FRICOT, subst. masc.
Familier
A.− Viande en ragoût. Le fricot de Ragotte. Dans une casserole en terre cuite, deux ou trois morceaux de lard qu'on laisse fondre et qu'on retire (...), puis on mince de l'oignon, de l'ail, de l'échalote, des carottes (Renard, Journal, 1909, p. 1231) :
... il [le forgeron] a pauvrement fait cuire la viande à même la braise où sont restées des traces de graisse. Alors qu'avec le morceau qu'on lui a donné : trois côtelettes premières et un peu de rognonnade il pouvait, en prenant un petit plat de terre et un oignon, se faire un petit fricot. Giono, Triomphe vie, 1941, p. 285.
B.− P. ext., vieilli
1. Viande et/ou légume(s) grossièrement cuisinés. Sur une avenue déserte, un vieux cantonnier, assis contre un mur, sa bouteille entre les jambes, mâchait lentement des bouchées de pain avec un peu de fricot (France, Île ping., 1908, p. 416). La misère des villes a partout la même haleine de fricot et de latrines (Mauriac, Pharis., 1941, p. 184).
2. [Avec une valeur générique] Repas, nourriture. Bichette, disait-elle sans façon, ton mari et toi, vous ne faites rien ce soir ? Je reste à manger votre fricot (Goncourt, G. Lacerteux, 1864, p. 29). Y avait un tirage terrible... sur le fricot... sur les bougies... sur le chauffage (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 311).
− P. méton. Cuisine. Faire le fricot. Il s'était mis au fricot : − Ayez pas peur. J' vous ferai ça à l'oseille. Rien, dans la vie, ne le disposait à la cuisine (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 35).
3. Vx. Bonne chère, bombance. Faire fricot. Il a donné des fêtes, des dîners, a séduit les uns par le fricot, les autres par la vanité (Mérimée, Lettres Delessert, 1870, p. 136). Pour ces gens-là, c'est comme si la guerre était à Madagascar ou chez les Chinois, j' te jure qu'ils ne s'en font pas pour la campagne d'hiver. C'est le fricot, je te le dis, le grand fricot (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 274).
− Région. (Canada). Festin, repas plantureux. Elle finit par avouer que ses parents donneraient un grand fricot le lendemain soir ; ils attendaient pour l'occasion de la parenté de Pierreville, d'un peu partout (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 115).
Étymol. et Hist. [1758 (d'apr. Bl.-W.5); 1767 attesté indirectement dans le bret. frico cf. Le Laé, Morin, v. 1135 ds Fr. mod. t. 15, 202] ; 1800 « ragoût; viande fricassée » (P. Leclair, Hist. brig. et assass. Orgères, p. 100 : Nous avions belle de manger [...] du fricot [...] tous les jours il nous faisait cuire des marmitées de cheval ou de vaches, qu'il avoit écorchés) ; 1847 p. ext. « nourriture en général » (Balzac, Cous. Pons, p. 53 : les chens qui mangent le vrigod ti roi). Dér. du rad. fric- de fricasser*; suff. -ot*. Fréq. abs. littér. : 56. (tlfi:fricot)
- fricot n.m. non conv. US. ALIM. "nourriture" - TLF, 1847, Balzac ; GLLF, av. 1850, Balzac ; Lex.[75], v. 1850 ; FEW (3, 792b), 1852 ; R, cit. Renard, 1909 ø sens : BW6, 1758 ; ND4, 1767, Le Lué [sic] ; "bombance" : E (en breton), GLLF, Lex.[75], PR[77], 1767
- 1767 - «Moi qu'avoit là z'un bon fricot, / Je vous pris mon homme au gavio, / Et lui dis : allons, patronet, va-t'en vendre ton gâteau plus loin, sinon j' te vas donner la féve sur l'oeil. Il vouloit me faire sortir dans la rue du dehors ; mais moi tout de suite, pif, paf, z'on [...]» Taconet, Les Ecosseuses de la Halle, 36 (Langlois) - P.E.
- 1782 - «LA PIQUETTE. [...] Tenez, Messieurs, voilà ce qui s'appelle une bonne bouteille de vin. JEROME. Nous allons voir ça. LA PIQUETTE. Moi, je m'en vas au fricot. Quand vous aurez besoin de quelque chose, vous n'aurez qu'à appeller.» [Goullinet], Les Trois aveugles, 27 (Cailleau) - P.E (bhvf:fricot)
- Du rad. de fricasser, et -ot (GR)