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forum abclf » Réflexions linguistiques » L'erreur de Saussure !

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Messages [ 1 901 à 1 950 sur 4 117 ]

1 901 Dernière modification par vh (20-12-2018 21:48:46)

Re : L'erreur de Saussure !

angl. Brexit < angl. Britain (G.B.) + angl. exit (sortie) et suggère l'angl. break (rupture)

1 902

Re : L'erreur de Saussure !

Et espérons qu'il n'y aura jamais de Frexit !

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 903 Dernière modification par glop (20-12-2018 23:23:44)

Re : L'erreur de Saussure !

Cela occasionnerait des frictions et nous en ferions les frais!

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

1 904

Re : L'erreur de Saussure !

À mon avis, Frexit suggère plutôt fracture, en français et en anglais (cf. angl. fracking)

1 905

Re : L'erreur de Saussure !

glop a écrit:

Pour ma part, je n’ai pas lu Saussure et je n’ai jamais compris pourquoi il vous obsède à ce point. Ce n’est pas l’œuvre de Saussure qui m’a empêché d’être convaincu par votre théorie qui, loin d’être dénuée d’intérêt, se veut dirais-je "à tort", universelle.

Dans le mot (acronyme) "BREXIT" J’entends malgré moi le mot "break" et le mot "excitation" mais ça n’aurait peut-être pas été si l’Angleterre avait quitté l’union européennes dans la sérénité. Ces sensations verbales ne naissent-elles pas, au moins en partie, après que les mots se sont formés?


L'un des sens du codon ''br'' renvoie à la notion de fracture, de ligne brisée et le codon fr évoque aussi la fracture et surtout le schème de vague que l'on rencontre dans frissons, froid, frisette (minivague)...
Le ''Xit'' de Brexit ou Frexit indique un mouvement qui multiplie (la fracture).

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

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1 906

Re : L'erreur de Saussure !

vh a écrit:

À mon avis, Frexit suggère plutôt fracture, en français et en anglais (cf. angl. fracking)

Oui  mais  c'est le codon fr uniquement qui évoque cette notion de fracture.

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1 907

Re : L'erreur de Saussure !

Pour aller dans le sens de Glop, qui, (oh le pauvre!), ne savait pas ce que signifie "exit" lol  :
Lors d'une analyse de poème par exemple, on voit bien que selon le sens porté par le texte, tels retours de sons se rassemblent autour d'une image ou d'une impression qui peut changer parfois radicalement.
Difficile de trouver comme ça un exemple précis, mais j'y pense.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

1 908

Re : L'erreur de Saussure !

L'inconscient a une définition d'exit proche de celle de la conscience : exit = it - ex soit mouvement hors de.

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1 909

Re : L'erreur de Saussure !

Ex mouvement hors de depuis la langue latine, certes, mais qui ressent de nos jours hors de dans examen, exact, exécrer, exécuter, même si c'était limpide pour les Latins ? On peut, bien sûr, trouver des astuces pour les rattacher au concept de sortie, d'émergence, mais ce n'est pas le ressenti spontané.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

1 910

Re : L'erreur de Saussure !

Tous les codons de la langue de l'inconscient possèdent deux sens :  it  = mouvement/fixation et ex = hors de/notion de développement (avec cassure ?).   Ce deuxième sens reste à préciser.

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1 911 Dernière modification par vh (10-01-2019 00:56:45)

Re : L'erreur de Saussure !

Chrisor :
Trouvez-vous ces associations non onomatopéiques (ex. BL=lumière) dans les langues non indo-européennes ? Je n'ai rien vu de cela dans les langues non indo-européennes avec lesquelles j'ai été en contact (chinois, langues amérindiennes).

PS : Les trouvez-vous en hindi, pourtant indo-européen ?
http://www.indeartsetculture.fr/medias/ … ancais.pdf

1 912

Re : L'erreur de Saussure !

vh a écrit:

Chrisor :
Trouvez-vous ces associations non onomatopéiques (ex. BL=lumière) dans les langues non indo-européennes ? Je n'ai rien vu de cela dans les langues non indo-européennes avec lesquelles j'ai été en contact (chinois, langues amérindiennes).

PS : Les trouvez-vous en hindi, pourtant indo-européen ?
http://www.indeartsetculture.fr/medias/ … ancais.pdf

Je n'ai pas étudié ces langues.  Mais si bl =éblouissant/aveuglant, c'est probablement à partir de l'onomatopée blabla dont le sens est passé de l'audition à la vue par correspondance synesthésique.

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1 913 Dernière modification par chrisor (29-01-2019 00:54:37)

Re : L'erreur de Saussure !

Depuis plus de 5 ans je m'évertue ou plutôt me tue à tenter de dénoncer l'illusion de Saussure. En vain jusqu'alors ...

IL est temps de faire un point sur les arguments avancés. La linguistique n'est pas la seule science humaine de la fin du XIXe siècle qui repose sur des erreurs fondatrices. La psychanalyse, construite sur le mensonge freudien du mythe de la guérison d'Anna O. par la talking cure de Josef Breuer entre décembre 1880 et juin 1882, est basée sur l'interprétation subjective des analystes; elle est justement remise en cause et Michel Onfray avec une plume au vitriol dans Le crépuscule d'une idole dénonce sans nuances ou ambages les mystifications de Freud.

Ainsi deux sciences humaines importantes, la psychanalyse et la linguistique, reposent sur des théories plus que centenaires qui sont devenues des dogmes. Leur obsolescence, programmée comme l’évolution de toute science, s’accélère car elles sont fondées toutes les deux sur des contrevérités. Leurs pères fondateurs, Ferdinand de Saussure et Sigmund Freud sont contemporains (le premier est né le 6 mai 1856 et le second le 26 novembre 1857). Le début de leurs oeuvres fondatrices remonte à la dernière décennie avant 1900; leurs théories se fondent sur des principes opposés : d'un côté le déterminisme inconscient de nos actes et de l'autre l'arbitraire son/sens de notre langage.

Leurs théories véhiculent des contenus de pensée qui se sont fixés par répétition et se transmettent de manière de moins en moins consciente, tout à la fois collective et partagée, aboutissant, qu’on le veuille ou non, à notre vision culturelle actuelle du monde. Ces dogmes, qu’on les juge vrais ou pas, se sont infiltrés dans notre réservoir culturel où cohabitent certitudes populaires, habitudes intellectuelles, visions  stéréotypées du monde, représentations imaginaires du passé et de l’avenir.

Remettre en question ces formes d’emprise sur la pensée humaine relève du sacrilège pour la science officielle et ses défenseurs. Les réponses parfois agressives sur ce fil de discussion en témoignent. Mais faut-il prendre des pincettes quand il s’agit désormais de prendre le taureau par les cornes ! Le savoir de ces deux sciences humaines, collé à l’intérieur de notre cerveau, qui nous conditionne à penser et croire malgré nous, n’est pas disposé dans des tiroirs séparés car la psychanalyse comme la linguistique est affaire de langage.

Il ne s'agit pas  d’opposer la rigidité des idées reçues devenues des dogmes à une pensée libre et rationnelle. Il ne s’agit pas de faire table rase du passé car malgré leurs erreurs et illusions ces sciences en désuétude ont eu le mérite d’apporter des solutions provisoires à des questions jusque là insoupçonnées ou obscures. Mais en un siècle les progrès des neurosciences ont été fantastiques et nous ne pouvons plus nous contenter de réponses sans soutien biologique.

Lacan qui s'est efforcé de recentrer la psychanalyse sur le langage et plus spécialement sur le signifiant a fait un premier pas vers l'existence d'une langue de l'inconscient. Hélas sa culture linguistique saussurienne lui a interdit de franchir la barre entre signifiant et signifié le contraignant à des glissements sous la barre aboutissant à de nombreuses "lacaneries".

L'illusion saussurienne est liée à une conception livresque des mots et à une sorte de croyance inconsciente à leur génération spontanée dans les aires du langage de l'hémisphère dominant dans lesquelles ils auraient ''atterris'' par quelque opération  du Saint-Esprit, totalement coupés des autres zones cérébrales et du monde extralinguistique !  Son illusion repose sur son incompréhension de la nature profonde des mots dont la fonction n'est pas de définir mais de désigner. "Qu'est-ce que c'est ?" dit l'enfant en pointant du doigt l'objet référent. Comment le créateur de mots, l'onomaturge, placé devant un objet sans nom s'y est-il pris pour en inventer un ? Voilà la question première que Saussure aurait du se poser alors qu'il a éliminé les onomatopées de son étude du langage humain. Son Cours de linguistique générale n'aborde jamais cette première interrogation.   (à suivre)

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1 914

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Depuis plus de 5 ans je m'évertue ou plutôt me tue à tenter de dénoncer l'illusion de Saussure. En vain jusqu'alors ...

On ne va certainement pas vous en plaindre !

chrisor a écrit:

Comment le créateur de mots, l'onomaturge, placé devant un objet sans nom s'y est-il pris pour en inventer un ? Voilà la question première que Saussure aurait du se poser alors qu'il a éliminé les onomatopées de son étude du langage humain. Son Cours de linguistique générale n'aborde jamais cette première interrogation.

En effet, car c'eût été infliger à son entreprise une tare originelle en la pourvoyant dès le départ d'un caractère spéculatif. En posant un "onomaturge", sans doute délégué par le Verbe divin, et dont les mots oraux et écrits (puisque vous parlez constamment de "lettres") ont été sans doute pervertis par quelque péché de l'Homme (cf. la Tour de Babel), vous êtes en plein dans ce domaine spéculatif et il faut vous croire sur parole, comme un "gourou". Sans nier sans doute le problème de l'origine du langage, le linguiste ne s'intéresse qu'à ce qui peut être démontré avec une méthode de recherche rigoureuse, avec un matériau qu'on a sous les yeux.

Par contre, les analyses de Saussure, tout en étant fondamentales, se trouvent aujourd'hui dépassées dans le sens où une linguistique de l'énonciation et du discours, avec notamment la pragmatique, doit venir compléter son appréhension de la langue presque strictement limitée à l'énoncé. Mais comme ce n'est pas non plus ce que vous lui reprochez, je n'insiste pas. 

