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forum abclf » Pratiques argotiques et familières » Chanteuse : une gommeuse

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Messages [ 47 ]

1 Dernière modification par mercattore (31-08-2011 12:26:08)

Sujet : Chanteuse : une gommeuse

Bonjour,

Dans un répertoire musical de 1902 il est mentionné le terme de gommeuse pour certaines chanteuses, mais il semble que son étymologie ne soit pas clairement établie (d'après le dico de Bob, notamment).
Le dico indique en outre que la gommeuse est  une «chanteuse de café-concert» mais ne doit-on pas préciser qu'elle se singularisait surtout par l'interprétation d'un certain genre de chansons ?
D'autre part, il est mentionné dans ce répertoire musical, en regard
de la chanteuse Brésina : son genre, expression que l'on retrouve peu dans les répertoires musicaux, à ce qu'il semble. Que vous inspire précisément cette expression. Merci. smile

http://www.hebergementimages.com/images/7c2f26b86facfb59e88393179f94c14b_SON-GENRE.jpg

2 Dernière modification par DB (31-08-2011 14:07:13)

Re : Chanteuse : une gommeuse

C'est l'abréviation pour "chanteuse de genre".
Il y a une bonne description (en anglais) des gommeux et des gommeuses ici.

3

Re : Chanteuse : une gommeuse

Bonjour,

il y a plus à dire. Il s'agit de la "manière" de chanter :

La gommeuse in Francia è la cantante da caffè-concerto che si agita e si
contorce come una gomma

cf. ce pdf (p. 37 en visu., 32 du document)

Plus complet ce document en anglais (p. 215) explique l'origine de la gommeuse. Et en faisant une recherche sur "courrier français" et "gommeuse" on retrouve l'histoire d'Emilie/polaire

Polaire s'illustra dans le genre gommeuse épileptique. Ces deux termes correspondaient en fait à deux genres du café-concert. Les gommeuses se singularisaient par une attitude aguicheuse et une élégance excessive, les épileptiques par une intense activité corporelle et gestuelle combinant danse, grimaces et chanson. " Pour moi, dès mon début, je fis tout de suite ces gestes exaspérés qui m'ont toujours été propres ; […] Rejetant ma tête en arrière, je chantais, en quelque sorte, avec mes cheveux battant au vent, avec mes narines frémissantes, avec mes poings crispés… ".

Un site est consacré à cette dame que voici :

http://deesk.pagesperso-orange.fr/polaire-1900/thumbnails/polaire_talbot_ca.JPG

Re : Chanteuse : une gommeuse

DB a écrit:

C'est l'abréviation pour "chanteuse de genre".
Il y a une bonne description (en anglais) des gommeux et des gommeuses ici.

Merci DB.

Le terme est pratique pour ne pas indiquer que l'interprète est une gommeuse, ce que Brésina était, en fait.

Re : Chanteuse : une gommeuse

Merci  éponymie pour ces excellentes précisions. wink

6 Dernière modification par DB (31-08-2011 14:37:46)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Brésina avait peut-être plusieurs cordes à son arc, mais en principe la chanteuse de genre n'est pas une gommeuse, si je comprends les distinctions. La gommeuse est plutôt excentrique tandis que la chanteuse de genre ne l'est pas nécessairement : elle va dire plus finement sa chanson de genre.
Je découvre grâce à vous cette Brésina peinte par Picasso. Sa tenue sur les photos et les gravures milite plus pour le genre que pour la gomme !
http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/chansons_illustrees/photos/bresina.jpg
http://cartophilie.be/maxipic/00/00/32/100003211.jpg

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Re : Chanteuse : une gommeuse

On trouve Polaire en plusieurs occasions dans les œuvres de Colette. Elles ont en effet partagé quelquefois les scènes de caf’ conc’ ou de cabarets parisiens, et il me semble même (à vérifier) que c’est Polaire qui a tenu le rôle de Claudine dans les adaptations théâtrales des romans.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Sylvain B a écrit:

il me semble même (à vérifier) que c’est Polaire qui a tenu le rôle de Claudine dans les adaptations théâtrales des romans.

Wikipedia confirme.

On peut la voir et l'entendre ici.

Quant à l'origine du terme "gommeuse", si les "épileptiques" (lancées à partir de 1877 si j'ai bien compris) et les "gommeuses" (à partir de quand ?) étaient deux genres différents, le fait de se contorsionner comme de la gomme semble plus correspondre aux épileptiques.J'ai probablement publié ce que mercattore savait déjà mais je me suis instruit.

