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forum abclf » Réflexions linguistiques » semi-auxiliaires et périphrases verbales

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Messages [ 101 à 149 sur 149 ]

101

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Oui, parce qu'on nominalise une association courante, comme dans laisser-aller ou laissez-passer.

Mais pour moi, si je "laisse", ce n'est évidemment pas moi qui "fais"... Il y a donc disjonction.

Hélas, je ne vois nulle part cette idée d'actant unique associée à l'auxiliarité clairement formulée dans les grammaires que je consulte, qu'elles soient structurales ou non.

Ou je me plante complètement, mais alors il faut que quelqu'un m'explique ce qu'il met sous le terme d'auxiliaire (ou de semi-auxiliaire, ce dernier pourvu d'une définition qu'on peut ramener à "tout auxiliaire autre que être et avoir" afin d'éviter le flou), ou cela va de soi...

Je remarque en effet qu'il n'y a jamais d'exemples de phrases comportant des "propositions infinitives" dans les nombreux exemples allégués, chez Dubois, par exemple.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

102

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Peut-être que le terme semi-auxiliaire a été utilisé parfois comme un euphémisme de "faux auxiliaire".

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Personnellement, je ne vois aucune raison à priori de rejeter l'idée que l'auxiliaire et l'auxilié puissent avoir un sujet différent.

Il apparait néanmoins que cela ne peut jamais être le cas pour un auxiliaire temporel ou d'aspect, puisque l'auxiliaire vient modifier le procès, dans sa temporalité, ou bien dans son déroulement.

Le cas de la diathèse circonstancielle est différent (voir) : c'est le circonstant qui devient le sujet de l'auxiliaire, le verbe auxilié gardant sont sujet propre.

Ex :
Le sport pro naquit pendant l'entre-deux-guerre.
-> l'entre-deux-guerre vit naître le sport pro.

[Ce genre de tournure est courant pour toutes les publications qui prennent pour thème une période historique, ou un lieu.]

Cet exemple montre que l'absence d'identité entre le sujet de l'auxiliaire et celui de l'auxilié est possible.

Mais c'est ici un auxiliaire de diathèse.

Donc ce genre de propriété dépend in fine du genre d'auxiliation.

Prenons le factitif.
Un architecte contruit ma maison.
-> il fait construire sa maison par un architecte.

Ici, le sujet logique de contruire est transformé en complément d'agent, via la préposition "par".

On pourrait avoir :
* il fait un architecte construire sa maison

Ce serait alors une structure similaire à :

Il laisse un architecte construire sa maison.

-> un des deux auxiliaires du factitif
le verbe laisser, permet deux sujets différents pour l'auxiliaire et l'auxilié.

104 Dernière modification par Lévine (14-01-2021 15:53:37)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

C'est surtout parce qu'il tient de l'auxiliaire dans le sens où il fait corps avec l'infinitif qui le suit, sans en être un au sens paradigmatique : il ne fait pas partie de la conjugaison du verbe.
D'autre part, les auxiliaires sont suivis d'un participe.

En tout cas, le critère de détermination des semi-auxiliaires ne peut être le sens :

Deux phrases comme :

a) Il peut venir, mais il ne le veut pas,
b) Il peut venir demain, mais je n'en suis pas sûr,

sont équivalentes du point de vue de la structure : on ne peut rejeter "peut" dans a) en alléguant qu'il serait moins "modal" que celui de b).

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

florentissime a écrit:

Prenons le factitif.
Un architecte contruit ma maison.
-> il fait construire sa maison par un architecte.

Ici, le sujet logique de contruire est transformé en complément d'agent, via la préposition "par".

On pourrait avoir :
* il fait un architecte construire sa maison

On  avait :
Joinville écrit : « le roi fit les chevaux monter dans la nef. »
On a encore :
un collègue déclare : « il faut faire les élèves monter de classe. »
Nous atteignons ici les eaux bourbeuses de la subordonnée infinitive.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

106 Dernière modification par glop (14-01-2021 19:48:50)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

P'tit prof a écrit:
florentissime a écrit:

Prenons le factitif.
Un architecte contruit ma maison.
-> il fait construire sa maison par un architecte.

Ici, le sujet logique de contruire est transformé en complément d'agent, via la préposition "par".

On pourrait avoir :
* il fait un architecte construire sa maison



On  avait :
Joinville écrit : « le roi fit les chevaux monter dans la nef. »
On a encore :
un collègue déclare : « il faut faire les élèves monter de classe. »
Nous atteignons ici les eaux bourbeuses de la subordonnée infinitive.

Je dois avouer bien humblement que j’ai caressé l’espoir que les eaux de la subordonnée infinitive soient limpides et qu’elles aident à diluer le problème.

Si l’on s’abstient juste un instant des inversions qui caractérisent vos deux exemples, cela donne :

- Le roi fit (proposition principale) monter les chevaux...(proposition infinitive).

- Il faut (proposition principale) faire monter… (proposition infinitive).

Le fait que les verbes en question soient répartis dans des propositions différentes ne les différencie-t-il pas des "vrais" auxiliaires ?

Apparemment, cette façon de voir parait trop simpliste aux grammairiens d’ici et d’ailleurs.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

107

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Dans le cas de Joinville, je pense que "les chevaux" est COD de monter ; autrement dit, monter a un sens actif. Beaucoup de ces tournures sont délicates à interpréter.

