Andreas a écrit :
Alors, premièrement, je n'arrive pas à expliquer à moi-même l'emploi du subjonctif dans Aussi metté-je (c'est bien le subjonctif, n'est-ce pas?)
Je ne pense pas qu’il s’agisse ici du subjonctif mette. Ce type de construction commençant par aussi ne peut pas, je crois, être suivi d’un subjonctif présent (il peut l’être par un conditionnel ou par un subjonctif imparfait), et donc, si mon affirmation est exacte, ce metté-je ne peut être qu’un indicatif présent. Étant donné que l’indicatif première personne du verbe mettre est normalement je mets, comment peut-on arriver à la forme metté-je, étant donné également que des inversions de type chanté-je etc. ne peuvent résulter que du remplacement par é d’un e muet terminant la première personne du singulier, e muet qui, dans le cas de je mets, n’est pas présent? Metté-je apparaît donc comme une forme tout à fait aberrante!
Heureusement, Grevisse nous éclaire à ce sujet:
709. À la 1re personne du singulier de l'indicatif présent, l'inversion du sujet je, pronom atone, produit des locutions que l'usage n'admet pas en général, surtout quand il s'agit de monosyllabes. Ainsi on ne dira pas: Cours-je? Prends-je? Sors-je? Romps-je? Mens-je? Pars-je? etc.
On évite ces formes en recourant à la périphrase est-ce que: est-ce que je cours? est-ce que je prends? etc., ou à quelque autre tour: Croyez-vous que je prenne ? Me voit-on courir? etc.
Toutefois I'usage admet l'inversion de je après quelques verbes très usités: ai-je? Dis-je? Dois-je? Fais-je? Puis-je? (voir § 674,12) Suis-je? Sais-je? Vais-je ? Vois-je? Veux-tu? etc. :
Qu'est-ce que j'aime en Syrie et qu'y veux-je rejoindre? (M. BARRÈS, Un Jardin sur l’Oronte, p. 7.) - Viens-je à temps ? (A. GIDE, Le Retour de l'Enfant prodigue, p. 151.) - Oui, oui, réponds-je (R. BENJAMIN, Aliborons et Démagogues, p. 50). - Encore une cave ! ne pus-je m'empêcher de dire (G. DUHAMEL, Cri des profondeurs, p. 192).
Hist. - Autrefois, dans la langue parlée surtout, des formes comme mens-je? tends-je ? etc., ont pu, sous I'influence de aimé-je, donné-je, etc., être remplacées par menté-je ? tendé-je ? etc. : Que ne perdé-je point! (Mme de GRIGNAN, dans Sév., Gr. Écr., t. X, p. 387.) - Cela se rencontre parfois encore de nos jours: Aussi metté-¬je toujours quelques chiffons rouges dans ma parure (BALZAC, La Peau de chagrin, p. 86). - Que voulé-je faire d'elle ? (J. GIRAUDOUX, Judith, p. 14.) - Ai-je cousu, cousé-je, coudrai-je dans du cuir ? (COLETTE, Le Fanal bleu, p. 28). - «Dans le cas d'une crise suscitée par les Soviets», écrivé-je à Kennedy ... (Ch. de GAULLE, Mémoires d'espoir, p. 272). - Aussi écrivé-je un roman aérien (R. QUENEAU, Le Vol d'Icare, p. 53).
Vous aurez noté, cher Andreas, que Grevisse cite le même passage de la Peau de chagrin que vous.
Je ne sais pas si vous le savez déjà: l’oeuvre de Balzac a été mise en ligne intégralement sur ce site de l’ARTFL:
http://www.v1.paris.fr/musees/balzac/fu … tation.htm
Outre les oeuvres, le site contient une foule de renseignements bibliographiques et biographiques, et toute une série de «fiches de lecture», sans oublier la fonction de recherche (vaut le détour!).