Re : Chanteuse : une gommeuse

DB a écrit:

Brésina avait peut-être plusieurs cordes à son arc, mais en principe la chanteuse de genre n'est pas une gommeuse, si je comprends les distinctions. La gommeuse est plutôt excentrique tandis que la chanteuse de genre ne l'est pas nécessairement : elle va dire plus finement sa chanson de genre.
Je découvre grâce à vous cette Brésina peinte par Picasso. Sa tenue sur les photos et les gravures milite plus pour le genre que pour la gomme !

Oui, je connais ces documents, mais c'est bien de les avoir présentés.
Je crois avoir été une « mauvaise langue» à l'égard de Brésina, en la qualifiant de gommeuse.
Le musée Picasso, à Barcelone, qui abrite le dessin de Picasso, commet d'ailleurs une grosse bourde en mentionnant que ce portrait (1903) représente Térésina, une danseuse espagnole (maîtresse du poète Divoire).
Picasso a signé ce tableau : Bnesina, d'où peut-être la confusion du musée ? Mais cette confusion parait énorme pour un tel musée !

Re : Chanteuse : une gommeuse

Sylvain B a écrit:

On trouve Polaire en plusieurs occasions dans les œuvres de Colette. Elles ont en effet partagé quelquefois les scènes de caf’ conc’ ou de cabarets parisiens, et il me semble même (à vérifier) que c’est Polaire qui a tenu le rôle de Claudine dans les adaptations théâtrales des romans.

Je crois d'ailleurs qu'elles ont été très très intimes.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

mercattore a écrit:

Le musée Picasso, à Barcelone, qui abrite le dessin de Picasso, commet d'ailleurs une grosse bourde en mentionnant que ce portrait (1903) représente Térésina, une danseuse espagnole (maîtresse du poète Divoire).
Picasso a signé ce tableau : Bnesina, d'où peut-être la confusion du musée ? Mais cette confusion parait énorme pour un tel musée !

Il y a une discussion très intéressante et documentée de cette question dans ce forum. Peut-être y avez-vous d'ailleurs participé.

Re : Chanteuse : une gommeuse

Oui.  smile

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Re : Chanteuse : une gommeuse

pour l'origine de [tlfi]gommeux[/tlfi] - donc de gommeuse,  le CNTRL donne une explication qui semble effectivement correspondre avec en plus la raison de l'appellation :

3. Pour [l'étymologie de] gommeux [it. ds le texte], l'on prétend que c'est l'appellation de mépris que les femmes donnent, dans les cabarets de barrière, à ceux qui mettent de la gomme dans leur absinthe, à ceux qui ne sont pas de vrais hommes...
Goncourt, Journal, 1875, p. 1053.

1. Subst. masc. Jeune élégant du xixe siècle, désœuvré et vaniteux. Synon. dandy, gandin, petit crevé. Un gommeux, épaules et vêtements étroits; col très haut; bottines à pointes aiguës et relevées (...) marche en fauchant, les bras écartés du corps avec affectation (Gyp, Gde Vie, 1891, p. 143)

Que l'élégant excentrique ait donné gommeux et gommeuse pour le genre de personnage de music-hall n'est pas surprenant.

Il ne fallait pas chercher bien loin semble-t-il.

Re : Chanteuse : une gommeuse

L'étymologie du mot a plusieurs versions, dont celle de Goncourt. Mais rien ne prouve qu'elle est la bonne..

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Hé oui, je n'avais pas consulté

http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=12355 a écrit:

BOB

Origine peu claire, p.-ê. de se gommer «se pommader», des vêtements gommés «empesés» ou de la gomme ajoutée à l'absinthe, comme le pensaient les Goncourt

Je me tais.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Avec l'esprit de l'escalier, je suis allé consulter sur Gallica les numéros de la gazette de music-hall d'où est extraite votre liste d'artistes ; le sens de "son genre", s'il désigne à coup à peu près sûr un chanteur ou une chanteuse de genre, reste inexpliqué pour ce qui est de "son". S'agit-il d'une abréviation populaire pour "chanson de genre" ? Je n'ai pas pu trouver d'explication.
Dans la liste, je remarque une artiste nommée Colette, également "son genre", résidant à Genève. Il ne doit pas s'agir de l'écrivain dont la période de music-hall a commencé plus tard et qui n'y était d'ailleurs pas chanteuse de genre.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Dans les souvenirs de Mayol (1929) on lit :