Pouvez-vous m'indiquer la référence du passage de Joinville ?

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

108 Dernière modification par P'tit prof (14-01-2021 21:14:48)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Non, je ne peux pas mais vous retrouverez aisément ce passage de l'embarquement à Aigues-Mortes.

(J'ai beaucoup aimé trouver cet affreux créolisme dans un écrit médiéval...)

Seul votre génie de la contradiction vous fait voir en chevaux un COD : les chevaux montent dans la nef, comme les élèves montent de classe.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

D'abord, je l'avais manqué, mais éponymie nous a donné une belle analyse.

Ensuite, il me semble que Lévine tend à focaliser sur les auxilliaires de conjugaison, et donc à réduire la nature des auxilliaires à ces verbes qui permettent de produire un tiroir verbal.

Cependant, le terme auxiliaire ne fait que relater quelque chose qui aide à...

Il s'agit de voir en quoi tel auxilliaire "aide à".

Par exemple, Laisser et faire, introduisent le mode factitif.

"Voir" permet des diathèses circonstancielles.

"Commencer à" permet de focaliser sur la phase d'entrée dans un procès (aspect)
...

C'est pourquoi, je ne trouve pas que la structure grammaticale soit pertinente pour les classer. L'usage est fluctuant.

"Je le fais marcher"
"je le laisse tomber"

Cela dit, puisque je tiens qu'il est des auxiliaires de la modalité perceptive, il me faudrait prouver qu'une telle modalité perceptive est pertinente, ce que je n'ai pas fait.

110 Dernière modification par Lévine (14-01-2021 23:09:59)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

P'tit prof a écrit:

Non, je ne peux pas mais vous retrouverez aisément ce passage de l'embarquement à Aigues-Mortes.

J'ai beaucoup aimé trouver cet affreux créolisme dans un écrit médiéval.

Seul votre génie de la contradiction vous fait voir en chevaux un COD : les chevaux montent dans la nef, comme les élèves montent de classe.


Je sais de quoi je parle.

"Après les verbes d'opinion, d'affirmation, de volonté ou bien derrière préposition, la proposition infinitive est exceptionnelle en AF. Les exemples indiscutables sont rares, car en bien des cas on ne saurait dire si le nom ou le pronom régime est sujet ou complément de l'infinitif."

                                                        Philippe Ménard, Syntaxe de l'ancien français, éd. Bière.

Je traduirai pour ma part : "le roi fit embarquer les chevaux".

Mais en fait, je trouve "et mist l'on touz nos chevaus ens que nous devions mener outre mer" (chez Champion, bien sûr !).

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

111 Dernière modification par Lévine (14-01-2021 22:45:50)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

florentissime a écrit:

D'abord, je l'avais manqué, mais éponymie nous a donné une belle analyse.

Espérons qu'il reviendra.

florentissime a écrit:

Ensuite, il me semble que Lévine tend à focaliser sur les auxilliaires de conjugaison, et donc à réduire la nature des auxilliaires à ces verbes qui permettent de produire un tiroir verbal.

Pas du tout : il n'y aurait pas de discussion en ce cas. Ce que je vise, ce sont bel et bien les modaux.

florentissime a écrit:

Cependant, le terme auxiliaire ne fait que relater quelque chose qui aide à...

Il s'agit de voir en quoi tel auxilliaire "aide à".

Ce n'est pas très rigoureux...

florentissime a écrit:

Par exemple, Laisser et faire, introduisent le mode factitif.

Avec des différences importantes entre les deux verbes.

florentissime a écrit:

"Voir" permet des diathèses circonstancielles.

Veuillez expliquer et justifier.

florentissime a écrit:

"Commencer à" permet de focaliser sur la phase d'entrée dans un procès (aspect)

Je suis d'accord.

florentissime a écrit:

C'est pourquoi, je ne trouve pas que la structure grammaticale soit pertinente pour les classer. L'usage est fluctuant.

"Je le fais marcher"
"je le laisse tomber"

Cela dit, puisque je tiens qu'il est des auxiliaires de la modalité perceptive, il me faudrait prouver qu'une telle modalité perceptive est pertinente, ce que je n'ai pas fait.

En effet. J'ai bien peur que vous considériez comme auxiliaire modal tout verbe derrière lequel on trouve un infinitif. Il est normal en ce cas que vous estimiez que votre travail est de les classer. Ce n'est pas mon cas, et à vrai dire, ce classement me paraît secondaire. C'est pourquoi j'attends votre démonstration sur les verbes de perception.

Vous dites que l'auxiliaire "aide" ; c'est incomplet, mais soit. Dans "je veux travailler", "veux" fait comprendre que le travail que j'évoque est soumis à ma volonté, cela est clair. Mais si je dis "je vois  les élèves travailler", en quoi ma perception peut-elle me faire comprendre comment les élèves travaillent, ou de quoi dépend leur activité, ou encore à quelles conditions celle-ci est soumise, etc... ? Pour moi, le fait que les élèves travaillent est un fait énoncé sans modalité.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

112 Dernière modification par glop (15-01-2021 04:37:54)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Levine :
(Diathèse circonstancielle)
Terme peut-être impropre, mais cela se réfère à l'exemple (re)donné ci-dess(o)us :

Le sport pro naquit pendant l'entre-deux-guerre.
Diathèse sur le circonstant :
L'entre-deux-guerre vit naître le sport pro.

