CASSE-PIPE(S),(CASSE-PIPE, CASSE-PIPES), subst. masc.
A.− Tir forain dans lequel les cibles sont des pipes en terre.
Rem. Attesté ds Lar 20e Suppl.-Lar. encyclop. et Rob.
B.− Arg., fam. Zone de combat de première ligne, particulièrement exposée. − Ils ne m'auront pas... On ne renvoie pas au casse-pipes un gars amoché comme moi... Ils me traîneront plutôt par les pieds (Dorgelès, Les Croix de bois, 1919, p. 308).
− P. méton. (Danger de) mort au combat. Tu sais où ils m'enverront. En avant de la ligne Maginot : c'est le casse-pipe garanti (Sartre, L'Âge de raison, 1945, p. 124).
Prononc. et Orth. : [kɑspip]. Casse-pipe ds Quillet 1965 (qui ne fait aucune rem. au sujet du plur.) ; casse-pipes ds Lar. 20e, Rob. et Pt Rob. ; les 2 formes admises ds Lar. encyclop., Dub. et Lar. Lang. fr., qui notent que le mot est inv. dans le cas de casse-pipe. Étymol. et Hist. A. [« tir forain » fin xixe s. d'apr. Lar. Lang. fr.] ; 1953 (Lar. 20eSuppl.). B. 1918 « engagement militaire » (156e inf. d'apr. Esn. Poilu). Composé de casse forme verbale de casser* et de pipe* ; l'attest. tardive du sens de « tir forain » rend douteuse l'explication d'Esn. qui y voit l'orig. du sens milit. ; celui-ci paraît issu soit de casser* sa pipe soit plutôt de casse-gueule* « assaut », pipe étant pris au sens de gueule (v. Esn., s.v. pipe). [Esnault a changé d'avis entre son Poilu et le DHAF. (gb)] Fréq. abs. littér. : 10. (tlfi:casse-pipe)
156e inf., mai 18 ; la pipe est la tête, dite fréquemment tête de pipe, et par synecdoque pipe ; casser sa pipe est mourir ; on trouve aussi : cassage de tête (bataille) ; mais au succès de casse-pipe a pu contribuer le souvenir des tirs forains sur pipes à bon marché. (Esnault1919)
- Casser sa pipe et casse-pipe sont deux expr. qui n'ont rien de commun. On disait jadis casser sa pipe en langue de carabins quand le patient, l'opération tournant mal, laissait tomber un certain appareil qu'on lui avait inséré entre les dents pour respirer : c'était une manière de dire chirurgicale et cette pipe n'était pas pour fumer. Rien de tel pour casse-pipe : il s'agit du tir forain où l'on démolit les pipes, en terre blanche, qu'on voyait encore entre les dents des connaisseurs du Quartier Latin en 1920'. Le casse-pipe dans l'infanterie, c'est l'image du front où les tireurs adverses vous visent et vous descendent. (Guérin cité par GIR)
- De casse, et pipe. (GR)
- Du tir forain où l'on abat au fusil (tire-pipes) des pipes en terre. Une interprétation par casser sa pipe, mourir, serait surajoutée : on dit aller au casse-pipes, mais non aller casser (ni faire casser) sa pipe. (DHAF)