Côté des dames, on trouvait une même multiplicité des genres, mais en plus gracieux, car c’étaient toutes de fort belles filles, exception faite, bien entendu, pour Jeanne Bloch et Abdala qui, leur talent mis à part, tiraient de leur physique... spécial une partie de leur succès. On entendait alors : la petite femme, la gommeuse, la romancière, la réalise la diseuse, la paysanne, la chanteuse grivoise, la cascadeuse, la chanteuse patriotique, les «petit Bob», etc.

On lit ensuite

A présent, tous les artistes ont le même genre, ils chantent un répertoire identique et leurs satanées musiques américaines, dont on abuse, se ressemblent toutes ! C’est cela qui donne au café?concert cette monotonie qu’on lui reproche justement !

Plus loin encore il dit :

Enfin, quand j’ai eu trouvé la bonne voie, créé mon genre, je me suis astreint à être gai, pour que le spectateur n’ait pas à retenir lui?même sa joie...

Il semble donc que jusqu'à la fin de la Belle Epoque il y avait une infinité de genre et que tout artiste pouvait créer “son genre”.

Dans le document initial on voit “Petit Bob son genre” voilà qui est clair, le «petit Bob» étant justement un genre recensé par Mayol.

Détailler tous les genres sur une liste d'artiste aurait donné l'impression d'un inventaire à la Prévert : on ne mettait que les plus classiques : “comique”, “gommeuse” (voir le titre de la liste), sans détailler le reste des "spécialités". Le public savait de toute façon qu'il verrait de tout.

C'est trop simple comme hypothèse ?

18 Dernière modification par pascalmarty (31-08-2011 16:45:55)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Il y a aussi le deuxième de la liste, Petit Bob, qui se voit attribuer son genre. Ne pourrait-on supposer que ces artistes s'étaient développé quelque spécificité personnelle, alors qualifiée de leur genre ?

Éponymie a posté pendant que j'écrivais. Je n'avais pas cette info sur le Petit Bob cité par Mayol, qui vient compliquer mon éventuelle explication.

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

pascalmarty a écrit:

Il y a aussi le deuxième de la liste, Petit Bob, qui se voit attribuer son genre. Ne pourrait-on supposer que ces artistes s'étaient développé quelque spécificité personnelle, alors qualifiée de leur genre ?

Les grands esprits se sont rencontrés et ont posté plus ou moins ensemble. Merci de confirmer : c'est bien ce qui semble le plus simple surtout au vu du texte de Mayol.

Re : Chanteuse : une gommeuse

Oui, oui, effectivement. Si Petit Bob avait créé son genre,  dûment recensé par Mayol, ça marche. Je me perdais un peu dans les conclusions qu'il fallait tirer.

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

pascalmarty a écrit:

Je n'avais pas cette info sur le Petit Bob cité par Mayol, qui vient compliquer mon éventuelle explication.

Serait-il surprenant qu'une artiste ait pour nom de scène celui de son genre ?

Re : Chanteuse : une gommeuse

éponymie a écrit:

Serait-il surprenant qu'une artiste ait pour nom de scène celui de son genre ?

C'est l'inverse, non ? Petit Bob se serait créé son genre à elle.
(Ne serait-ce point un cas d'éponymie ? wink)

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

pascalmarty a écrit:
éponymie a écrit:

Serait-il surprenant qu'une artiste ait pour nom de scène celui de son genre ?

C'est l'inverse, non ? Petit Bob se serait créé son genre à elle.
(Ne serait-ce point un cas d'éponymie ? wink)

Mais Mayol parle des "petit Bob", mercatorre serait tombé pile-poil sur la numéro un ?

Va-t-il maintenant se demander d'où vient ce nom ?

Re : Chanteuse : une gommeuse

éponymie a écrit:

Mayol parle des "petit Bob", mercatorre serait tombé pile-poil sur la numéro un ?

Ben pourquoi pas ? Les souvenirs de Mayol dont tu parles datent de 29. Si Petit Bob a démarré sa carrière avant 1902, ça lui laisse le temps d'avoir fait des émules.

