Passer au contenu du forum

forum abclf

Le forum d'ABC de la langue française

Mise à jour du forum (janvier 2019)

Remise en l'état – que j'espère durable – du forum, suite aux modifications faites par l'hébergeur.

(Page 2 sur 2)

forum abclf » Histoire de la langue française » Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Flux RSS du sujet

Messages [ 51 à 74 sur 74 ]

51

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Naïf a écrit:

PS. Les éditions L'Harmattan fournissent un travail remarquable. L'édition scientifique en France est sclérosée: il est très difficile de publier, il faut le blanc-seing de telle unité de recherche, beaucoup de sous etc. Voyez le malheur des thèses françaises empilées dans les bibliothèques universitaires... L'Harmattan offre un débouché naturel à maintes publications qui, sans cela, ne verraient jamais le jour.

Est-ce si sûr ? Il est aujourd'hui assez aisé, et modérément coûteux, si l'on a quelques connaissances pour produire un fichier .pdf, de se faire l'éditeur de ses œuvres, ou de celles d'autrui (chercher : autotédition sur Google). Avec un site pour la publicité mondiale et quelques amis prêts à verser leur obole, chacun doit pouvoir avoir un vrai livre à son nom en vente sur la toile smile
(mais c'est hors-sujet).

52

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

gb: (..) se faire l'éditeur de ses œuvres, ou de celles d'autrui (..)

Sans vouloir relancer cette déviation, je note juste que ce n'est peut-être pas complètement hors du sujet: on dévie, tout en continuant de profiler notre héros, qui a bel et bien suivi un chemin proche de celui que vous dites.

...Ou plutôt - parce que l'Harmattan, les Presses du Septentrion etc. méritent vraiment des encouragements, et non une désobligeante condescendance -  qui a opté pour la meilleure solution: version papier, éditeur publiant des textes par ailleurs bien cotés et à des conditions plus avantageuses que les éditeurs-imprimeurs réalisant un rêve de célébrité à la Andy Warhol. Ajoutons le site internet - que je ne suis pas allé voir - et nous obtenons un texte somme toute bien diffusé, y compris, donc, chez les romanistes allemands! Pas dupes, évidemment, mais acheteurs quand même.

Côté édition scientifique en France, il existe désormais un classement drastique en A, B et C des supports de publication: que je sache, les éditeurs d'un jour et sites de livres électroniques n'y figurent pas. (je précise que je ne sais quasiment rien du monde de l'édition dans les sciences dites "dures"). Il y a seulement quelques courageux périodiques en ligne, faiblement pris en compte dans le classement officiel.  À ce classement souvent inique, inventé par de sinistres ronds de cuir (je l'ai dit ailleurs sans anonymat),  s'ajoutent les anciennes contraintes académiques, déjà trop restrictives. Côté évaluation, en France, c'était le trop-plein qu'il fallait pallier, non l'inverse...

Or la reconnaissance par les paires dépend fortement des types de supports, ne serait-ce que parce que les catalogues bibliographiques n'inventorient pas tout, parce que les auteurs (français, en tout cas) hésitent encore parfois à citer les URL,  parce qu'on a encore une méfiance vis-à-vis des écrits qui n'ont pas reçu l'accord d'un comité de rédaction reconnu, parce que les hurluberlus existent de tout temps, et qu'ils peuvent désormais créer autant de sites internet qu'ils souhaitent, pour le meilleur comme pour le pire.

On le constate au quotidien: les chercheurs publiant en Allemagne ont moins de difficultés. Les éditions Otto Sagner publient et diffusent très bien les thèses; Max Niemeyer Verlag est plus accessible que ses homologues hexagonaux lorsqu'il s'agit de publier des actes de colloque, par exemple, et d'un professionalisme époustouflant. Sans parler du torrent des publications en anglais, que tous les chercheurs un peu au courant des réseaux acquièrent - et ne cesseront pas d'acquérir - gratis via le net dès leur sortie en librairie ou presque. C'est là qu'interviennent les "e-books".
Secret de polichinelle: la majeure partie de cette masse de textes publiés aux E.U. et aux titres aguichants, équivaut tout juste à des mémoires de 4e ou 5e année de faculté français (Master), à d'anciennes "thèses de 3e cycle", au mieux à des thèses nouveau régime. Les critères d'accès à la publication sont moins stricts. Je ne critique pas cette stratégie, puisque je les fréquente abondamment!