S'il a "éliminé" les onomatopées (pp. 101-102 de son Cours, que vous avez lu in extenso, j'espère), c'est parce qu'elles ne jouent qu'un rôle limité dans le système de la langue étudié dans sa dimension synchronique, qui est l'objet principal de la linguistique générale. Mais je crois à vrai dire que le linguiste n'a guère plus de choses à en tirer que le musicologue analysant les quelques mesures d'harmonie imitative dans la Symphonie pastorale...

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1 915 Dernière modification par chrisor (31-01-2019 14:11:15)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

En posant un "onomaturge", sans doute délégué par le Verbe divin, et dont les mots oraux et écrits (puisque vous parlez constamment de "lettres") ont été sans doute pervertis par quelque péché de l'Homme (cf. la Tour de Babel), vous êtes en plein dans ce domaine spéculatif etc....  C'eût été infliger à son entreprise une tare originelle en la pourvoyant dès le départ d'un caractère spéculatif

Mais la théorie du signe linguistique de Saussure est par définition spéculative. Il eut fallu qu'il la démontrât ! Son entreprise comporte une tare originelle ou un biais cognitif qui disqualifie totalement sa théorie. Devant trois mots : arbre, tree, Baum, notre cher Professeur raisonne et "résonne" faux. Comme ces 3 signifiants renvoyant à un signifié commun n'ont aucun groupe de phonèmes, ni même aucun phonème commun, il en déduit que le signe est conventionnel selon les langues et qu'entre signifié et signifiant le lien n'a aucune motivation, qu'il est arbitraire.  Une fois que vous dites cela vous n'avez plus rien à démontrer: c'est arbitraire, la belle affaire !

Comme Saussure, vous semblez croire encore à la génération spontanée des mots car vous vous interdisez de tenter de comprendre comment ils se sont formés comme la société française de linguistique d'il y a plus d'un siècle. Pourtant certains tel Meritt Rhulen  dans L'origine des langues se sont lancés vers cette recherche...  sans réel succès ... à cause de Saussure car le mot n'est pas la plus petite unité du langage, pas plus que le morphème, le radical ou la racine indo-européenne reconstituée. Dpnc inutile de rechercher des premiers mots primitifs reconstitués. Si vous admettez comme une vérité divine que les phonèmes ou les couples de phonèmes qui forment nos mots n'ont aucun sens, que son et sens sont indépendants, que la barre entre signifiant et signifié est infranchissable (ce que croyait encore Lacan d'où son fourvoiement), il est certain que vous resterez fermé à tout autre point de vue.

Vous semblez penser sans doute comme Saussure que les aires du langage de l'hémisphère dominant forment un pré carré qui ne communique ni avec le cerveau limbique (cerveau affectif), ni avec les aires sensorielles associatives corticales, ni avec l'autre hémisphère. Depuis 1900 nos connaissances en neurosciences ont quelque peu évolué et imaginer que les aires du langage sont indépendantes est devenu une hérésie histo-anatomique. Les onomatopées sont des mimes humains de bruits extérieurs ou intérieurs, des mimophones qui permettent d'incarner ces bruits du monde sans l'intervention d'aucun dieu. Et ce n'est pas parce que Saussure n'a rien compris à la nature et à la structure des onomatopées qu'il faut s'obstiner à demeurer dans l'ignorance et l'erreur !

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1 916 Dernière modification par vh (31-01-2019 15:18:22)

Re : L'erreur de Saussure !

Si le phénomène que décrit Chrisor avait,  pourquoi pas, des origines physiologiques essentiellement humaines, on le remarquerait hors des langues indo-européennes.

On remarquerait aussi sans doute ces sons dans les tentatives d'expression orale de personnes atteintes de troubles du language.

1 917

Re : L'erreur de Saussure !

vh a écrit:

Si le phénomène que décrit Chrisor avait,  pourquoi pas, des origines physiologiques essentiellement humaines, on le remarquerait hors des langues indo-européennes.

Comme les codons inconscients reposent essentiellement sur la géométrie et  l'émotion il est probable que dans le langues non indo-européennes qu'on trouve des similitudes. Mais je ne parle ni le chinois ni l'arabe.

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1 918 Dernière modification par vh (31-01-2019 15:35:29)

Re : L'erreur de Saussure !

Pas besoin de parler le chinois. Regardez dans les dictionnaires de chinois romanisé (transcription phonétique dite pinyin).

La transcription phonétique officielle pinyin est  celle de la région de Pékin et utilise l'aphabet latin. En gros, les lettres c[ts] x[ɕ], q[tɕ], u[ u], r[ʐ], z[tsɛ] et h[x]ne sont pas prononcées comme en francais. Les tons (représentés par les accents) sont probablement sans importance dans votre étude.


Exemple :
Vous dites que le son B-L est  associé à ce qui est lumineux (cf. blanc, bleu, éblouir, angl. blind...)

Cherchons le mot lumineux et ceux de sens proches.
http://www.hanzidico.com/dictionnaire-c … y=lumineux
Pour lumineux, je trouve une vingtaine de mots chinois, mais pas un seul avec le son B-L ou P-L (B et P sont  proches en chinois, cf. Beijin, Pékin)

Par contre, pour blanc, on trouve bái (prononcé comme baille)
http://www.hanzidico.com/dictionnaire-c … uery=blanc


https://fr.wikipedia.org/wiki/Hanyu_pinyin

1 919 Dernière modification par Lévine (31-01-2019 15:51:36)

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Mais la théorie du signe linguistique de Saussure est par définition spéculative. Il eut fallu qu'il la démontrât !
Son entreprise comporte une tare originelle ou un biais cognitif qui disqualifie totalement sa théorie. Devant trois mots : arbre, tree, Baum, notre cher Professeur raisonne et "résonne" faux. Comme ces 3 signifiants renvoyant à un signifié commun n'ont aucun groupe de phonèmes, ni même aucun phonème commun, il en déduit que le signe est conventionnel selon les langues et qu'entre signifié et signifiant le lien n'a aucune motivation, qu'il est arbitraire.  Une fois que vous dites cela vous n'avez plus rien à démontrer: c'est arbitraire, la belle affaire !

Eh bien oui, justement, en synchronie, ça ne se démontre pas, ça se constate !
Vous en voulez à Saussure parce qu'il se refuse à dire pourquoi c'est comme cela ; c'est bien pour cela que je vous ai parlé de cause première et de métaphysique dans un autre sujet.
A partir de là, vous allez pouvoir adresser à la linguistique un reproche qui ne sera plus une calomnie, celui de gratuité ou du moins d'être une entreprise désintéressée. Sans doute y a-t-il une part de vrai au départ, mais de nos jours, on ne conteste plus l'utilité de la linguistique. Benveniste, par exemple, a bien montré son importance en ethnographie et en anthropologie, notamment dans les relations entre langue et culture (je pense à sa célèbre étude sur les verbes avoir et être en français).

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1 920 Dernière modification par chrisor (31-01-2019 19:44:19)

Re : L'erreur de Saussure !

Je ne nie pas l'intérêt de la linguistique, je propose une autre linguistique !

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1 921 Dernière modification par chrisor (31-01-2019 19:48:01)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Eh bien oui, justement, en synchronie, ça ne se démontre pas, ça se constate !


Oui mais en synchronie on n'examine le langage qu'à un instant t. Si vous découvrez une météorite sur terre le constat de ses propriétés ne pourra pas vous faire deviner ni sa trajectoire ni le lieu de son ''départ''. Or le langage ne cesse d'évoluer et connaitre l'évolution diachronique permet de constater ce qui évolue dans le signifiant et dans le signifié. Cela permet de repérer les invariants notionnels de certaines séquences submorphémiques.

En outre la bévue de Saussure est de confondre les notions de définition et désignation. Arbre, Baum, tree sont des signifiants qui désignent le même référent pour lequel nous avons dans ces trois peuples des signifiés voisins;  ils ne renvoient pas à la définition de l'arbre en son entier mais ils désignent des caractéristiques différentes de ce référent. Même en synchronie Saussure se trompe. Les phonèmes et certains couples de phonèmes renvoient à des signifiés inconscients présents dans les onomatopées et les mots enfantins. Si on compare tree et tremble on CONSTATE une certaine analogie phonique et littérale, non ? Le néerlandais boom laisse entendre le bruit du Tannenbaum  qui chute (boum!). On pourrait dire que tree, Baum et arbre sont des sortes de synonymes qui qualifient le référent par des critères différents.

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1 922 Dernière modification par chrisor (02-02-2019 16:41:42)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Eh bien oui, justement, en synchronie, ça ne se démontre pas, ça se constate !


En synchronie on constate, si l'on consulte quelque dictionnaire, que la majorité des sens secondaires ou figuratifs d'un mot relève de la métonymie ou de la métaphore. Cette caractéristique consciente de désigner une partie pour le tout  est habituelle en métonymie  : bois (matière) pour bois (forêt) ou voile pour bateau.

Dans la métaphore le mot renvoie le plus souvent à une caractéristique analogique du mot cible. Ainsi quand on évoque par métaphore l'or du soir qui tombe on réalise un pléonasme inconscient puisque soir ( ir-or- s) désigne déjà la réflexion de cette lumière or en surface. Et si un sens métaphorique de blé désigne l'or par comparaison colorée consciente et par la notion de richesse de la possession d'une récolte, le codon bl qui initie le mot évoque déjà l'éblouissement. C'est toujours la loi d'une partie pour le tout et cette motivation systématique rend obsolète la théorie de Saussure  puisque signifiant et signifié ne sont pas du tout arbitraires d'une part et que le signe verbal n'est pas conventionnel puisqu'il renvoie à des caractéristiques du référent. L'erreur de Saussure se vérifie autant en synchronie qu'en diachronie.

Ce n'est pas parce nous avons appris et acquis des mots ''tout faits'', préfabriqués par nos ancêtres, que notre cerveau droit est incapable d'en mémoriser des unités inconscientes et de reconstruire un code de l'inconscient. Ce sont en premier dès le début du langage des séquences biphonémiques et bilittérales qui ont été refoulées lors de notre apprentissage de la langue maternelle orienté vers la syllabe ouverte. La fixation de l'attention consciente sur la syllabe ouverte réalise -  que vous le vouliez ou non - une mise en retrait de la syllabe dite fermée dans laquelle la voyelle est dite entravée. Au temps de Saussure on commençait à peine à connaître les aires de Broca et de Wernicke du langage oral, mais on ignorait le fonctionnement différent des deux hémisphères cérébraux. Il est temps que cette vision périmée des mots s'adapte à nos connaissances neuro-anatomiques. Nous ne sommes plus en 1900 !

