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forum abclf » Réflexions linguistiques » les diphtongues

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1

Sujet : les diphtongues

bonjour,

j'aimerais un petit renseignement...Quest-ce qu'une diphtongue?


En effet, pour mon cours d'espagnol le professeur dit que la diphtongue est la reunion de 2 voyelles ecrites formant une voyelle sonore.Par contre mon professeur d'anglais dit que c'est la construction de deux voyelles sonores qui forme une diphtongue.Pour finir, je ne trouve rien concernant la diphtongue pour la langue francaise.


Un petit exemple pour ma prof d'espagnol: la reina ( ei égal une diphtongue meme si ei no forme qu'un son, on ne dit pas re i  na  le rei va ensemble)

Pour le prof d'anglais pear (ea est un dipghtongue formé de deux sons vocaliques (   e?)--(? = e retourné en phonétique)


Quelle est la bonne solution? qu'est-ce qu'une diphtongue.Merci de répondre

Re : les diphtongues

La diphtongue n'existe pas en français, commençons par le plus simple !

Cela dit, les grammaires anciennes nommaient diphtongues ce que les grammaires modernes nomment plus justement digrammes : deux graphèmes pour traduire un seul phonème, tel le -ai dans grammaire.
C'est la définition de votre professeur d'espagnol, elle est purement orthographique.

La diphtongue est un phonème, un son voyelle qui commence d'une façon et finit d'une autre.
Exemple : l'anglais cow. On prononce quelque chose qui commence par a et finit par o, mais les deux sons fondus l'un dans l'autre, pas du tout comme le français cahot !
Autre exemple : l'allemand blau.

Mes exemples (tirés d'ailleurs d'un manuel de latin) prouvent qu'une diphtongue ne s'écrit pas nécessairement avec deux lettres, mais qu'elle fait entendre deux sons.

Cependant, votre question prouve qu'il y a plusieurs sens à ce terme. « A Rome, fais comme les Romains », adaptez-vous à chaque professeur : soyez graphique en espagnol, et phonétique en anglais ! (Si je puis oser de tels néologismes...)

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : les diphtongues

L'allemand possède énormement de diphtongues (au, äu, ai, eu...).

A àjouter: il y a aussi des triphtongues, je crois, disparues de la langue française depuis beaucoup de siècles maintenant. Dans l'anglais, le mot "hour" (heure) a survécu.

Ceci devient vraiment insignifiant. - Pas encore assez.

4 Dernière modification par piotr (22-02-2006 20:06:32)

Re : les diphtongues

P'tit Prof a écrit:

La diphtongue n'existe pas en français, commençons par le plus simple !

Peut-être, P'tit Prof, mais alors pourquoi Robert (entre autres) en donne-t-il la définition avec des exemples tirés du français ?
  En effet, je ne suis ni linguiste, ni phonéticien, ni grammairien, ni lexigographe, mais j'ai toujours entendu parler, à l'école de la République, des diphtongues (réelles ou supposées ?).

et Robert le Petit a écrit:

diphtongue : voyelle dont la tenue comporte un changement d’articulation produisant une variation de timbre. Et il ajoute : « La diphtongue peut être considérée comme formée d’une voyelle et d’une semi-consonne. »

Cette semi-consonne est souvent un yod (le [ i ] ou le [ j ] mouillé), ou bien les sons  [ w ] et [ u ]. De plus, on distingue les diphtongues ascendantes (semi-consonne + voyelle) et descendantes (voyelle + semi-consonne).
  Des exemples ? En première approximation :  travail, œil, oui, aïe, hiatus, Priape, iambe, ouate, quoi, yeux, Yole, yoyo, youyou ...; mais aussi tous les verbes en -oir, en -uire, et j'en oublie bien sûr.

  On peut distinguer les diphtongues vraies des autres selon qu'elles sont clivables ou non en versification : ainsi y-eux, ti-are, etc. ne sont pas réellement des diphtongues (elles sont toutes ascendantes). De même, les sons qui bénéficient d'une représentation phonétique conventionnelle reconnue, ne sont pas des diphtongues : ainsi  les sons ou, an, au, on etc., pris isolément, puisqu'ils ne contiennent pas de variation vocalique (ceux-là-mêmes que les grammairiens qualifiaient de diphtongues il y a cinquantes ans, comme le rappelle P'tit Prof).

  A contrario, je propose de considérer comme diphtongues « authentiques » celles qui répondent à ces deux caractéristiques : être insécable en versification et nécessiter plus d’un signe pour sa représentation phonétique. Certains sons comme le [wa] de loi et le [wi] de oui remplissent ces critères.
  Le cas de oui [wi] est particulier puisqu’il est composé de deux semi-consonnes : serait-ce la diphtongue parfaite ? Il convient d’ailleurs de distinguer oui / [wi] de ouï /[ui] : celui-ci est sécable, celui-là insécable; c'est évidemment le tréma qui fait la différence. Mais ail et aïe [aj] sont des diphtongues vraies (sauf à dire, comme en pays d'Oc : " Aï-eu, tu m'as fait mal-eu !smile  ).

Brassens a écrit:

[...]
En séchant l'eau de sa frimousse
D'un air très doux elle m'a dit oui.

Chemin faisant, que ce fut tendre
D'ou-ïr à deux le chant joli

[...]                                                              (Le parapluie)

Diphtongue et triphtongue :

  Étant donné qu'il n'y a point de diphtongue en français, on risque encore moins d'y rencontrer des triphtongues, et pourtant !

Littré a écrit:

Triphthongue [*]
   1°Terme de grammaire. Syllabe composée de trois voyelles qu'on fait entendre en une seule émission de voix ; mieux nommée trivocale. Miaou, onomatopée du cri du chat, offre une triphthongue. Adjectivement, Une syllabe triphthongue.
   2°Par extension et improprement, concours de trois voyelles formant un seul son comme oie, eau.
   Du grec, trois, et, son.

[*] Littré utilise l'orthographe étymologique, du grec tri- et de phthoggos = bruit, son

Ainsi, le chien aboie en diphtongue (ouah !) et le chat miaule en triphtongue (miaou !). Mais noyé , ployé, ayant, bayant, seyant, ouailles sont-ils  des  triphtongues ?

  La question mérite d'être posée : on coupera ayant, soit [?j-ã], soit [?-jã], mais on conserve l'association d'une voyelle avec une diphtongue (répondant à notre définition), donc pas de vraie triphtongue. Le cas de ouailles est intéressant : il se phonétise en [waj]  (soit trois signes), et je ne sache pas qu'il puisse se scinder dans un vers.

  Comme aurait dit Molière : Voilà pourquoi votre fille est muette !

elle est pas belle, la vie ?

Re : les diphtongues

Moi, je m'en fie au tableau des 37 phonèmes du français, ses seize voyelles dont quatre nasales, ses trois glides et ses dix-huit consonnes.
Je m'en fie aussi à mon manuel de phonétique...

Ces exemples :

Des exemples ? En première approximation :  travail, œil, oui, aïe, hiatus, Priape, iambe, ouate, quoi, yeux, Yole, yoyo, youyou ...; mais aussi tous les verbes en -oir, en -uire, et j'en oublie bien sûr.

n'en sont pas vraiment.

En effet, pour me prouver que les diphtongues existent en français, on me cite des mots complets.
Dans ces mots se produit, au contact de la glide (merveilleux mot qui remplace avantageusement le lourdingue semi-consonne/semi-voyelle !) une diphtongaison.
Prenons le mot iambe, par exemple.
Si je remplace le yod initial par un jé (ainsi nomme-t-on les phonèmes : bé, ké, dé, gué...), j'obtiens jambe, sans trace de la moindre diphtongaison.
Prenons oui : je remplace le digamma par pé, j'obtiens pis, par lé, j'obtiens lit, par mé, j'obtiens mie... [wi] ne combine pas deux glides (ce serait imprononçable) mais un yod avec une voyelle i. [waj] comprend bien deux glides, le digamma et le yod, mais entre les deux on trouve une voyelle, au contact de laquelle les glides se font consonnes.

Bref, ces prétendues diphtongues n'ont aucune existence objective, on ne peut en faire la liste comme on fait celle des seize voyelles.
Reste le cas de aou dans l'onomatopée miaou. D'abord, ce n'est pas une triphtongue, car Littré prend la glide yod pour une voyelle.  Ensuite, aucun autre mot français moderne ne comprend plus ce son, qui a existé autrefois.

Il n'existe plus de diphtongues en français moderne, plus de l mouillé non plus, plus de i nasalisé... Faisons avec ce qu'il nous reste !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

6 Dernière modification par Net (24-02-2006 02:10:40)

Re : les diphtongues

Pour la triphthongue de Littré ( les Allemands s'en tiennent toujours : et masc.!  der Triphthong, der Diphthong - cf. Rhythmus !, etc...), Robert laisse tomber h 2: « Union dans une même syllabe de trois voyelles... »
Il serait bien logique de dire pour une diphtongue (ainsi) aussi :
« Union dans une même syllabe de deux voyelles... »  Je ne sais pas pourquoi il ne l'a pas fait, Bob. Par contre, il nous informe d'une deuxième notion, ABUSIVE. Bon. Ou bien mal ! Ce qui revient au même.  ;-))
Pratiquement ! De par cette seule définition "calquée", les réponses de mon cher et vénéré p'tit prof s'éclaircissent davantage (là où elles ne l'étaient pas déjà sans cette élucidation !).
Petit remarque supplémentaire : très belles, les trois diphtongues NASALES portugaises : ão (mão), ãe (mães), õe (leões) sans oublier la prononciation de "s" dans ce contexte !
Petit quiz "Net" : Prière de donner chaque fois un exemple : 1° une (très) grande ville; 2° une (pas trop grande) ville connue entre autres à cause d'un certain vin; un (très grand) poète ... portugais, bien sûr.
Allez... Et merci d'avance (Rem. : vous pouvez négliger à CETTE SEULE FIN les tildes...) cool cool cool (Mais aucunement Matilde ni Mathilde)

« NON ! » - Qu'est-ce qu'il dit ? tt* : « Euh ...  OUI ! » (* traduttore – traditore)

7

Re : les diphtongues

Merci pour votre débat

on y trouve les éléments habituels de la contradiction entre la vision orthographique de la langue et la vision phonétique.

Pour ma part, je me suis intéressé à la vision phonologique. Eh oui, la phonologie, cela existe (mais tout le monde n'est pas au courant) !

