katsoura a écrit:- De nombreux métiers ne trouvent pas leur équivalence au féminin.
Je crois qu'une bonne façon d'analyser ce problème serait, selon un protocole qui donne de bons résultats en linguistique, de commencer par établir une règle simple et d'examiner ensuite les raisons pour lesquelles certains noms ou classes de noms échappent à la règle. Je proposerais :
règle 1 : Les noms de professions, métiers, titres et fonctions sont masculins, le genre non marqué.
règle 2 : Quand il est nécessaire de pouvoir désigner l'épouse d'un titulaire masculin, un féminin est formé pour cet usage :
- la boulangère vend le pain que son mari a boulangé ;
- la colonelle, la duchesse accompagnent leur mari dans ses fonctions représentatives ;
- en Grèce et à Rome anciennes, l'épouse du roi avait des fonctions religieuses spécifiques, sur basileus on a formé basilina, sur rex, regina, sur imperator, imperatrix.
Examinons maintenant quelques exceptions.
Quand l'évolution de la société a permis à des femmes de porter un titre de plein droit, on a utilisé ce « nom d'épouse » pour les désigner : la reine Victoria, l'impératrice Catherine II.
Quand le titre ou la fonction est un ancien adjectif substantivé, on continue à l'accorder : régente, directrice, députée.
Les métiers ou activités qui étaient spécifiquement féminins portent des noms uniquement féminins, lavandière, sage-femme, ou à masculins peu usités, fileuse, brodeuse.
Les activités de loisirs de la noblesse (théorie médiévale de l'otium) pouvaient être des deux genres, lecteur, lectrice, chasseur, chasseuse ou chasseresse. Mais celles de la roture restent masculines, pêcheur [de poissons] n'a pas de féminins.
Les activités condamnées par l'église ont souvent des féminins, voleuse, actrice.
Même si le suffixe -teur (-tor en grec et en latin) n'est plus productif, on a toujours conscience qu'il est formateur de noms d'agents et qu'il possède un féminin historique, -trice. Dans ce cas, quand la base est toujours motivée, on a aisément des féminins, institutrice, formatrice quand le besoin s'en fait sentir. Mais la motivation reste essentielle : comme au- ne signifie plus rien, *autrice ne peut être formé alors que actrice est soutenu par agir, action, actif.
Ce n'est, bien sûr, qu'un petit aperçu de tout ce qu'on pourrait faire. L'essentiel est de bien percevoir que la langue est ici un témoin de l'histoire des sociétés et qu'il est toujours dangereux de vouloir manipuler l'histoire. On ne peux gommer le fait que notre passé était loin d'être clément avec les femmes et que forger le mot "auteure" n'y changera rien !
Les mots n'apparaissent dans une langue, par dérivation ou emprunt que quand ils correspondent à un besoin de communication. Aujourd'hui qu'il est admis que les femmes savent écrire, on voit mal les raisons de donner un féminin à "auteur" et, d'ailleurs, fort peu d'entre elles le revendiquent !
Cordialement,
Dominique
Il n'y a pas de honte à préférer le bonheur. (A. Camus)