Bonjour,
Je trouve « Et pour l’apaiser, lui donnèrent à boire à tyrelarigot » chez Rabelais (Gargantua, entre 1533 et 1535) . Extrait de l'article de Schwob cité dans Compléments, et que j'ai trouvé en entier . Schwob faisait écho à la communication de M. Fleury de 1884
Le 19/11/2021, Roland de L.
II. − Loc. adv., fam. À tire-larigot
A. − Beaucoup et à longs traits. Boire à tire-larigot. Le vin des pierrailles régionales écumait dans les verres, et parmi toute cette population rurale buvant à tire-larigot il n'était question que du sans-pareil (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 247) :
1. Il le fit venir et lui dit : « Vieux dégoûtant ! va, je connais ton vice. Vends-moi ton corps (pour quand tu seras mort, s'entend) service pour service. » Vous devez bien penser que notre saligaud accepta tout de suite. Ayant de l'or, il but à tire-larigot un jus moins insolite. Ponchon, Muse cabaret, 1920, p. 57.
B. − P. ext. En grande quantité, en abondance. Elle est merveilleuse, la vie! Elle fabrique, à tire larigot, des clématites et des paquebots, des squelettes et des chevelures (Audiberti, Quoat, 1946, 2e tabl., p. 72) :
2. ... il faut vous marier convenablement, et vous ne vous marierez convenablement que si vous faites défiler devant vous des messieurs convenables, à tire-larigot, comme on fait défiler devant soi des étalons au Tattersall. Montherl., J. filles, 1936, p. 955.
− Expr. S'en donner à tire-larigot. Nos auteurs dramatiques et nos romanciers sont uniques. Ils vivent la plupart comme de gais et spirituels chenapans, avec des filles, avec des cocottes, avec des femmes mariées ; ils ne se gênent en rien et s'en donnent à tire larigo. Mais dès qu'il s'agit, dans leurs inventions littéraires, d'un adultère, cela devient une affaire de tous les diables (Sainte-Beuve, Cahiers,1869, p. 133). Étymol. et Hist. 1. Av. 1518 [boire] a tyre Larigault « boire d'un trait, en vidant une bouteille l'une après l'autre » (Sermons choisis de Michel Menot, éd. J. Nève, Paris, 1924, p. 417); 1532 boire à tyrelarigot (Rabelais, Pantagruel, éd. V. L. Saulnier, XVIII, 74); p. ext. 1585 à tirelerigot « en grande quantité » (Paré, éd. J. F. Malgaigne, III, 731) (tlfi:larigot )
La langue populaire a interprété « tire-larigot » comme s'il fallait y reconnaître le suffixe argotique -go ; mais diverses considérations amènent à penser que go est la partie essentielle du mot. Le mot existe au XVI (Rabelais). Mais dans la Response et complaincte.. sur le Jargon (1630) on trouve une expression à comparer : « chanter lerigo ». Le mot rigo existait donc séparément : on peut donc écrire : tire-la-rigo. Le mot rigo (rego*) contient le re- comme prothèse. Rego signifiait gueule, gosier. Cf. Madame Engueule, accords poissards le nom de Madame Angot (=forte en gueule). Sens de go*, rego*, rigo* bien établi : expr. boire, chanter à tire-le-rigo = à gorge déployée. Et ces mots go*, gou*, rigo* ont donné naissance à un grand nombre d'expressions (gogo : écoute la bouche bée les boniments). (SCHW1889Tirelarigot)
Locution expliquée de plusieurs façons : on a prétendu que les Romains fêtèrent leur délivrance en criant « A toi, Alaric Goth » ; on a aussi dit qu'un archevêque de Rouen, Odon Rigaud, avait donné une cloche lourde à la cathédrale que les sonneurs avaient du mal à mettre en branle, qu'ils buvaient comme des sonneurs comme des sonneurs « à tire la Rigaud » ; ce qui est plus probable c'est qu'il faut lire ici le vieux mot fr. larigot (dérivé du grec larynx, larygos) = flûte, gosier, robinet qu'on applique à la tonne : boire à tire-larigot signifierait boire comme un joueur de flûte, boire à tire-gosier, boire à la chantepleure du tonneau. (La Mosaique, 1877, cité par GIR-BIS)
Métaphore musicale comme flûter, et siffler ou fifrer ; XVIe : le larigot est une flûte et le buveur fait le même geste qu'un musicien. (MCC)