Le verbe naître a bien son sujet propre.

Modalite perceptive :
Imagine un crime, qu'une autorité veut PUNIR (modalité déontique)
D'abord l'autorité doit CONNAÎTRE le crime (Modalité epistémique).
Ensuite, elle doit retrouver celui qui en EST l'auteur (modalité alétique). Pour ce faire elle trouve un témoignage :

Mr X DIT avoir VU Mr Y sortir de la maison à l'heure du crime.

Mr Y est-il nécessairement coupable ?
Non.
Mr X peut mentir.
Mr X peut avoir mal VU.

Cet exemple pour montrer l'écart qui existe entre une modalité perceptive et un fait réel.

Cet écart gagnerait à être conceptualisé clairement, car une négligence à cet endroit pourrait être dommageable.

C'est pourquoi l'intégrer à la grammaire serait œuvre utile.

114

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

Dans "je veux travailler", "veux" fait comprendre que le travail que j'évoque est soumis à ma volonté, cela est clair. Mais si je dis "je vois  les élèves travailler", en quoi ma perception peut-elle me faire comprendre comment les élèves travaillent, ou de quoi dépend leur activité, ou encore à quelles conditions celle-ci est soumise, etc... ? Pour moi, le fait que les élèves travaillent est un fait énoncé sans modalité.

Pour moi aussi. Et je n'imaginais pas au début de cette discussion qu'on pût en douter !
« Je vois les élèves travailler » implique que les élèves travaillent : le premier des deux faits relatés, « Je vois », n'a aucune incidence sur le second (les élèves travaillent), ils sont indépendants l'un de l'autre.
Mais on sait à lire toute cette phrase que les élèves travaillent !
Il n'en va pas de même pour « Je veux travailler » , « Je vais travailler », « Je peux travailler », « Je dois travailler », « Il me faut travailler »... rapportés à « Je travaille » : il se peut que ces cinq tournures ne soient pas suivies de mon travail effectif, on n'en sait rien ! Modalité.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

115 Dernière modification par Lévine (15-01-2021 11:37:17)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Tout à fait.

florentissime, ce que vous dites de la perception est juste : c'est même le sujet philosophique par excellence, de Platon et son fameux mythe de la caverne jusqu'à Schopenhauer (Le monde comme volonté et comme représentation). Mais en quoi ce vous dites concerne-t-il la seule tournure verbe + infinitif ?

La phrase : "Je sens le rôti brûler" n'est-elle pas plus "objective" que "je sens que le rôti brûle", dans laquelle le verbe sentir implique une opération mentale (je sens que..., mais je peux me tromper ou je dis cela pour effrayer le cuisinier).

De même : "Je te vois travailler" par rapport à "je vois que tu travailles" (constat après une remontrance, par exemple).

Je remarque par ailleurs que je ne peux pas dire "je vois travailler" en parlant de moi. Je peux dire "j'entends travailler", mais il ne s'agit évidemment de perception auditive, même figurée : dès son origine, entendre n'a pas le seul sens de "percevoir par l'ouïe".

_______________

Chover, existe-t-il une proposition infinitive en allemand ? En russe, non : "je vois des enfants jouer" = "je vois des enfants jouant" ou "je vois des enfants qui jouent" (plus lourd, mais c'est une question de style).

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

116 Dernière modification par Lévine (15-01-2021 20:59:48)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

glop a écrit:

Je dois avouer bien humblement que j’ai caressé l’espoir que les eaux de la subordonnée infinitive soient limpides et qu’elles aident à diluer le problème.

Si l’on s’abstient juste un instant des inversions qui caractérisent vos deux exemples, cela donne :

- Le roi fit (proposition principale) monter les chevaux...(proposition infinitive).

- Il faut (proposition principale) faire monter… (proposition infinitive).

Le fait que les verbes en question soient répartis dans des propositions différentes ne les différencie-t-il pas des "vrais" auxiliaires ?

Apparemment, cette façon de voir parait trop simpliste aux grammairiens d’ici et d’ailleurs.

J'avais laissé passer votre message...

Vous soulevez un pb intéressant, qui est celui du factitif.

Dans la phrase : "Le roi fit paître les chevaux" (je modifie le verbe à cause de l'ambiguïté sens actif/sens neutre de monter), on remarque que "fit paître" ne peut supporter aucune complémentation entre les termes, à la différence de "le roi laissa paître les chevaux"/" le roi laissa les chevaux paître".
Il semblerait donc bien qu'il faille accepter "faire" comme indissociable de "monter", et que "les chevaux" soient alors le complément de l'expression verbale "fit paître" prise dans son ensemble ; en effet, cette complémentation ne peut se rattacher ni à l'auxilié (on ne "paît" pas un animal), comme c'est le cas dans les tournures classiques, ni à l'auxiliaire, puisqu'on ne fait pas "un animal paître". Ce serait là un cas particulier à propos duquel je ne peux rien dire d'autre pour le moment.
Et ceci pose le problème de la limite entre les propositions, que vous avez abordé : il semble gênant d'établir cette limite entre "fait" et "monter". Si l'on accepte que "faire monter" fonctionne comme prédicat unique, on a une proposition indépendante. Si l'on ajoute "il faut", ce verbe devient l'auxiliaire de "faire monter", c'est donc lui qui prend naturellement les marques de temps et de personne, mais cela ne change rien à l'analyse.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

117 Dernière modification par glop (15-01-2021 20:32:20)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Je voulais rebondir sur un message d'éponymie où du moins lui poser une question mais je ne trouve plus le message. Tant pis! au risque de tomber comme un cheveux dans la soupe voilà:

Imaginons ce dialogue :
Toi qui connais du monde, Peux-tu me trouver un job ?
Réponse A :
Je vais voir.
Réponse B :
Je vais voir Bertrand à ce sujet.

