B.− [Peut-être p. allus. à l'extinction des lumières liée au trop petit nombre de spectateurs, et qui rappelle l'obscurité du four]
1. [En parlant d'une pièce de théâtre] Absence de spectateurs, interprétée comme un échec, une déconsidération. Si votre Nana ne chante ni ne joue, vous aurez un four, voilà tout (Zola, Nana, 1880, p. 1098).
− Loc. Faire un four. Sa pièce aurait fait un four (Goncourt, Journal, 1894, p. 510). Faire four (vieilli). Nous faisons four, dit Lousteau en parlant à son compatriote la langue des coulisses (Balzac, Muse départ., 1844, p. 99). Synon. faire un bide.
− P. méton. Ce qui provoque l'absence de spectateurs. La pièce de Cadol est un four, à ce que m'a dit le commis de Lévy (Flaub., Corresp., 1869, p. 84). Dès le deuxième acte, il a bien fallu me rendre à l'évidence : une pièce exécrable, un four noir (Martin du G., Notes Gide, 1951, p. 1369) :
6. Nous n'avons eu qu'un four, une pièce de M. Becque, qui a semblé triste, mais qui a eu ensuite un très grand succès à la Comédie-Française. Maupass., Contes et nouv., t. 2, Endorm., 1889, p. 1173.
2. P. ext. [En parlant de tout spectacle ou de toute manifestation socio-culturelle ou artistique] Échec complet. Finalement, quand il s'occupe de quelque chose, on peut être certain que ce sera un four (Becque, Parisienne, 1885, II, 7, p. 304) :
7. Ce roman a été étranglé à sa naissance par Troppmann et Pierre Bonaparte. Il serait juste de le réhabiliter. C'est un four immérité. Georges devrait penser à le réintroduire dans le monde par quelques articles corsés. Flaub., Corresp., 1879, p. 280. 3. 1659, 19 déc. théâtre (Lagrange, Registre ds Fr. mod. t. 15, p. 201 : Zénobie (...) un four) (tlfi:four)
Four dans le sens de chute complète au théâtre : Rochefort, dans ses Souvenirs d'un vaudevilliste, à l'article THÉAULON, attribue l'origine de cette expression à ce que cet auteur comique avait voulu faire éclore des poulets dans des fours à la manière des anciens Egyptiens, et que son père, s'étant chargé de surveiller l'opération, n'avait réussi qu'à avoir des oeufs durs. C'est depuis cet incident burlesque, ajoute-t-il, que les auteurs disent qu'une pièce fait four quand elle éprouve une chute complète. Cette origine n'est pas exacte, puisque l'expression dans le sens ancien est antérieure à Théaulon. Il est possible qu'elle ait été remise à la mode depuis quelques années et avec un sens nouveau, qui peut avoir été déterminé par le four de Théaulon, mais c'est ailleurs qu'il faut en chercher l'explication : les comédiens, refusant de jouer et renvoyant les spectateurs, c'est là le sens primitif, faisaient four, c'est-à-dire rendaient la salle aussi noire qu'un four. (Littré:four)