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1 923 Dernière modification par chrisor (08-02-2019 09:45:25)

Re : L'erreur de Saussure !

Suite message du  28-01-2019

Quelques dogmes médicaux désuets


Durant des siècles la théorie des humeurs, par exemple, a régné sur la science occidentale en médecine, en biologie, en philosophie, et pourtant de nos jours elle a perdu toute valeur scientifique et est considérée comme erronée, voire farfelue. Son aberration n'est apparue que lorsque les progrès techniques ont permis le développement de la médecine, de la chimie et de la physique modernes, c'est-à-dire vers la fin de notre XVIII ème siècle. Même un savant comme Descartes croit encore à la bile et au phlegme, et cette théorie est évoquée comme une vérité évidente par Shakespeare. De nos jours notre langage courant en porte encore de multiples vestiges, et sans y réfléchir, nous employons des expressions issues de cette théorie : ne parlons-nous pas toujours de « rhume de cerveau » comme si l’écoulement provenait du cerveau selon la théorie explicative savante en vigueur jusqu'au XVIème siècle ! Il faudra que les anatomistes de la Renaissance montrent que l'os frontal n'avait pas d'ouverture au sommet des fosses nasales pour que l'on renonce à cette pathogénie, non facilement car quelques esprits obstinés ont encore soutenus l‘existence de « pores invisibles » !

Le terme « rhume », du grec rheuma, « écoulement », habite toujours le vocabulaire médical dans lequel il est encore question de « rhumatismes » même si nous savons que leurs douleurs ne sont pas dues à des écoulements d’humeurs, mais à des inflammations articulaires. Ces écoulements qui  sont indiqués par le suffixe d’origine grec ‘’rhée’’ (otorrhée, leucorrhée, diarrhée, pyorrhée…) caractérisent aussi les « catarrhes » (grec : katarrhooi, « écoulements vers le bas »), qui sont passés de mode et qu'on rencontrait chez les « cacochymes », vieillards atteints de fluxions de poitrine, puisque le mot est formé du grec kakos, « mauvais » et khuma, « chose qui se déverse ». Les deux principales humeurs, le phlegme et la bile survivent dans le phlegmon (le phlegme indique alors une accumulation de pus) et dans le redoutable choléra, mot issu du grec kholê ou kholos, « bile »ou dans la simple « colère », plus banale et en général moins meurtrière. Nos expressions familières baignent encore dans ces liquides corporels : être de « bonne » ou de « mauvaise humeur », « se faire de la bile » ou « tirer sa flemme », mot qui vient aussi de l'antique et vénérable phlegme, par l'intermédiaire de l'italien flemma, passé au genre féminin à cause de sa terminaison en -a, alors qu'en grec c'était un mot neutre.

La bile noire a débouché sur la mélancolie (en grec mélankholia, de mélaina kholê). Nos voisins anglais ont même trouvé le moyen d'appeler « humour » le tempérament de celui qui est doué d'un « phlegme » imperturbable, qui lui permet de regarder le monde avec une indifférence spirituelle nuancée de mépris. D’autres expressions désuètes étaient empruntées au latin, comme les « fluxions », les humeurs « peccantes », ou la « pituite », équivalent du phlegme. Pas facile de se débarrasser de ces vieilles notions explicatives admises à un certain moment de l’histoire humaine et dont les vestiges restent toujours ancrées dans notre inconscient langagier collectif.
On peut se demander pourquoi les humeurs, les liquides de l'organisme, ont paru si importantes pour expliquer le fonctionnement du corps humain, malade ou sain. Pourquoi pas le souffle, la respiration ? Le « pneuma » a bien lui aussi joué son rôle (symbole de vie, on lui a attribué des valeurs philosophiques et même théologiques), mais il faut reconnaître que ce qui caractérise la médecine européenne, et cela depuis la médecine grecque antique, ce sont les humeurs, et que le « pneuma » n'a jamais réussi à les supplanter, alors que dans les médecines anciennes de la Chine et de l’Inde et aussi dans celle de l'Egypte, c'était plutôt le souffle ou les souffles qui jouaient le rôle principal, car c'était le souffle vital qui imprimait au corps son mouvement et faisait circuler le sang, comme le vent pousse les nuages; il n'y a rien, dans les médecines chinoise, indienne ou égyptienne, qui corresponde à la bile et au phlegme des Grecs, quels que soient les efforts que certains chercheurs ont déployés pour essayer d'établir des correspondances entre ces diverses théories. Inversement, pour les Grecs, au moins au début, le sang ne joue pas un rôle particulier. Il irrigue le corps, simplement, comme des canaux dans un jardin, et ce n'est que tardivement qu'on lui attribuera un statut semblable aux autres humeurs, le rendant responsable, par ses altérations en quantité ou en qualité, de certaines maladies. Il est vrai que les Grecs n'ont découvert l'importance du pouls qu'au IIIème siècle avant J.C. dans les écoles médicales d'Alexandrie, tandis que les médecins chinois les avaient précédés dans cette science depuis un millénaire. Cette théorie des humeurs a servi longtemps de système d’explication bien qu’elle ne reposât point sur des faits expérimentaux vérifiés.

Au total la théorie des humeurs aura été admise par la commnauté scientifique et philosophique pendant plus 22 siècles, cher Lévine. Cette conception, devenue obsolète de nos jours et considérée désormais comme farfelue, illustre parfaitement une pensée de Paul Valéry: «  Ce qui a été cru par tous, et toujours, et partout, a toutes les chances d’être faux". Et c'est loin d'être la seule !

à suivre ...

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

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1 924 Dernière modification par Lévine (08-02-2019 14:11:28)

Re : L'erreur de Saussure !

Cher monsieur,

C’est au contraire Hippocrate (que vous avez oublié de nommer) et ses continuateurs, dont les textes forment le corpus hippocratique, qui ont combattu des idées reçues depuis des temps immémoriaux. Les présocratiques croyaient – sans le démontrer car à ces époques, le philosophe ne rendait pas compte de sa sagesse – que le monde était issu du λόγος (Héraclite), du nombre (Pythagore) de la matière (Démocrite), de je ne sais quoi encore... Hippocrate, à la fois médecin et philosophe, a voulu séparer le domaine de l’âme et du νοῦς, inconnaissables, de celui du corps, connaissable parce que relevant de la nature, certes d’origine divine (Hippocrate n’était pas matérialiste), mais se gouvernant par ses lois propres et susceptible de se « dérégler », ce qui montre bien que la divinité n’a pas part aux causes secondes, comme le montreront par la suite Aristote  et les philosophes médiévaux. Ce faisant, il a voulu séparer le domaine du mal, relevant des rapports entre l’Homme et la divinité, de celui de la maladie, d’origine physique, même dans le cas des maladies « sacrées », comme l’épilepsie. Pour moi, loin d’être un obscurantiste, même si ses théories physiologiques sont évidemment dépassées – mais que pouvait-on savoir du corps humain au Vème siècle avant J.-C. ?– , il est un des premiers à avoir fondé un humanisme authentique en donnant à l’Homme une possibilité de connaître sa nature et d'agir pour une part sur sa destinée, et en tentant de le débarrasser des pratiques magiques, ôtant par là-même au divin l’image de force malfaisante et injuste qu’on pouvait lui appliquer.
Quant à Saussure et à ses devanciers du XIXème siècle, il s’est inscrit en faux contre des conceptions mentalistes ou mimétiques en matière d’origine du langage dont l’antiquité est à peu près équivalente à celle que vous signalez pour Hippocrate par rapport à nous. S’il y en a bien un qui a fait tomber des idées reçues et a donné à la linguistique un statut vraiment scientifique, c’est bien lui, non ?
Mais votre démonstration a sa cohérence : en rejetant Hippocrate et Saussure, vous voulez nous faire retourner au temps des présocratiques, ôter sa liberté à l’Homme en lui donnant comme maîtres, non des philosophes ou des médecins, mais des vaticinateurs.

Je veux malgré tout croire en votre humanisme, d'autant que vous êtes médecin, et je vous salue cordialement.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 925 Dernière modification par chrisor (10-02-2019 12:14:08)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:


Quant à Saussure et à ses devanciers du XIXème siècle, il s’est inscrit en faux contre des conceptions mentalistes ou mimétiques en matière d’origine du langage dont l’antiquité est à peu près équivalente à celle que vous signalez pour Hippocrate par rapport à nous. S’il y en a bien un qui a fait tomber des idées reçues et a donné à la linguistique un statut vraiment scientifique, c’est bien lui, non ?
Mais votre démonstration a sa cohérence : en rejetant Hippocrate et Saussure, vous voulez nous faire retourner au temps des présocratiques, ôter sa liberté à l’Homme en lui donnant comme maîtres, non des philosophes ou des médecins, mais des vaticinateurs  .

Je ne rejette pas Hippocrate mais tous ceux qui l'ont suivi aveuglément pendant plus de 22 siècles pour sa théorie des humeurs. Comme vous le dites, je suis médecin et je veux au contraire plus d'humanisme tant en médecine qu'en linguistique (je vous inviterais bien à lire mes livres !).  Ce n'est pas parce que la théorie des humeurs est totalement désuète et sans fondement biologique actuel, que les théories ultérieures sont un retour en arrière pré-socratique ! La science évolue en permanence comme les langues humaines et accepter une théorie comme vraie pendant des siècles pour celle des humeurs et plus d'un siècle pour celle de l'arbitraire du signe sans preuves scientifiques n'est pas une marque d'humanisme éclairé mais plutôt aveuglé. A partir des cours de Saussure ses élèves qui ont écrit son Cours posthume ne sont pas à la base d'une linguistique scientifique humaniste, bien au contraire !  En posant le signe comme arbitraire et coupé du référent, ils nient l'homme et sa biologie. Pour moi la linguistique saussurienne désincarne le langage, le déshumanise et en fait une invention virtuelle factice. Eh bien non ! Les neurosciences commencent à démontrer que le langage humain est né à partir du mode de fonctionnement neuronal des gestes de la main, une main qui permet le pointer du doigt sur tel ou telle caractéristique du référent. Et parler de science pour une théorie de l'arbitraire n'a aucun fondement ! Définir le mot comme arbitraire c'est simplement masquer une profonde ignorance qui, je l'espère, ne doit pas être associée à l'humanisme !

