Sujet : Contaminations de consonnes en français et en allemand
Petit rappel, avec mon vocabulaire, qui n'est pas celui d'un spécialiste. Pour que tout le monde suive ! J'essaie d'être à la fois rigoureux et compréhensible. Que ceux qui n'ont pas besoin de ce rappel me pardonnent et me corrigent éventuellement.
Soient les mots français « chie » et allemand Schi, ski. Ils comportent tous deux un son, un « phonème consonantique », qui correspond généralement à la graphie ch dans notre langue et qu'on note / ʃ / en alphabet phonétique international (API).
Considérons « cheval ». Le deuxième phonème consonantique qu'il contient se note /v/ en API et correspond à notre v. Dans certaines régions, dans la bouche de certains locuteurs, son e n'est pas prononcé. Et alors, le /v/ d'origine disparaît, au profit d'un f (/f/ en API) : « ch'val » est prononcé [ ʃfal ]. Je vais y revenir.
Lorsqu'on prononce la consonne /v/ et qu'on met sa main sur sa gorge, on perçoit une légère vibration, celle des cordes vocales. Pour /f/, rien de tel. On qualifie /v/, ainsi que /b/, /d/, /g/ (dans « gui ») et /ʒ/ (dans « j'y »), de consonnes sonores. Les « sourdes » (produites hors des cordes vocales) qui leur correspondent sont /f/, /p/, /t/, /k/ (plusieurs graphies en français) et, on l'a deviné si on ne le savait pas !, / ʃ / (ch en français, on l'a vu, mais aussi parfois sch, sh…).
Venons-en à l'allemand. / ʃ / y est noté souvent sch. Mais aussi s- en début de mot, devant une sourde : spielen, jouer, [ ʃpilən ], Stuhl, chaise, [ ʃtul ]… Je ne connais, et c'est bien logique, aucun mot simple où / ʃ / serait suivi de la sonore correspondant à /p/ (/b/) ou de celle correspondant à /t/ (/d/). La sourde est incompatible avec une sonore potentielle à sa suite immédiate. Pour les mots comportant schw, ce que j'entends, ce que je dis correspondent parfaitement à cette constatation à propos de sp- et st-, quand bien même w se prononce /v/ lorsqu'il ne subit pas la contamination de / ʃ / (sch). Sur le fil On prononce "cette génération" en "cedgénération" avec un d au lieu d' (sic), à la rubrique Pratiques linguistiques, vous avez évoqué, gilleshoque, une « tension » que contient sch dans Schwein, porc. Je ne parviens pas à imaginer comment elle pourrait empêcher que s'y produise la même chose que dans le français « ch'val ».
(Les messages ci-dessous proviennent de ce même fil.)
Nous pouvons arrêter là cette discussion, et revenir enfin à la langue française sur ABC. Ce fut une longue et intéressante digression...
Mais regina l'a demandé, et je l'ai suivie, elle et moi ne continuons pas cette discussion ici.
@ Chover Effectivement, comme vous l'indique gillleshoque , vous n'avez cité que… .
Pourquoi me mettez-vous ainsi en porte-à-faux ?
Retour au fond. Je n'ai aucunement souhaité éduquer votre oreille lorsque je vous ai demandé de lire *SCHFEFEL et SCHWEFEL, j'ai simplement tenté d'obtenir de vous une réponse à la question que je me posais de savoir si vous vous entendiez alors vous-même dire deux mots différents. La difficulté que vous avez évoquée alors, concernant la lecture du premier (« je constate que pour arriver à prononcer ces mots qui commenceraient par " schf" , j'ai beaucoup de mal... ») m'a étonné : elle ne me paraît pas favoriser l'avancement du sujet. D'autant que, lorsque j'ai évoqué ensuite Fischfang, pêche, mot authentique qui comporte la même séquence schf que SCHFEFEL imaginaire, je n'ai obtenu aucune réaction de votre part concernant d'éventuels soucis comparables. Je croyais que vous évoqueriez alors les deux mots en quoi Fischfang se décompose et affirmeriez devoir y faire une petite coupure ; mais – je ne suis sûrement pas le seul dans ce cas – en langage naturel, je n'en fais aucune entre les deux syllabes (mots) de Fischfang, tandis que je puis vous assurer de mon incapacité d'en éviter une si j'essaie de dire authentiquement *Fischwang, que j'invente, avec la sonore à la suite immédiate de la sourde. Or affirmer pouvoir prononcer [ʃvaʁts] (schwarz) sans coupure revient à revendiquer de dire *Fischwang sans coupure.
Libre à chacun de se demander si mes arguments se tiennent ou non.
Les échantillons 2, 3, 4, 5 du mot schwarz sur Forvo font entendre nettement [ʃfaʁts], et c'est ainsi que je le prononce.
Ecoutez des natifs :
Personnellement , j'entends bien " v" et non " f" et c'est ainsi que je prononce...
J'y reviens. Je peux écouter dix fois chacun des trois locuteurs, je n'entends que [ʃfajn].
Moi, j'entends [ʃvaʁts], mais avec un [v] dont le point d'articulation est un peu en avant de la lèvre du fait du [ʃ] qui précède.
Merci. J'avais toutefois imaginé que vous en diriez plus sur les contaminations et les incompatibilités entre sourdes et sonores !