Voilà - en trop long - une réaction qui nous détourne finalement peu du travail...
----
PS. N'hésitez pas à délester ce message si nécessaire, j'ai quand même quelques scrupules, mais je souhaitais réagir tongue

53

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Andreas a écrit:

6) Les langues romanes sont quasiment identiques

[...oui, c’est peut-être parce qu’elles ont une même origine… ? :-)]

Je viens de traverser le livre de Cortez, dont je n'ai pas spécialement prisé le style raccoleur, et vous remercie pour cette contre-argumentation efficace.

Je m'interroge encore, cependant, sur l'explication d'un phénomène qui, dans l'état de mes connaissances, me paraît tout de même curieux:

Comment se fait-il que les langues romanes aient presque toutes évolué quasi-indépendamment dans le même direction, partant d'une langue à cas, SOV, pro-drop, sans prépositions ni articles, à ordre variable des constituants, vers ce qu'on connaît du français, de l'italien, de l'espagnol: langues SVO, à ordre fixe, avec prépositions et articles, etc.?

Car il faut bien admettre que  plusieurs langues romanes présentent une syntaxe quasi identique et pourtant fort différente de celle de la langue "mère".

Merci pour votre éclairage!

54

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Pélagie a écrit:

Comment se fait-il que les langues romanes aient presque toutes évolué quasi-indépendamment dans le même direction, partant d'une langue à cas, SOV, pro-drop, sans prépositions ni articles, à ordre variable des constituants, vers ce qu'on connaît du français, de l'italien, de l'espagnol: langues SVO, à ordre fixe, avec prépositions et articles, etc.?

Je n'ai malheureusement pas de réponse définitive à la question, et je crois qu'on n'en puisse pas donner une puisque en dehors des langues romanes ce sont aussi les langues germaniques (allemand, anglais, norvégien etc.) qui se sont développés en partant de bases synthétiques pour devenir des langues plus analytiques, c-à-d. où les informations grammaticales sont plutôt donné par la syntaxe, par des mots auxiliaires (prépositions, articles) que par des morphèmes ou changements à l'intérieur d'un mot.
Soit qu'on y voit une tendance générale des langues synthétiques à devenir plus analytiques, soit qu'on qualifie le developpement semblable des langues romanes et germaniques comme hasard.
Dans le cas des langues romanes, à mon avis, il faudrait observer le fait qu'elles ont connu pendant longtemps un developpement commun dans le latin vulgaire. On trouve déjà des emplois des pronoms démonstratifs comme articles (ille etc.) et un emploi plus fréquent des prépositions dans les écrits en latin des VIe/VIIe/VIIIe siècles.

Ceci devient vraiment insignifiant. - Pas encore assez.

55

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Andreas a écrit:

Soit qu'on y voit une tendance générale des langues synthétiques à devenir plus analytiques, soit qu'on qualifie le developpement semblable des langues romanes et germaniques comme hasard.

Il faudrait également s'assurer qu'une telle tendance est présente chez, par exemple, les groupes celte et slave des langues indo-européennes



Andreas a écrit:

Dans le cas des langues romanes, à mon avis, il faudrait observer le fait qu'elles ont connu pendant longtemps un developpement commun dans le latin vulgaire. On trouve déjà des emplois des pronoms démonstratifs comme articles (ille etc.) et un emploi plus fréquent des prépositions dans les écrits en latin des VIe/VIIe/VIIIe siècles.

Dans le latin vulgaire ? Reste à établir ce qu'étaient le latin vulgaire le plus tardif et les langues romanes à leur stade le plus ancien. Et, ceci fait, vérifier s'il est possible d'établir un fil reliant les secondes au premier, dont la nature permette de décider si les éventuels parallélismes recensés relèvent effectivement de la transmission pure, c'est-à-dire hors emprunt. Ça risque d'être assez difficile dans la mesure où nous avons peu d'écrits romans qui soient antérieurs au IXe s. — et bien sûr aucune idée du plus ancien roman, tel qu'il se parlait.