Je vous serre cordialement la main...  en gardant la conviction que l'humain peut se libérer de ses erreurs !

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

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1 926 Dernière modification par chrisor (13-02-2019 01:21:43)

Re : L'erreur de Saussure !

Suite du message du 28 01 19 :   "Ce qui a été cru par tous, et toujours, et partout, a toutes les chances d’être faux"


La théorie de la génération spontanée:


    Bien d’autres certitudes médicales se sont maintenues durant des siècles et ont été défendues par des esprits brillants. Ainsi en est-il de la génération spontanée des organismes vivants. Cette idée d’Aristote, tel un serpent de mer qui a surnagé pendant deux millénaires, était une théorie supposant l’apparition, sans ascendants, de la vie à partir de la matière inanimée. On croyait que les asticots pouvaient naître d'un morceau de viande avariée, les moucherons d’une tranche de melon abandonnée ! Dans l'Organon, le philosophe grec fait mention de l'apparition spontanée de mites dans les lainages ou de souris dans les tas de vieux chiffons ! Les savants au cours des siècles et des siècles ajouteront foi à ce mythe et le renforceront de leur crédit intellectuel. C'est le cas de Descartes au XVIIe siècle et de Buffon au suivant qui se fera l'écho dans son « Histoire naturelle » d’observations microscopiques du biologiste anglais John Needham. Ce dernier aurait établi avec certitude la réalité de la génération spontanée de micro-organismes qu'on n'appelait pas encore des microbes. Cette croyance sera également celle, dans la première moitié du XIXe siècle du naturaliste Jean-Baptiste de Lamarck, persuadé que ce qu'ils nomment les « infusoires " (des eucaryotes  ciliés unicellulaires vivant dans les liquides) étaient issus de matière inanimée.

    Il faudra attendre les expériences de Louis Pasteur pour convaincre les éminents savants de l'Académie française des Sciences en décembre 1862 pour conclure officiellement à l'inexistence de la génération spontanée. Les expériences méticuleuses de Pasteur ont clairement établi qu’il existait en réalité des germes ou des œufs à l’origine des êtres vivants, apparus d’une matière soi-disant inanimée, réfutant définitivement cette théorie. Dans un milieu isolé et convenablement stérilisé, la vie n’apparaît pas spontanément. Cette remise en cause de la génération spontanée a permis le développement des mesures d’hygiène et d’asepsie contre le développement des maladies infectieuses dont le mode de transmission  a pu être appréhendé.
                         
    L’importance de la contagion dans la tuberculose qui fut responsable d'une peste blanche décimant les européens entre 1750 et 1950 permet de juger de l’importance de l’avancée scientifique que fut la découverte du bacille infectieux responsable par Koch en 1882. Jusqu'aux années 1950, les traitements antituberculeux furent lourds et souvent inefficaces : séjours sanatoriaux prolongés, chimiothérapie par sel d'or ou calcium parentéral, thoracoplastie, curage ganglionnaire, pneumothorax régulièrement entretenu (méthode de Forlanini), collapsothérapie extrapleurale, lobectomie, pneumonectomie ont constitué des armes lourdes d'une efficacité inconstante dans la lutte contre une maladie dont le pronostic restait très sévère. La lutte antituberculeuse va s'organiser avec l'utilisation de l'allergie à la tuberculine et la vaccination par le bacille de Calmette et Guérin (BCG). La prévention de la contamination familiale, l'amélioration des conditions de l'habitat, le dépistage radiologique après la seconde guerre mondiale, la mise en place de dispensaires de dépistage anti-tuberculeux et de services hospitaliers spécialisés vont commencer à faire régresser la pandémie.

    L’isolement du bacille de Koch permettra une nouvelle stratégie antibactérienne avec en 1944 la découverte par Waksmann, un immigré ukrainien aux USA, de la streptomycine, un premier antibiotique efficace qui lui vaudra le prix Nobel en 1952. C’est en janvier 1946 pour la première fois qu’une méningite tuberculeuse fut stoppée dans son évolution grâce à l’administration de la précieuse streptomycine américaine. Cette découverte mettait un premier coup d’arrêt à la maladie de Vienne, une peste blanche tuberculeuse qui ravageait l’Europe. Le placement des tuberculeux en sanatorium d’altitude fut un principe médical auquel ont obéi tous les médecins pendant un siècle jusque dans les années 1970, sans preuve scientifique. Il faudra attendre la dénonciation d’un jeune médecin américain combinée à l’efficacité de nouveaux traitements antibiotiques antituberculeux pour qu’on accepte le caractère irrationnel de ce principe thérapeutique qui aura eu cependant le mérite d’une certaine mise en quarantaine des malades.


à suivre...                                                              (les corrections sont les bienvenues)

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Re : L'erreur de Saussure !

Je ne sais pas ce que vous attendez comme corrections, mais vous sortez du domaine de mes compétences, et du cadre de ce forum !

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 928 Dernière modification par chrisor (15-02-2019 13:32:54)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Je ne sais pas ce que vous attendez comme corrections, mais vous sortez du domaine de mes compétences, et du cadre de ce forum !

En effet je suis sorti du domaine de la linguistique pour mettre en évidence combien les dogmes ont parfois la vie dure et cela même dans des domaines pour lesquels la vie humaine est en jeu.

J'avais démarré ce fil sur l'erreur de Saussure mais j'aurais du le nommer les erreurs de Saussure car nore professeur de sanskrit en a commis plusieurs sérieuses.

Començons par Le dogme linguistique de l’arbitraire des mots

   
    1. La théorie de l’arbitraire de Ferdinand de Saussure
   
    Les dogmes ont la vie dure et ne sont pas l’apanage de la médecine ou de la biologie. En linguistique le mot est formé d’une chaîne d'unités sonores qu'on appelle phonèmes dont l'ensemble porte le sens. Le phonème, plus petit segment phonique du langage articulé, est lui réputé être dépourvu de sens. Si l'on passe de papa à pépé, le /é/ ne semble pas lié à la notion de vieillesse (un éphèbe juvénile) et si l'on remplace é par i, pour faire pipi, ce dernier phonème n'est pas spécifique de la sphère urinaire (idée, rififi, illico, ouistiti, inouï), même s'il arrive que papi inonde son lit s’il est incontinent. Ce constat n’élimine pas la possibilité que ce phonème /i/ puisse évoquer quelque sens précis en particulier en fin de mot.

    Le mot, lui, est communément considéré comme la plus petite unité d’expression des langues. Il peut se segmenter en linguistique en morphème réalisant le plus petit élément significatif malgré son absence d'autonomie. Ainsi le mot ''marcheurs'' est composé de trois morphèmes: «march» (marche), «eur» (celui qui pratique) et «s» (marquant le pluriel). Le mot est appelé scientifiquement signe verbal, un signe que Ferdinand de Saussure définit comme une réalité psychique à deux faces : l'une étant le concept (signifié) et l'autre l’écho acoustique (signifiant) ou l’image graphique pour la lecture, tous les deux inséparables, mais coupés du référent.

    Saussure prend l'exemple d'une feuille de papier pour expliquer la dualité du signe verbal : la pensée est le recto et le son le verso. On ne pourrait pas découper le recto sans découper en même temps le verso. Le signifiant ne serait qu'un médiateur du signifié, que son plan d'expression et la signification serait l'acte qui unit signifiant et signifié dont le produit est le signe. La théorie de Saussure, élevée au rang de dogme grâce à l'aura d'un livre posthume édité par ses élèves, le Cours de linguistique générale, impose l’arbitraire du signe comme principe de la linguistique moderne. Il n’attribue de sens au mot qu’en termes de valeur discriminatoire par rapport aux autres signes de la langue (arbre/plante, animal/végétal). Ainsi le mot est pour lui l’unité indéfectible de deux éléments psychiques : en bas le signifiant, tel [aRbR(e)] et en haut le signifié, tel le concept d’arbre.

Écho acoustique ou image visuelle de caractères lus, le mot n'aurait pour la linguistique ''officielle'' aucun lien motivé ou naturel avec les caractéristiques du référent. Ainsi le mot français arbre associe la forme sonore /arbr/ au concept d'arbre avec des phonèmes qui n'auraient aucun lien avec le référent, l'arbre réel.

    Les trois signifiants arbre en français, Baum en allemand ou tree en anglais, sans phonème ni lettre en commun renverraient à un signifié similaire (le concept d’arbre) pour désigner le même référent. Les linguistes en déduisent que le signifiant est arbitraire et accepté par simple convention sociale tacite de chacun de ces peuples. À première vue les signifiants ''arbre'', ''tree'' et ''Baum'' dissemblables semblent plaider en effet pour l'arbitraire d'un signe avec un signifiant sans connivence avec le signifié. Son et sens seraient indépendants et rien dans la chaîne sonore ou graphique d’un mot ne pourrait évoquer le référent. Et ce signe à deux faces signifiant/signifié serait totalement coupé du référent avec lequel il n’aurait aucun lien.         


                      Un signe linguistique coupé de la réalité

                                     convention                                                                 arbitraire
                                                                                                   [aRbR(e)]                      concept d arbre
    Réalité                                                                                                     Cerveau Gauche
    référent                                           (coupé du signe)                Signifiant   <——————>    Signifié   
                                                                                                         signe verbal

Le constat de l’absence de similitude entre arbre, tree et Baum doit-il obligatoirement amener à en conclure que ces mots sont nés sans aucune motivation ?

La première erreur de Saussure concerne ce jugement a priori car le professeur de sanskrit n’a pas compris l’essence même du mot ! Dans son esprit de littéraire le mot serait un signe purement cérébral sans connexion avec la réalité du monde extra-linguistique. Personne ne peut imaginer que les quatre lettres de tree ou de Baum ou les cinq d’arbre puissent représenter toutes les caractéristiques d’un arbre. Ne comprenant pas  l’emploi de signifiants différents selon les langues pour désigner un référent identique ou similaire, il invoque une convention sociale des peuples qui les aurait acceptés tacitement ! Selon lui : « Au contraire de toutes les institutions qui « sont toutes fondées, à des degrés divers, sur les rapports naturels des choses », la langue est une construction parfaitement arbitraire amenant l’association d’une « idée quelconque avec une suite quelconque de sons ». Vollà sa seconde erreur grave car anti-biologique (d'où les exemples de dogmes non linguistiques).