Dans La réponse A "je vais voir" (au sens de peut-être), le verbe aller serait bien l’auxiliaire du verbe voir
Dans la réponse B, la qualité d’auxiliaire du verbe voir serait supplantée, si j’ose dire, par Bertrand.


?

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

118 Dernière modification par éponymie (15-01-2021 20:42:07)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

glop a écrit:

Imaginons ce dialogue :
Toi qui connais du monde, Peux-tu me trouver un job ?
Réponse A :
Je vais voir.
Réponse B :
Je vais voir Bertrand à ce sujet.

Dans La réponse A "je vais voir" (au sens de peut-être), le verbe aller serait bien l’auxiliaire du verbe voir
Dans la réponse B, la qualité d’auxiliaire du verbe voir serait supplantée, si j’ose dire, par Bertrand.

Non. Ce qui pourrait justifier une différence de traitement entre A et B. C'est une éventuelle reformulation en  "j'y vais". Elle est possible dans les deux cas. Mais il y a un contexte dans lequel est impossible : le contexte de certitude, celui pour lequel le sens serait "je m'en occupe" ou "peut-être" (éventuellement avec Bertrand), celui où le verbe aller sert à construire le futur dit proche.

Bertrand n'est pas significatif.

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Chover a écrit:

« Je vois les élèves travailler » implique que les élèves travaillent : le premier des deux faits relatés, « Je vois », n'a aucune incidence sur le second (les élèves travaillent), ils sont indépendants l'un de l'autre. Mais on sait à lire toute cette phrase que les élèves travaillent !

Combien de professeurs ont-ils dit cela, alors qu'en vérité il n'en était rien ?

Une perception implique une possibilité d'erreur. D'où que ces verbes sont susceptibles de glissement sémantique,  par exemple, vers le probable :
- je le vois bien arriver demain;
Vers une modalité volitive :
- j'entends le sermoner ce soir;
Ou vers une croyance :
- je vois l'économie s'effondrer à cours terme.

Pour reprendre votre exemple, dans un dialogue :
-- ces élèves ne travaillent pas !
-- Je les vois bien travailler la veille de l'examen...

Clairement, ici, ce qui est vu n'est pas réel, mais hypothétique.

La perception est une opération intellectuelle, il est donc logique qu'elle soit un genre de modalité, laquelle fluctue, selon le contexte, entre évidence (preuve objective) et hypothèse (impression subjective).

120

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Vous demeurez dans la sémantique, et au-delà dans la philo.

Faites-vous une différence grammaticale entre :

Je le vois bien arriver demain et J'ai la nette impression qu'il arrivera demain ?

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

121

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

florentissime a écrit:
Chover a écrit:

« Je vois les élèves travailler » implique que les élèves travaillent : le premier des deux faits relatés, « Je vois », n'a aucune incidence sur le second (les élèves travaillent), ils sont indépendants l'un de l'autre. Mais on sait à lire toute cette phrase que les élèves travaillent !

Combien de professeurs ont-ils dit cela, alors qu'en vérité il n'en était rien ?

Il me semble que tout lecteur ou auditeur peut dire cela de tout texte et qu'on quitte la syntaxe avec cette sorte de considération.
En reprenant « Je vois les élèves travailler », j'avais à l'esprit le verbe de perception « voir », dont il était question.

florentissime a écrit:

Une perception implique une possibilité d'erreur. D'où que ces verbes sont susceptibles de glissement sémantique,  par exemple, vers le probable :
- je le vois bien arriver demain;
Vers une modalité volitive :
- j'entends le sermoner ce soir;
Ou vers une croyance :
- je vois l'économie s'effondrer à cours terme.

Pour reprendre votre exemple, dans un dialogue :
-- ces élèves ne travaillent pas !
-- Je les vois bien travailler la veille de l'examen...

Clairement, ici, ce qui est vu n'est pas réel, mais hypothétique.

La perception est une opération intellectuelle, il est donc logique qu'elle soit un genre de modalité, laquelle fluctue, selon le contexte, entre évidence (preuve objective) et hypothèse (impression subjective).

Je ne crois pas que « voir » soit encore un verbe de perception dans les exemples que vous donnez là, où « imaginer » lui est substituable.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

122

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

Chover, existe-t-il une proposition infinitive en allemand ? En russe, non : "je vois des enfants jouer" = "je vois des enfants jouant" ou "je vois des enfants qui jouent" (plus lourd, mais c'est une question de style).

