ESBIGNER, verbe trans.
Arg., pop. ou dial.
B. Emploi pronom. réfl. S'esquiver, s'en aller, s'enfuir, partir sans se faire remarquer. Synon. décamper, filer en douce. Je casse une canne, autrement dit je m'esbigne, ou, comme on dit à la cour, je file (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 296). Y m'semble l'voir encore [le duc] l'soir qu'y s'a esbigné comme ça à l'anglaise (GYP, Mme la Duchesse, 1893, p. 114). Il faut que je m'esbigne en souplesse de cette cabine, de cette carcasse (AUDIBERTI, Quoat, 1946, 2e tabl., p. 55).
Rem. La docum. atteste esbigné, ée, en emploi adj., corresp. à l'emploi pronom. Et la mère ? demanda le saltimbanque avec tout l'intérêt d'un amant épris, inquiet sur le sort de l'objet aimé. Esbignée ! répondit Rocambole (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 624).
Prononc. : [], (je m')esbigne []. Étymol. et Hist. 1. 1754 trans. « voler » (P. BOUDIN, Madame Engueule, p. 45) ; 2. ca 1810 s'esbigner « s'enfuir en hâte » (DÉSAUGIERS, Parodie de la Vestale, acte II, couplet 7 ds SAIN. Lang. par., p. 512). Empr. au fourbesque [arg. ital.] sbignare « courir » (dep. 1619, Il Nuovo modo di intendere la lingua zerga d'apr. DAUZAT Ling. fr., p. 272 ; cf. 1640, OUDIN, Recherches ital. et fr.), altération de l'ital. svignare « fuir en se cachant » (dep. XVIe s. d'apr. DEI), lui-même prob. dér. de vigna (vigne*), au sens de « s'enfuir de la vigne comme un maraudeur » ; le passage de v à b fait cependant difficulté : v. explications contradictoires données ds FEW t. 14, p. 477 et par ROHLFS t. 1, § 191. Fréq. abs. littér. : 12. Bbg DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 272. SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 237. SAIN. Lang. par. 1920, p. 317, 455, 512. (tlfi:esbigner)
- esbigner (s'-) v.pron. non conv. DÉPLAC. "disparaître" - FEW (14, 474b), v. 1825 ; Rs, cit. R. Ikor. Add.DDL Corr.E, GLLF, Lex.[75], PR[77] (1809, Désaugiers) et compl. R, ND4, TLF (v. 1810, Désaugiers), BW6 (av. 1827, Désaugiers), L (Désaugiers, même texte)
- 1808 - «Et l'amant, qui s'sent morveux, / Voyant qu'on crie à la garde, / S'esbigne en disant : 'Si j' tarde, / Si j' m'amuse à la moutarde, / Nous la gobons tous les deux.[...] AIR Y a d' l'oignon. Il s'esbigne en cachette ; / Mais au bas d' la maison / Un' patrouille en vedette / Surprend l' pauvre garçon... / Y a d' l'oignon, (ter.) / D' l'oignette... / Y a d' l'oignon." » Désaugiers, Chansons et poésies diverses, I, 155-6 et 173 (Capelle et Renand) - P.E.
- esbigner (s'-) v.pron. non conv. DÉPLAC. "disparaître" - L (cit.), DDL 15, 1808, Désaugiers ; E, GLLF, Lex.[75], PR[77], DFNC, 1809, Désaugiers ; R, TLF, ND4, v. 1810, Désaugiers ; FEW (14, 474b), v. 1825 ; BW6, av. 1827, Désaugiers. Add.DDL :
- 1799 - «DAMAS. Ce que m'a dit ma femme à présent me tracasse ; / Fricandeau, laisse-moi seul un instant, de grâce. / (à Saucinette). Toi, fais-moi le plaisir de t'esbigner aussi.» J.-A. Jacquelin, Les Héros de cuisine, 12 (Foulon) - P.E.
- 1808 - «LA PALISSE. [...] nous voilà à table. Quand il faut passer au comptoir, tu t'esbignes.» Ourry, Les Amours de Braillard, 13 (Cavanagh) - P.E.
- esbigner (s'-) v.pron. arg. , non conv. DÉPLAC. "disparaître" - DDL 19, 1799 [repris in GR] ; E, GLLF, Lex.[79], 1809 ; TLF, 1810 ; FEW (14, 474b), v. 1825 ; Ls, cit. Désaugiers ; DFNC, cit. Goron.
- 1789 - «Tous ceux-là qui sçavon' zécrire, / En attendant pouvons toujours, / Coucher par terre un biau discours, / Et pis l' glisser dans un' tirlire / Dont on vous a baillé l' cad'nas, / A la sell' fin qu' ça n' sesbigne pas.» R'quête en magnier' d'écrit à monseigneu le pervo des marchands, 4 (s.l.n.d.) - P.E.
- esbigner (s'-) v.pron. arg. , non conv. DÉPLAC. "disparaître" - DDL 19, 1799 [repris in GR] ; E, GLLF, Lex.[79], 1809 ; TLF, 1810 ; FEW (14, 474b), v. 1825 ; Ls, cit. Désaugiers ; DFNC, cit. Goron. s'esbiner - E, 1829 ; FEW (rég.), ø d ; absent TLF.
- 1801 - «BLANCHET [...] ce n'est pas à nous qu'on z'en veut... Vîte, esbinez-vous. Ici Blanchet ressort de la maison avec les quatre Garde-marée, qui se sauvent avec précipitation.» [A. Rosny], L'Enfant de trente-six pères, III, 200 (Huguin) - P.E. (bhvf:esbigner)
- Se garer des beignes. (AYN)
- Argot ital. sbignare « s'enfuir de la vigne ». (GR)
- Empr. au fourbesque [arg. ital.] sbignare « courir » (dep. 1619, Il Nuovo modo di intendere la lingua zerga d'apr. DAUZAT Ling. fr., p. 272; cf. 1640, OUDIN, Recherches ital. et fr.), altération de l'ital. svignare « fuir en se cachant » (dep. XVIe s. d'apr. DEI), lui-même prob. dér. de vigna (vigne*), au sens de « s'enfuir de la vigne comme un maraudeur » ; le passage de v à b fait cependant difficulté. (TLFi)