JOBARD, -ARDE, adj. et subst.
Fam. (Celui, celle qui est) trop naïf, d'une grande crédulité. Passer pour un jobard ; prendre qqn pour un jobard ; traiter qqn de jobard. Quand on a des rentes, sacristi ! il faudrait être jobard pour s'esquinter le tempérament (Maupass., Pierre et Jean, 1888, p. 323). J'aime Odette de tout mon coeur, mais pour lui faire des théories d'esthétique, il faut tout de même être un fameux jobard ! (Proust, Swann, 1913, p. 228). V. canaillerie ex. 1 :
... un jobard qui ramasse avec joie un papier plié en quatre, qui le fourre dans sa poche, (...) entre furtivement dans une allée pour y développer sa trouvaille qui se trouve n'être qu'un prospectus de vente au rabais... Kock, Ni jamais, 1835, p. 280.
− [P. méton.] Emploi adj. Qui caractérise une telle personne, qui en est le fait. Il a un air jobard (Ac.1935). Diderot, dont les « Salons » tant vantés lui paraissaient singulièrement remplis de fadaises morales et d'aspirations jobardes (Huysmans, À rebours, 1884, p. 191). L'ignorance, les niaises pudeurs, les crédulités jobardes (Bloy, Désesp., 1886, p. 54).
Prononc. et Orth. : [ʒ ɔba:ʀ], fém. [-aʀd]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1807 subst. jobbard (Francis, Désaugiers, Moreau, Taconnet chez Ramponneau, p. 7 (Barba) ds Quem. DDL t. 18) ; 1808 subst. (Frédéric [Dupetit-Méré], La Famille des Jobards ou Les Trois cousins, vaudeville en un acte, Paris, 1810, p. 12 : savez-vous ce qu'on appelle un Jobard, à Paris ? [...] C'est une bête) ; 1834 adj. (Sainte-Beuve, Corresp., t. 1, p. 442). Dér. de job(e) « niais, sot » (v. job1) ; suff. -ard*. Cf. en m. fr. joubard (1571, M. de La Porte, Épithetes ds Gdf. : chien joubard), de sens obsc., défini « qui aime à plaisanter, à s'amuser » ds Gdf., « qui aime à folâtrer » ds FEW t. 4, p. 428b, non défini par Hug. ; Gdf. cite également Jobar comme nom propre en 1161 (Cart. de St Loup, fo40 vo, orig., Arch. Aube : Constantius Jobar), et un verbe a. fr. enjobarder « tromper, se moquer de » (fin xiiie s., Jean de Meung, Testament, ms. [Rome] Corsini, fo154d [xive s.]). Le m. fr. et les dial. connaissent d'autres dér. de job(e) au sens de « sot, nigaud, niais » (FEW t. 4, p. 428b), v. jobelin. Fréq. abs. littér. : 43. (tlfi:jobard)
- jobard n.m. non conv. CARACT. "naïf" - ND4, PR[77], 1832 ; BW6, 1836 ; FEW (4, 428b), 1842, Mozin ; R, cit. Balzac ; L, DG (néol.), ø d. • jobbard Compl.TLF (mêmes réf., ø texte)
- 1807 - «Il joue au collin-maillard, / Le jobbard, / Qui, si tard / D'aimer fait la sottise.» Francis, Désaugiers, Moreau, Taconnet chez Ramponneau, 7 (Barba) - P.E.
- jobard n.m. non conv. CARACT. "naïf" - ND4, PR[77], 1832 ; BW6, 1836 ; FEW (4, 428b), 1842, Mozin ; R, cit. Balzac ; L, DG (néol.), ø d. Add.DDL : Compl.E, GLLF, Lex.[75], TLF (1808)
- 1808 - «GREGOIRE. [...] savez-vous ce qu'on appelle un Jobard, à Paris ? JOBARD. Comment ! ce qu'on appelle un Jobard ! GREGOIRE. C'est une bête, mon oncle !... JOBARD. Une bête ! GREGOIRE. Oui, quand on voit un individu qu'est un peu dans les oies, on dit que c'est un Jobard. Mad. JOBARD. Quelle horreur ! JOBARD. Quelle insolence !» Frédéric et Boirie, La Famille des Jobards, 12 (Barba) - P.E.
- 1815 - «PINSON. [...] des niches aux jobards, ça fait passer le temps ...» Désaugiers, Gentil, Brazier, Je fais mes farces, 11 (Nouv. éd., Barba) - P.E.
- jobard n.m. non conv. CARACT. "naïf" - E, GLLF, Lex.[79], DDL 18, TLF, GR[85], 1808 ; FEW (4, 428b), 1842, Mozin ; L, DG (néol.), ø d jobbard : DDL 18, TLF, GR[85], 1807 • Jobar n.pr. - G, TLF, 1161. Au 18e :
- 1798 - «PERSONNAGES. [...] JOBAR. Hugot.» Aude, L'Ecole tragique, 39 (Barba) - P.E.
- 1799 - «MENU. Il s'entend avec l'aveugle, je te dis ; mais ils ne me feront pas. J'ai vu courir le loup. Comme ils feraient des moqueries de moi, si je leux lâchais la pièce en Jobar...» [Aude et Hapdé], Cadet Roussel misantrope et Manon repentante, 17 (Théâtre du Vaudeville) - P.E.
- jobard n.m. non conv. CARACT. "naïf" - E, GLLF, Lex.[79], DDL 18, TLF, GR[85], 1808 ; FEW (4, 428b), 1842, Mozin ; L, DG (néol.), ø d jobbard : DDL 18, TLF, GR[85], 1807
- 1804 - «[...] en un instant, tout c' bonheur là a été flambé. J'ai été, en propre mot, le jobard de ma tendresse pour toi et pour le fruit de nos amours, je me suis blousé, j'ai été fait d'amitié, en confiant l'agriculture de c'te jeune plante, à qui ?... à qui ? à un homme qui !...» Sidony et Servières, Jocrisse suicide, 7 (Masson) - P.E. (bhvf:jobard)