Autre question : quels peuples contemporains des VIIe & VIIIe s., occupant la zone actuelle de la Romanie d'Europe, avaient le latin pour idiome maternel ?

56

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

travail: du latin treppalium, instrument de torture.
cela se nomme du réalisme.

En grec moderne, travail=douleia (accent tonique sur la lettre a) qui vient de "douleia" (accent tonique sur la lettre i) qui signifie "esclavage". big_smile
Il existe aussi le verbe ergazomai=oeuvrer

57

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Ce qui nous montre que douleía et ?rgázomai n'ont pas varié de sens depuis le grec classique ...

elle est pas belle, la vie ?

58

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

greg a écrit:

Il faudrait également s'assurer qu'une telle tendance est présente chez, par exemple, les groupes celte et slave des langues indo-européennes

J'avoue que je ne suis pas spécialiste dans ce domaine là, je ne connais pas l'histoire de ces langues. Mais peut-être qqn. d'autre sait davantage ?

Et, ceci fait, vérifier s'il est possible d'établir un fil reliant les secondes au premier, dont la nature permette de décider si les éventuels parallélismes recensés relèvent effectivement de la transmission pure, c'est-à-dire hors emprunt.

Selon ta théorie, les langues romanes auraient emprunté tous ces éléments ? Mais à quelle langue et comment, stp. ?

Autre question : quels peuples contemporains des VIIe & VIIIe s., occupant la zone actuelle de la Romanie d'Europe, avaient le latin pour idiome maternel ?

Dépend de la définition du "latin". Moi, je conçois comme latin aussi ces variétés du latin qui se sont parlées dans l'espace roman jusqu'à ce qu'elles soient suffisamment distinctes ou reconnues comme distinctes du latin. Pour le français, nous voyons une telle rupture (Renaissance carolingienne) et une telle prise de conscience (Concile de Tours) au début du IXe siècle ; dans ma conception des choses, les gens ont parlé jusqu'à ce temps-là une variété du latin - même si cette variété était déjà avant relativement différente du latin classique écrit.

Ceci devient vraiment insignifiant. - Pas encore assez.

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Bonsoir,

Je me souviens que lorsque j'étais en cinquième, lors nous avions une initiation obligatoire au latin, notre prof nous posa exactement la question initiale de ce fil.
Je luis répondis sans attendre: "parce qu'à une époque [je ne savais pas laquelle], le travail aux champs a dû être le travail le plus important, le plus courant". C'était la bonne réponse.

Ce prof s'appelait Rure et officiait à Arles. Je l'ai eu deux ans en latin et français, il m'a beaucoup marqué. Longtemps après, j'ai cherché à le retrouver mais en vain. Il était peut-être mort. Il a dû avoir ses soixante printemps vers 1980. L'un d'entre vous l'aurait-il connu? Certains d'entre vous sont profs je crois, disposez-vous d'annuaires professionnels?

Merci,

H

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Hippocampe a écrit:

Ce prof s'appelait Rure et officiait à Arles. Je l'ai eu deux ans en latin et français, il m'a beaucoup marqué. Longtemps après, j'ai cherché à le retrouver mais en vain. Il était peut-être mort. Il a dû avoir ses soixante printemps vers 1980. L'un d'entre vous l'aurait-il connu? Certains d'entre vous sont profs je crois, disposez-vous d'annuaires professionnels?

C'est assez amusant de jouer au détective sur la toile. D'abord, la liste des patronymes pendant le dernier siècle : Rure est un nom extrêmement rare. Entre 1916 et 1940 sont nées deux personnes seulement de ce nom, toutes deux en Seine-Maritime. Mais l'annuaire du téléphone n'en connaît plus aujourd'hui.