à suivre ...

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Re : L'erreur de Saussure !

L'erreur d'une motivation relative

Dans l’hypothèse où le signifiant serait en relation avec l’objet référent extra-linguistique, comment  pourrait  être représenté cet objet ? Si l’on se réfère à la définition des dictionnaires un arbre en botanique est un végétal ligneux, de taille variable, dont le tronc se garnit de branches à une certaine hauteur qui elles-mêmes se divisent et se couvrent de feuilles caduques ou persistantes, dont les racines plongent dans la profondeur de la terre. Au total le mot arbre renvoie à une forêt d’autres mots : végétal, tronc, branche, rameau, tige, aubier, caduc, racine, écorce, liste à laquelle on pourrait ajouter : feuillage, verdure, chlorophylle, sève, fruits, fleurs, cime, frondaison, souche, pied, ombre, sylvestre, etc. Bref il est impossible qu’un mot formé de quelques phonèmes ou lettres puisse évoquer l’ensemble des caractéristiques du référent arbre.   

    Pourtant à ce champ sémantique commun, on peut adjoindre encore tous les noms d’arbres de notre environnement ou ceux plus exotiques par exemple africains qu’évoque Gide en 1927 dans Voyage au Congo : « Le directeur de ce jardin, présente à notre émerveillement les plus intéressants de ses élèves : cacaoyers, caféiers, arbres à pain, arbres à lait, arbres à bougies, arbres à pagnes, et cet étrange bananier de Madagascar, l'arbre du voyageur, dont les larges feuilles laissent sourdre, à la base de leur pétiole qu'un coup de canif a crevé, un verre d'eau pure pour le voyageur altéré ».
     
      Si l’on consulte un dictionnaire on ne peut que constater que la définition d’un mot renvoie à des dizaines de mots dans une suite sans fin. Il est impossible donc en quelques phonèmes ou lettre de définir le référent. Choisir la solution d’une convention arbitraire pour l’expliquer résulte d’un manque de réflexion. Dans la liste de arbres exotiques on se rend compte que la différenciation de désignations d’arbres se réalise par un seul élément : arbre à pain, à lait, à bougies, à pagnes. Par le même procédé on distingue l’arbre de Judée de l’arbre de Noël. Le français pour nommer les arbres fruitiers se contente le plus souvent de le faire à partir des fruits qu’ils portent : pommier, poirier, pêcher, prunier, mirabellier… La langue allemande parle d’Apfelbaum, de Birnbaum, de Pfirsichbaum

                   Référent                                                          signe verbal cérébral des linguistes

                                                                                     [arbre] signifiant                 (concept d'arbre)  signifié 
         monde extra-linguistique
   
   
         Dans la Genèse biblique on parle de l’Arbre de la Connaissance. Pour Saussure son fruit semble défendu. Pourtant n’est-il pas évident que pour désigner ces arbres il suffit de nommer leurs fruits. Au lieu d’imaginer un arbitraire relatif comme il en émet l'hypothèse erronée  n’est-il pas plus simple de penser que la terminaison -ier ou -er des arbres fruitiers français remplace le Baum allemand et désigne un concept plus général que le nom spécifique du fruit porté.

Pour comprendre la première erreur de Saussure il suffit de constater le nombre de synonymes pour définir une caractéristique d'un référent désigné par un substantif. Si l(on suit le raisonnement de Saussure on devrait penser que ces synonymes qui ne sont jamais de vrais synonymes appartiennent à des langues étrangères.

Il suffit de comparer les synonymes de petit pour se rendre compte que de nombreux adjectifs ne sont pas du tout permutables pour désigner la notion de petitesse : insignifiant faible médiocre    maigre pauvre mesquin mince modeste bas    réduit modique léger    court     infime minuscule négligeableminime étroit piètre dérisoire étriqué chétif ordinaire méchant limité humble exigu    délicat succinct    subalterne    simple nain malheureux imperceptible sommaire menu enfant avorton vil lilliputien jeune inférieur grêle gringalet gamin fin borné quelconque    mineur microscopique gosse banal svelte riquiqui    moindre mioche    mignon microbe    juste    joli délié anodin minus petiot rétréci subtil    ténu    infinitésimal gentil fils    bambin biquet bébé bénin crapoussin    mini    miniature moutard myrmidon môme nabot obscur portatif    puce pygmée marmouset    invisible gnome     animalcule bon sujet    bout d'homme    bref    coquet courtaud    criquet demi-portion    douillet extrait  écrasé....
Entre une petite fille et une fille bornée ou maigre la qualification n'est pas synonyme. Pourquoi. Parce ces adjectifs désignent un ou deux caractères différents du référent pour lesquels un concept variable de petitesse ou bassesse peut-être apprécié.

Et si les mots ne relevaient que de l'arbitraire on se demande bien pourquoi pour désigner les odeurs et les gouts, les locuteurs n'auraient pas inventés des mots. Or ce n'est pas le cas car ils se contentent de comparaisons : une odeur de café, un parfum vanillé,  un goût fruité... Les couleurs orange (dérive de celle du fruit), violet et rose (de la fleur), marron (du fruit du marronnier..), confirme une extension du lexique par comparaison de type analogique. Toujours pas d'arbitraire !

Notre professeur genevois est "à côté de la plaque" avec son arbitraire !

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1 930 Dernière modification par Lévine (15-02-2019 22:45:33)

Re : L'erreur de Saussure !

Point n'est besoin de si longues démonstrations...

Vous confondez phonologie et sémantique. Il faudrait être fou pour nier l'importance du sens dans la genèse des tropes ou dans la composition des mots. En tout cas, n'imputez pas cette position à Saussure, qui n'aborde ni la sémantique ni la psycholinguistique dans son cours, comme je vous l'ai déjà dit, justement pour éviter de tout confondre et de n'aboutir à rien.

Pour en revenir à l'un de vos précédents messages, on peut facilement voir qu'il n'existe aucun lien nécessaire entre les séquences /vwal/ d'une part,  /bato/ d'autre part, et les concepts qu'elles font naître dans notre esprit, pas plus qu'il n'existe de vocation, pour ces deux séquences, à désigner le même concept dans un contexte donné (je simplifie, car pour un vrai poète, une voile n'est justement pas un bateau, non plus qu'une colombe).

Ce toit tranquille où marchent des colombes
Entre les pins palpite, entre les tombes ;

Et du fait que le suffixe -ier sert à former des noms d'arbre, faut-il conclure que le bâtonnier produit des bâtons, le particulier des particules ?
Le suffixe -ier n'a pas vocation à avoir tel ou tel sens, mais il possède une fonction qu'il nous appartient de mettre en valeur en évitant de poser des a priori (même en recourant au latin). C'est le but de la méthode structurale, dont Saussure est un des pères.

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1 931 Dernière modification par chrisor (15-02-2019 22:49:09)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

...


1)  Pour en revenir à l'un de vos précédents messages, on peut facilement voir qu'il n'existe aucun lien nécessaire entre les séquences /vwal/ d'une part,  /bato/ d'autre part et les concepts qu'elles font naître dans notre esprit, pas plus qu'il n'existe de vocation, pour ces deux séquences, à désigner le même concept dans un contexte donné (je simplifie, car pour un vrai poète, une voile n'est justement pas un bateau, non plus qu'une colombe).


2)  Et du fait que le suffixe -ier sert à former des noms d'arbre, faut-il conclure que le bâtonnier produit des bâtons, le particulier des particules ?
Le suffixe -ier n'a pas vocation à avoir tel ou tel sens, mais il possède une fonction qu'il nous appartient de mettre en valeur en évitant de poser des a priori (même en recourant au latin). C'est le but de la méthode structurale, dont Saussure est un des pères.

1)  Voile et bateau : dans voile se trouve le codon il dont l'un des sens est le courant (Nil, fil de l'eau, pile électrique) et dans bateau l'initiale b évoque l'eau. Le signifiant voile est plus dynamique que le signifiant bateau. Mais désigner le bateau par la voile répond à une synecdoque qui dérive de la loi pars pro toto du cerveau droit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur

2) Votre suffixe -ier est formé de er et  de ie, deux  codons inconscients dont le premier marque la notion de domaine,
de classe et le second la notion de  propagation.

Sens des codons : er = notion de domaine, ère et notion de fermeture (ermite, hermétique, terme, enfer, verrou, barrière)
                            ie = propagation (épidémie, maladie, série) et de crainte (tyrannie, tricherie, avanie, agonie)

Pour le bâtonnier il y a certainement une crainte du bâton comme pour le barreau qui suggère une menace de ceux de la prison.


Tous les sons ont vocation à avoir du sens mais pas n'importe quel découpage du signifiant.

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Re : L'erreur de Saussure !

Vous avez trouvé la clé qui ouvre toutes les serrures, tant mieux pour vous.

Une seule remarque, déjà faite d'ailleurs au cours de ces 78 pages (heureusement, le papier numérique ne coûte pas cher) : dans "voile", le codon "il" est purement graphique, n'est-ce pas ?
Pour ce qui est de notre langue, ce sont donc des clercs qui ont imaginé le système que vous défendez. Quels clercs ? Pour qui ? A quelle époque ? Et comment s'est opérée la transmission de leur savoir dans la conscience linguistique d'un peuple presque totalement analphabète ? Comment se fait-il enfin qu'il y ait eu tant de variantes orthographiques ou phonétiques à une même époque, pour un même dialecte ? Pour voile, on trouve aussi vel, plus rarement certes, mais on le trouve. Comment l'expliquez-vous ?
Et n'oubliez pas que jusqu'à la Renaissance carolingienne, l'écrit, chez nous, c'est le latin !

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 933 Dernière modification par chrisor (16-02-2019 09:59:21)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Vous avez trouvé la clé qui ouvre toutes les serrures, tant mieux pour vous.

Une seule remarque... dans "voile", le codon "il" est purement graphique, n'est-ce pas ?