Tout à fait. Ich sehe die Kinder spielen correspond mot à mot à Je vois les enfants jouer.
Et il m'est très difficile dans cette discussion d'oublier la langue de GOETHE, que j'ai déjà citée (message 60) à propos des « auxiliaires de mode », à peu près équivalents des modaux anglais.
Sehen, voir, hören, entendre, et lassen, laisser ou faire, sont associés auxdits auxiliaires de mode lorsqu'il s'agit de citer les verbes allemands qui amènent un infinitif complément sans zu (cf. to en anglais) : Ich kann helfen, Je peux aider, Er lässt ein Haus bauen, Il fait construire une maison... On admet pour l'allemand que seuls les « auxiliaires de mode » « modulent », « modifient », « modèrent » le sens de leur infinitif complément. Donc sehen, hören et lassen, qui se comportent grammaticalement comme des auxiliaires de mode, ne sont pas considérés comme tels, parce que leur sujet est différent de celui de l'infinitif.
Lorsqu'on rencontre un infinitif en allemand, il est très souvent précédé de zu. C'est le cas en particulier dans les authentiques subordonnées infinitives exprimant le but, l'absence et le remplacement (Sie braucht Ruhe, um gut zu schlafen, Elle a besoin de calme pour bien dormir. Er liest, ohne etwas zu verstehen, Il lit sans rien comprendre. Anstatt zu lachen, müsstest du dich schämen, Au lieu de rire, tu devrais avoir honte).

À cet égard, ce que vous avez dit sur le russe m'étonne d'ailleurs un peu : autant que je sache (mais je sais peu !), чтобы, pour, pour que, peut amener des infinitifs sans verbe conjugué. Du reste, je vois dans un petit dictionnaire Он приехил, чтобы сдавать (infinitif) экзамен, Il est venu pour passer un examen.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

123

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Merci de votre réponse.
Mais pour moi, on ne parle de proposition que si l'infinitif à son actant propre : autrement, je parle de groupe infinitif. En cas, bien sûr qu'on emploie un infinitif en russe pour dire "je peux partir", "l'élève travaille pour réussir", etc...
C'est d'ailleurs une partie du problème qui nous occupe ici.
Par contre, en russe, Ich sehe die Kinder spielen se dirait : я вижу играющих детей (on ne postpose le participe, en mettant une virgule, que si la phrase est complémentée) : я вижу детей, играющих на улице.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Chover :
Tout homme est à l'intersection d'un monde externe, réel, et interne, idéel

Une perception prend quelque chose à l'extérieur, pour le reverser à l'intérieur. Mais il y a aussi les reperceptions, et les aperceptions  qui consistent à saisir des projections du monde idéel.

Une perception permet donc de saisir à la fois un fait externe, et interne.

La vision est liée à l'imagination, progressive, l'ouie à l'entendement,  ponctuelle. Ce sont toujours des perceptions, qu'elles soient de l'externalité, ou bien de l'interiorité.

Il peut arriver que l'intériorité se supperpose à l'externalité, c'est pourquoi une modalité perceptive implique une gradation dans sa certitude.

Le glissement sémantique se fait facilement en Français.

125 Dernière modification par Chover (24-01-2021 09:06:23)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

pour moi, on ne parle de proposition que si l'infinitif a son actant propre : autrement, je parle de groupe infinitif.

C'est plus clair ainsi, en effet.
Cela me questionne, malgré tout, pour deux raisons :
• « prendre le train » doit être analysé comme un groupe infinitif dans Je pars prendre le train et comme une proposition infinitive dans Je t'ai vu prendre le train,
• je peine beaucoup à voir autre chose que des subordonnées infinitives dans Il rit sans rien comprendre, Elle a besoin de calme pour bien dormir, ou Au lieu de rigoler, tu devrais réfléchir.
Les équivalents allemands de ce que je viens de mettre en gras sont appelés clairement Infinite Nebensätze (Satz signifie là phrase ou proposition, Nebensatz veut dire subordonnée [phrase, proposition d'à côté], infinit vaut impersonnel, à base d'infinitif). Ayant cela plus ou moins consciemment à l'esprit, j'imagine, en présence de « Je pars prendre le train », Je pars pour prendre le train...
Mais il s'agit là d'une simple question de vocabulaire.

Il me faut avouer, florentissime, ne pas être certain d'avoir parfaitement compris votre message 124. Toutefois, je continue de faire la distinction, sémantique et grammaticale, par exemple, entre les deux verbes conjugués dans Je le vois arriver en décapotable et Je le vois bien arriver en décapotable ! Dans cette dernière phrase, le point d'exclamation et l'adverbe « bien », dont on ne peut se passer pour que voir signifie imaginer, me paraissent aller dans ce sens. Mais je ne suis presque jamais sûr de moi à cent pour cent !

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

126 Dernière modification par Lévine (17-01-2021 12:02:24)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Je ne peux évidemment pas me prononcer sur la terminologie allemande. En français, on ne parle pas de proposition infinitive si l'actant du verbe à l'infinitif ne fait pas partie du syntagme verbal infinitif ; en clair, s'il n'a pas de sujet propre.

Il rit sans rien comprendre : syntagme (ou "groupe") infinitif CCirc.
Il rit sans que nous comprenions quoi que ce soit à son attitude : Prp. Sub. C.Circ. 