Par contre, interroger ces pages blanches par régions donne au moins un résultat (j'espère avoir parcouru toutes les régions). A Six-Fours-les-Plages, non loin de Toulon si je ne me trompe, vit un M. Rure, qui semble bien être en France le seul abonné au téléphone de ce nom. Bingo ? Je n'en sais rien. Mais, cher Hippocampe, donnez-lui donc un coup de fil !

(Il y a peut-être des gens sur ce forum qui considèrent ce type d'investigations comme une intolérable atteinte à la vie privée. Zut pour eux.)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Pourquoi le français viendrait-il du latin et pas le contraire?... Après tout les gaulois ont bien envahi et occupé l'Italie, pour finalement s'intaller dans sa moitié nord...
Le français pourrait très bien être du gaulois, latinisé par des légions romaines parlant à la longue un latin celtisé puis germanisé, surtout au Nord de la Loire avec les invasions  franques, normandes et bretonnes, ainsi que des Burgondes à l'Est et les Visigoths au sud (francien, franco-provençal et occitan)...

DEFENSE DE CRACHER PAR TERRE ET DE PARLER BRETON. (Le Ministère de l'Éducation Nationale)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Hippocampe a écrit:

Je me souviens que lorsque j'étais en cinquième, lors nous avions une initiation obligatoire au latin, notre prof nous posa exactement la question initiale de ce fil.
Je luis répondis sans attendre: "parce qu'à une époque [je ne savais pas laquelle], le travail aux champs a dû être le travail le plus important, le plus courant". C'était la bonne réponse.

L'apparentement labor, labour, labourer me fait penser à un autre.
En espagnol, hacer signifie faire, et une hacienda (donc l'endroit où l'on « fait ») est une grande propriété agricole.
Même chose en portugais, ou faire se dit fazer et où une fazenda est une exploitation agricole.
En allemand, bauen signifie construire, bâtir, et le paysan est le Bauer.
Cela me semble aller dans le sens de ce qui dit ci-dessus Hippocampe : il fut un temps où l'essentiel du travail se passait aux champs.

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Intéressantes versions étrangères. Ca me fait penser à la liste des mots voulant dire "nuit" et ressemblant à "n-huit".

Pour Six-Fours, je vais chercher. Merci beaucoup Pierre.

64 Dernière modification par patoiglob (03-02-2010 15:02:57)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Breton: "labourad" = travailler... Et si le latin venait du breton?... Ça vous en boucherait un cidre!...

DEFENSE DE CRACHER PAR TERRE ET DE PARLER BRETON. (Le Ministère de l'Éducation Nationale)

65 Dernière modification par Coco 47 bis (04-02-2010 05:01:21)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Hippocampe a écrit:

Intéressantes versions étrangères. Ca me fait penser à la liste des mots voulant dire "nuit" et ressemblant à "n-huit".

Je crains de ne pas saisir le sens de cette sibylline assertion…
J'ai juste voulu pointer ceci : certaines langues ont gardé des temps anciens un lien sémantique entre faire et travailler la terre. Cela n'a rien à voir avec une homologie phonétique du genre nuit = n'huit (ou n'huis, ou noue-hi, si vous voulez jouer…).

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Bonjour Coco,

Je faisais allusion à un long fil (je ne sais plus lequel mais j'ai gardé le résultat ci dessous dans mon ordinateur) où différents participants établissait avec étonnement cette liste:

allemand: acht / nacht
ancien haut-allemand: ahtô / naht
moyen haut-allemand: ahte / nacht
anglais: eight / night
vieil-anglais: eahta - æhta / niht - nieht
breton: eizh / noz
catalan: vuit / nit
espagnol: ocho / noche
espéranto: ok / nokto
français: huit / nuit
ancien français: oit — uit / noit — nuit
gaëlique: ochd / oidhche
gascon: ueit / nueit
italien: otto / notte
néerlandais: acht / nacht
occitan: uèch / nuèch
picard: uit / nuit (à vérifier)
piedmontais: eut / neuit
poitevin: uit - vuit / neùt - nét - nit
portugais: oito / noite
roumain: opt / noapte
scots (germanique): aicht / nicht
suédois: åtta (ôtta) / natt (natt')
wallon: ût / nut

(
finnois: kahdeksan / yö
lituanien: aštuoni / naktis
tchèque: osm / noc
gallois: wyth / nos
)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Mon dieu, voilà ce serpent de mer qui reparaît ! Sors du corps d'Hippocampe, serpent, on t'a reconnu, et retourne dans les profondeurs !