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

25 Dernière modification par regina (31-08-2011 20:49:53)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Cette Mademoiselle Brésina ne fut pas particulièrement flattée par les critiques de la revue Art lyrique et music-hall , numéros consultables sur Gallica. De 1896 à 1898, on y vante surtout les charmes physiques de la chanteuse, quant à son talent et son jeu artistique, peuchère, ils se sont montrés bien sévères...

Ceci étant, elle a pu par la suite, travailler sa voix et acquérir du métier.

Fevrier 1896: « ...et la charmante petite Brésina a-t-elle l'air timide et confus dans son rôle de Chloé»

Décembre 1896: «  Mlle Brésina déploie presque trop d'entrain dans Miss Récolte et le Pousse-Cailloux. »

1896/1897, un peu  laudatif « Son affriolant bataillon féminin en engageant Mlle Brésina,. une gentille artiste de 17 ans à peine, très en beauté, qui occupera bientôtùne des premières places.»

1896/1897: «  Ça lui permet de recommander dans ses communiqués à la presse quotidienne les nénés de Mlle Brèsina, à peine âgée de 17 ans»

Juillet 1898: « Mlle Brésina a .retrouvé à ENGLISCHER GARTEN .de"Yi'énrie le succès qu'elle avait à Berlin »  ( là, ça se passe à Munich )

1896/1897: « On est fier d'être Français quand on entend Mlle Brésina crier : « Vive la France » et envoyer des baisers aux galeries dans Près de l'Ecole militaire.»

Décembre 1898: « Mlle Brésina, qui avait des nichons naissants l'année dernière (M ans à peine), ; n'en a plus du tout cette année ; elle aime bien sa mère.»

1896/1897: «il a beau jeu à passer immédiatement après Mlle Brésina, vulgaire débutante, à qui on a appris ses gestes et deux chansons banales»


1896/1897: «  Mlle Brêsina, une toute jeune personne ne doutant de rien et qui ne semble avoir qu'une bien vague conception de l'art du chant! On dit qu'elle est très pistonnée.»

1896/1897: «La Marche des Félibres est bien comme musique,  mais Mlle Brésina n'a plus assez de voix pour ce genre »

http://gallica.bnf.fr/searchInPeriodiqu … mp;lang=FR
Bonne lecture mercattore smile

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

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Re : Chanteuse : une gommeuse

pascalmarty a écrit:
éponymie a écrit:

Mayol parle des "petit Bob", mercatorre serait tombé pile-poil sur la numéro un ?

Ben pourquoi pas ? Les souvenirs de Mayol dont tu parles datent de 29. Si Petit Bob a démarré sa carrière avant 1902, ça lui laisse le temps d'avoir fait des émules.

Tu pourrais avoir raison.

Voici des extraits de l'Echo de Lyon de juin 1892

Petit-Bob, la célèbre divette de l'Eldorado de Paris, a débute hier soir dans sa dernière création les Enfants Terribles, devant un public nombreux. À côté. De Petit-Bob débutait aussi une artiste de valeur, Mlle  Praville, chanteuse gommeuse, très applaudie aussi.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Et voilà un des textes que chantait Petit-Bob (Mlle Hobdhol) en 1888-1889

http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/chansons_illustrees/02_deuxieme_premiere_serie/photos/page_03/30_10.jpg
http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/chansons_illustrees/02_deuxieme_premiere_serie/photos/page_03/30_11.jpg

je ne trouve pas l'adjectif...

28 Dernière modification par mercattore (31-08-2011 18:33:54)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Toujours aussi remarquablement chercheuse, Régina. Grand merci. smile
Holmes n'a plus qu'à se rhabiller...
En 1916, elle se produisait encore, malgré ces mauvaises critiques. Avait-elle pris des leçons musicales depuis ?
PS :Votre lien en bleu ne fonctionne pas, Régina..