En effet le codon "il" est graphique, mais pas totalement puisque phonétiquement il est inclut dans une diphtongue : voile se prononce /vwal/. Selon le dictionnaire ce mot est issu du latin  *vela « voile », plur. neutre pris pour un subst. fém. sing. de velum « voile de navire »  On rencontre en a. fr. le subst. masc. veil, issu directement du lat. velum: déb. xiies. Il semble donc que l'on soit passé de vela à veil puis voile . La notion de courant (d'air) apparait donc déjà en vieux français mais était absente du latin.

Cette diphtongue ''oi'' (/wa/) est une voyelle qui, au cours de son émission subit une variation de timbre et qui peut être considérée comme la fusion en une seule syllabe de deux éléments vocaliques perçus comme différents, successifs, et dont l'un est plus fermé que l'autre. L'orthographe a tenu compte de la prononciation qui devait initialement marquer davantage la séparation des deux phonèmes. En outre notre perception consciente est largement devancée par notre perception inconsciente (subliminale) qui détecte en premier la séparation des deux phonèmes.


Vous demandez comment expliquer ''vel'' ? Manifestement ce mot dérive du latin. Le codon ''el‘' évoque l'élévation ou l'enlèvement  (déplacement d'un objet à partir d'un endroit de départ).

Un autre mot comporte cette séquence ''oil'', le poil issu du latin pilus, filament, au figuré en français : « un rien ». Cette fois le français a graphiquement ajouté un o dans ce mot formant le codon ol qui évoque la section ronde du poil. Quant au p il marque soit la petitesse soit le dégoût dans ce mot et le codon il le lien, l'attachement.

Lévine a écrit:

Pour ce qui est de notre langue, ce sont donc des clercs qui ont imaginé le système que vous défendez. Quels clercs ? Pour qui ? A quelle époque ? Et comment s'est opérée la transmission de leur savoir dans la conscience linguistique d'un peuple presque totalement analphabète ? Comment se fait-il enfin qu'il y ait eu tant de variantes orthographiques ou phonétiques à une même époque, pour un même dialecte ? Pour voile, on trouve aussi vel, plus rarement certes, mais on le trouve. Comment l'expliquez-vous ?
Et n'oubliez pas que jusqu'à la Renaissance carolingienne, l'écrit, chez nous, c'est le latin !

Beaucoup de questions qui incitent à noircir du papier web ! Les clercs n'ont rien ''imaginé'' et je pense que le imprimeurs ont joué aussi un rôle dans l'orthographe. Les clercs parlaient latin comme vous l'écrivez et ce latin a influencé leur inconscient comme leur conscience pour la transcription graphique et la bonne orthographe. Quant à l'évolution ultérieure des mots ce sont les locuteurs dominants qui ont favorisé leur évolution et surtout leur sélection. En fonction des prononciations les transcriptions graphiques se sont adaptées et dans un dialecte des variations existent selon de petites zones géographiques. L'accent change parfois beaucoup selon le lieu dans un seul département et davantage dans une région où l'on parlait le même dialecte.
Pour chaque nouveau mot c’est un seul locuteur qui l’a sans doute ‘’inventé » et il a été repris par un groupe pour finalement s’imposer. J’ai connu une ‘’bonne soeur’’ jardinière qui avait inventé sa propre langue avec des centaines de mots qui lui étaient propres. La langue comme l’agriculture a fait du remembrement et de l’unification avec perte de la diversité. Les patois et l’argot ont été des bancs d’essai avant une sélection plus nationale et un choix des dominants.

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1 934 Dernière modification par Lévine (16-02-2019 11:02:44)

Re : L'erreur de Saussure !

Oh là ! Il y a malentendu : je ne vous demandais pas une leçon de phonétique historique ! Toute modestie mise à part, c'est plutôt à moi de vous la donner vu que vous ne savez les choses qu'à moitié.
Un seul exemple : voile et poil ont subi exactement le même traitement phonétique vu que le e long de vela et le i bref de pilum se prononçaient de la même façon dès le bas-latin, c'est à dire é fermé. Point n'est besoin de faire intervenir une "rotondité" quelconque !!!

Désolé, mais dans la conscience du locuteur médiéval, il n'y a plus de i dans voile depuis le XIIIème siècle. Ce sont les clercs qui pont maintenu ce i, par tradition, après l'évolution ei>oi>oè>wè>wa

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

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Re : L'erreur de Saussure !

Quel courage Lévine !

Ce fil, malgré tout, me donne terriblement envie de parler avec vous de phonétique historique... j'adorerais maitriser la phonétique historique française autant que l'espagnole !

1 936 Dernière modification par chrisor (16-02-2019 15:05:35)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Oh là ! Il y a malentendu : je ne vous demandais pas une leçon de phonétique historique ! Toute modestie mise à part, c'est plutôt à moi de vous la donner vu que vous ne savez les choses qu'à moitié.
Un seul exemple : voile et poil ont subi exactement le même traitement phonétique vu que le e long de vela et le i bref de pilum se prononçaient de la même façon dès le bas-latin, c'est à dire é fermé. Point n'est besoin de faire intervenir une "rotondité" quelconque !!!

Désolé, mais dans la conscience du locuteur médiéval, il n'y a plus de i dans voile depuis le XIIIème siècle. Ce sont les clercs qui pont maintenu ce i, par tradition, après l'évolution ei>oi>oè>wè>wa

Vos remarques ne changent rien à mes propos (voile ne se prononce pas comme vela). Vous pensez que l'évolution phonétique est indépendante de l'évolution sémantique. Vous croyez comme Saussure que le mot renvoie à l'ensemble des caractéristiques du référent alors qu'il ne désigne qu'une ou deux de ses caractéristiques. En évoluant phonétiquement le mot modifie sa sémantique. Mais comme vous ne voulez pas accepter la possibilité de la loi pars pro toto du cerveau droit (pourtant démontrée), il n'est pas possible d'avancer. Le signifiant "arbor'' latin ne désigne pas les mêmes caractéristiques du référent "arbre" français même si ce dernier en dérive phonétiquement. L'inconscient français ne désigne pas le référent "arbre" par exactement les mêmes caractéristiques de ce référent  sauf pour la séquence "arb" (ab-ar).

La linguistique ne peut pas faire fi de la biologie cérébrale, bien sommaire du temps de Saussure. Depuis le Cours, le fonctionnement différent des deux hémisphères cérébraux a été démontré, la plasticité neuronale vérifiée, le rôle capital du système limbique (hippocampe + amygdales cérébrales) ou cerveau affectif commun à tous les mammifères analysé dans la mémoire et l'émotion (cf l'erreur de Descartes de Damasio), etc. Vouloir faire de la langue un système abiologique, isolé dans les aires corticales du langage à G, est un rêve de littéraire ou de religieux.

L'hypothèse de Saussure fonctionne sur la génération spontanée ou l'insémination artificielle d'une langue transmise toute faite comme si le cerveau de l'élève ne traitait pas autrement le signifiant avec son cerveau droit. Les mots ne sont pas nés dans le cerveau G sans liaison avec le cerveau D, le cerveau limbique et les aires sensorielles associatives. Penser autrement est une absurdité biologique. Mais Saussure a l'âme religieuse, son signe verbal s'installe dans le cerveau par l'opération du Saint esprit ! : « Il faudrait chercher sur quoi se fonde la division en mots, car le mot, malgré la difficulté à le définir, est une unité qui s'impose à l'esprit, quelque chose de central dans le mécanisme de la langue".  Scientifique ce propos, cher Lévine ?

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1 937

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Quel courage Lévine !

Ce fil, malgré tout, me donne terriblement envie de parler avec vous de phonétique historique... j'adorerais maitriser la phonétique historique française autant que l'espagnole !

Eh bien libre à nous de créer un petit sujet franco-espagnol sur des points intéressants de l'histoire de ces deux langues. Je pense que cela pourrait intéresser les visiteurs d'ABC, même chrisor ! lol
Par contre, il faudrait ne dire que l'essentiel à chaque fois, de peur de lasser les lecteurs.

Qu'en pensez-vous ?

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 938

Re : L'erreur de Saussure !

Personnellement, je lis toujours avec plaisir tout ce qui concerne la phonétique historique, alors vous aurez au moins un lecteur.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

1 939 Dernière modification par chrisor (16-02-2019 16:06:45)

Re : L'erreur de Saussure !

Voici un exemple d'évolution phonétique qui montre l'influence du peuple sur le choix du code.

Siffler est issu du latin vulgaire sifilare, doublet osco-ombrien du classique sibilare « siffler »  (« siffler quelqu'un) ». D'apr. Nonius (IV ème s.), sibilare aurait été en usage dans les classes cultivées, tandis que les classes populaires, subissant l'empreinte des patois ruraux, auraient utilisé sifilare. Les médecins ont repris le ''terme noble'' pour former le terme savant ''sibilants'' pour indiquer la perception de ''sifflements'' lors de l'auscultation pulmonaire.
Passer de ib à if est pour vous une question phonétique alors que pour moi cette évolution phonétique  n'existe que parce qu'elle est soutenue par une évolution sémantique : on passe de ib = haut perché, élevé à if  = aigu.  Ces deux codons sont parfois synonymes  mais ce n'est pas la règle générale. Dans sibilare il faut entendre un courant (d'air) haut perché  et dans sifilare un courant d'air aigu ou pointu. Le concept acoustique de sonorité aigüe passe par synesthésie analogique dans le domaine visuel pour désigner la caractéristique pointue de nombreux objets (un angle vif, canif, récif), voire d'éléments anatomiques : pif, tarbouif, tif.

Tous les codons de l'inconscient sont nés ainsi soit à partir d'analogie entre l'audition et la vue (par exemple éclat sonore à éclat lumineux, soit directement par mime d'un bruit issu du référent émetteur.

La phonétique historique se contentera d'être descriptive, car elle ne s'appuie pas sur la sémantique (inconsciente).

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1 940

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Voici un exemple d'évolution phonétique qui montre l'influence du peuple sur le choix du code.

Siffler est issu du latin vulgaire sifilare, doublet osco-ombrien du classique sibilare « siffler »  (« siffler quelqu'un) ». D'apr. Nonius (IV ème s.), sibilare aurait été en usage dans les classes cultivées, tandis que les classes populaires, subissant l'empreinte des patois ruraux, auraient utilisé sifilare. [...]

