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Le forum d'ABC de la langue française

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Messages [ 51 à 67 sur 67 ]

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Re : Ecorche veau

À qui le dites-vous (rires).
(une conséquence des lois anti-tabac, c'est certain).

Gardons donc votre audacieuse hypothèse sous le coude, et gardons des munitions pour d'autres séances de tir au canard : si elle n'est pas pas certaine c'est cependant une bonne idée de pousser voir dans de nouvelles directions si le mot «écorche-veau» ne pourrait pas désigner autre chose qu'un instrument de boucherie.

Re : Ecorche veau

Sage conseil GB Administrateur car la mouche des fleurets semble s'user et je vous fiche mon billet qu'il va se trouver sans tarder quelque candidat pour la prendre !
Dans le strict respect du règlement du forum continuons donc , mais sans abus, d'user, à l'occasion,  d'un peu d'humour et d'un peu de trombines. Non, Ptit Prof , il n'y a pas de mal à çà.
Quant à «dégénérer» je posais la question de la conjugaison avec "être" ou "avoir" car le TLFI prend un exemple d'utilisation avec "de" chez A. FRANCE. «le prince Adelestan n'était point dégénéré de ses ancêtres» .
«n'était point» aïe ! la réponse à ma question  n'est sans doute  pas si évidente ... et je m'ai peut-être pas trompé big_smile ... en français ! sad

53 Dernière modification par regina (31-01-2008 16:01:13)

Re : Ecorche veau

Retour à l'écorche-veau, roi de la fête smile

J'ai pris la peine d'éplucher quelques inventaires mobiliers de maisons fortes ou de seigneuries , datant du XVI ème ou du XVIIème, histoire de se représenter un peu mieux, les conditions de vie de ces familles nobles, mais peu argentées, somme toute.
Ces inventaires sont accessibles en ligne et plusieurs concernent le Dauphiné( il y a même un inventaire détaillé des biens mobiliers du Château de Sassenage, au début 17ème) mais le niveau de vie y était plus élevé( baronnie).
Justement, ce qui frappe, c'est que même pour  une baronnie, près d'un siècle plus tard, l'inventaire montre une relative pauvreté mobilière.
Dans ces maisons fortes , à l'époque qui nous intéresse , on trouve dans une chambre de vie ( chambre haute) une ou deux   garde-robes , quelques  lits , des coffres ( ouverts ou fermés selon ce qu'on y serrait) ,table, chaise , maie et huche , des  ustensiles  de cuisine et divers objets d'utilité élémentaire . C'est à peu près tout.

Deux remarques, après lecture :
- Les notaires procédaient avec méthode au milieu de ce bric-à-brac: les objets ne sont pas cités dans les inventaires en fonction de leur proximité géographique au sein d'une pièce , mais selon l'usage.
Les lits, châlits, matelas, literie d'une part, les ustensiles de cuisine de l'autre.
Savoir dans quel ordre l'écorche-veau est cité dans l'inventaire, donnerait une indication. Nous saurions peut-être dans quelle catégorie le notaire classait l'objet.

- S'agissant de familles au final peu riches , on peut constater que, comme toujours, le système D fonctionnait. Puisqu'il n'y avait pas toujours l'argent disponible pour renouveler le mobilier ( les qualificatifs usés, méchants reviennent très souvent), il fallait être ingénieux  . Certains notaires scrupuleux ou méticuleux donnent des renseignements précis sur ces détournements d'usage :
par exemple, j'ai trouvé un saloir transformé en lavoir.

A partir de là, on peut imaginer que dans cette maison forte, on avait acquis ou récupéré un véritable écorchoir , dont on voulait se servir pour autre chose: y découper la viande , dépiauter lapin et gibier, écailler du poisson, y laisser lever la pâte, s'en servir comme charnier ( y laisser la viande) , ou cent autres activités possibles.
Quant aux noms des ustensiles, ils étaient, à ce que j'ai vu,  terre à terre : il y a de fortes chances que  l'écorche-veau, au départ  portait le nom de sa fonction.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