29 Dernière modification par DB (31-08-2011 18:36:48)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Grâce à Mercattore, nous faisons tous une plongée passionnante, et à certains égards consternante, dans l'univers du music-hall au tournant du XXe.
Eponymie me paraît avoir vu juste. "Son genre" doit désigner le genre propre de ces artistes, dont beaucoup sont tombés dans l'oubli, quoiqu'ils fussent bien nombreux à revendiquer leur propre genre. À l'inverse, d'ailleurs, on a connu des "chanteurs en tous genres", dans la lignée des troupes de théâtre dont on voyait les membres désignés comme "premier rôle en tous genres", "deuxième père en tous genres", "utilité en tous genres".
On trouve dans les revues musicales d'époque des attestations de "genre Bob" ou "genre petit Bob", ainsi que "genre Bob et Duhamel" et naturellement d'autres comme "genre Bonnaire". Le Mémorial d'Aix du 23 mars 1894 mentionne ainsi une "Melle Regina, genre Bonnaire" wink. Dans ce dernier cas, le modèle qui donne le nom au genre est bien une artiste nommée Bonnaire.
Qu'en est-il de "petit Bob" ? Le genre dérive-t-il du nom de l'artiste mentionnée dans la liste ou l'artiste a-t-elle choisi son nom en fonction d'un type préexistant ? Il faudrait plus de détail sur ce "genre petit Bob", mais il me semble que c'est un rôle représentant un enfant*** ; il pourrait s'agir du gamin de 8 ans, espiègle mais ayant bon cœur,  selon le type célèbre créé par Gyp d'abord pour les lecteurs de la Vie parisienne, puis dans un livre à succès de 1883.

*** ce que confirme les dernières trouvailles d'Eponymie, la gaminerie et les enfants terribles.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

regina a écrit:

Juillet 1898: « Mlle Brésina a .retrouvé à ENGLISCHER GARTEN .de"Yi'énrie le succès qu'elle avait à Berlin »  ( là, ça se passe à Munich )

C'est où, "Yi'énrie ?

Décembre 1898: « Mlle Brésina, qui avait des nichons naissants l'année dernière (M ans à peine),

M pour mille ?
Sacrés ratages de la numérisation !

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Et je me demande aussi si les expressions "se donner un genre", "elle n'a pas de genre" ne viennent pas de ce monde-là où il fallait absolument en avoir un.

Un ce spectacle de ce genre a-t-il jamais été filmé ?

Re : Chanteuse : une gommeuse

Petit Bob demeure 18 avenue Parmentier. Un coup de fil nous renseignerait peut-être... wink

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Re : Chanteuse : une gommeuse

mercattore a écrit:

Petit Bob demeure 18 avenue Parmentier. Un coup de fil nous renseignerait peut-être... wink

Ou un coup de Google map, si on donne l'adresse précise on peut voir l'immeuble smile

Je suis donc allé voir, l'immeuble est beau et est certainement celui ou Petit-Bob a habité mais pas de plaque commémorative. Point d'association d'anciens amants éplorés pour l'immortaliser sad. On pouvait toujours tenter.


Autre hypothèse, liée à l'éponymie :

la numéro 1 donne son nom de scène au genre X, d'où “son genre” et les suivantes sont Mlle Y, genre X

Petit-Bob, son genre
Amélie, petit-Bob

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Re : Chanteuse : une gommeuse

mercattore a écrit:

PS :Votre lien en bleu ne fonctionne pas, Régina

Oui, je l’ai constaté aussi. Mais le problème est facile à résoudre : il suffit de supprimer l’espace entre http et les deux barres obliques dans l’url :
http://gallica.bnf.fr/searchInPeriodiqu … geNumber=3

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Re : Chanteuse : une gommeuse

À votre service, mercattore smile C'est rectifié.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Encore quelque chose sur les gommeuses ici :

DU CAFE CONCERT AU MUSIC-HALL

Plusieurs genres de chanteurs défilent : les gambilleurs, les diseurs et diseuses (genre narratif  d'Yvette Guilbert), les chanteuses d'opérettes  Anna Judic et Florence Duparc, les romancières ou poseuses (romances tristes sifflotées en robe du soir). Il y a encore  les gommeuses (Les Cinq Demi-Vierges aux Ambassadeurs). A le Belle Epoque,  on appelait « gommeurs » les jeunes hommes qui passaient leur temps à se pommader et poussaient l'élégance jusqu'au ridicule. Les gommeuses désignaient  des artistes à la mise excentrique. On allait écouter également  le scieur (Sulbac), ou le pochard (Bourgès), le patriotique, l' excentrique (Thérésa), les pétomanes (nain Delphin), la danseuse électrique (représentée par Toulouse-Lautrec).