Jusque là, c'est juste. Le "patois rural" en question appartient aux parlers sabelliques, qui relèvent, comme le latin, du domaine italique.

chrisor a écrit:

Passer de ib à if est pour vous une question phonétique alors que pour moi cette évolution phonétique  n'existe que parce qu'elle est soutenue par une évolution sémantique : on passe de ib = haut perché, élevé à if  = aigu. Ces deux codons sont parfois synonymes  mais ce n'est pas la règle générale. Dans sibilare il faut entendre un courant (d'air) haut perché  et dans sifilare un courant d'air aigu ou pointu.

C'est forcément une question de phonétique... lol
Est-elle motivée ? Peut-être, vu le caractère du mot. On n'exclut jamais rien en phonétique historique, mais on n'affirme pas non plus à la légère.
Or je remarque que le mot buffle, emprunté à l'italien bufalo, est lui aussi issu d'un étymon bufalu, attesté, correspondant au latin classique bubalus.
S'agit-il ici de se rapprocher du beuglement du buffle ?
Vous voyez que ce n'est pas si simple.

chrisor a écrit:

La phonétique historique se contentera d'être descriptive, car elle ne s'appuie pas sur la sémantique (inconsciente).

Elle ne prétend pas à plus. Si, en fait, mais pas dans le sens où vous l'entendez.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 941

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Eh bien libre à nous de créer un petit sujet franco-espagnol sur des points intéressants de l'histoire de ces deux langues. Je pense que cela pourrait intéresser les visiteurs d'ABC, même chrisor ! lol
Par contre, il faudrait ne dire que l'essentiel à chaque fois, de peur de lasser les lecteurs.

Qu'en pensez-vous ?

J'en pense que c'est une excellente idée ! Et que si d'autres membres du forum s'y connaissent (peu importe la langue), ce serait encore plus intéressant !

chrisor a écrit:

Voici un exemple d'évolution phonétique qui montre l'influence du peuple sur le choix du code.

Siffler est issu du latin vulgaire sifilare, doublet osco-ombrien du classique sibilare « siffler »  (« siffler quelqu'un) ». D'apr. Nonius (IV ème s.), sibilare aurait été en usage dans les classes cultivées, tandis que les classes populaires, subissant l'empreinte des patois ruraux, auraient utilisé sifilare. [...]

Des changements phonétiques peuvent être motivés, oui, pourquoi pas.
En revanche, si pour vous tout changement phonétique est couplé à un changement sémantique, il va falloir réussir à expliquer tous les changements phonétiques systématiques (ou presque) qu'on retrouve dans des mots qui n'ont rien à voir les uns avec les autres.
Dans votre exemple de "siffler", vous omettez de parler de la perte du /i/ (prétonique). Comment vous expliquez cette perte ? Quelle est la perte ou le gain en sémantique ? Et surtout, pouvez-vous rapprocher cela de toutes les syncopes vocaliques pré ou post-toniques ?
Prenons l'espagnol par exemple. "sibilare" a donné "silbar". Point commun avec le français : chute de la voyelle prétonique.
Différence avec le français : on part bien du mot "sibilare" mais il s'est produit une métathèse (inversion des deux phonèmes /l/ et /b/). Vous y verrez une "volonté" plus ou moins consciente de changer le sens du mot, mais il est plus probable que la métathèse soit simplement due à la "volonté" plus ou moins consciente d'adapter le mot au schéma syllabique et à des enchainements de phonèmes présents dans la langue.

1 942 Dernière modification par Lévine (16-02-2019 21:21:05)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:
Lévine a écrit:

Eh bien libre à nous de créer un petit sujet franco-espagnol sur des points intéressants de l'histoire de ces deux langues. Je pense que cela pourrait intéresser les visiteurs d'ABC, même chrisor ! lol
Par contre, il faudrait ne dire que l'essentiel à chaque fois, de peur de lasser les lecteurs.

Qu'en pensez-vous ?

J'en pense que c'est une excellente idée ! Et que si d'autres membres du forum s'y connaissent (peu importe la langue), ce serait encore plus intéressant !

On essaiera, je crois que j'ai déjà un sujet dans ce qui suit !

oliglesias a écrit:

Différence avec le français : on part bien du mot "sibilare" mais il s'est produit une métathèse (inversion des deux phonèmes /l/ et /b/). Vous y verrez une "volonté" plus ou moins consciente de changer le sens du mot, mais il est plus probable que la métathèse soit simplement due à la "volonté" plus ou moins consciente d'adapter le mot au schéma syllabique et à des enchainements de phonèmes présents dans la langue.

C'est ce qui se passe aussi en français avec les séquences consonne + r, et même -r + consonne + r (marbre, par ex.)
Dans de nombreux mots apparaît un -r "parasite" comme dans ordre < ordinem, tertre < termitem, dartre < *derbitam, chanvre < *cannapum, trésor < t(h)esaurum, etc.
Souvent, c'est la présence d'un autre -r qui a joué, mais pas toujours.

Voilà un bon sujet de comparaison, s'il y a d'autres cas que celui que vous citez pour l'espagnol.
Vous pourrez initier le fil, si vous voulez, libre à vous de choisir ce sujet ou un autre, évidemment.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 943 Dernière modification par chrisor (17-02-2019 12:01:37)

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Voici un exemple d'évolution phonétique qui montre l'influence du peuple sur le choix du code.

Siffler est issu du latin vulgaire sifilare, doublet osco-ombrien du classique sibilare « siffler »  (« siffler quelqu'un) ». D'apr. Nonius (IV ème s.), sibilare aurait été en usage dans les classes cultivées, tandis que les classes populaires, subissant l'empreinte des patois ruraux, auraient utilisé sifilare. [...]

oliglesias a écrit:

Des changements phonétiques peuvent être motivés, oui, pourquoi pas.


Dans votre exemple :"siffler", vous omettez de parler de la perte du /i/ (prétonique). Comment vous expliquez cette perte ? Quelle est la perte ou le gain en sémantique ? Et surtout, pouvez-vous rapprocher cela de toutes les syncopes vocaliques pré ou post-toniques ?
Prenons l'espagnol par exemple. "sibilare" a donné "silbar". Point commun avec le français : chute de la voyelle prétonique.
Différence avec le français : on part bien du mot "sibilare" mais il s'est produit une métathèse (inversion des deux phonèmes /l/ et /b/). Vous y verrez une "volonté" plus ou moins consciente de changer le sens du mot, mais il est plus probable que la métathèse soit simplement due à la "volonté" plus ou moins consciente d'adapter le mot au schéma syllabique et à des enchainements de phonèmes présents dans la langue.

La métathèse hispanique est intéressante : "sibilare" a donné "silbar". Pour la langue de l'inconscient qui se lit de la droite vers la gauche, sibilare associe il-ib-s  et silbar associe ib-il-s  : évoquant pour le premier un courant (d'air) élevé (hauteur du son) et pour le second un élevé courant d'air, des versions quasi-identiques, qui confirment mon mode de lecture des suites de consonnes.

oliglesias a écrit:

Dans votre exemple : "siffler", vous omettez de parler de la perte du /i/ (prétonique). Comment vous expliquez cette perte ? Quelle est la perte ou le gain en sémantique ?

En passant de sibilare à siffler le /i/ prétonique du latin a été ''soufflé'' comme vous l'indiquez. Cette perte n'a pu se réaliser qu'avec le phonème /f/ car l'un des sens de /fl/ évoque le flux (d'air). Entre le courant d'air et le flux d'air reconnaissez que la différence est faible. Cela n'aurait pas pu se produire avec la consonne /b/ car les deux sens de /bl /: éblouissement/aveuglement sont incompatibles avec un sifflement sauf s'il est admiratif et ''ciblé'' !

Cette chute de la voyelle prétonique doit-elle être imputée sur le plan phonétique à la loi d'économie vocale ?


Les changements phonétiques sont possibles si les modifications sont compatibles avec les caractéristiques du référent évoquées par les nouvelles séquences signifiantes.

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1 944 Dernière modification par chrisor (28-03-2019 13:57:57)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit :

chrisor a écrit:

Voici un exemple d'évolution phonétique qui montre l'influence du peuple sur le choix du code.

Siffler est issu du latin vulgaire sifilare, doublet osco-ombrien du classique sibilare « siffler »  (« siffler quelqu'un) ». D'apr. Nonius (IV ème s.), sibilare aurait été en usage dans les classes cultivées, tandis que les classes populaires, subissant l'empreinte des patois ruraux, auraient utilisé sifilare. [...]

oliglesias a écrit:

Des changements phonétiques peuvent être motivés, oui, pourquoi pas.
En revanche, si pour vous tout changement phonétique est couplé à un changement sémantique, il va falloir réussir à expliquer tous les changements phonétiques systématiques (ou presque) qu'on retrouve dans des mots qui n'ont rien à voir les uns avec les autres.

Dans votre exemple de "siffler", vous omettez de parler de la perte du /i/ (prétonique). Comment vous expliquez cette perte ? Quelle est la perte ou le gain en sémantique ? Et surtout, pouvez-vous rapprocher cela de toutes les syncopes vocaliques pré ou post-toniques ?
Prenons l'espagnol par exemple. "sibilare" a donné "silbar". Point commun avec le français : chute de la voyelle prétonique.
Différence avec le français : on part bien du mot "sibilare" mais il s'est produit une métathèse (inversion des deux phonèmes /l/ et /b/). Vous y verrez une "volonté" plus ou moins consciente de changer le sens du mot, mais il est plus probable que la métathèse soit simplement due à la "volonté" plus ou moins consciente d'adapter le mot au schéma syllabique et à des enchainements de phonèmes présents dans la langue.


Pardon  pour cette réponse tardive et merci pour votre réponse que je pourrai donner comme exemple pour expliquer la lecture des suites de consonnes dans la langue de l'inconscient.

Pour cette langue inconsciente sibilare se transcrit  ar-il-ib-. L'espagnol sllbar se transcrit ar-ib- il- s c'est à dire avec les mêmes codons linguistiques inconscients pour lesquels se produit juste une inversion de l'ordre entre il et ib. J'ai déjà à plusieurs reprises expliqué que la suite V-C1-C2 devait se lire  VC2-VC1. Vous apportez donc de l'eau à mon moulin. Le changement phonétique par chute de la voyelle pré ou post tonique ne change pas le sens du mot.