68 Dernière modification par Coco 47 bis (05-02-2010 05:42:28)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Hippocampe a écrit:

Bonjour Coco,

Je faisais allusion à un long fil (je ne sais plus lequel mais j'ai gardé le résultat ci dessous dans mon ordinateur) où différents participants établissait avec étonnement cette liste:

allemand: acht / nacht
ancien haut-allemand: ahtô / naht
moyen haut-allemand: ahte / nacht
anglais: eight / night
vieil-anglais: eahta - æhta / niht - nieht
breton: eizh / noz
catalan: vuit / nit
espagnol: ocho / noche
[…]

Cher Hippo, soyez gentil de ne pas me mêler à ces insanités.
Merci de tout cœur.

69 Dernière modification par Me-K (15-08-2010 17:58:07)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Sujet pour moi très intéressant, qui aurait pu s'avérer très polémique, et ne l'a pas été.

Sur les travaux d'Yves Cortez, qui m'échappent en partie, j'ai bien noté les critiques, qui elles-mêmes m'échappent en partie, le fond du sujet étant ardu pour un non linguiste. Ardu mais enrichissant. Je voyais déjà qu'il avait très probablement ce handicap d'avoir travaillé seul: on peut avoir de bonnes raisons de travailler seul, comme de mauvaises raisons. Il lui a certainement manqué des éléments importants, voire fondamentaux, d'une part, et il a - quelquefois ou souvent, selon les appréciations - tendance à aller trop vite. Il est dit qu'il connaissait huit langues, je ne suis pas capable de jauger le degré de ces connaissances en langues, et donc tout cet aspect m'est directement inaccessible.

Je n'y vois pas un mystique, et en principe sur ce point j'ai un peu de flair. Oui, il cite Bouddha, mais ces dernières décennies beaucoup de gens, faisant l'effort d'échapper à la pensée unique ambiante, sont allés voir à l'extérieur ici ou là, avec plus ou moins de bonheur, sans qu'il s'agisse de mystiques ou de mystificateurs. Il aurait pu tout aussi bien s'appuyer sur Descartes et sur le principe des Lumières. En gros, à ce que j'en ai compris, essayer de s'élever au dessus des idées reçues, trouver sa propre unité de pensée, et peut-être, observer toujours sous différents éclairages.

Sur le mot travail: oui, on identifie deux notions opposées du travail, l'une l'assimilant à la servitude, l'autre à l'élévation, à l'enrichissement, à la liberté, avec entre les deux un sens neutre.

Je voulais juste rappeler que le parallèle inverse se retrouve avec scholé*: on part, en suivant le Belin, de la libre disposition du temps pour arriver à l'étude, donc à l'école, et même au produit de l'étude: traité, ouvrage.

Pour traduire scholé*, je proposerai en français le mot de «vaquement», opposé aux vacances, mais plus tard, dans la catégorie de sujets adéquate.

*transcription non garantie.

a contribué ensuite sous yd

70 Dernière modification par Me-K (21-08-2010 00:47:45)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

J'avais vu le latin comme une perversion, essentiellement pour fermer ou embrouiller l'accès au grec, oui, comme une «langue artificielle»* type espéranto, et je l'avais appelé, ce qui choquera beaucoup de monde, le desespéranto de l'Antiquité.

Ciceron, Ciceron, oui, mais j'ai connu deux Ciceron, le premier pompeux et verbeux, déambulant ses déclamations sous les colonnades du Forum, celui de la Première Catilinaire, l'autre à la hauteur des meilleurs Grecs, découvert grâce à l'excellent livre de Claudia Moati, La Raison de Rome (avis unanime des critiques). Le premier latin, l'autre grec? C'est pour les philologues.

Lisez Tertullien, vous en reviendrez peut-être, si vous ne mourrez pas par l'épais.