Je veux partir demain : groupe inf. [se rattachant à "veux"] (infinitif en russe aussi)
Je vois le succès m'échapper : Prop. inf. COD de "vois" (tournure participiale, ou autres tournures en russe, par exemple ici "Je vois que le sujet m'échappe").
___________________

En français comme en russe, on a l'infinitif quand on ne change pas d'actant. Mais, pour en revenir une dernière fois à ce sujet en ce qui me concerne, cela ne veut pas dire que tout verbe suivi d'un infinitif ayant le même actant que lui soit à considérer comme semi-auxiliaire. C'est là qu'interviennent les fameux critères pour les reconnaître : voir ce que j'ai écrit dans le sujet ouvert par éponymie.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

Je vois le succès m'échapper : Prop. inf. COD de "vois" (tournure participiale, ou autres tournures en russe, par exemple ici "Je vois que le sujet m'échappe").

Sauf que, en pronominalisant, on aura
Je le vois m'échapper

L'autre solution pour décrire grammaticalement la chose serait donc :
Je : sujet
le : COD
vois : verbe
m'échapper : attribut du COD

Ce serait logique puisqu'on peut vouloir signifier que l'on perçoit une qualité de quelque chose.

128

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

florentissime a écrit:

L'autre solution pour décrire grammaticalement la chose serait donc :
Je : sujet
le : COD
vois : verbe
m'échapper : attribut du COD

Ce serait logique puisqu'on peut vouloir signifier que l'on perçoit une qualité de quelque chose.

Il ne me semble pas que « m'échapper » décrive une qualité (une manière d'être, bonne ou mauvaise) à la différence, par exemple, d'« épuisée » dans « Tous les soirs, je la vois épuisée ».

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

129 Dernière modification par Lévine (24-01-2021 10:17:57)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

@florentissime

J'ai toujours dit qu'il était gênant de parler de sujet en ce cas. En latin, ce "sujet" est bel et bien à l'accusatif, et des grammairiens estiment qu'on ne peut pas parler de sujet d'un verbe à un mode impersonnel. C'est pourquoi je préférais parler d'actant. C'est plus clair pour le sujet qui nous occupe.

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Tout à fait. J'ai l'habitude de dire « le mot qui serait sujet si le verbe était conjugué », ce que rend très exactement, je crois, « actant » !

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

131 Dernière modification par Lévine (24-01-2021 12:23:44)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

actant et patient sont fréquemment utilisés en linguistique.

La proposition infinitive divise les grammairiens, et sa genèse en français n'est pas facile à établir. J'avais l'impression que ce pouvait être un calque du latin, mais si c'est l'évidence au XVIème, qui en abuse (en raison du soi-disant "retour à l'Antiquité"), ça l'est moins pour les périodes plus anciennes, vu sa rareté. C'est donc plus au niveau du latin et surtout du grec qu'il faut travailler.

Chover, j'en profite pour vous demander quelle est la définition grammaticale du (ou de la) "Nebensatz" que vous évoquiez.

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

quelle est la définition grammaticale du (ou de la) "Nebensatz" que vous évoquiez.

Les pratiquants des deux langues voient dans Nebensatz, je crois, l'équivalent exact de « proposition subordonnée ».
Définition du dictionnaire tout allemand équivalent du Larousse : unselbstständiger, von einem Hauptsatz abhängiger Satz, der allein nicht sinnvoll bestehen kann.
Cela signifie : proposition (Satz) non autonome (unselbstständiger), dépendant (abhängiger) d'une proposition principale (von einem Hauptsatz), qui (der), pour faire sens (sinnvoll), ne peut exister seule (allein nicht... bestehen kann). Proposition non autonome, dépendant d'une principale, et qui, pour faire sens, ne peut exister seule.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Cela explique, quand nous parlions du russe, la "confusion" que je voyais faite entre l'infinitif dépendant ou prépositionnel (ich möchte spielen, par exemple) et la "proposition infinitive" (ich sehe die Kinder spielen, d'après votre exemple).
C'est en fait parce que le mot Nebensatz désigne simplement un élément dépendant, et non une nature, comme notre mot "proposition".
Est-ce que je me trompe ?

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

@florentissime

J'ai toujours dit qu'il était gênant de parler de sujet en ce cas. En latin, ce "sujet" est bel et bien à l'accusatif, et des grammairiens estiment qu'on ne peut pas parler de sujet d'un verbe à un mode impersonnel. C'est pourquoi je préférais parler d'actant. C'est plus clair pour le sujet qui nous occupe.

Mais je n'ai pas parlé de sujet. J'ai parlé d'un COD, la chose perçue, et de son attribut, un groupe infinitif.

135

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Disons plus prudemment "complémentation du COD".

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136

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Lévine a écrit:

Cela explique, quand nous parlions du russe, la "confusion" que je voyais faite entre l'infinitif dépendant ou prépositionnel (ich möchte spielen, par exemple) et la "proposition infinitive" (ich sehe die Kinder spielen, d'après votre exemple).
C'est en fait parce que le mot Nebensatz désigne simplement un élément dépendant, et non une nature, comme notre mot "proposition".
Est-ce que je me trompe ?

Non. Nebensatz signifie proposition subordonnée et rend donc compte d'une nature et d'une autre caractéristique, plus proche de la fonction que de la nature, mais un peu vague, à mon sens !, celle de subordination.

