ARSOUILLE, adj. et subst.
Populaire
A.− Emploi adj. [En parlant d'une pers., de sa manière d'être] Qui a le genre, l'allure, les manières d'un ou d'une arsouille. Air, genre arsouille :
1. La fille (...) ne parle pas aux sens du peuple avec des paroles ordurières, avec des gestes obscènes, avec l'apparence arsouille. E. de Goncourt, La Fille Élisa, 1877, p. 119.
2. Avec son pif en trompette (...) son ventre mastoc et son allure arsouille, on l'eût prise [Anne de Bretagne] pour une marinière... Huysmans, En ménage, 1881, p. 40.
B.− Emploi subst. Celui, celle qui a les manières, le langage d'une crapule, d'un voyou. Synon. débauché, dépravé, dévoyé :
3. ... cette intéressante partie du peuple français que l'on désigne sous les dénominations de gamins, de titis et de voyous, deux champions en attitude (...) c'étaient des arsouilles qui tiraient la savate. T. Gautier, Les Français peints par eux-mêmes, t. 5, Le Maître de chausson, 1842, p. 263.
4. L'an dernier, en sus de ses vues des Folies, il exposait des coulisses avec des danseuses, au petit bec retroussé, d'affolantes et célestes arsouilles, causant avec de gros messieurs paternels et obscènes, les Crevel de notre époque, et de jeunes pantins gourmés dans leurs cols droits et leurs habits noirs ; tous s'agitant, vivant, exhalant l'odeur de l'atmosphère qui les entoure. Huysmans, L'Art moderne, 1883, p. 123.
Rem. 1. J. Humbert (Nouv. glossaire genevois, 1852, p. 25) fait de ce mot un ,,terme ignoble, qu'on retrouve dans quelques provinces du nord et du centre de la France.`` 2. Littré localise le mot dans le lang. pop. parisien.
PRONONC. : [aʀsuj]. Demi-longueur ds Passy 1914 à la dernière syllabe. Littré veut encore qu'on prononce un l mouillé.
ÉTYMOL. ET HIST. A.− Subst. 1792 « voyou, sujet de bas étage, débauché » (Gorsas, 26 fév. 1792 ds Buchez et Roux, Hist. parlem. de la Révol. fr., t. 13, p. 231 ds Brunot t. 10, p. 224 : Il y avait dans le parterre plusieurs souteneurs de tripots, connus sous le nom d'arsouilles). B.− Adj., supra. Issu du lat. solium (FEW t. 12, s.v. solium 2 b) v. souiller ; soit déverbal de arsouiller* (Sain. Lang. par. p. 76) ; soit métathèse de souillard (F. Baldensperger, Notes lexicologiques, Rev. Philol. Fr., t. 17, 1903, p. 291) attesté au sens de « souillon » dep. 1356 (Complainte s. la bat. de Poitiers, ap. Ler. de Lincy, ch. hist. ds Gdf. : Leurs soillars et leur page pour gens d'armes), lui-même dér. de souiller*; suff. -ard*.
STAT. − Fréq. abs. littér. : Arsouille. 20. Arsouillerie. 1.
BBG. − France 1907. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 144, 173. − Larch. 1880. − La Rue 1954. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 92. − Michel 1856. (tlfi:arsouille)
- Anagramme du vieux mot souillart qui qualifiait l'arsouille du MA ; la souillardaille était la canaille jadis ; se prend aussi adjectivement. (LAR 6e)
- Déformation du vieux mot souillart = canaille, vaurien. (DEL)
- Anagramme du vieux mot souillart = arsouille au MA : la souillardaille était la canaille de jadis (Théo. Gautier cité par Larchey) ; aux environs de 1830 le sens a évolué dans un sens plus indulgent pour désigner ceux qui faisaient des excès de boisson dont le modèle était Lord Seymour que le peuple avait baptisé Mylord l'Arsouille : le mot fit son chemin et n'a conservé que les acceptions = ivrogne, ivrognerie. (GIR-BIST)
- Cellard (Vie du lang.) propose arsehole (trou du cul) qui forme l'expression « pissed as arseholes » = complètement saoul. Le mot s'est diffusé avec Mylord l'Arsouille. (cité par MCC)
- Déverbal de arsouiller*, avec infl. de souille, souiller, souillard « souillon ». (GR)