Je ne vous redonnerai pas mon avis ici car tout est exposé (pour le moment sur wikipedia, à la page ... diphtongue) mais de fortes tensions récurrentes conduiront probablement un jour ou l'autre à la suppression de "mon" texte, malgré les nombreuses références que j'y ai inséré..
j'avais d'abord lancé la discussion sur la page de commentaires, sans réactions, et au bout d'un certain temps, je me suis lancé à refonder l'article et tout de suite, alors que l'ancien article très peu satisfaisant n'avait provoqué aucune réaction à part la mienne, ont surgit de toutes parts des bonnes volontés pour m'empêcher de travailler.


récemment, une personne honnête et de bonne volonté a mis un en-tête à la page lui reprochant de ne pas donner assez de références (si j'ai bien compris) et dans la discussion est apparu aussi une personne dont le projet, apparemment, est  de "supprimer" ou de "réduire à sa plus simple expression" ce qui le dérange : on s'en doute, la partie qui soutient l'existence de diphtongues en français)

Le remède : je suis en train de rédiger un texte sur la diphtongue en français sur Knol, au moins on ne me l'effacera pas

au plaisir

Motunono

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Re : les diphtongues

La diphtonguisation est un des problèmes de diction de nombreux québécois. 

Elle se produit en particulier avec le son "è" devant "r" et "s" : "chaise" devient "chaïse", "père" devient "païre" ou paère".

Cela se produit surtout avec des syllabes longues (ou qui traditionnellement ont été longues) : "Pâques" devient " Paouque", "rase" devient "raouse".

Ce phénomène est davantage présent dans certaines régions.

Verbum

In principio erat Verbum

9

Re : les diphtongues

Verbum a écrit:

Ce phénomène est davantage présent dans certaines régions.Verbum

Lesquelles ? Merci d'avance !

« NON ! » - Qu'est-ce qu'il dit ? tt* : « Euh ...  OUI ! » (* traduttore – traditore)

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Re : les diphtongues

Salut Net,

Personellement je l'ai remarqué particulièrement en Estrie. Voir :

http://www.ciral.ulaval.ca/phonetique/phono/r38.htm

Les spécialistes semblent préférer : diphtongaison.

Verbum

In principio erat Verbum

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Re : les diphtongues

Merci, Verbum ! Très intéressant.

En effet, « diphtongaison » fait meilleure mine... ;-))

« NON ! » - Qu'est-ce qu'il dit ? tt* : « Euh ...  OUI ! » (* traduttore – traditore)

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Re : les diphtongues

P'tit prof a écrit:

La diphtongue n'existe pas en français, commençons par le plus simple !

En fait, il n'y a peut être pas de diphtongues dans le français de france, mais il y en a énormément dans le français québécois.

13 Dernière modification par Naïf (01-11-2008 00:19:51)

Re : les diphtongues

McGill a écrit:
P'tit prof a écrit:

La diphtongue n'existe pas en français, commençons par le plus simple !

En fait, il n'y a peut être pas de diphtongues dans le français de france, mais il y en a énormément dans le français québécois.

Itou en français de Belgique, comme le suggère la concurrence [e] /[ej] en finale (rendue célèbre dans l'hexagone par l'humoriste Coluche: "Arrivés-y à Calais-y, on a été bien embêtés-y") - sous réserve d'une analyse phonologique précise

Comme nous ne savons guère ce qu'il en est de la véritable prononciation du français dans les DOM et TOM, il paraît important de bien préciser, quand c'est nécessaire, "français hexagonal" ("métropolitain" ne va pas, évidemment, justement parce que le français n'est pas parlé seulement en France ou dans les DOM et TOM).

Digression oiseuse:

Vive l'Internet, qui permet aux membres internationaux de la communauté francophone de se découvrir enfin! A terme, il faudra que ces incorrigibles jacobins de Français continentaux (ils me pardonneront)  acceptent un peu de variation dans les pratiques de leur idiome: qu'ils acceptent que les orthographes divergent, que les mots ne soient pas toujours identiques, que les constructions détonnent... bref, à ce qui est le quotidien - qu'ils le veulent ou non - des locuteurs d'anglais, de chinois, d'arabe, d'espagnol, de russe, d'hébreu...

Ceci est aussi une réaction aux projets de nouvelle "défense et illustration de la langue françoise" qui se manifestent sur ce site. Voyez cette nouvelle donne, les batailles ne sont plus les mêmes maintenant que sous Du Bellay... Il faut compter un peu plus avec ses alter ego!

Fin de la digression oiseuse.

14 Dernière modification par greg (02-11-2008 12:43:20)

Re : les diphtongues

monkey007 a écrit:

En effet, pour mon cours d'espagnol le professeur dit que la diphtongue est la reunion de 2 voyelles ecrites formant une voyelle sonore.

Les voyelles (comme les consonnes) étant des sons, elles sont forcément toutes sonores au sens large (= orales = prononcées). Les éléments graphiques ( = visuels = écrits) tels que <a>, <e>, <h>, <s> (etc) ne *sont* jamais sonores, mais *représentent* des sons. Ainsi le panneau routier portant l'indication <Marseille 200 km> ne prononce aucun son mais permet de visualiser la suite de phonèmes suivante : /ma?s?jdøs??kilom?t?/, où les 9 lettres du premier mot symbolisent les 6 phonèmes de /ma?s?j/, les 3 chiffres du nombre suffisent à évoquer les 4 phonèmes de /døs??/ et les 2 lettres de l'imprononçable couple de consonnes finales permettent d'identifier la chaîne des 8 phonèmes présents dans /kilom?t?/.

Si la réunion de deux ''voyelles'' écrites ne peut en aucun cas former un son articulé (voyelle ou consonne ou mélange des deux), elle peut cependant représenter un ou plusieurs phonèmes de la parole humaine. 

monkey007 a écrit:

Par contre mon professeur d'anglais dit que c'est la construction de deux voyelles sonores qui forme une diphtongue.

Je suis de l'avis de ce prof. Une diphtongue est l'enchainement de deux vocoïdes (pour ne pas reprendre le terme ''voyelle'', très souvent associé, et à tort, aux éléments graphiques traditionnellement appelés ''lettres de l'alphabet''). Et je plussoie aussi avec P'tit prof : «  [...] la définition de votre professeur d'espagnol [...] est purement orthographique » et donc totalement hors-jeu question phonétique & prononciation.

monkey007 a écrit:

Un petit exemple pour ma prof d'espagnol: la reina ( ei égal une diphtongue meme si ei no forme qu'un son, on ne dit pas re i  na  le rei va ensemble)

Le mot <reina> est composé de deux syllabes : /?ei?/ & /na/. Si trois syllabes étaient nécessaire pour prononcer <reina>, la décomposition serait alors la suivante : /?e/, /i/ & /na/.

monkey007 a écrit:

Pour le prof d'anglais pear (ea est un dipghtongue formé de deux sons vocaliques (   e?)--(? = e retourné en phonétique)

Ce prof a *presque* raison : la suite de deux lettres <ea> *représente* en effet la diphtongue /e??/ entendue dans /pe??/. Mais, d'un autre côté, <ea> ne saurait *être* une diphtongue : il s'agit d'un digramme et plus généralement d'une paire de lettres. Le digramme <ea> peut également représenter une diphtongue distincte de /e??/ : exemple ? <great> pour /g?e??t/, et non pas */g?e??t/. Le digramme <ea> sert également à représenter la monophtongue /e/ : <head> pour /hed/, et non pas */he??d/ ni */he??d/. Idem pour la monophtongue  /??/ : <earth> pour /???/, ni */e???/ ni */e???/ ni */e?/. Dans <reality> en revanche,  la paire de lettres <ea> n'est pas un digramme et ne représente pas un phonème unique (monophtongue ou diphtongue), mais deux phonèmes : <reality> ?  /??·'æ·l?·t?/ (dont, au passage, seul le second porte l'accent lexical).

P'tit prof a écrit:

Cela dit, les grammaires anciennes nommaient diphtongues ce que les grammaires modernes nomment plus justement digrammes [...].

Sans doute parce que beaucoup des digrammes aujourd'hui monophtongués (en France) étaient autrefois diphtongués (en France, toujours).



Le Petit Robert a écrit:

« La diphtongue peut être considérée comme formée d’une voyelle et d’une semi-consonne. »

Erreur. Les deux phonèmes finaux /aj/ du mot <travail> ne forment pas diphtongue. Itou pour les deux phonèmes initiaux /wa/ de <oiseau>. Les phonèmes /j/ & /w/ ne sont pas des voyelles et ne peuvent de ce fait constituer un élément de diphtongaison.

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Re : les diphtongues

Un détail:
En parlant de "vocoïde" (terminologie de phonéticiens, Malmberg par exemple), vous semblez accréditer l'idée que ces questions se traitent à partir de la seule substance sonore. Mais le départ V ("voyelles")/ C ("consonnes") dépend de la définition de la syllabe dans chaque langue. Cette définition-là, vous accorderez qu'elle s'obtient par une analyse d'un niveau autre que phonétique.  Il est donc risqué de passer d'une langue à l'autre sans crier gare!

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Re : les diphtongues

Naïf a écrit:

Mais le départ V ("voyelles")/ C ("consonnes") dépend de la définition de la syllabe dans chaque langue.

Et aussi de la structuration syllabique à l'œuvre dans chaque langue prise pour elle-même. Opposer <reina> /??ei?·na/ et <reinserción> /re·in·se?·??jon/. Avec <reina> la paire de lettres <ei> est un digramme représentant un son complexe unique : une diphtongue. Avec <reinserción> la même paire n'est pas un digramme puisqu'elle transcrit une suite de deux sons simples : deux monophtongues.

Pour en revenir à la bipolarité matière/structure (matière phonique vs structuration syllabique) que tu évoquais, le chaînon manquant est le phonème. Le phonème n'est à proprement parler pas un son (ou phone), mais plutôt une classe de sons (éventuellement réduite à un son et un seul). Les systèmes de syllabation varient certes avec les langues (opposer le verbe anglais <establish> prononcé /?s·ta·?bli?/ par un apprenant francophone et /?·?stæb·l??/ par un anglophone maternel ? 3 syllabes dans les deux cas mais découpages & accentuation différents), mais aucun ne peut s'envisager sans recourir en amont à une analyse subsyllabique et/ou infrasyllabique qui remonte jusqu'aux phonèmes, y compris les liens qu'ils entretiennent  entre eux.

L'opposition /?s·ta·?bli?/ vs /?·?stæb·l??/ nous apprend qu'au-delà de l'acquisition des phonèmes (= ensemble des phones de la même classe phonémique) d'une langue étrangère (/?/ & /i/ pour /?/, /a/ pour /æ/ etc), se pose la difficulté du découpage syllabique, même quand le nombre de syllabes est respecté par l'apprenant non-maternel. Je suis donc de ton avis, mais il ne me semble pas qu'on ait quitté le domaine de la phonologie pour autant.