1) Or il y aurait une hypothèse toute neutre et toute simple, pas forcément simpliste, dont je m'étonnerais qu'elle n'ait pas encore été étudiée, selon laquelle au départ Rome n'aurait voulu que simplifier la transcription - l'écriture - du grec. D'où l'alphabet latin d'une part, d'où la reprise la plus simple en latin de la plupart des mots grecs, d'autre part.

Et Cortez m'a permis hier de mettre le doigt sur autre chose - que lui-même n'a pas du tout envisagée -, c'est que Rome avait une haute idée politique de «l'unité ou de l'entité romaine», formant un tout stable, équilibré, fondateur de légitimité, des plébéiens aux patriciens (SPQR). Rome aurait donc tenté, avec une très forte volonté et sans idée de mal faire, une fusion entre ce grec pour ainsi dire latinisé et la langue orale locale.

2) Toujours en positivant la démarche de Rome, il y aurait eu encore une volonté de rendre le grec plus accessible, ne serait-ce que pour l'unité de l'Empire ou pour faciliter son administration: j'ai été très frappé, en m'essayant à traduire les Actes, de l'étonnement et de l'admiration de Lysias, le gouverneur militaire romain de Jérusalem, quand Paul, pas fou, s'adresse à lui en grec: «Tu parles grec?». Oui, Paul répond simplement qu'il est de Tarse en Cilicie, donc citoyen romain, mais Lysias a compris immédiatement qu'il était un haut citoyen romain: c'est 400 soldats qu'il mobilisera en pleine nuit pour le sauver des 40 anathémistes et l'amener à Césarée, à 60 kilomètres, avec au moins un relais à mi-chemin. Pour un simple anthropos romanos? A d'autres. 

Pourquoi Paul ne s'adresse-t-il pas à l'officier romain en latin, mais en grec, s'il veut simplement montrer qu'il est citoyen romain (anthropos romanos)?

Traduire le grec était probablement accessible,
Écrire le grec certainement difficile,
Et parler le grec, rare.

De fait, les choses auraient ensuite changé, c'est pour les linguistes et pour les historiens.

* oui, en y réfléchissant il n'est pas si simple de définir une langue artificielle, j'essaierai d'y revenir.

Edit: en ce qui concerne l'avènement du latin et de l'alphabet latin, j'avais complètement oublié le rôle qu'ont pu jouer les Étrusques (des Phéniciens, donc).

a contribué ensuite sous yd

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

Pour le Travail :
Il me semble que la version étymologique de Cortez est suspecte. Faire dériver le mot par simple glissement d'une mécanique linguistique, me semble non pas révolutionnaire, mais résultat d'une tendance contemporaine assez absurde. Le langage, intimement attaché à l'homme, en hérite des potentialités. Il évolue en fonction du sens que l'homme donne à la vie, des mots d'esprit, des tournures de phrase, des expressions... Le langage et son évolution ne peut être étudié indépendamment du contexte : mentalité, imaginaire, croyances, du fait qu'il est une création d'un être vivant sensible et rationnel.
Maintenant, j'avoue ignorer qui est à l'origine du rapprochement entre travail et tripalium. C'est écrit partout, mais je ne trouve pas de référence qui puisse relater les fondements de ce rapprochement.
Si j'en juge le dico étymologique du Français (Jacqueline Picoche, édit° Robert), le sens "tourment, souffrance" semble plus ancien (XIIème) que le celui désignant "un instrument pour ferrer les animaux" (XIIIème).
Ce dico renvoie l'étymologie vers 2 étymons : trois (tri en latin) et paix (*pag, *pak en indo-européen  "fixer, enfoncer").
*pag aurait eu des descendants très divers :
pax, pacis : paix (idée de fixer un état des choses)
pacare : pacifier, apaiser.
pala : bêche (qu'on enfonce dans le sol pour cultiver).
palus : pieu
pagus : (district rural)
paganus : païen (habitant d'un district rural)
------------------
de pax, pacis, on aurait paix, apaiser, paisible,... ; payer (XIème apaiser quelqu'un, XIIème lui donner l'argent qui est dû), paie,...; pacifier,... ; pacte,... ;
de pagus : pays, paysan, païen;
de palus, pala : pelle, palette, palet, pieu, palissade
---------------------------------------------------------
maintenant : à quoi rattacher le mot travail ?
les trois pieux ?
les trois pactes ?
les trois paix ?
les trois payes ?