Re : Ecorche veau

En réponse au questionnement que depuis quelques temps je partage avec plusieurs d’entre vous, je reçois une lettre à l’ancienne (stylo plume et papier quadrillé) de l’une des mémoires vivantes du village où se trouve la maison forte qui autrefois abrita de notre écorche-veau. Voici en substance les précisions qu’apporte cet érudit passionné d’histoire locale.
Au fil des temps, chaque mot est susceptible de connaître diverses évolutions phonétiques et sémantiques totalement indépendantes de son origine (étymologie). Il convient donc de bien distinguer ce qui relève de l’étymologie et ce qui relève du sens. Si l’on s’en tient à l’étymologie, « escorchevel » provient très clairement :
-    du latin « ex-corticare », verbe composé du nom « cortex » (la peau, l’écorce) et de la préposition ex (à partir de…) qui signifie « enlever la peu, l’écorce ». On trouve ce verbe dans les histoires naturelles de Pline et, plus tard, dans saint Augustin à propos des martyrs auxquels on arrachait la peau. Au moyen âge, on rencontre le verbe « escorcier » : enlever le peau, l’écorce,
-    et du latin « vitellis » (veau) qui aboutit phonétiquement à veel, « vel » en ancien français (XIème, XIIème) et que l’on retrouve aujourd’hui dans vélin, vélage.
S’agissant maintenant du sens, il est difficile de comprendre pourquoi on a donné à « escorchevel » le sens de vent violent. Mais c’est un fait incontestable : les dictionnaires et la littérature sont là pour l’attester. En revanche - et même si les dictionnaires sont muets sur ce point - le sens qui doit être attribué au mot « écorche-veau » dans l’inventaire de 1640 est manifestement le sens porté par l’étymologie. A une époque où l’on est habitué à représenter la réalité par une description aussi concrète que possible (les hameaux sont souvent identifiés par des caractéristiques naturelles facilement repérables, les terriers ou parcellaires sont en quelque sorte des « cadastres écrits »), le notaire a probablement jugé que ce mot avait le grand avantage de bien dire ce qu’il  voulait dire... Et qui sait, peut-être a-t-il ce jour-là rédigé le seul et unique document qui fait apparaître le mot « écorche-veau » ?
Le terme « étou » quant à lui est issu d’une vieille racine germanique « stub… » qui signifie fauteuil, siège. Beaucoup moins précis.
Je vais guetter le facteur demain…
Cordialement.

55 Dernière modification par Bookish Prat (01-02-2008 08:01:46)

Re : Ecorche veau

...et on s'étonnera de retrouver, vers 2310, sur un inventaire notarial rédigé il y a trois siècles, dans une drôle de langue, probablement dérivée du grec et du latin, un item inconnu nommé : «écorche-prof».

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

Re : Ecorche veau

Je fais suite au message de Regina. Dans la pièce de l’écorche-veau se trouvent 25 items. Les deux premiers sont des lits de noyer avec ciel, tapisseries, crépines, frangeons et garnitures d’usage (coytre, matelas, traversier…). Viennent ensuite une table avec ses bancs (3), un chère à bras et dossier (4) une banque de noyer fermant à clé et contenant les papiers de la maison forte (5), un cabinet de noyer dont l’un des tiroirs renferme 6 cuillères d’argent (6), un écorche veau garni de ses sangles tout neuf (7). Le reste se compose pour l’essentiel de chaises, d’accessoires de cheminée, d’ustensiles de cuisine. On peut penser - pure hypothèse - que l’écorche-veau fait la transition entre les meubles « de valeur » (parmi lesquels la chaise réservée au seigneur) et les ustensiles d’usage courant.
Cordialement.

Re : Ecorche veau

Bonjour les d'jeunes.
Dictionnaire de 2310 :« ECORCHE-PROF : terme issu d'une légende du début du 2ème millénaire où la fée  «Matermisecordie» maintenait sur l'écorchoir d'un fakir, dont les pointes (de l'écorchoir !) avaient été remplacées par des smileys (du nom latin :sybillinus crobardus) , un gentil prof qui avait voulu passer pour un méchant.
Finalement la fée et le pseudo -méchant se réconcilièrent mais on n'a jamais su s'ils eurent moult progéniture.
C'est par dérision que le terme signifie aujourd'hui "Douce France ", nom d'une province ancienne de l'ancienne Europe qu'on pourra apercevoir par le hublot du spoutnik quand le nuage atomique sera dissipé».

Merci Bookish . Rien de mieux qu'un sourire indulgent pour détendre l'atmosphère ... j'ai dit atmosphère ?

Delphinal . Pas de doute écorcheveau = courchevel . Pourquoi le nom d'un vent ? y aurait-il eu un arbre ou une plantation dont le nom fût semblable par étymologie au bébé de la vache et qui aurait pu se trouver dépouillé par la tempête ? Est-ce une piste  ?
Quant à l'engin, j'en tiens pour mon écorchoir.