17 Dernière modification par Naïf (02-11-2008 15:03:14)

Re : les diphtongues

C'est à dessein que je n'ai pas parlé de phonèmes (l'existence même d'un niveau d'analyse de ce type, distinct de la morphologie, est une question actuellement âprement rediscutée). Mais je ne doutais pas un instant que nous... argh "fussions" (!)  d'accord sur l'essentiel: on ne parlera pas de diphtongues in abstracto, mais toujours relativement à une structure linguistique donnée,  grosso modo: à une langue donnée.

Je suis sans doute un peu lourdingue en insistant sur ce point bien connu d'une partie des intervenants ici, mais qu'il faut rappeler aux autres: non seulement des sonantes comme [r], mais aussi des bruyantes comme [S], [k] se rencontrent avec le rôle de V. De même, c'est toute l'organisation du matériau sonore d'une langue qu'il faut étudier pour décider si, disons, le segment sonore [...j...] peut constituer une partie de diphtongue (les notations d'usage utilisent alors un autre symbole), ou bien fonctionne comme C. Etudier notamment les alternances vocaliques, la structure canonique des morphèmes etc.

18 Dernière modification par greg (04-11-2008 12:03:13)

Re : les diphtongues

Naïf a écrit:

C'est à dessein que je n'ai pas parlé de phonèmes (l'existence même d'un niveau d'analyse de ce type, distinct de la morphologie, est une question actuellement âprement rediscutée).

Remarque, de par sa nature de classe phonique, le phonème est tout sauf étranger à la morphologie. On relie souvent (pour ne pas dire tout le temps) la morphologie (et plus généralement la grammaire) aux mots écrits (ex : <je/il chante> vs <tu chantes> vs <ils chantent>) alors qu'on devrait plutôt procéder inversement : partir de l'invariabilité de /???t/ pour tous les pronoms personnels sujets autres que /nu/ & /vu/, et seulement ensuite noter, sur ce point précis, la divergence du code graphique avec le code parlé. Mais les faits sont têtus : l'acquisition du code oral par l'enfant est considérée par la société comme un phénomène naturel émanant du giron familial, tandis que la transmission du code écrit est institutionnalisée et confiée à des professionnels qu'aucun lien de parenté ne relie à l'enfant (école). Ce processus d'alphabétisation collective masque la réalité : la grammaire (dont la morphologie) n'est que ''sonore''. Le ''visuel'' n'est qu'une entreprise ultérieure de formalisation externe, appliquée à un code voisin (en ce que, par une pirouette assez laborieuse, l'écrit se substitue à la langue elle-même !). Mais ce code voisin reste essentiellement un corps étranger au regard de la parole humaine : l'écriture est un système visuel de représentation d'une langue invisible par nature (la même observation se soutient dans la relation écriture/LSF alors que le trait et le geste sont tous deux visibles).

Ci-dessous, oromorphologie possible de quelques verbes français au présent de l'indicatif :

/??m???/
/tym???/
/ilm???/ — /?lm???/
/num?????/ — /??m???/
/vum???e/
/ilm???/ — /?lm???/

/??pa?/
/typa?/
/ilpa?/ — /?lpa?/
/nupa?t??/ — /??pa?/
/vupa?te/
/ilpa?t/ — /?lpa?t/

/??g???di/
/tyg???di/
/ilg???di/ — /?lg???di/
/nug???dis??/ — /??g???di/
/vug???dise/
/ilg???dis/ — /?lg???dis/

/??m/
/ty?m/
/il?m/ — /?l?m/
/nuzem??/ — /??n?m/
/vuzeme/
/ilz?m/ — /?lz?m/

19 Dernière modification par Naïf (04-11-2008 01:54:25)

Re : les diphtongues

Le ''visuel'' n'est qu'une entreprise ultérieure de formalisation externe, appliquée à un code voisin. (...) Mais ce code voisin reste essentiellement un corps étranger au regard de la parole humaine : l'écriture est un système visuel de représentation d'une langue invisible par nature"

Très-très-très douteux. On pensait ça à l'époque de Martinet, ses élèves, peut-être, diffusent encore ce sous-produit de l'opposition nature/culture, sauf leur respect. Le français soutenu est une oralisation de l'écrit.
Mais nous sommes assez d'accord sur un point pour ne pas faire dévier ce fil: ce n'est pas à partir de l'écrit qu'on décide si une séquence est une diphtongue ou non smile

20

Re : les diphtongues

Naïf a écrit:

Le ''visuel'' n'est qu'une entreprise ultérieure de formalisation externe, appliquée à un code voisin. (...) Mais ce code voisin reste essentiellement un corps étranger au regard de la parole humaine : l'écriture est un système visuel de représentation d'une langue invisible par nature"

Très-très-très douteux. On pensait ça à l'époque de Martinet, ses élèves, peut-être, diffusent encore ce sous-produit de l'opposition nature/culture, sauf leur respect. Le français soutenu est une oralisation de l'écrit.

C'est pourtant la réalité et non une théorie : les humains, du moins ceux dotés de la faculté de parler, ont dit des choses qu'ils n'ont pu transcrire. Que ce soit au cours du stade préalphabétique dans nos contrées aujourd'hui, ou bien au sein de sociétés, archaïques et modernes, ici et ailleurs, où l'illettrisme massif était/est la règle. Je ne dis pas ça par nostalgie ou coquetterie, mais bien parce que l'écrit procède de l'oral et non l'inverse — ce qui n'interdit pas les influences intercodiques réciproques que tu évoquais plus haut, mais ceci est une autre histoire.   

Quant à la prétendue opposition nature/culture entre oral et écrit, c'est la société qui la pose ; pas les linguistes. En s'abstenant d'intervenir dans le cercle familial des tout-petits dès lors que le stade alphabétique ou préalphabétique n'est pas en jeu, il appert par contraste que la société appréhende l'émergence de la parole enfantine comme un phénomène naturel, alors que celui-ci est à vrai dire au moins aussi socioculturel que sa matrice, la cellule familiale. Entendons-nous bien : je ne suis pas partisan d'une intervention étatique d'ordre linguistique dans les familles (!), je note simplement que la société commence à sérieusement fourrer son nez dans le développement linguistique de l'enfant à partir du moment où celui-ci s'expose à l'écrit. Ce faisant, la société en dit long sur le prix qu'elle attache à l'écrit et révèle du même coup le peu de cas qu'elle fait de l'oral. C'est normal : l'écrit est le vecteur privilégié de la transmission des connaissances, l'oral ne vient qu'après, s'il arrive jamais...

Les linguistes (ainsi que les historiens et autres anthropologues) posent l'antériorité de l'oral (ou du geste) sur l'écrit. Ça n'implique pas que le fait chronologiquement antérieur soit hors du champ de la culture ; bien au contraire.

Mais revenons à la diphtongue : tu as raison de recentrer. Le fait que <ail> dans <bail> et <oi> dans <oiseau> soient encore largement considérés comme des diphtongues, et non comme les homologues respectifs de <ar> dans <bar> et <na> dans <naseau>, montre le chemin à parcourir par la linguistique de l'oral, éternel parent pauvre de l'enseignement des langues...

21 Dernière modification par Naïf (04-11-2008 20:03:14)

Re : les diphtongues

"Les linguistes (ainsi que les historiens et autres anthropologues) posent l'antériorité de l'oral (ou du geste) sur l'écrit. "

Non, pas tous, et nous ne sommes pas un petit village gaulois, et nous avons lu Leroi-Gourhan smile))
Mais j'arrête de flooder, puisque le pauvre Monkey reçoit du coup des choses qui ne l'intéressent pas du tout, et qu'on est OK sur le non-rapport diphtongue/écrit dans les langues évoquées dans le présent fil.
Edit. j'espère qu'on n'y cause pas de l'allemand, dans ce fil, parce que là, c'est une autre paire de manches...

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Re : les diphtongues

le français soutenu est une oralisation de l'écrit, mon c.l ! Par contre Greg, qui croyez être critique, ouvrez votre esprit, oi n'est pas comme ar !

cherchez : dipthongue sur knol !

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Re : les diphtongues

" Le fait que <ail> dans <bail> et <oi> dans <oiseau> soient encore largement considérés comme des diphtongues, et non comme les homologues respectifs de <ar> dans <bar> et <na> dans <naseau>, montre le chemin à parcourir par la linguistique de l'oral, éternel parent pauvre de l'enseignement des langues..."

Premièrement c'est faux, oi n'est majoritairement considéré comme une diphtongue que chez ceux qui sont restés au niveau philologique (dictionnaire de l'Académie par ex.). Pour tous ceux qui sont parvenus au niveau phonétique, ils clament sans cesse que ce n'en est pas une, sans fournir  aucune preuve ni aucune méthode ...

Le "chemin à parcourir" qu'il leur reste, surtout aux seconds, les premiers n'ont fait aucun chemin linguistique, c'est celui de parvenir au vrai niveau linguistique, celui de la phonologie. La définition de la diphtongue n'a d'intérêt que si elle est phonologique (donc dans le cadre d'une langue définie). En phonétique, par définition, toute diphtongue est décomposable donc sera assimilée à deux éléments, c'est le même problème pour les affriquées, tous les phonèmes complexes.

Il ne sert donc par exemple à rien de comparer une diphtongue de l'anglais et du français puisque la phonologie est intérieure à la langue.

Plus généralement, vous ne pouvez poser ce qui est diphtongue et ce qui ne l'est pas par dictat (comme cité plus haut).  Si la linguistique est une science, alors la diphtongue doit avoir une définition mais aussi un test.

Les tests que j'ai effectués montrent que pour [baj] ça se discute, poser une semi-consonne ou une diphtongue est probablement d'une économie équivalente).  Pour [wa] dans oiseau, par contre, c'est une diphtongue à 100%. C'est la diphtongue la plus répandue et la plus caractéristique de la phonologie du français, bien mise en évidence aussi quand on étudie les autres dialectes d'oïl.

Les diphtongues propres au canadien sont bien connues et discutées dans de nombreux articles. Cela suffit à rendre l'affirmation qu'il n'y a pas de diphtongues en français stupide.  A moins de rejeter le québécois hors du français. Mais ceux là même qui étudient ces diphtongues propre du canadiens font la plupart du temps partie aussi de la secte qui répète sans cesse qu'il n'y a pas de diphtongues en français standard, ce qui ne résiste pas à un examen scientifique :

Voir : http://knol.google.com/k/-/la-diphtongu … 2oyvur0n/2

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Re : les diphtongues

JOURDAN a écrit:

Plus généralement, vous ne pouvez poser ce qui est diphtongue et ce qui ne l'est pas par dictat (comme cité plus haut).  Si la linguistique est une science, alors la diphtongue doit avoir une définition mais aussi un test.