Toutefois, dans mon message 122 (ci-dessus) je me suis mal expliqué :

Chover a écrit:
Lévine a écrit:

Chover, existe-t-il une proposition infinitive en allemand ? En russe, non : "je vois des enfants jouer" = "je vois des enfants jouant" ou "je vois des enfants qui jouent" (plus lourd, mais c'est une question de style).

Tout à fait. Ich sehe die Kinder spielen correspond mot à mot à Je vois les enfants jouer.

J'ai cru que vous me demandiez si, en allemand comme en russe, l'infinitif était inenvisageable dans l'équivalent de « Je vois les enfants jouer » (Réponse : non ! L'infinitif est d’emploi normal en l'occurrence). Et l'allemand voit dans die Kinder spielen une Infinitivergänzung, un infinitif complément, mais pas une proposition infinitive (Infinitivsatz). Et là, à l'instar du latin, on n'analyse pas le deuxième actant comme sujet, il est à l'accusatif, comme le montre cet autre exemple avec un nom masculin* :

Ich lasse meinen Drachen steigen, Je fais monter mon cerf-volant (Mon cerf-volant se dit mein Drache lorsque ce nom est sujet).

A fortiori, dans Ich lasse einen Baum fällen, Je fais abattre un arbre, l'authentique fonction C.O.D. impose l'accusatif einen Baum, le second actant étant inconnu, comme en français, bien sûr.
Soient les deux phrases « Il propose de m’aider » et « Il propose à ses amis de m’aider ». Leurs équivalents allemands, très comparables au français dans leur construction, Er schlägt vor, mir zu helfen et Er schlägt seinen Freunden vor, mir zu helfen  comportent pour cette langue la même subordonnée infinitive mir zu helfen, qu’on nomme ainsi sans se préoccuper de l’actant unique ou non. C’est la présence de zu qui importe. J’y ai fait allusion dans un précédent message.
Plus proche du sujet de ce fil : Les infinitifs compléments des six auxiliaires de modalité allemands reconnus comme tels, on l’a vu, ne sont pas précédés de zu (Er will mir helfen, Il veut m’aider). Cependant, on peut se demander si tous les grammairiens allemands trouvent satisfaisant que l’on reconnaisse une modalité dans cette phrase et qu’on n’en voie aucune dans Er hat vor, mir zu helfen, Il a l’intention de m’aider. Je dois faire preuve moi-même de modestie en l'affaire !

* Au neutre, au féminin et au pluriel, rien ne distingue l'accusatif du nominatif.

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137

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Merci infiniment. Deux dernières questions :

- La tournure Ich sehe die Kinder spielen était-elle employée dans l'ancienne langue (vieil haut-allemand, par exemple ?)

- Dit-on Ich habe die Kinder spielen gesehen ou Ich habe gesehen (,) die Kinder spielen ?

Si, comme je le crois, c'est la première tournure qui prévaut, cela veut dire qu'on considère die Kinder spielen comme un simple COD expansé, et non comme une proposition.


Dans les grammaires latines scolaires, on parle bien de sujet à propos de l'actant de l'infinitif, bien qu'il soit à l'accusatif, mais ce n'est pas rigoureux.

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138 Dernière modification par Chover (25-01-2021 19:24:30)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Réponses aussi brèves que possible. Je ne voudrais rebuter ni les non germanistes ni… les germanistes !

Lévine a écrit:

- La tournure Ich sehe die Kinder spielen était-elle employée dans l'ancienne langue (vieil haut-allemand, par exemple ?)

Je tends à croire que des tournures comme Ich sehe die Kinder spielen existent depuis… longtemps ! Mais mon vieil haut-allemand, modeste à l'origine, est loin, de surcroit !

Lévine a écrit:

- Dit-on Ich habe die Kinder spielen gesehen ou Ich habe gesehen (,) die Kinder spielen ?
Si, comme je le crois, c'est la première tournure qui prévaut, cela veut dire qu'on considère die Kinder spielen comme un simple COD expansé, et non comme une proposition.

C'est effectivement la première formulation qui conviendra... après une petite modification due à un idiotisme pour lequel je n'ai jamais entendu parler d'un équivalent dans quelque autre langue que ce soit. Lorsque sehen, voir, hören, entendre, et lassen, laisser ou faire, sont employés à un temps composé et amènent un infinitif complément, leur participe passé perd le préfixe ge- qu'il comporte dans toutes les autres circonstances : Ich habe die Kinder spielen sehen, J'ai vu les enfants jouer (à comparer à Ich habe die Kinder gesehen, J'ai vu les enfants). On nomme souvent cette particularité « double infinitif », à tort. Mais ce germanisme ne change rien à la fonction de « C.O.D. expansé » que vous avez évoquée à juste titre, je crois, pour die Kinder spielen.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

139

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Parfait. Il me reste à vous remercier d'avoir si longuement répondu à mes interrogations.

La comparaison entre les langues est toujours très fructueuse.

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Je vous lis tous avec grand intérêt. Et comme le sujet est trop difficile pour moi, je me contente d'une petite remarque subsidiaire :
Chover a écrit : Je le vois arriver en décapotable et Je le vois bien arriver en décapotable ! Dans cette dernière phrase, le point d'exclamation et l'adverbe « bien », dont on ne peut se passer pour que voir signifie imaginer [...]