Personnellement, je penche sur :
Les trois paix : paix du corps, de l'âme et de l'esprit, en lien avec la sainte trinité. Il me semble qu'il faille en effet comprendre le mot de travail en rapport avec la religion catholique. St Augustin a écrit "du travail des moines" (DE OPERE MONACHORUM), où il indique que le travail manuel est nécessaire. Les diverses règles monastiques (bénédictins, ...)  vouent les moines à certaines tâches, tant physiques qu'intellectuelles et spirituelles. Les Abbayes ont lancé la société du travail européenne, en défrichant, cultivant, assainissant la gaule chevelue et conservant les artisanats antiques.
Il me semble plus sage de comprendre un mot en relation avec la mentalité de l'époque que par des jeux de sonorités.
Vu ainsi, le travail serait le tourment que l'on s'inflige pour la paix du monde, vue sous trois angles différents : aménagement du monde physique par les mains, occupation des âmes par l'étude, occupation des esprits par la méditation.

Cette conception de la pacification du monde implique la conception d'une dette à rembourser à Dieu en trois domaines (tri-paye), afin d'être plus vaillants (tri-vaillance) tant soi-même que collectivement.

Ou encore : l'homme pieu a trois piliers à sa foi trinitaire
(qui est "le père, le fils, le saint-esprit"), pour réaliser la paix divine tant en soi que dans le monde, ce sont trois activités pieuses (manuelles, intellectuelles et spirituelles), trois types d'effort que l'on s'inflige à cette fin et pour se purifier soi-même (car de notre purification dépend celle du monde) : c'est une triple piété (tri-piété)

trinité (corps, âme, esprit), trois dettes ("trois payes"), trois paix intérieures à gagner, trois piétés (pour expier) : le travail.

72 Dernière modification par DB (15-10-2010 09:39:43)

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

N'oubliez pas qu'il y a en français deux sens assez différents du mot "[tlfi]travail[/tlfi]". N'oubliez pas de regarder les deux mots dans le TLFi. Voyez notamment la notule étymologique du second :

TECHNOL. Appareil utilisé pour immobiliser les gros animaux domestiques quand ils doivent subir certaines opérations (ferrage, pansage, etc.). Je n'ai jamais entendu parler même des vestiges de travails, de ces machines de charpente où l'on suspendait les animaux difficiles (La Varende, Normandie en fl., 1950, p. 169).
Prononc. et Orth.: [t?avaj]. Att. ds Ac. dep. 1694 (1740: ,,n'a point de pluriel``; dep. 1762 ,,fait travails au pluriel``, sauf 1935 qui n'indique pas le plur.). Étymol. et Hist. Ca 1200 (Elie de Saint-Gille, 1920 ds T.-L.). Du lat. médiév. trepalium « instrument de torture » (dep. 573, Concile d'Auxerre ds Blaise Latin. Med. Aev.; cf. Du Cange), prob. calque du gr. byz. ????????????, comp. de ???- « trois » et ????????? « pieu » (H. et R. Kahane ds R. Ling. rom. t. 26, pp. 138-139; Kahane Byzanz, 439 (?); FEW t. 13, 2, pp. 291b-292a).

73

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

florentis a écrit:

l'homme pieu a trois piliers

s’il est vraiment pieu, alors peut-être a-t-il, plutôt que des piliers, trois piquetslol

74

Re : Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez

La Personne Humaine M a bien trois Piliers; Mais il ne faut pas confondre travail et Travail. Le travail de l'accouchement permet la naissance de la vie du Triangle pubien de la femme et le Travail spirituel nous fait Naître dans l'Autre Monde d'En-haut.

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

Messages [ 51 à 74 sur 74 ]

forum abclf » Histoire de la langue française » Etymologie de «Travail» et «le français ne vient pas du latin» Cortez