Les tests que j'ai effectués montrent que pour [baj] ça se discute, poser une semi-consonne ou une diphtongue est probablement d'une économie équivalente).  Pour [wa] dans oiseau, par contre, c'est une diphtongue à 100%. C'est la diphtongue la plus répandue et la plus caractéristique de la phonologie du français, bien mise en évidence aussi quand on étudie les autres dialectes d'oïl.

Je ne pense pas que la linguistique soit une science à l'image de la physique ou des maths. Cela dit, je ne suis pas de ton avis : je n'entends aucune diphtongue dans /wa-zo/. D'ailleurs quand tu rapproches [la-lwa-di] pour <la loi dit> de cette prononciation particulière [i-l?a-di] pour <il lui a dit>, tu débouche sur une commutation homogène. Sauf bien sûr à poser que ?a, ?e, ?i (etc) sont aussi des diphtongues.

Mais peut-être as-tu une théorie là-dessus ?



JOURDAN a écrit:

"Les diphtongues propres au canadien sont bien connues et discutées dans de nombreux articles. Cela suffit à rendre l'affirmation qu'il n'y a pas de diphtongues en français stupide.  A moins de rejeter le québécois hors du français. Mais ceux là même qui étudient ces diphtongues propre du canadiens font la plupart du temps partie aussi de la secte qui répète sans cesse qu'il n'y a pas de diphtongues en français standard, ce qui ne résiste pas à un examen scientifique :

Prétendre que la phonologie de l'hexagonal et du français nord-américain sont en tous points identiques ne vient à l'idée de personne. Et justement la diphtongaison est une différence majeure entre les deux grandes normes hexagonales et certaines des normes nord-américaines. Aussi, ne me prête pas une idée aussi saugrenue que l'exclusion du nord-américain de la francophonie : il est évident que le débat portait sur l'hexagonal.

Sur l'aspect sectaire, il ne tient qu'à toi de produire des arguments. Je suis tout prêt à changer d'avis face à des exemples probants.



JOURDAN a écrit:

Les tests que j'ai effectués montrent que pour [baj] ça se discute, poser une semi-consonne ou une diphtongue est probablement d'une économie équivalente).

En laissant de côté la question "économique", on peut remarquer que l'enchaînement syntaxique aj + voyelle , comme dans <bail emphytéotique>, conduit très souvent à ba-j?? ? cf <baillant>.

Si d'autre part <bail> est ba?? (ou quelque chose d'approchant) et non baj, comment interprèterais-tu la prononciation septentrionale de <bille> ? Ce serait bi?? contre bij, n'est-ce pas ?

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Re : les diphtongues

"Je ne pense pas que la linguistique soit une science à l'image de la physique ou des maths". Peut-être que tu ne le penses pas, mais c'est ce que la linguistique structurale essaie d'être ne dépend pas de ce que tu penses. Cf. premier chapitre d'un manuel de linguistique au choix. Même si ce n'était pas une science "exactement" comme la physique, cela ne justifierait pas les "dictats" je crois. Bon c'est un mot un peu sévère, mais si on le remplace par "affirmation gratuite" ce n'est pas plus conciliant, il n'y a pas de solution....

": je n'entends aucune diphtongue dans /wa-zo/." La présence d'une diphtongue ne dépend pas de ce que tu "entends", comme je l'ai déjà suggéré, il faut partir d'une DEFINITION, et ensuite TESTER si cette définition s'applique. Sinon on parle dans le vide.

Le test que tu proposes : "commutation homogène." n'est pas valable car justement, tu n'as pas prouvé qu'il n'y avait pas de diphtongue dans "lui", il faut utiliser un test qui n'est pas une démonstration circulaire. Je ne comprends pas ce que viennent faire les autres ?a ?e etc. (il ne faut pas tout mélanger et jeter à la figure de quelqu'un qu'il veut tout transformer en diphtongue, il faut se recentrer sur un test valable et procéder une par une syllabe, et mot par mot.

": il est évident que le débat portait sur l'hexagonal." NOn, ce n'est pas évident, plein de sources et de dictionnaires font la même généralisation non justifiée. Ce n'est pas parce que tu te justifies à posteriori que leurs affirmations le sont; comment peuvent-ils affirmer que le "français moderne" n'a pas de diphtongues ? A quel moment ils ont exclu le canadien du français moderne ? On ne peut pas justifier un pareil manque de méthode.

"Sur l'aspect sectaire, il ne tient qu'à toi de produire des arguments. Je suis tout prêt à changer d'avis face à des exemples probants." très bonne position, très scientifique, maintenant il ne suffit pas de l'exprimer, il faut la mettre en pratique.

"En laissant de côté la question "économique", on peut remarquer que l'enchaînement syntaxique aj + voyelle , comme dans <bail emphytéotique>, conduit très souvent à ba-j?? ? cf <baillant>.
Si d'autre part <bail> est ba?? (ou quelque chose d'approchant) et non baj, comment interprèterais-tu la prononciation septentrionale de <bille> ? Ce serait bi?? contre bij, n'est-ce pas ?
"

Il ne faut pas laisser la question "économique" de côté, certaines explications équiventes ne peuvent probablement se départager que comme ça (malheureusement). je ne peux pas répondre à ces questions phonétiques car elles apparaissent en mauvais caractères dans mon navigateur mais la méthodologie me semble confuse. Je reviens sur l'idée de base : 1 Définition 2 Test. On ne peut se lancer directement dans les exemples....

La théorie demandée est esquissée dans mon article sur Wordpress

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Re : les diphtongues

JOURDAN a écrit:

"Je ne pense pas que la linguistique soit une science à l'image de la physique ou des maths".
Peut-être que tu ne le penses pas, mais c'est ce que la linguistique structurale essaie d'être ne dépend pas de ce que tu penses. Cf. premier chapitre d'un manuel de linguistique au choix. Même si ce n'était pas une science "exactement" comme la physique, cela ne justifierait pas les "dictats" je crois. Bon c'est un mot un peu sévère, mais si on le remplace par "affirmation gratuite" ce n'est pas plus conciliant, il n'y a pas de solution....

Ce que la linguistique "structurale" — comme tu dis — essaie d'être n'a aucune importance : la linguistique demeure une discipline très différente des sciences que sont les maths ou la physique.



JOURDAN a écrit:

": je n'entends aucune diphtongue dans /wa-zo/."
La présence d'une diphtongue ne dépend pas de ce que tu "entends", comme je l'ai déjà suggéré, il faut partir d'une DEFINITION, et ensuite TESTER si cette définition s'applique. Sinon on parle dans le vide.

Le compliment t'est retourné. En attendant ta définition, on peut toujours remarquer que la production sonore wa n'est pas une succession de deux voyelles : le premier son est consonantique et le second non. Mais attendons ta définition.



JOURDAN a écrit:

Le test que tu proposes : "commutation homogène." n'est pas valable car justement, tu n'as pas prouvé qu'il n'y avait pas de diphtongue dans "lui", il faut utiliser un test qui n'est pas une démonstration circulaire.

Il n'y a pas plus de voyelle en position médiale dans <lui> prononcé lɥi — et non lyi — qu'il n'y en a dans <l'ouie> ou <Louis> prononcés lwi — et pas lui. À moins que tu proposes une définition de ce qu'est une voyelle articulée.



JOURDAN a écrit:

": il est évident que le débat portait sur l'hexagonal."
NOn, ce n'est pas évident, plein de sources et de dictionnaires font la même généralisation non justifiée. Ce n'est pas parce que tu te justifies à posteriori que leurs affirmations le sont; comment peuvent-ils affirmer que le "français moderne" n'a pas de diphtongues ? A quel moment ils ont exclu le canadien du français moderne ? On ne peut pas justifier un pareil manque de méthode.

Pitié, épargne-nous les manœuvres dilatoires. Il est évident que l'un des traits majeurs qui distinguent les normes hexagonales (Nord et Sud) du nord-américain est la diphtongaison. Si ta position surprend, ce n'est pas parce que les Québécois diphtonguent <père> et <peur> mais bien parce que tu affirmes que <doigt> et <baille> contiennent des diphtongues partout dans l'Hexagone.



JOURDAN a écrit:

"Sur l'aspect sectaire, il ne tient qu'à toi de produire des arguments. Je suis tout prêt à changer d'avis face à des exemples probants."
très bonne position, très scientifique, maintenant il ne suffit pas de l'exprimer, il faut la mettre en pratique.

Très juste. Attendons donc des précisions sur ton approche.



JOURDAN a écrit:

je ne peux pas répondre à ces questions phonétiques car elles apparaissent en mauvais caractères dans mon navigateur mais la méthodologie me semble confuse. Je reviens sur l'idée de base : 1 Définition 2 Test. On ne peut se lancer directement dans les exemples....

La théorie demandée est esquissée dans mon article sur Wordpress

Tu peux toujours recourir à X-Sampa si l'API ne fonctionne pas pour toi.

L'idée de base est très bonne : on va commencer par le 1, c'est-à-dire tes définitions. Après on verra...

27 Dernière modification par yd (13-05-2012 13:51:58)

Re : les diphtongues

Je me tiens complètement en dehors du plan technique, que je ne maîtrise pas du tout.

Mais je crois vraiment qu'il nous faut repartir, autant que faire se peut, de la logique qui a présidé à l’avènement de l'alphabet et de l'adaptation de cet alphabet aux parlers.

Pour la suite, je suis tributaire de mon jugement que je crois pouvoir porter sur le grec ancien, ayant cru remarquer que le grec semble avoir hésité beaucoup plus sur la notation des voyelles que sur la notation des consonnes, à ce point d'envisager un stade de la notation du grec sans les voyelles : l'écriture du grec aurait donc connu des origines communes avec les écritures sémitiques, celles-ci maintenant la seule écriture des consonnes, le grec préférant au final noter aussi les voyelles.

Au départ, la logique de l'alphabet aurait consisté à considérer que les sons - notés par les consonnes, donc - impliquant une « frappe » de la langue ou des lèvres constituaient la trame de la prononciation de tout parler, et que cette trame était très stable, comme le trait d'un dessin. La part variable, le coloriage du dessin, ne concernerait donc, dans cette logique, que la tonalité, en clair les sons que nous notons par les voyelles. Ils cherchaient la notation la plus universelle possible, ce qui défiait, sans jeu de mots, l’entendement ; ils avaient remarquablement observé, étudié, analysé et synthétisé : la logique choisie s'imposait à eux. J'ai cru remarquer jusque dans nos parlers régionaux que ce sont les sons notés par les voyelles qui varient, qui personnalisent, qui particularisent. Même si la prononciation des consonnes varie parfois d'une langue à une autre, pour chacune de ces langues elle est stable, ce qui permet et explique l'écriture alphabétique commune.