58

Re : Ecorche veau

Delphinal a écrit:

un écorche veau garni de ses sangles tout neuf (7)

Autant il est peu probable, comme le faisait remarquer Delphinal (# 32), qu'on écorchât les veaux (ou toute autre marmaille à l'exclusion des enfants destinés à la consommation immédiate et sur place) dans une chambre, autant un début de réponse à cette énigme nous est peut-être fourni avec la mention « tout neuf » : il n'a jamais servi ! Comme le signale Regina (# 54), les notaires n'étaient pas avares de détail.

    J'avance donc une hypothèse : cet écorche-veau n'était pas dans la pièce où l'on s'en sert habituellement, il y était entreposé, soit provisoirement et faute d'avoir un meilleur endroit, soit dans l'attente de l'inventaire notarié.

    Plausible ou fantaisiste ?

elle est pas belle, la vie ?

Re : Ecorche veau

C'est plausible, Piotr.  Les notaires s'appliquaient, chaque fois qu'il le  jugeaient utile, à préciser l'état de l'objet par des expressions estimatives conventionnelles telles que "fort bon", "fort usé",  "mi neuf" sans oublier "vieux", adjectif dépréciateur de la valeur marchande . On peut supposer que si l'écorche-veau est "tout neuf", c'est qu'il n'a jamais servi (#18 ). Et s'il n'a jamais servi, rien n'indique qu'il se trouve dans le lieu précis de son utilisation future. Peut-être effectivement est-il simplement entreposé là en a
Cordialement.

60

Re : Ecorche veau

Oups ! pardon : je n'étais pas remonté assez haut (# 18) dans le fil ...

elle est pas belle, la vie ?

Re : Ecorche veau

Encore un message parti sur une configuration de frappe que je n'arrive pas à identifier ! Mille excuses... L'écorche-veau était peut-être, comme le suggère Piotr, entreposé là en attendant de rejoindre sa destination finale. Et sans doute lui accordait-on une certaine attention puisqu'il est dans la pièce où sont rassemblés les objets "de valeur", notamment les papiers de la maison forte.
Cordialement.

62

Re : Ecorche veau

Pour en revenir au sujet, l'inventaire du notaire me rappelle furieusement cette scène de l'Avare :

LA FLÈCHE.- Ce n'est plus qu'un petit article.

Des quinze mille francs qu'on demande, le prêteur ne pourra compter en argent que douze mille livres; et pour les mille écus restants *, il faudra que l'emprunteur prenne les hardes, nippes, et bijoux, dont s'ensuit le mémoire, et que ledit prêteur a mis, de bonne foi, au plus modique prix qu'il lui a été possible.

CLÉANTE.- Que veut dire cela?

LA FLÈCHE.- Écoutez le mémoire.

Premièrement, un lit de quatre pieds, à bandes de points de Hongrie, appliquées fort proprement sur un drap de couleur d'olive; avec six chaises, et la courte-pointe de même; le tout bien conditionné, et doublé d'un petit taffetas changeant rouge et bleu.

Plus, un pavillon à queue* , d'une bonne serge d'Aumale rose-sèche; avec le mollet * et les franges de soie.

CLÉANTE.- Que veut-il que je fasse de cela?

LA FLÈCHE.- Attendez.

Plus, une tenture de tapisserie, des amours de Gombaut, et de Macée *. Plus, une grande table de bois de noyer, à douze colonnes, ou piliers tournés, qui se tire par les deux bouts, et garnie par le dessous de ses six escabelles.

CLÉANTE.- Qu'ai-je affaire, morbleu...

LA FLÈCHE.- Donnez-vous patience.

Plus, trois gros mousquets tout garnis de nacre de perles, avec les trois fourchettes assortissantes *.

Plus, un fourneau de brique, avec deux cornues, et trois récipients, fort utiles à ceux qui sont curieux de distiller.

CLÉANTE.- J'enrage.

LA FLÈCHE.- Doucement.

Plus, un luth de Bologne, garni de toutes ses cordes, ou peu s'en faut.

Plus, un trou-madame, et un damier, avec un jeu de l'oie renouvelé des Grecs, fort propres à passer le temps lorsque l'on n'a que faire.

Plus, une peau d'un lézard, de trois pieds et demi, remplie de foin; curiosité agréable, pour pendre au plancher d'une chambre.

Le tout, ci-dessus mentionné, valant loyalement plus de quatre mille cinq cents livres, et rabaissé à la valeur de mille écus, par la discrétion du prêteur.

Il n'y manque que l'écorche-veau !

