Je me présente je m’appelle Henri…
Non, Daniel, non, ça c’est pour une autre fois 
Bien, 37 ans, natif d’Albanie ou de quelque chose comme ça, vivant en France depuis ’99. Amoureux moi aussi, d’ailleurs comme tout le monde ici, de la langue française.
Actuellement, sans travail. Une foutue maladie m’a terrassé l’année dernière et j’essaie de me remettre petit à petit. Le patron a jugé que je n’étais pas en mesure d’assumer mon poste de cariste/manutentionnaire et, aidé quand même par un gentil médecin du travail, il a fait parvenir chez moi une lettre recommandée. Je l’ai lue, une fois, deux fois, trois fois, et je n’ai toujours pas compris pourquoi les patrons écrivent et décrivent mal leur langue. Remis en mains propres, me dit-il. Mais mon cher Monsieur, c’est « remis en main propre » et pas au pluriel. Mais bon, allez lui faire comprendre que le chômage n’est pas si marrant que ça. Bref, ma journée est une journée de travaux forcés : déambulage ou déambulation ou déambulement (il y en a pour tout les goûts, ne vous poussez pas, s’il vous plaît), et aussi traduction. Qu’est-ce que je traduis ? me demanderiez-vous. Eh bien, Beckett, Gary, Houellebecq, de Beauvoir, Sartre (toujours derrière Simone ce petit bonhomme) tout y passe dans ma moulinette.
Mon but ? De me dire un jour : voilà, quoique un petit moins de rien venu de nulle part, vous avez réussi à mener à terme votre foutue de vie en toute tranquillité, bonheur et honnêteté.
Oh, j’habite au Centre, au centre de tout.
Bonne journée et à bientôt 