Le problème au cœur de cette logique sont les sons qui tiennent à la fois de la consonne - la trame - et de la voyelle - la tonalité. Si j'ai bien compris, la notion « historique » de diphtongue ne consisterait qu'à classer les sons qui ne peuvent être notés ni comme consonnes ni comme voyelles. Ceci voudrait donc dire que la notion de diphtongue - je veux dire cette notion-là de la diphtongue - serait propre aux langues notées par l'écriture alphabétique, qu'elles notent ou non les voyelles, puisque pour les langues qui ne notent pas les voyelles la question demeure de ce qu'on identifie comme consonne.

Quand je prononce « oui », je prononce le « son-voyelle » noté ou puis la voyelle notée i.
Quand je prononce « yeux », je peux soit prononcer de la même façon la voyelle i puis la voyelle e, soit m'aider de ma langue pour prononcer ce qu'on appelle je crois le l mouillé, suivi de la voyelle e : l'écriture doit trancher là où la phonétique ne le peut pas.

On peut s'amuser à prononcer à la suite, sans se servir de sa langue, les voyelles e, i, et e, et en accélérant on va reconnaître un superbe œil, alors que quand on prononce naturellement œil, on se sert de la langue pour le l mouillé final.

Joli cas encore que celui du mmm - bouche fermée - des choristes : pour moi c'est une diphtongue, un inclassable, pour les linguistes je crains qu'il ne soit qu'une question sans réponse, le genre de question sur laquelle personne ne peut s'accorder.

Fille légère ne peut bêcher.

Re : les diphtongues

yd a écrit:

JQuand je prononce « oui », je prononce le « son-voyelle » noté ou puis la voyelle notée i.
Quand je prononce « yeux », je peux soit prononcer de la même façon la voyelle i puis la voyelle e, soit m'aider de ma langue pour prononcer ce qu'on appelle je crois le l mouillé, suivi de la voyelle e : l'écriture doit trancher là où la phonétique ne le peut pas.

On peut s'amuser à prononcer à la suite, sans se servir de sa langue, les voyelles e, i, et e, et en accélérant on va reconnaître un superbe œil, alors que quand on prononce naturellement œil, on se sert de la langue pour le l mouillé final.

Je doute que vous prononciez en permanence "ou-i" et ce que vous appelez le "l mouillé" serait plutôt le yod une des trois semi-consonne/semi-voyelle du français.

Pour le oui faites donc une recherche sur le moteur PFC avec mot entier et "oui" (indifférent pour le reste des critères), l'écoute ne fonctionne plus que sur Internet Explorer.

Je crois aussi que les phonéticiens reconnaissent qu'il y a des stratégies différentes pour former une même son, ce qui relativise d'ailleurs les noms ronflants et compliqués qui leur sont donnés ainsi que votre expérience et votre démonstration.

Sans parler du fait qu'il y a aussi une différence entre le son que vous croyez entendre et celui qui est effectivement émis.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

29 Dernière modification par yd (29-05-2012 16:45:25)

Re : les diphtongues

Je suis sujet, par définition, à l'influence de mon oreille, à sa formation en matière de langue - à ses habitudes, en clair, qui varient surtout selon les parlers - et à l'interprétation que j'en fais, ou que mon cerveau en fait : cela vaut aussi bien pour les scientifiques que pour moi, pour vous et pour tout le monde.

La seule façon d'échapper à cette subjectivité serait de passer tous les parlers de la planète à l'analyseur vocal : depuis vingt, trente ou quarante ans que la science en a les moyens, où en est-elle, où a-t-elle profité de ces enregistrements pour enregistrer elle-même en ce domaine ses propres progrès, où le lecteur, ou l'étudiant, ou le chercheur lambda peuvent-il consulter ces nouveaux apports ? Comme je n'entends jamais rien à ce sujet - mais on me dira n'est-ce pas que j'ai l'oreille sélective ou faussée -, je crains fort que la réponse ne soit autre que le point zéro.

Pour oui, peu importe, le but était pour moi de faire remarquer qu'aucune « frappe » de la langue ou des lèvres n'intervenait. Si on tend l'oreille, on entendra par contre assez souvent une légère aspiration, censée ne pas exister - hum ! - en français. C'est ce qu'on rend caricaturalement par ouiche.

Fille légère ne peut bêcher.

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Re : les diphtongues

Dans certaines régions, en particulier le Nord et l'Est, oui devient ui, buée est prononcé bu-ée, juin s'entend jouin ; il ne faut donc pas faire de généralité.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

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Re : les diphtongues

Alco a écrit:

Dans certaines régions, en particulier le Nord et l'Est, oui devient ui […].

Et en Belgique l'huile devient l'houile. C'est d'ailleurs ainsi que, à la télévision et à la radio, on reconnaît la belgitude de certains journalistes wallons qui n'ont quasiment pas d'accent : quand ils ont à prononcer ui.

Re : les diphtongues

yd a écrit:

JLa seule façon d'échapper à cette subjectivité serait de passer tous les parlers de la planète à l'analyseur vocal : depuis vingt, trente ou quarante ans que la science en a les moyens, où en est-elle, où a-t-elle profité de ces enregistrements pour enregistrer elle-même en ce domaine ses propres progrès, où le lecteur, ou l'étudiant, ou le chercheur lambda peuvent-il consulter ces nouveaux apports ?

C'est dommage mais le moteur PFC dans ses résultats ne donne pas les résultats de l'analyse vocale mais, si le coeur vous en dit et si vous avez le temps, le site explique comment faire pour installer les logiciels qui vont bien. Je m'étais plongé dans leur doc à un certain moment sans aller plus loin que les premières installations, on s'y retrouve.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

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Re : les diphtongues

Alco a écrit:

Dans certaines régions, en particulier le Nord et l'Est, oui devient ui, buée est prononcé bu-ée, juin s'entend jouin ; il ne faut donc pas faire de généralité.

Comme c'est bien observé! Je suis de l'est de la France et j'ai souvent fait l'amère constatation que oui, ma manière de parler n'est pas celle qu'on affecte de croire la seule valable à la radio, à Paris...

Re : les diphtongues

erual a écrit:
Alco a écrit:

Dans certaines régions, en particulier le Nord et l'Est, oui devient ui, buée est prononcé bu-ée, juin s'entend jouin ; il ne faut donc pas faire de généralité.

Comme c'est bien observé! Je suis de l'est de la France et j'ai souvent fait l'amère constatation que oui, ma manière de parler n'est pas celle qu'on affecte de croire la seule valable à la radio, à Paris...

Si vous saviez comme ça m'agace moi aussi parfois moi qui suis du sud-ouest, quelqu'un disait déjà - clairement contrairement à son habitude - quelque chose d'approchant :

Naïf a écrit:

Comme nous ne savons guère ce qu'il en est de la véritable prononciation du français dans les DOM et TOM, il paraît important de bien préciser, quand c'est nécessaire, "français hexagonal" ("métropolitain" ne va pas, évidemment, justement parce que le français n'est pas parlé seulement en France ou dans les DOM et TOM).

Digression oiseuse:

Vive l'Internet, qui permet aux membres internationaux de la communauté francophone de se découvrir enfin! A terme, il faudra que ces incorrigibles jacobins de Français continentaux (ils me pardonneront)  acceptent un peu de variation dans les pratiques de leur idiome: qu'ils acceptent que les orthographes divergent, que les mots ne soient pas toujours identiques, que les constructions détonnent... bref, à ce qui est le quotidien - qu'ils le veulent ou non - des locuteurs d'anglais, de chinois, d'arabe, d'espagnol, de russe, d'hébreu...

Ceci est aussi une réaction aux projets de nouvelle "défense et illustration de la langue françoise" qui se manifestent sur ce site. Voyez cette nouvelle donne, les batailles ne sont plus les mêmes maintenant que sous Du Bellay... Il faut compter un peu plus avec ses alter ego!

Fin de la digression oiseuse.

Si ce n'est qu'il faisait du "français hexagonal" un bloc. Il suffit de probablement de dire "français standard" (plus que "parisien"), celui que bien peu parlent vraiment au quotidien.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

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Re : les diphtongues

Ce que la linguistique "structurale" — comme tu dis — essaie d'être n'a aucune importance : la linguistique demeure une discipline très différente des sciences que sont les maths ou la physique.

Si, pour travailler dans une discipline, il faut d'abord poser les bases. Parmi les bases, il y a le projet. Ce n'est pas moi qui ait inventé l'expression "Linguistique structurale". Il faut se renseigner un peu. Bien sûr que c'est une discipline différente des maths, je fais des maths et de la physique à mes heures perdues (un article sur l'effet Doppler, plein de formules, un autre sur le stroboscope, quelques formules aussi, pas méchantes), mais elle essaie tout de même d'être une science. Si son projet était de ne PAS être une science, où irait-elle ?


Le compliment t'est retourné. En attendant ta définition, on peut toujours remarquer que la production sonore wa n'est pas une succession de deux voyelles : le premier son est consonantique et le second non. Mais attendons ta définition.

Pour me "retourner" le compliment, il faudrait que j'écrive des phrases comme : dans tel mot, je n'entends pas tel ou tel son, donc il n'existe pas. Je n'écris pas de telles phrases. Tu ne peux pas étudier ce que tu appelles les consonnes et les voyelles en "remarquant" puis en affirmant. C'est une approche phonétique dans laquelle tu as déjà défini à l'avance et découpé les sons, ne serait-ce que par ton écriture phonétique, et ensuite tu affirmes que ce découpage correspond à quelque chose dans la structure de la langue française. Je te propose une autre approche, basée sur des opérations qui sont décrites dans tous les bons bouquins de linguistique : les substitutions et les permutations (voir plus bas) notamment.



Il n'y a pas plus de voyelle en position médiale dans <lui> prononcé lɥi — et non lyi — qu'il n'y en a dans <l'ouie> ou <Louis> prononcés lwi — et pas lui. À moins que tu proposes une définition de ce qu'est une voyelle articulée.

On ne peut pas faire des raisonnement qui commence par "il n'y a pas plus de ci dans ça que de truc dans machin, donc pof j'ai raison" les différents mots dont tu parles n'ont pas la même morphologie, par exemple dans l'ouie, il y a  deux morphèmes et bien sûr on le voit dans notre écriture traditionnelle et ça se démontrerait assez facilement même sans. Pour étudier les rapports entre Louis et lui, il faudrait trouver des approches qui montrent de combien d'éléments ils se composent à un niveau inférieur à celui des morphèmes (donc des phonèmes) , pas juste dire regardez il n'y a rien, donc il n'y a rien.