Je le vois arriver en décapotable : on peut se passer de l'adverbe et du point d'exclamation quand "voir" signifie "imaginer" . C'est le contexte qui montre le sens.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Mais Ylou, le sujet est difficile pour tout le monde ! lol

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Ylou a écrit:

Je le vois arriver en décapotable et Je le vois bien arriver en décapotable ! Dans cette dernière phrase, le point d'exclamation et l'adverbe « bien », dont on ne peut se passer pour que voir signifie imaginer [...]
Je le vois arriver en décapotable : on peut se passer de l'adverbe et du point d'exclamation quand "voir" signifie "imaginer" . C'est le contexte qui montre le sens.

Disons que j'ai personnellement du mal à m'en passer ! Et que, pour le moins, dans bon nombre de cas, lorsqu'on lit « Je le vois arriver en décapotable », la probabilité que « voir » ait son sens propre est plus grande.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Je lis ceci dans wikipédia :
Un solécisme est une « faute dans les déclinaisons, dans les conjugaisons ou dans les constructions [...]
On peut rattacher à cette faute la construction délicate avec la locution « s’être vu » + l’infinitif, où la tentation est forte de placer par concision le pronom réfléchi « s' » comme complément du verbe à l’infinitif, alors qu'il n'est que son sujet. Généralement, le contexte sauve le sens.
    « Il s’est vu décerner le premier prix. »
    Au lieu de :
    « Il s'est vu recevoir le premier prix. »

    Normalement, dans le premier cas, on devrait traduire qu’il s’est vu lui-même en train de décerner un prix. Mais il est sûr que le sens voulu était qu’il a vu un prix qui lui a été décerné. « Se voir » correspond à une « vision de soi faisant une action » et non la « vision d’un fait qui se réalise pour soi ».

Qu'en pensez-vous ? (c'est moi qui souligne).

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

144 Dernière modification par Chover (04-02-2021 09:15:40)

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Il m'est difficile de vous répondre : c'est la première fois, me semble-t-il, que je vois considéré comme fautif « Il s'est vu décerner le premier prix » dans le sens « On lui a décerné le premier prix ». Certes, à peu près tout le monde s'accorde, je crois, sur l'ambigüité possible de la tournure, ambigüité présente, toutefois, seulement au masculin singulier : avec « Elle s'est vu décerner le premier prix », la question ne se pose plus, en tout cas à l'écrit, « s' » y est bien C.O.S. de décerner.
À propos de « s' », justement : pour sa démonstration, Wikipédia le considère comme sujet de l'infinitif dans « Il s'est vu décerner le premier prix » si cette phrase signifie « Il s'est vu en train de décerner le premier prix ». Nous l'avons vu ci-dessus, il est bien préférable de parler alors d'actant. Pour moi, en pareil cas, « s' » est C.O.D. de voir.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Je suis bien de votre avis, 'Chover'. La position prise par un contributeur de Wiki est évidemment infondée. La construction attaquée est irréprochable, mais il faut reconnaître qu'elle est souvent mal comprise de nos jours et fait souvent l'objet de critiques de la part de ceux qui ne la maîtrisent pas bien.

146

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Il me semble que le contributeur de Wiki fait une conclusion en totale contradiction avec les explications qu'il donne.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Pour information, la page Wikipedia où Ylou a pris cette curieuse affirmation semble être celle-ci :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Anacoluthe
Le passage précis concernant le prétendu solécisme semble être copié de l'opinion proférée par un certain "czardas", qualifié de "Grand Maître", sur le site suivant, ou être rédigé par le même auteur, en 2015:
https://www.question-orthographe.fr/que … -ecriture/
ce passage étant lui-même étrangement semblable à cette page de 2009 :
http://esterella-au-pays-des-merveilles … 80824.html
Bref, ou bien les gens se contentent de copier une position erronée et la reproduisent ou bien un même auteur progage lui-même sa doctrine erronée sous divers noms ! Ça n'en fait pas pour autant une vérité, mais bien sûr le public qui se contente d'une recherche succincte et non soigneusement recoupée sur Internet risque d'être dupé.

En tout cas, la formule est tout à fait classique et validée par l'Académie :
http://www.academie-francaise.fr/jacqueline-f-france
Il n'y a donc pas solécisme.

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Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

CQFD. Merci.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

Re : semi-auxiliaires et périphrases verbales

Mais du coup l'académie évoque bien le "sujet" du verbe à l'infinitif, ce qui serait impossible si l'on estime que l'infinitif est un mode impersonnel.

Il y a manifestement une construction propre aux verbes de perception.

"Je l'ai vu partir hier"

Si l'on tient que l'infinitif est un mode impersonnel, il ne peut avoir de sujet.

Mais si on prend ce sujet comme COD du verbe de perception, comme la pronominalisation en usage le fait, alors il faut tenir l'infinitif comme attribut du COD.

C'est une convolution perceptive, qui implique donc 2 actants, l'un percevant, l'autre perçu, le groupe infinitif étant complément d'évolution, ou de convolution, de l'actant perçu.


Nb : j'avais défini :
Situation : je suis ici..n
Évolution simple : je mange, je cours.
Convolution : je mange une pomme.

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