Prenons l'exemple de Thérésa : elle   fait ses débuts à l'Eldorado en 1862 et propose des chansons folles, des chansonnettes bouffe, comme Les canards tyroliens ou C'est dans le nez que ça me chatouille ;  elle chantera Rien n'est sacré pour un sapeur devant Napoléon III lui-même. Elle va créer en 1875 la chanson La Terre de Jules Jouy dédiée à Emile Zola, La glu de Jean Richepin avant de finir sa carrière en 1893. Une autre artiste, Polaire : elle chante tous les soirs aux Ambassadeurs des « chahuts » (airs américains), un genre prisé au Moulin-Rouge ou bien à l'Eldorado.  (voir l' opéra Werther de Massenet). Polaire était une gommeuse, qui portait des costumes excentriques assez déshabillés, et proposait un répertoire assez niais, voire leste. 
« Au caf'conc, déclarait Yvette Guilbert, il faut d'abord faire rire » : le Café-concert est avant tout un lieu de mixité sociale.

Voilà donc ces cinq gommeuses en 1895, quand on voit les danseuses du Moulin-Rouge immortalisées par Lautrec on se dit que la filiation est directe  :

http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/textes_divers/corbeille/photos/cinq_demi_vierges_les.jpg


De toute façon toute recherche sur le sujet aboutit très souvent sur ce site de référence fantatisque :

www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net

que mercatorre connait probablement bien.

37

Re : Chanteuse : une gommeuse

éponymie a écrit:

Une autre artiste, Polaire : elle chante tous les soirs aux Ambassadeurs des « chahuts » (airs américains), un genre prisé au Moulin-Rouge ou bien à l'Eldorado.  (voir l' opéra Werther de Massenet). Polaire était une gommeuse, .

Que vient faire Werther de Massenet dans cette galère ?

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Il y a un rapport que l'on trouve dans les mémoires de Polaire (toujours sur le fameux site de référence) :

Aux Ambassadeurs, je lançai ce nouveau refrain  : Le p'tit frisson, "chanson pour les petites femmes blasées" ; le grand succès allait à une nouveauté qui demeura longtemps populaire, et dont beaucoup, sans doute, n'ont pas tout à fait oublié la vogue : "Tamaraboum dihé  !" Il était entonné tous les soirs par une artiste nommée Duclerc, bordelaise opulente, qui répondait assez bien au portrait de Mme Angot "pas bégueule, forte en gueule". Elle poussait cela comme un cri énorme, que la salle reprenait en chœur. Je pus découvrir plus tard que la musique de ce refrain était à peu près exactement celle de l'invocation de Werther dans le chef-d'œuvre de Massenet : "Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps"...

On appelle ça du plagiat.

Cela aurait nécessité un petit développement de la part du monsieur qui a écrit l'article en 2004 effectivement.

39

Re : Chanteuse : une gommeuse

Merci pour votre recherche et votre réponse rapide.
Ce serait amusant d'entendre ce fameux refrain, pour voir s'il y a effectivement lieu de parler de plagiat. Polaire n'est pas très rigoureuse quand elle écrit : « la musique de ce refrain était à peu près exactement celle de l'invocation de Werther » !

Re : Chanteuse : une gommeuse

DB a écrit:
éponymie a écrit:

Une autre artiste, Polaire : elle chante tous les soirs aux Ambassadeurs des « chahuts » (airs américains), un genre prisé au Moulin-Rouge ou bien à l'Eldorado.  (voir l' opéra Werther de Massenet). Polaire était une gommeuse, .

Que vient faire Werther de Massenet dans cette galère ?

C'est vrai, ça ! Une petite modification s'impose donc : « Une autre artiste, Polaire : elle chante tous les soirs aux Ambassadeurs des « chahuts » (airs américains), un genre prisé au Moulin-Rouge ou bien à l'Eldorado, voire quelques airs du Werther de Massenet.»;)

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Je crois surtout qu'il faudrait consulter l'article du magazine "Notre Histoire2 n° 222 de juin 2004 que le professeur - qui a écrit l'article sur son blog perso - mentionne comme unique source smile. Il sera probablement mieux écrit et ponctué.

P.S. : ce fil n'a pas inspiré vos talents d'illustrateur Bookish sad

Re : Chanteuse : une gommeuse

éponynimie a écrit:

P.S. : ce fil n'a pas inspiré vos talents d'illustrateur Bookish sad

Comment ferais-je un choix plus judicieux que ces cinq ravissantes gommeuses de 1895  ?http://a2.idata.over-blog.com/250x166/4/04/72/43/onfray-portraits/obeir-coup-de-chapeau-droite.jpg

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

43 Dernière modification par mercattore (02-09-2011 10:17:48)

Re : Chanteuse : une gommeuse

A propos des gommeuses :

éponymie a écrit:

De toute façon toute recherche sur le sujet aboutit très souvent sur ce site de référence fantatisque :

www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net

que mercatorre connait probablement bien.

