Partic. [notamment dans l'expr. crever ou vider l'abcès] Situation (pol., administr., etc.) anormale, devenue intolérable et appelant une intervention rapide et énergique pour y mettre fin :
8. Cresteil (rire amer). − « Ah, oui, tout était beau, c'était du cristal ! Et qu'en est-il résulté ? Hein ? Nous avons crevé l'abcès : nous comptions sur la guérison : et, maintenant, c'est la gangrène ! » (...). − « En avons-nous assez vu!... La gabegie politique, les abus d'autorité, le mercantilisme partout ! R. Martin du Gard, Jean Barois, 1913, p. 465.
9. Le Père Aubry, sachant avec quelle force rejettent sur un sol religieux, les plus profonds instincts que semblaient avoir chassés les prières et l'eau bénite, aurait voulu vider l'abcès ! y mettre le fer et le feu. C'était bien l'avis de l'évêque. Nulle transaction avec le diable, pas d'armistice avec l'Enfer ! M. Barrès, La Colline inspirée, 1913, p. 272.
10. ... le curetage de l'abcès vichyssois est loin d'être complet, il y aura des retours de purulence... M. Déat, L'OEuvre, 12 févr. 1941.
11. Les abcès administratifs diffèrent des collections purulentes en ce qu'ils ne crèvent pas seuls. Ils ne s'ouvrent pas spontanément, pour l'excellente raison, qu'ils ne sont pas des abcès, mais des... « fromages ». O. Brien, L'OEuvre, 9 mars 1941.
12. Puisque le malentendu est une méprise invétérée, le plus expédient est sans doute de ne pas laisser à l'ordre chronique du malentendu le temps de se former ; il faut, pour cela, crever l'abcès tout de suite, tuer dans l'oeuf la fausse situation. V. Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 183.
Rem. Dans ces emplois, abcès fonctionne soit comme suj. (l'abcès se résorbe, ex. 6 ; l'abcès crève, l'abcès s'ouvre, ex. 10), soit comme obj. notamment avec le verbe crever (ex. 7, 11). Le mot associé peut être un subst. du vocab. méd. curetage de l'abcès (ex. 9). Le cont. est souvent pol., plus rarement psychol.
B.− Sens fig. (cf. sém. B), attesté dès le XVIIe s., subsiste : [Par la confession] dès qu'on a percé l'abcès et qu'on l'a jeté dehors, on sent tout à coup la sérénité se répandre dans l'âme. Bourdaloue, Pensées, t. 1, p. 330, (Littré). (tlfi:abcès)