Pitié, épargne-nous les manœuvres dilatoires. Il est évident que l'un des traits majeurs qui distinguent les normes hexagonales (Nord et Sud) du nord-américain est la diphtongaison. Si ta position surprend, ce n'est pas parce que les Québécois diphtonguent <père> et <peur> mais bien parce que tu affirmes que <doigt> et <baille> contiennent des diphtongues partout dans l'Hexagone.

Pitié épargne nous les mots savants ! Si c'est si évident, pourquoi tant de gens écrivent sans réfléchir que le français moderne n'a pas de diphtongue. S'ils avaient un peu de rigueur, ils préciseraient au moins que le ou les français parlés au Canada en ont, ou il trouveraient une autre expression que "français moderne".

Je n'affirme rien, je démontre, cette démonstration amène assez vite qu'un mot comme doigt contient effectivement une diphtongue, pour baille, je n'ai jamais rien "affirmé" de tel car c'est difficilement démontrable, ce complexe de sons ne se rencontre déjà qu'en finale de mot, ce qui n'est pas très favorable. La solution avec la semi-consonne est probablement la plus économique.

Très juste. Attendons donc des précisions sur ton approche.

J'en ai déjà donné. Même si la linguistique n'est pas des maths ou de la physique, elle doit se comporter avec un minimum de logique. mon approche : Définition, test, conclusion.


Tu peux toujours recourir à X-Sampa si l'API ne fonctionne pas pour toi.

euh, oui, mais bon

L'idée de base est très bonne : on va commencer par le 1, c'est-à-dire tes définitions. Après on verra...

Merci, il ne s'agit pas que de "Ma définition". Il s'agit de toutes les définitions qui ont été données et pourquoi la plupart ne tiennent pas la route (ne permettent pas un test).

Si tu veux "commencer par le 1", je t'en prie : localise sur internet ma revue de toutes les définitions (en français, pas de TOUTES les définitions du monde). Je te dévoile un pan de la conclusion : aucune discussion à base phonétique n'est jamais arrivé à départager une diphtongue d'une double voyelle ou complexe consonne-voyelle, semi-truc/voyelle, etc.

Autre piste, de nombreux bouquins de linguistique illustrent la méthode pour distinguer une consonne complexe d'une double consonne. Par exemple on montre que le son noté ch en espanol (prononcé tch) doit être considéré comme une seule unité de la langue, c'est facile car en espagnol, de fait, le son que nous notons ch en français (désolé j'ai pas l'API ici) n'existe pas. En anglais,  le problème est plus épineux : le même son noté ch (et aussi prononcé tch) est-il aussi un phonème ou bien une double consonne, d'autant que [t] existe dans cette langue et aussi [ch] (pardon) ???

Remarquons que dès le départ, ils ont abandonné l'idée de faire cette analyse phonétiquement, car JUSTEMENT, ces consonnes complexes SE PRESENTENT phoniquement comme des doubles consonnes : TCH se présente comme t+ch..

Martinet trouve une solution (il y en a peut-être d'autres) pour le Ch anglais en décrivant le tableau total des consonnes de l'anglais, son SYSTEME phonologique, c'est ça qui est "structural"

Bon très bien, moi j'admets la conclusion de Martinet (dans Eléments de linguistique générale) par contre ni lui ni personne que j'ai trouvé pour le moment n'explique le même genre de méthode pour les voyelles, i.e. comment distinguer une diphtongue d'une voyelle double (ou semi-truc/voyelle etc.) ????

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Re : les diphtongues

et j'aimerais bien savoir ce qu'il faut faire pour être averti qu'il y a de nouveaux messages sur un fil ?

Re : les diphtongues

On clique la case s'abonner à ce sujet, sous le cadre destiné à recevoir la réponse.

Ceci posé, je me suis permis d'intervenir dans le précédent message, pour distinguer nettement les citations de greg des réponses de Jourdan.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : les diphtongues

P'tit prof a écrit:

On clique la case s'abonner à ce sujet, sous le cadre destiné à recevoir la réponse.

Ceci posé, je me suis permis d'intervenir dans le précédent message, pour distinguer nettement les citations de greg des réponses de Jourdan.

Bonjour, je ne vois toujours pas cette case ???? (j'avais bien cherché ce genre de truc, je SUIS abonné à des forums)

Elle est censée être du côté de "envoyer la réponse" "aperçu de votre réponse" ? AAAAAAAAHJ, ça y est, je la vois ! à chaque fois je voyais les trucs sur les binettes" et ça me faisait zapper... (dans les autres forums, il ne me semble pas que cette option soit à choisir au moment où on répond ????)

Merci d'avoir édité ce qui était citation et mes réponses, j'essaierai d'améliorer mes interventions à l'avenir, surtout si on m'aide....

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Re : les diphtongues

Je suis tombé sur cette introduction, que je trouve assez bien rédigée : ciep.fr/publications/genetique/genetique2.php

Un petit extrait : "Aucune description de quelque composante d'une langue que ce soit - phonétique, morphologique, syntaxique, sémantique - naïve ou consciente, platement empirique ou lourdement théorisée, ne saurait faire l'économie de la procédure comparative. Quel que soit le modèle théorique de référence, si, sur des énoncés, nous ne pouvions effectuer des séries de commutations, substitutions, permutations et transformations, portant sur des éléments de nature variable ; sans pratiquer, en un mot, la comparaison, nous serions incapables de produire la liste des phonèmes d'une langue, d'inventorier les combinaisons possibles des morphèmes, de poser des règles de syntaxe, de lister des sèmes, etc."

Appliqué à notre sujet, cet exposé me semble particulièrement pertinent.... On ne peut pas prendre un mot comme oiseau et décider s'il contient ou non des diphtongues. La diphtongue ne va pas apparaître comme la sainte vierge à Lourdes. Le mot oiseau est intéressant car il contient le son complexe à l'initiale, mais il faudrait le comparer avec d'autres mots, qui ont apparemment les mêmes sons, mais qui se comportent différemment, "water" par exemple (je parle de water en français, je vais aux water, où sont les waters...etc). Et ensuite il faudrait aussi se pencher sur d'autres mots, qui le contienne ailleurs, notamment des mots qui appartiennent à une famille/flexion.

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Re : les diphtongues

Une autre idée pour travailler, que j'ai déjà évoquée, est de poser des définitions. Je suis tombé par hasard sur ce texte dans Wikipedia, à la page "religion", qui parle de travailler à l'intérieur d'un "cadre" :
"Dans l'avant propos du Dictionnaire des faits religieux Régine Azria commence par rappeler qu'il n'est pas facultatif pour une science de définir son objet : « Dès leur origine, les sciences sociales des religions ont placé la question de la « définition » de leur objet au centre de leur préoccupation. Cet impératif de définition est en effet le premier pas de toute démarche scientifique, le préalable à toute possibilité d'approche critique38"

Cela veut dire pour nous qu'avant de se mette à parler de diphtongue, il faudrait bien préciser le cadre de réflexion proposé : s'il s'agit seulement de phonétique, alors oui, on pourra discuter à l'infini de la présence et de la nature des diphtongues

Si en revanche, on veut comprendre la diphtongue en tant qu'unité qui peut se manifester à la place d'une monophtongue, selon les mots, ou selon les dialectes, alors le cadre qu'il faut poser (la définition de l'objet de la science) n'est plus phonétique, le cadre doit être phonologique, et les méthodes de la phonologie devront être employées.

La plupart des définitions qu'on trouve ne sont pas cadrées, donc inutilisables.

41 Dernière modification par greg (06-06-2012 01:04:43)

Re : les diphtongues

Bon, on a pas avancé d'un pouce.
Puisque tu refuses de mettre les mains dans le cambouis, j'y vais.



Voici une liste de mots :

wa·ʁi  hoirie
ba·ʁi  barrit
ma·ʁi  mari
va·ʁi  varient



Et une autre :

wa·zo  oiseau
ba·zo  basaux
ma·zo  maso
na·zo  naseau



T'as pas comme l'impression que le phonème w commute avec les quatre consonnes que sont b, m, v et n ?






C'est dommage que tu te contentes de renvoyer à "internet", "de nombreux bouquins" ou "Martinet" sans rentrer vraiment dans le vif du sujet. Je vais donc le faire à ta place en reproduisant un extrait du passage que tu as intitulé Comportement en initiale du complexe [wa] :

  • Quand le complexe [wa] est placé en initiale, on remarque que les mots traditionnels se comportent comme s’ils débutaient par une voyelle, c’est à dire qu’ils font l’objet d’une liaison, comme dans « les oiseaux » alors que les mots exogènes comme « wapiti », « water » ou « ouistiti » (qui phonétiquement ont le même [w]) ne peuvent pas se lier. Cela corrobore l’idée que dans les mots traditionnels, ce [wa] dont on sait qu’il est bien l’aboutissement d’une diphtongaison, est toujours un phonème unique, par opposition au comportement des mots empruntés, dans lesquels W-A se comporte en revanche comme deux phonèmes dont le premier, une consonne, ne peut être liée.



Si tu parles de wa, que vient faire wis·ti·ti ouistiti dans ton développement ?



Puisqu'il est donc aussi question de wi, on peut citer :

     le·wi (fʁɑ̃·se·e·o·lɑ̃·de)
     les ouis (français et hollandais)

où <oui> est un mot plutôt traditionnel épargné par la liaison.



Et comment parler de wi en omettant ɥi ? Qu'on en juge :

     de·ɥi·tɛ·nə
     des huitaines

avec <huitaine> dans le rôle du mot pas vraiment exogène.



Et, pour finir, retour à wa :

     nu·wa·tɔ̃
     nous ouatons

     de·wa·tə
     des ouates

Mais peut-être que <ouate> et <ouater> ne sont toujours pas acclimatés à notre langue malgré leur présence multiséculaire...

     PS
beaucoup de maternels feront la liaison dans <nous ouatons> et <des ouates>
beaucoup d'autres ne la feront pas

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Re : les diphtongues

greg a écrit:

Bon, on a pas avancé d'un pouce.

si, la preuve :

greg a écrit:

Voici une liste de mots :

wa·ʁi  hoirie
ba·ʁi  barrit
ma·ʁi  mari
va·ʁi  varient



Et une autre :

wa·zo  oiseau
ba·zo  basaux
ma·zo  maso
na·zo  naseau



T'as pas comme l'impression que le phonème w commute avec les quatre consonnes que sont b, m, v et n ?