Oui, c'est un remarquable site.

A propos de Polaire, j'avais écrit  sur ses rapports avec Colette « Je crois d'ailleurs qu'elles ont été très très intimes
Il s'avère que j'ai été une très mauvaise langue mad :                                                                                   http://deesk.pagesperso-orange.fr/polai … phie_b.htm
                                                                                                                                                                                                                                         
http://www.hebergementimages.com/images/97227a24b81f6b64e71319ec97ad8668_POLAIRE---ABC.jpg

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Re : Chanteuse : une gommeuse

Le terme "gommeuse" est utilisé par Edmonde Charles-Roux dans "L'Irrégulière", biographie très fouillée de Coco Chanel. Une gommeuse était, à Vichy et à Moulins, au début du 20e siècle, une jeune femme peu douée d'une belle ou grande voix, qui se produisait essentiellement dans les "beuglants" et chantait des chansons populaires, militaires, folkloriques...

45 Dernière modification par éponymie (22-11-2011 21:59:17)

Re : Chanteuse : une gommeuse

Le sujet n'est pas si vieux mais il y a déjà du nouveau (façon de parler smile ) sur la toile. Je suis même surpris de trouver autant de nouveautés seulement en mettant gommeuse et chanson sur google. Au moment où le sujet a été lancé la pêche était bien plus maigre.

LA GOMMEUSE PUDIQUE (Gaston Couté, 1880-1911)

J'étais une petit' chanteuse
Sorti' tout fraîch'ment de pension ;
Je n'étais pas encor noceuse
Et n'en avais pas l'intention.
J'voulais quand mêm' rester honnête,
Avec mon art gagner mon pain ;
Mais quand j'chantais mes chansonnettes
Chaqu'soir l'public criait au r'frain :

La jambe, la jambe,
La jambe avec sa chanson !
Nous somm's venus pour ses nichons
Et pour qu'ell' nous fass' voir ses jambes !
Ses jambes, ses jambes,
Si nous ne voyons pas ses jambes
Dans un retroussis frétillard
Nous ferons du pétard !

Je n'leur chantais pas de ces choses
Qui font pâmer d'ais' les fauteuils ;
Je n'montrais pas de dessous roses
En clignant gentiment de l'oeil ;
Car je n'pouvais pas devant l'monde
M'résoudre à c'qu'on r'luqu' mes mollets
Et j'rougissais lorsqu'à la ronde
On me disait à chaqu' couplet :

La jambe, la jambe,
La jambe avec sa chanson !
Nous somm's venus pour ses nichons
Et pour qu'ell' nous fass' voir ses jambes !
Ses jambes, ses jambes,
Si nous ne voyons pas ses jambes
Dans un retroussis frétillard
Nous ferons du pétard !

Bien qu'la vertu soit mon idole
C'est un'monnaie qui n'a plus cours
Aussi, dés ce soir je m'enrôle
Dans le bataillon de l'amour ;
Tout comm' ces dames de la Butte
Je veux sauter comme un cabri
Seul'ment, messieurs, pour qu'je chahute
Faudra que vous y mettiez l'prix.

La jambe, la jambe,
La jambe avec ma chanson !
Ressentez-vous le p'tit frisson
A regarder ainsi mes jambes !
Mes jambes, mes jambes !
Si vous voulez mieux voir mes jambes
Je vous attends, gros polissons,
Demain à la maison.

Voici le lien vers le site : http://gastoncoute.free.fr/

Edmonde Charles-Roux n'a pas tout dit neutral

On trouve aussi ça dont voici un extrait :

La chanson entre alors dans un véritable âge d'or, où l'extravagance le dispute à la prodigalité. Des quartiers chics aux faubourgs, on se rue sur ces théâtres consacrés à la chanson. Ouvriers, bourgeois, artistes, commerçants, militaires et bonnes d'enfants s'assemblent là, devant la même scène, la même cerise à l'eau-de-vie, dans la bonne ambiance, chaude, bruyante et enfumée, pour se repaître de l'admirable floraison de refrains nouveaux reflétant l'âme du pays tout entier. Des artistes encore jamais vus entrent en scène, ne reculant devant aucun moyen pour se distinguer.