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Re : Ecorche veau

Alors ce facteur , quelles nouvelles ? smile

Le terme « étou »  quant à lui est issu d’une vieille racine germanique « stub… » qui signifie fauteuil, siège. Beaucoup moins précis.

C'est un peu plus compliqué. Le terme étou ou estou aurait d'après  Littré  la même racine germanique que étal, racine qu'on retrouve dans  le mot français stalle.

La racine en ancien haut-allemand était: st(h)a :  indiquait l'idée de position ( et d'abord la position verticale) .

A partir de là , se sont formés des mots tels que Stall ( qui désignait un lieu clos où le bétail se tient debout) . Le mot étable a le même sens mais serait passé par le latin.

Un étal ou estal , c'était d'abord un lieu couvert  pour exposer des marchandises :

Place située à couvert où l'on exposait les marchandises à vendre dans les marchés publics (cf. FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p. 12).

TLFi

et aussi une table qu'on dressait :

Table mobile ou non (sur tréteaux ou charrette), souvent protégée par un auvent, et servant à exposer les marchandises au marché.

TLFi

On retrouve ce sens dans la citation de Littré extraite de la Chanson de Roland. ( XI ème siècle):

Nous remaindron en l'estal [debout] en la place. - Pour vostre amour ici prendrai estal [position], Ch. de Rol. CLVII.

Alors, le rapport avec la chaise? en allemand Stuhl . Il y en a un, c'est vrai.

D'après Grimm , ce mot viendrait aussi de la racine st(h)a. Toujours l'idée de position, d'un objet qu'on pose.  En russe , le mot ( stol) ???? désigne une table .

Ppar contre, Stub semble avoir  eu  une autre signification( souche d'arbre) .

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

Re : Ecorche veau

Eh bien Regina, cette fois j'attends le facteur pour, si vous le permettez, faire suivre votre analyse du mot "étou" à mon correspondant sans ordinateur. Une chose est sûre : il nous en fait voir du pays cet écorche-veau !

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Re : Ecorche veau

Bien sûr, delphinal smile . L'explication de votre correspondant sera d'ailleurs , peut-être plus pertinente que la mienne ,car je n'ai  pas d'analyse personnelle : je consulte les dictionnaires français et allemands dont je peux disposer ( pour l'étymologie de la langue allemande Grimm reste une référence). Ensuite je compare  et constate parfois que les linguistes d'un pays à l'autre n'ont pas non plus la même interprétation pour un même mot.

Possible que  votre ami érudit ait des sources plus actualisées. mais je crois quand même que stub n'est pas à l'origine de la chaise: Stuhl.
Hier, j'ai cité l'ancien mot stub( souche d'un arbre, ce qui reste lorsqu'on a coupé le tronc) , mais il y aussi un autre stub ou stup qui a donné le mot actuel Stube ( chambre), au départ avec l'idée de chauffer à la vapeur ( étuve).  Là , à l'époque de Grimm , certains linguistes faisaient dériver ce mot du latin stupa, d'autres y voyaient une racine germanique.

Voyons ce que dira votre ami. smile

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

Re : Ecorche veau

Retour sur les ondes… Regina, mon correspondant a été impressionné par votre analyse du mot « étou » et il la juge parfaitement acceptable. Dès lors, poursuivant le raisonnement, il remarque que la notion de position verticale étymologiquement associée à ce mot pourrait orienter vers des dispositifs munis de crochets de suspension plutôt que vers une table. Spéculation séduisante mais qui présente l'inconvénient de nous renvoyer au tableau de Rembrandt, c'est-à-dire au point de départ - ou presque...
Cordialement.

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Re : Ecorche veau

Bonsoir ,

Dites merci de ma part à votre correspondant pour ses compliments smile

Au demeurant, je ne crois pas, que l'étymologie de l' étou puisse influer sur votre écorche-veau.
Si vous pensez que l'objet évoqué par le notaire correspond bien à celui représenté sur la gravure et la photo de Gouingouin , alors il s'agissait d'un étou, estou, écorchain , d'une sorte de table donc.

L'étymon  germanique s(h)ta remonte à l'an pèbre  et l'étou ne se transforme pas pour autant en jambier wink  Sinon nous risquerions de voir les bovins dans les étables et stabulations entrer en lévitation  , pattes en l'air pour retrouver le sens ancien. big_smile   laissons, je crois, l'écorche-veau reposer de pied ferme sur le plancher ... des vaches.

D'ailleurs, la racine s(h)ta indiquait la verticalité mais surtout la position ( être posé) , ce qui implique un contact avec le sol ou une surface.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

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