchebem → bistroquet → bistroque → troquet → bistroquet → bistrot. (GIR-BIST)
- A d'abord désigné le cabaretier avant de désigner le débit de boisson ; étymologie incertaine : peut-être emprunté au poitevin « bistraud » (petit gardeur de vaches domestiques, d'où commis d'auberge). Autre étymologie peu vraisemblable : les Cosaques à Paris, en 1814, commandaient à boire en disant « bistro, bistro » (= vite en russe) : les cabaretiers auraient pris le mot pour eux. (MCC)
- Corruption de mastroquet. (AYN)
- Orig. incert.; p.-ê. du poitevin bistraud « petit domestique », qui aurait désigné l'aide du marchand de vin; ou encore des formes bistingo (1845), bistringue, bastringue, d'orig. obscures; quant à une adaptation du russe byistro « vite », venue des cosaques demandant à boire à Paris en 1814, c'est une pure fantaisie en l'absence de toute attestation du mot à l'époque ou peu après; mais l'hypothèse la plus vraisemblable rattache le mot à bistouille (par la var. attestée bistrouille et un verbe bistrouiller). → Bistouille (GR)
- D'origine confuse, le mot bistrot date pour certains, de l'arrivée des Cosaques dans la région parisienne durant la guerre de 1814. Les hommes de troupe qui n'avaient absolument pas le droit de fréquenter un quelconque estaminet, déjouant toute surveillance s'y précipitaient à chaque occasion en criant : bistro, bistro !... ce qui paraît-il signifie : vite... vite... Après avoir absorbé ce qui leur était servi, ils disparaissaient aussi rapidement qu'ils étaient venus. C'est de cette époque dit-on que le parisien avide de nouveauté prit l'habitude d'appeler le café, le bistro. Bistrot sans T final évidemment, mais nombreux sont ceux, et nous en sommes, qui l'écrivent avec la lettre en question, pourquoi ? Nous pensons que le mot litigieux est vraiment français et qu'il provient d'une suite d'allitérations et de déformations de mastroquet tout simplement. En louchebem (ce langage particulier aux bouchers) mastroquet devient listroquem. Reprenant le mot au vol l'argot à son tour le malaxe et le refond pour en faire listroquet, listroque, troquet, bistroquet et finalement le raccourci bistrot avec un t car il ne faut pas oublier que l'on dit en parlant de son tenancier ou de sa tenancière qu'il est un bistrotier ou une bistrote. (Giraud, Bistrots, 1960)