Très bonne idée de faire ces commutations. Je ne connaissais pas le mot "hoirie",je l'avoue, et j'ai appris quelque chose aujourd'hui... maintenant, je ne fonctionne pas sur des "impressions". Je n'ai pas "comme l'impression", je retiens une hypothèse, ensuite je vois où elle mène. Avant d'aller plus loin, disons que le fait de prendre un mot excessivement rare (ou excessivement fréquent) n'est jamais bon pour une démonstration. Mais je ne le réfute pas, ce hoir, au contraire, j'y reviendrai.

La deuxième liste est bonne aussi, ça me plait. Si on suit cette ligne de raisonnement, on arrive à la conclusion provisoire que le phone [w] se comporte comme une consonne "normale", mais en faire un "phonème" est peut-être aller un peu vite en besogne :

Pour que l'hypothèse tienne la route, on doit maintenant étudier

1 comment ce phonème hypothétique se comporte, en milieu de mot, et en fin de mot, la plupart des consonnes du français sont assez ubiquistes je pense

2 comment il s'associe avec les autres voyelles que [a]

3 qu'est-ce qu'il donne en association avec d'autres consonnes

bref toutes les possibilités qu'il a de former des syllabes, bien sûr on doit s'attendre à ne pas trouver TOUS les cas, mais une consonne qui aurait un comportement trop spécial, ça ne serait pas très bon non plus.

4 proposer une explication cohérente pour les problèmes de liaison évoqués plus haut

5 si d'autres difficultés ne surgissent pas en chemin, on pourrait aussi faire une étude fine sur ce son tel qu'il apparaît dans les racines/morphèmes... qui ont plusieurs allomorphes (on pourrait prendre hoirie par exemple)

43 Dernière modification par JOURDAN (06-06-2012 13:14:50)

Re : les diphtongues

je remplace mon précédent message, répété deux fois, par ce petit commentaire technique, en effet, si j'ai envoyé la même chose deux fois, c'est parce que j'étais obligé de répéter l'opération je ne sais combien de fois avant que ça marche, assez fatiguant...

ça m'étonne d'ailleurs que mon message ne soit pas répété 5 fois plutôt, tellement j'ai peiné,  ça marche très mal ce serveur, ou le logiciel qui gère les posts (j'ai aussi quelques problèmes avec Wordpress, mais c'est moins pire, comme on dit)

j'accède à plein de sites qui marchent très bien, mais languefrançaise, ça rame à peu près à chaque fois

Re : les diphtongues

C'est quoi-tesse, des basaux ?

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

45 Dernière modification par JOURDAN (06-06-2012 07:16:20)

Re : les diphtongues

P'tit prof a écrit:

C'est quoi-tesse, des basaux ?

= un pluriel pour "basal", un adjectif un peu spécialisé de la botanique, d'après ce que je lis mais ce n'est pas important

je reviens sur les commutations : une "commutation" à elle seule ou même une petite série ne peuvent pas prouver l'existence d'un phonème. Quand j'ai pris cheap et sheep et que je dis que ça parait commuter, ce qui de fait pourrait étonner une oreille francophone, la plupart des linguistes me donneront raison car ils s'accordent à considérer le son [tch] de cheap comme représentant un seul phonème en anglais, donc c'est un coup de bol (ou j'ai choisi cette paire minimale car je connaissais un peu la phonologie de l'anglais...).

Supposons au contraire que j'aie pris (de bonne foi) chip et trip comme cobayes (car ils ont une bonne tête, à l'oreille, de paire minimale, non ?). Je pourrais en déduire qu'entre ces deux mots il y une commutation entre le 2ème son [ch] du premier, et le 2ème son [r] du second. Je serais encouragé à le penser car le son [ch] existe d'ailleurs en anglais et bien sûr j'aurais en plus la confirmation d'avoir le son [t] représentant le phonème tout à fait établi /t/ de l'anglais. Malheureusement cette "commutation" ne prouverait ni qu'il y a 4 phonèmes dans chip (comme dans trip) ni que l'un deux est un /ch/ comme dans ship (avec lequel je serais aussi fortement tenté de le comparer).

C'est pourquoi la commutation phonétique [wazo] / [nazo] ne prouve pas qu'il y a 4 phonèmes dans oiseau, ni que l'un d'eux est un /a/ comme dans /nazo/ et que l'autre est la même consonne qu'on a dans les water....

Une fois qu'on a l'inventaire phonétique d'une langue, on peut l'illustrer par des paires minimales, mais tant qu'on n'a pas cette liste magique, on peut toujours former des paires mais sont-elles minimales ? Je pense qu'il y a une ambiguïté pédagogique dans la plupart des manuels à ce sujet du POUVOIR des paires mini pour découvrir les phonèmes d'une langue.

La réalité phonologique des phonèmes supposés par les commutations ne commence à prendre corps que lorsque ces phonèmes trouvent une place logique dans un TABLEAU d'oppositions. C'est pourquoi Martinet résout le problème posé par chip:ship:trip ou cheap:sheep en recourant à l'analyse de ce qui se passe dans :  Jeep.

je répondrai aussi aux autres questions

46 Dernière modification par JOURDAN (06-06-2012 13:21:04)

Re : les diphtongues

greg a écrit:

Si tu parles de wa, que vient faire wis·ti·ti ouistiti dans ton développement ?

Pardon si ma phrase n'était pas compréhensible mais dans cet extrait, je voulais faire remarquer que certains mots en [wa] (écrits wa ou oua) semblaient se comporter comme des mots ne commençant pas par une voyelle, exactement aussi comme d'autre mots en [wi], comme ouistiti, qui s'écrit bien avec des voyelles graphèmes pourtant, mais que personne ne songerait à lier.


greg a écrit:

où <oui> est un mot plutôt traditionnel épargné par la liaison.

OUI, "oui" est un cas, il faut le reconnaître. En commençant par s'apercevoir de son long destin de diphtongue/triphtongue (sans préjudice de ce qu'il est aujourd'hui, mais il faut quand même s'en souvenir...)

Maintenant, pour un mot donné, le fait qu'il déclenche une liaison ou pas est un indice, on ne peut pas le considérer comme une démonstration en soi. On va le voir dans la suite un même mot peut se lier ou non selon le contexte.


Dans le cas d'un mot aussi fréquent et important que oui, deux choses peuvent avoir empêché la liaison de se faire (que j'ai entendue toutefois je vais retrouver la citation) :
1 la mise en valeur, le mot étant très court, si on le lie il y a un risque qu'on ne l'entende plus
2 l'homophonie avec l'ouie (toujours bien comprise), lier l'un et pas l'autre permet de les distinguer comme la haie peut au moins se distinguer de lait ou l'est ou laid ou les (français standard) même si les 4 derniers ne le peuvent.

ce genre de mots subissent donc de fortes pressions dues à leur brièveté et l'homophonie, comme on s'en aperçoit en étudiant le sort des mots "hui" et "huis". Dans les paroles de "grand cerf, ouvre moi"  la rime, "un lapin venir à lui, et frapper à l'huis" n'est plus comprise et les gens remplace le deuxième vers par "et frapper ainsi" (suprimer la liaison aurait pu contribuer à la survie du mot dans le langage courant, mais ce n'est pas moi qui décide...). Par ailleurs Le "hui" dans "aujourd'hui" n'a survécu qu'en s'agrégeant avec l"au jour d'"....



   

greg a écrit:

  de·ɥi·tɛ·nə
     des huitaines

avec <huitaine> dans le rôle du mot pas vraiment exogène.

la notation phonétique (? il y faudrait des crochets) me paraît inconsistante (français standard ?), celà dit, "huit" devrait se lier sans problème à toutes les sauces et s'élider, comme dans les nombres mais en pratique, dans l'utilisation, on a eu besoin de le "mettre en valeur", c'est l'explication que je vois ...

l'une a froid, l'autre à chaud ("une" non mis en valeur); as-tu vu la une du Parisien ? ("une" mis en valeur, c.a.d. substantivé du point de vue de la syntaxe, mais non lié du point de vue prosodique)

ainsi : dix-huit, vingt-huit sont obligatoirement liés mais : le huit du mois, me(s) huit jours ne se lient pas...

alors si huitaine a effectivement quelques problèmes à se lier ce n'est pas très étonnant, dans la langue il ne faut pas tout chercher à expliquer mais j'avancerai que le h graphique a pu jouer son rôle subliminal d'anti lien/élision (mais pas  pour "huit" dans les chiffres qui sont des mots prononcés tous les jours)



greg a écrit:

Et, pour finir, retour à wa :

     nu·wa·tɔ̃
     nous ouatons

     de·wa·tə
     des ouates

Mais peut-être que <ouate> et <ouater> ne sont toujours pas acclimatés à notre langue malgré leur présence multiséculaire...

ce n'est pas moi qui l'affirme, c'est toi qui le constate, comme Littré d'ailleurs (il constatait que les gens ont tendance à ne pas lier l'ouate, alors que rien ne les en empêche....), tu ne m'en veux pas de te comparer à Littré j'espère ? Ce sont des mots qu'on emploie rarement, je parle de l'ouate. Dès qu'un mot se raréfie, les gens l'emploient avec des pincettes, ils ne savent plus trop comment le prononcer. Beaucoup de gens prononcent "oyez" : oh yeah, comme les tambours majors anglais, alors qu'ils ont l'exemple de voyez, qui leur donne la prononciation correcte en français.

Pour les waters, c'est clairement un mot exotique mais quotidien, et son écriture nous le rappelle constamment, et aucun mot qui s'écrit comme ça ne se lie en français, donc l'ensemble de ces mots écrits comme ça vont continuer ensemble longtemps à ne pas se lier....(il y a peut-être d'autres raisons, je n'entends pas les enfants dire "lezouaters" ?)

Finalement, mea culpa, j'ai simplifié la situation en évoquant juste le fait que certains mots étaient exotiques :  il faut bien considérer différentes dimensions linguistiques : certains mots font bien partie du fond linguistique mais ils sont rares et deviennent instables (sens ou prononciation), en fait ils deviennent exotiques/étranges, d'autres mots sont utilisés quotidiennement, mais restent "étrangers" dans leur prononciations et/ou leur graphie. Le même mot peut suivre différentes règles de liaison selon qu'il est intégré dans une formule toute faite ou non. Enfin des mots rentrent en collision homophonique et il faut les abandonner, ou au contraire les maintenir au prix d'un artifice prosodique (qui peut être la liaison).