Depuis le début de ce fil ma principale divergence avec vous concerne toujours la conception que vous avez des mots. Vous écrivez dans ce dernier message : "il va falloir réussir à expliquer tous les changements phonétiques systématiques (ou presque) qu'on retrouve dans des mots qui n'ont rien à voir les uns avec les autres". 

Je ne sais comment m'y prendre pour que vous puissiez imaginer une autre conception des mots que celle de Saussure qui les considère comme les plus petites unités significatives d'expression de notre langue qui seraient arbitraires et conventionnelles  . Cela n'est vrai qu'en apparence et il faut accepter d'oublier cette formulation qui vous enferme. Selon ma théorie, que des milliers d'exemples corroborent, les mots sont des sortes de rébus littéraux qui désignent le référent par un ou deux critères saillants, qui en font non une peinture comme l'affirme Crayle de Platon mais une caricature. Ce rébus est une sorte de phrase et ce n'est pas parce qu'un codon identique existe dans les mots qu'ils sont synonymes ! si vous introduisez le mot ''pied'' dans des phrases, pourquoi voulez-vous à tout prix qu'elles aient le même sens ? Non, ces phrases parlent de pied en exprimant des idées qui peuvent être totalement différentes, comme par exemple tous les mots avec ''bl'' en français parlent d'une caractéristique éblouissante ou aveuglante du référent.

C'est justement la difficulté que j'ai rencontrée lorsque j'ai du établir le PGCDS (plus grand commun diviseur sémantique) d'un corpus de mots comportant le même codon : cl renvoie soit à la notion de fermeture soit à la notion de bruit retentissant. Parmi les centaines de mots français comportant ce codon cl la majorité ne sont pas des synonymes : clore n'est pas réclamer ni exclure ni éclore ni faire un miracle. Mais conclure, cloîtrer, claustrer, clôturer, mettre sous cloche, créer un clan, un club, une classe peuvent avoir des acceptions synonymes dans certains contextes.


quant aux 2 codons if de siffler et ib de sibilare ils peuvent  être ses "symphonèmes" ou "symphonies"dans ces mots; En effet le codon if évoque pour l'un de ses deux sens la notion de pointu, aigu et le codon ib celui d'élevé dans toutes ses acceptions dont la hauteur du son. Les médecins entendent encore grâce à Laennec les sibilants expiratoires de l'asthmatique qui sont des sifflements provoqués par la contraction des bronchioles.

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1 945

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor, je voudrais savoir si vous avez une théorie concernant le genre des noms, pour le moins arbitraire si l'on sort de la catégorie des animés (et encore).

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1 946

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

chrisor, je voudrais savoir si vous avez une théorie concernant le genre des noms, pour le moins arbitraire si l'on sort de la catégorie des animés (et encore).


J'avoue n'avoir jamais réfléchi à cette question dans le cadre de la motivation des mots.

J'ai trouvé sur le web un article sur le genre des noms à référent non animé

1. Généralités
Dans le cas des noms désignant des non animés, le genre est arbitraire. La forme finale du nom permet dans certains cas de déduire le genre, mais le plus souvent, la seule solution pour connaitre le genre d’un nom est d’apprendre le genre par cœur — ou de consulter un dictionnaire.

2. Suffixes indiquant presque toujours un nom masculin
-age    un voyage, le ramassage (en général dérivés verbaux), le ménage
Exceptions: la nage, une page, une image, une plage, une cage, la rage
-al    le métal, le canal, le mal
-ard    un retard, un pétard, un batard
-au, -eau    un bureau, un noyau, un maquereau, un château
-et    un paquet, un billet
-ent    l’accident, le talent. Exceptions: la dent, la gent
consonne + in    le coussin, le cristallin. Exception: la fin
-ou    un clou, un trou, un cou
-isme    le tourisme, l’impressionnisme, le socialisme
-ment    le mouvement, un complément, le parlement, le classement, le développement
-oir    un abattoir, un lavoir, un rasoir, le soir, un loir
-ot    un complot, un matelot, le trot, le tarot, le rot, le pot

3. Suffixes indiquant presque toujours un nom féminin
-ade    une promenade, une salade, une rasade
-aison    une maison, la salaison, une saison, cette raison
-ée    une journée, la levée, la cuillerée, la maisonnée, la dictée, la veillée, une panacée.

-ence, -ance    la conséquence, l’importance
-esse    la paresse, la jeunesse
-ette    l’assiette, la raquette
-ie    la psychologie, la furie, une partie
-tié    l’amitié, la moitié, la pitié
-tion, -sion    une station, une émission, la condition, une solution, sa décision
-ude    l’habitude, la quiétude, la mansuétude
-ure    la peinture, l’ouverture, la confiture, la couture
En dehors de ces suffixes, il en existe évidemment d'autres, mais que ne se répartissent pas par genre de façon nette (par exemple mots en -oire: une nageoire, un accessoire, une armoire, un laboratoire, une histoire, un directoire etc.).
4. Noms en -ée masculins
Les noms terminés en -ée sont normalement du féminin, mais un certain nombre de noms d’origine grecque en -ée sont masculins. Les trois noms les plus fréquents sont:
le lycée, le musée, le trophée

Autres mots, moins fréquents:
le coryphée, le caducée, le gynécée, l’Elysée



Comme le mot est construit par l'inconscient de la droite vers la gauche avec la notion la plus générale d'abord et en dernier la caractéristique spécifique, il semble que le genre de la notion générale pourrait donner le genre du nom ?


Comme le codon final porte deux sens possibles, le genre peut varier malgré l'homonymie.  A priori il semble qu'un certain arbitraire existe mais je vais devoir analyser les codons et peut-être trouver un synonyme adapté au genre pour chacun d'entre eux  ?

L'exemple du suffixe -ée : ée = multitude/ écoulement  pose déjà problème d'autant que certains mots peuvent correspondre aux deux sens : la marée (écoulement) ou la marée humaine (multitude). Les mots d'origine grecque : rhinorrhée, diarrhée, otorrhée marquent un écoulement et sont du genre féminin, comme des mots avec la notion de multitude tels une armée de, une flopée.

Au lieu d'écoulement il faudrait employer le mot affluence qui peut posséder ces deux sens., ce qui ne permet pas de comprendre le genre de lycée ou musée !  Le genre des mots d'origine latine ou grecque est-il toujours respecté dans les mots français qui en sont issus?  Quant au neutre ?

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1 947 Dernière modification par Lévine (08-04-2019 20:30:23)

Re : L'erreur de Saussure !

Merci de ce tableau, mais je savais tout cela. Je voulais simplement savoir si vous aviez une idée sur l'origine de la différenciation du genre des noms.

Bien sûr, comme vous pouvez vous en douter, marée n'a rien à voir historiquement avec diarrhée.

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1 948 Dernière modification par chrisor (13-04-2019 09:21:22)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Je voulais simplement savoir si vous aviez une idée sur l'origine de la différenciation du genre des noms.

Bien sûr, comme vous pouvez vous en douter, marée n'a rien à voir historiquement avec diarrhée.

C'est justement cela que je nie indirectement. La séquence ''ée'' de marée et diarrhée renvoie au même schème dynamique d'écoulement même si le premier mot dérive du latin et le second du grec et qu'ils n'ont bien sûr pour l'ensemble du sens de leur chaîne sonore aucun lien diachronique ou synchronique. Mais comme je le répète les mots sont déjà de courtes phrases chargées par un ou deux éléments saillants de caricaturer le référent. Or le codon linguistique inconscient du français qui évoque, soit l'écoulement soit la multitude, est inséré dans les mots pour indiquer cette notion qu'elle traduise l'écoulement intestinal répété r(r) d'une hostilité (h) ou celui d'une onde aquatique (m) menaçante ou prééminente (ar).

C'est justement cette motivation de certaines unités du signifiant que vous ne semblez pas pouvoir concevoir ou admettre. Peut-être le saisissez vous mieux dans diarrhée et giclée étymologiquement tout aussi différents ?  Si vous acceptez d'entendre l'hypothèse que tous les mots sont motivés et sont une peinture caricaturale du référent qu'ils désignent, vous devriez commencer par vous rapprocher de Cratyle dont l'analyse était seulement intuitive et approximative. Le nom même de Saussure m'amène à le concevoir comme un assassin du Savoir des langues dont il a réduit les unités significatives d'expressions à des pions préfabriqués dont l'origine et la construction n'auraient aucun intérêt pour comprendre une langue. Son système est fermé sur lui-même et coupé  de toute réalité biologique, encore admissible à son époque mais désormais inconcevable !

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1 949

Re : L'erreur de Saussure !

Mais c'est à cause de leur sens que diarrhée et giclée évoquent un écoulement :

diarrhée < διάρροια "flux de ventre", de διαρρεῖν "couler à travers" ou "couler de part et d'autre"
giclée < ?

Au fait, une dictée, une gelée, une curée, ça ne coule guère...

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1 950

Re : L'erreur de Saussure !

Denrée dragée apogée durée mariée musée lycée raclée chaussée vallée araignée.

Ma première impression est qu'il n'évoquent aucun écoulement.
Cependant, je peux m'adonner à un petit jeu :
Je passe sur  "mariée" parce que c'est, à l'origine, un participe passé. Heureusement parce que ...
La denrée étant à l'origine une marchandise, ne dit-on pas "écouler de la marchandise" ?
Le sucre de la dragée coulait bien, au départ, pour enrober l'amande...
Je passe sur "durée" qui évidemment évoque l'écoulement du temps.
Le lycée, quant à lui, laisse couler le flot des lycéens, à certaines heures, et ne les retient que pour mieux les laisser déborder de ses portes.
La raclée est un déferlement de coups, certes. La chaussée ressemble à un cours d'eau. La vallée en abrite un. Quant à l'araignée, j'ai beau me creuser la cervelle... peut-être sa toile rappelle-t-elle les ronds qu'on fait dans l'eau ?
Ne voyez pas ici, un persiflage, mais bien plutôt un petit exercice essayant de montrer qu'on peut faire dire tout ce qu'on veut à tout.
On peut même essayer avec "apogée", terme qui ne s'applique au sens propre qu'à la lune, car qui dit lune dit... marées...

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

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