Les « gommeuses », ou « épileptiques », exhibent généreusement leurs jambes et leurs décolletés, se trémoussent, grivoisement, abusant de tout un arsenal de grimaces. C'est l'époque de Polaire, à la taille douloureuse de minceur, de Mistinguett, qui apporta au genre l'audace excessive de sa gouaille populaire, d'Yvette Guilbert, l'incomparable, immortalisée par Toulouse-Lautrec, qui remit tout en question. Le choix, la qualité de son répertoire (au service des poètes), sa manière de « jouer » la chanson provoquèrent un bouleversement total. Elle demeure, avec Thérésa, la plus illustre représentante de l'histoire du « Caf'Conc' ».

Pour les images ce fil d'ABC a largement contribué à alimenter les résultats de recherches (on y trouve aussi le coup de chapeau de Bookish Prat !) mais il y a aussi :

http://t2.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcTTuMFdxnOK5dF8UR0TZO36daXR3ZGJSfd2E0vX4VGGeI1FvRtQnA

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

46 Dernière modification par éponymie (22-11-2011 22:28:39)

Re : Chanteuse : une gommeuse

On trouve aussi cet article smile

LA GOMMEUSE (25/01/1883)

La gommeuse est un mammifère carnassier qui s'apprivoise assez facilement ; cependant, même à l'état domestique, elle est peu susceptible d'attachement.

Sans avoir la timidité de la hyène, elle en a néanmoins les habitudes voraces; comme celle-ci, elle sort de son repaire à la tombée du crépuscule pour chercher sa nourriture, et vient armée de ses griffes roses, déterrer les petits gommeux, qu'elle dévore tout vivants. Son coeur présente la forme d'un porte-monnaie à compartiments multiples, et l'appareil de la digestion, très compliqué chez cet animal, est d'une force et d'une élasticité prodigieuses qui ne reculent devant rien : fortune, héritages, sentiments virils, cet animal mange tout, ronge tout, détruit tout, et ne lâche sa proie que pour courir à une victime moins vidée.

Mode de reproduction : contrairement à la loi qui régit les êtres, la gommeuse ne se reproduit que par des moyens artificiels, qui sont les suivants:

Prenez une gardeuse d'oies que vous raclez proprement après l'avoir lavée à grandes eaux. Faites infuser le sujet ainsi préparé dans plusieurs litres de paresse mélangée d'une forte addition de gourmandise et de coquetterie ; ajoutez quelques verres de Champagne, un faux chignon, plusieurs pincées de piments erotiques. Faites alors sécher l'objet saupoudré avec du blanc de perle, arrosez légèrement avec du rouge végétal et quelques gouttes de parfums assortis ; enveloppez le sujet dans du velours et de la soie, et servez froid.

Pour finir (?), une série de photos de Polaire en gommeuse épileptique :

http://2.bp.blogspot.com/_2eWazr4uBa0/S8DHgtdhQBI/AAAAAAAADAU/vvJmNRDrzW8/s640/polaire_revue_panorama.jpg

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : Chanteuse : une gommeuse

Dans le Point d'aujourd'hui, un article qui parle d'un genre de music-hall un peu particulier pas encore évoqué dans ce fil : le pétomane.

Celui qui se fait appeler le Pétomane entame son récital par une cavalcade de prouts tous plus stupéfiants les uns que les autres. Interminables, trépidants, aigus, graves, écrasés, détonants, fringants, craintifs, colériques, conquérants, coulants, caquetants, il en a pour tous les goûts.

Chaque salve déclenche un mistral de rires. À s'en péter les boyaux. Son anus a également l'oreille musicienne, il joue La Marseillaise ou, plus tard, 'O Sole Mio en soufflant dans un ocarina par l'intermédiaire d'un tuyau. Lequel est également utilisé par Pujol pour souffler une chandelle à plusieurs mètres de distance ou encore pour fumer. Dans la salle, le public hurle à s'en faire exploser les côtes. Un journaliste écrit : "Il avait su attirer au Moulin Rouge, nez au vent et bouche bée, les foules idolâtres." Le prince de Galles, le roi des Belges, Léopold, et même Sigmund Freud font partie de ses plus fervents admirateurs.

Drôle d'époque la Belle Époque smile

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

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