47 Dernière modification par JOURDAN (09-06-2012 07:13:54)

Re : les diphtongues

Bien entendu, la méthode des commutations/permutations/déletions reste valable en première approche. Elle ne devient dangereuse que dans l'étude des consonnes complexes (affriquées par ex.) ou des voyelles complexes (diphtongues, triphtongues).
Toutefois il ne faut pas se faire trop d'illusion sur son pouvoir de distinguer les phonèmes ex-nihilo. Avant de pouvoir faire des commutations, on doit être suffisamment familiarisé avec la langue pour ne pas faire "n'importe quoi". En clair on a intérêt à avoir appris ses distinctions "sur le tas", donc en fait de première approche, il vaut mieux s'en servir en deuxième approche....
Il existe une connaissance paralinguistique d'une langue, chez ses locuteurs, même illettrés, appelée "intuition linguistique" ou quelque chose d'approchant. Connaissance qui leur permet d'appliquer certaines "règles" (sans les connaitre) et de faire certains jeux de mots (et pas d'autres).
A la liste de tâches évoquée plus haut, on pourrait donc ajouter l'étude du rôle que joue le phone [w] dans les jeux de mots, les contrepèteries etc.
Mon point 1 était mal exprimé, on peut le remplacer par cette étude des contrepèteries, je suis toute ouïe (ne cherchez pas il n'y en a pas).
En attendant, je débroussaille un peu les points 2 et 3 :
Si le phone [w] provoque, en début de mot, une liaison/élision comme une voyelle bien née, il faut vite renoncer à le voir comme une voyelle puisque bien sûr, à part la ressemblance phonétique, il n'en présente pas la propriété typique : faculté de former une syllabe à lui tout seul.
Comme consonne, ce n'est guère mieux, cette consonne ne peut s'associer qu'à très peu de voyelles (seulement [a] et [i(je peux pas mettre un crochet ici....) à première vue, et seulement dans un ordre bien précis (la plupart des consonnes commutent en français, si on a [fa] on peut rencontrer aussi [af]. Nous avons [wa] et [wi] mais je ne vois pas de [aw] et de [iw].
On arrive au moment où tout le monde va s'écrier "cette démonstration ne sert à rien, on savait depuis le début que c'était une SEMI-CONSONNE"
Ah bon d'accord, le grand mot est lâché, mais qu'est-ce qu'une "semi-consonne" ? je vois deux sortes de définitions (je dis que je les vois, mais je vois surtout des gens qui se servent du mot sans donner aucune définition...).

1 c'est une voyelle, mais dans certains environnement, elle jouerait le rôle d'une consonne (ou l'inverse). Il s'agirait d'ALLOPHONES. Je n'ai pas de définition sous la main, mais il doit y en avoir qui correspondent à cette idée, j'en ai lu je crois.

Quand Martinet note  /mua/ le mot "moi" (Eléments p. 117), il est évidement dans cette optique. Si ce sont des allophones, c'est très intéressant, car on n'a pas besoin de justifier le comportement bancal de [w] en tant que consonne. Par contre, il faut réaliser qu'il deviendrait difficile d'opposer deux morphèmes sur la base voyelle/semi-consonne-correspondante par leur commutation.

2 ce sont deux phones différents, qui ont des ressemblances phonétiques certes, mais jouent un rôle différent. Ils ont chacun leur place dans les tableaux phonétiques, la voyelle dans un trapèze des voyelles, la semi-consonne dans un tableau des consonnes. Comme ici  : sfu.ca/fren270/phonetique/consonnes.html#21  (mais puisqu'il y a aussi des sonores, des orales, des arrondies, des constrictives, etc. dans la première liste, qu'est-ce qui justifie de les placer dans le même tableau, mais dans une liste séparée ?????????)

Comment choisir entre ces deux définitions ? Eh bien à mon avis, on pourrait préférer celle qui explique le plus de choses, en étant la moins coûteuse, la moins "dangereuse" peut-être ? A la limite, on pourrait admettre les deux en parallèle, à condition tout simplement de l'avouer explicitement, comme je viens de le faire.

Mais de toutes façons, il faut se rendre compte que cela restera une approche DESCRIPTIVE, non structurale. On part des sons que l'on a segmentés de façon largement arbitraire et on essaie de les classer logiquement. Cela peut donner des résultats aberrants si on ne tient pas compte des remarques que j'ai faites plus haut : l'existence de sons complexes qui font que le nombre de phonèmes n'est pas donné d'avance.

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Re : les diphtongues

J'ai donc réalisé une étude, assez rapide (en interrogeant des amateurs plus ou moins spécialisés) sur les contrepèteries.

A leur connaissance, il n'y a pas d'exemple de contrepèterie dans lequel la supposée semi-consonne [w] commute avec une autre consonne.

Ce genre de commutation pourrait pourtant être utile en faisant un "drap" à partir d'un "doigt", ou un "bras" à partir d'un "bois", à condition de trouver un mot donnant un [r] et acceptant le [w] en retour bien entendu.

On a donc des gens qui cherchent des contrepèteries depuis plusieurs siècles et qui en remplissent des pages entières sans  qu'aucun ne se soit aperçu que ce son était disponible ?

Rappelons en effet que les contrepèteries se font sur les sons, non sur les lettres : les c de ceci par exemple seront à utiliser comme des [s].

J'en entends dans le fond qui commencent à rouspéter que les contrepèteux ne sont pas des linguistes. Certes, mais comme on vient de le voir, ils travaillent sur les sons de la langue, ce qui est déjà un meilleur point de départ que beaucoup de linguistes, qui n'ont pas toujours bien assimilé la nature orale de la langue.

Alors comment se fait-il que certains linguistes fassent des commutations que les contrepèteux ne font pas ? Eh bien ce n'est pas à moi qu'il faut poser la question, mais à eux !

Le principe de la commutation des phonèmes n'est pas de poser des traits phonétiques que l'on a isolés comme étant des phonèmes de la langue puis de les faire commuter pour la joie des linguistes. Il est de reconstituer artificiellement certes - mais en essayant de rester le plus fidèle possible - la procédure mentale utilisée par un locuteur pour produire des morphèmes en opérant des choix paradigmatiques.  C'est exactement ce que font les contrepèteux en mimant (quelquefois un peu laborieusement) des lapsus qui pourraient réellement arriver.

49 Dernière modification par Maginhard (19-06-2012 17:47:27)

Re : les diphtongues

Mais c'est tout simple. Arrêtons le charabia des linguistes qui cherchent surtout à montrer qu'ils ont fait de longues études.

Dans « lion », « i » et « on » sont liés dans la prononciation prosaïque usuelle, mais ce n'est qu'une contingence. En poésie, on les sépare :

« Vous êtes mon li-on superbe et généreux. »
Cela donne de la noblesse et de l'emphase.

Donc « ion » n'est pas une diphtongue.

Essayez maintenant de faire une récitation publique où vous déclamez :

« J'aime le son du cor le soir au fond des bo-a. »

L'assistance va exploser de rire (et ce n'est pas le pied de trop qui fait la vis comica).

Quoique « oi » soit la succession de o et a, on ne peut les séparer : c'est une diphtongue.

C'est pourtant simple !

50 Dernière modification par JOURDAN (20-06-2012 00:19:06)

Re : les diphtongues

Non, ce n'est pas un problème tout simple, et c'est pour ça que certains "linguistes" se penchent sur le problème. Ne soyez pas si affirmatif, le charabia ne sert pas à montrer qu'on a fait de longues études. Dans mon cas, en linguistique, je suis complètement autodidacte (bien qu'ayant fait de longues études par ailleurs).

Si demain vous allez travailler chez un artisan, mettons un maréchal-ferrand, vous n'allez pas lui renvoyer à la figure les termes techniques, probablement très nombreux, que vous aurez besoin d'apprendre. Ayez la même ouverture avec les sujets intellectuels qu'avec les sujets manuels !

Vous proposez de reconnaitre les diphtongues par l'opposition synérèse/dyérèse. Désolé de ces termes techniques, le premier signifie qu'on prononce les sons "ensemble" et le deuxième en succession, ils sont seulement plus pratiques, car plus courts. Je ne les ai pas appris au cours de longues études, mais sur le tas.

Honnêtement, l'exemple du lion ne me parait pas vraiment génial, vous êtes sûr qu'en poésie on peut dire un li-on ? Je sais que beaucoup d'hotels s'appellent le "lit on dort" mais franchement je trouve cette prononciation un peu bizarre. Il doit y avoir d'autres exemples plus nets.

Maintenant votre exemple sur le fond des bois (attention, ça ne donnerait pas "bo-a" mais "bou-a") est tout à fait vrai, on ne peut prononcer ce mot en diérèse, ni en poésie, ni dans une chanson.

Et vous avez raison, cela fait de cette syllabe une "diphtongue", du moins au sens phonétique. Certains linguistes admettent vaguement cette notion de diphtongue phonétique, mais la plupart des linguistes du Français la réfutent, car ils ont inventé la notion de semi-consonne et ensuite ils font de cette semi consonne un phonème ce qui fait que finalement pour eux il y a deux phonèmes dans la syllabe, et plus de diphtongue. Comme j'en ai déjà parlé, cette idée de semi-consonne se cogne aux murs de tous les côtés, on la prononce comme une voyelle, mais on la met dans le tableau des consonnes, et surtout on évite de choisir entre les deux définitions que j'ai évoquées, ce qui est bien pratique car alors, si quelqu'un demande pourquoi elle ne se comporte pas comme-ci, vous dites : "ah oui, mais c'est une consonne" et pas comme ça, vous dites "ah oui, mais c'est une voyelle"....

Malheureusement, cette méthode simple de reconnaitre les diphtongues (je reviens à votre proposition) connait des problèmes car il existe en français des cas où une telle diphtongue, toujours prononcée en synérèse (ensemble) est toutefois nettement coupée en deux par une limite morphologique, en clair : une racine et une terminaison par exemple. Compte tenu de cette structure interne, on est obligé de voir dans ces mots deux morphèmes collés et cela empêche de reconnaître la syllabe où la diphtongue apparaît comme une vraie unité linguistique (je n'ai pas d'exemple sous la main, mais en cherchant ensemble, on va en trouver).

Pour conclure, on peut parfaitement utiliser votre approche de la diphtongue, à condition de comprendre qu'il s'agit seulement d'une diphtongue phonétique. Le stade suivant, pour les linguistes charabiants ou non, est alors de distinguer dans ces diphtongues phonétiques celles qui correspondent à deux unités de la langue (qui se sont collées dans la prononciation) et celles qui correspondent à une seule unité. Autrement dit, comme le tenant d'une chaire de linguistique à Paris a fini par me lâcher, poussé dans ses retranchements : des diphtongues bi-phonématiques et des diphtongues mono-phonématiques (composées de deux ou bien d'un seul phonème).

Personnellement, c'est l'existence des deuxièmes qui m'intéressent dans une langue donnée, les premières pouvant apparaître au hasard des hiatus, voire à la jonction de deux mots, comme le "vay" dans [ilvaitõbe] (il va y tomber)

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