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forum abclf » Pratiques linguistiques » Les savants et la science

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Messages [ 47 ]

Sujet : Les savants et la science

Une digression naissante commençait à enfler sur le fil "Paris-Briquette", où elle n'avait rien à voir ; j'a préféré en faire un nouveau sujet. Voici les deux dernières interventions sur le mot savant.

Bookish Prat a écrit:
Pierre Enckell a écrit:

Encore un emploi péjoratif de savant : seuls les ignorants auraient donc raison ?

L'adjectif savant peut être utilisé avec une note de légère moquerie envers  la manière pontifiante qu'ont certains  savants  de dispenser leur savoir (et parfois leurs erreurs) et sans que cela signifie que«seuls les ignorants ont raison» big_smile

P'tit prof a écrit:

Je plussoie : les mots ne sont pas des objets que l'on range sagement sur les étagères, par ordre alphabétique. Leur habitat naturel est la phrase, où ils se placent selon leurs affinités, et  leur place dans la phrase fait sens.
Autrement dit, pas plus qu'un grand homme n'est un homme grand, pas plus de savantes considérations et de savants lexicographes ne sont des considérations savantes et des lexicographes savants.
L'adjectif postposé a le sens propre : un homme grand, c'est un homme dont la taille est supérieure à la moyenne.
L'adjectif antéposé a le sens métaphorique : un grand homme, c'est un personnage qui a marqué son temps (le cumul  est possible : voir Pierre le Grand ou le général de Gaulle, mais pas obligatoire, voir Napoléon Ir).
Dans le cas de l'adjectif savant, antéposé il prend une nuance ironique, soulignant précisément qu'il n'y a là aucune science véritable. C'est un hommage rendu à la connaissance et à ses serviteurs dévoués. (On notera que je n'ai pas écrit dévoués serviteurs...)

Re : Les savants et la science

L'autre jour déjà, Naïf a reproché à P'tit Prof son usage péjoratif du mot savant. Voici que PP insiste. Son analyse des emplois antéposé et postposé est plutôt contredite par le TLF :
http://www.cnrtl.fr/definition/savant
lequel donne pourtant, sans en signaler l'ironie, un emploi caractéristique par Georges Sorel.

Oui ; mais je ne sais si Sorel est une référence recommandable. Il se la joue, comme on dit, en paysan du Danube : Haha, les soi-disants experts n'y connaissent rien ! Cette moquerie du "gros bon sens" à l'égard de la connaissance fine est indigne et déplorable.  Elle est généralement utilisée par les populistes, les poujadistes, les chauffeurs de taxi, et ceux qui préconisent "y a qu'à" comme solution à tous les problèmes. Nous ne devrions pas, sur ce forum surtout, montrer un tel mépris envers des gens qui tâchent honnêtement d'en savoir plus.

Dans l'intervention qui a fait démarrer cette digression, Bookish Prat se moque méchamment de l'ignorance des "savants" du Petit Robert, et leur oppose un autre dictionnaire. Je n'ai pas la compétence nécessaire pour trancher la question de l'étymologie de rupin ; mais Bookish Prat ne l'a certainement pas non plus.  Il se permet pourtant de juger, et avec brutalité. Et P'tit Prof le défend ! Une savante intervention égalerait des propos ridiculement pédants !  Un savant ouvrage serait du papier perdu ! Les mots ont quand même un sens, non ?

3 Dernière modification par Naïf (06-05-2010 01:15:21)

Re : Les savants et la science

Peut-être faut-il distinguer entre le fait de société (les ricanements visant les hommes et femmes de science et leurs façons de procéder), et la donnée linguistique (l'emploi ironique de savant, adjectif ou substantif).

- Le fait de société est inscrit sur les bulletins de salaire (en France, au moins): à degré d'excellence comparable, il vaut mieux être chanteur de variétés, animateur de jeu télévisé, footballeur, médecin spécialisé ou capitaine d'industrie qu'un savant, ou même son avatar professionnel: un scientifique (a fortiori dans le domaine des humanités: lettres, sciences de l'homme, linguistique, philosophie).

- La donnée linguistique paraît elle aussi bien assurée: le mot savant attire les emplois ironiques ou les contextes associant le savoir du savant et le non-savoir, voire la folie et l'animalité: du syndrome du savant  ausinge savant et à l'âne du même nom, en passant par le savant fou et le savant Cosinus... L'hommage rendu, comme on a dit plus haut, ne tarit pas de vachardise.

Difficile de déterminer s'il existe un lien (et de quelle nature) entre ces deux thèmes. Il faudrait une investigation  serrée recoupant une lecture de Weber et sa postérité et un passage au crible des occurrences de "savant" dans la base Frantext.
Je relève juste au passage qu'on a apparemment cessé, à un moment donné, d'illustrer les degrés de comparaison de l'adjectif à partir des exemples très savant, fort savant, plus savant, moins savant, le plus savant (malgré une longue tradition qui remontait au doctus / doctissimus des grammaires latines?  )

En tout cas,  le rapport du savant / scientifique à l'ignorance est un fait qu'il revendique et assume, lui qui postule que le tout ne relève d'aucun savoir. Sa seule vocation est de se frotter à des problèmes locaux qu'il construit lui-même dans le respect des exigences de ses pairs, et de le faire avec le plus grand sérieux possible d'après les critères acceptés dans son métier. On sait assez combien cette prétention et cette superbe déplaisent aux puissants, lesquels multiplient dernièrement les expertises extérieures, exigent un droit de regard, en appellent à l'arbitrage du "monde professionnel" etc.

Les têtes savantes n'en font qu'à leur savante tête. A ce point que le relevé des erreurs factuelles et omissions d'un travail de recherche (ou dans des notices étymologiques) ne suffisent aucunement à invalider l'entreprise. Tout au plus  la renforcent-elles, en soulignant qu'elle est amendable, donc qu'elle mérite d'être poursuivie. Dans les conditions exorbitantes d'indépendance du savant rappelées à l'instant, c'est déjà merveilleux!

4 Dernière modification par Bookish Prat (06-05-2010 06:43:35)

Re : Les savants et la science

Naïf a écrit:

Les têtes savantes n'en font qu'à leur savante tête. A ce point que le relevé des erreurs factuelles et omissions d'un travail de recherche (ou dans des notices étymologiques) ne suffisent aucunement à invalider l'entreprise.

Ce sage propos serait applicable au cas présent si les notices étymologiques de nos dictionnaires ne résultaient pas d'un long travail d'élaboration souvent pluri-générationnel. Mon reproche adressé aux savants lexicographes du PR 2009 n'est pas tant une omission de recherche que l'acceptation («emprunt» conviendrait mieux),  sans vérifications minutieuses,  des résultats de recherches de leurs prédécesseurs.

Pierre Enckell a écrit:

Cette moquerie du "gros bon sens" à l'égard de la connaissance fine est indigne et déplorable.  Elle est généralement utilisée par les populistes, les poujadistes, les chauffeurs de taxi, et ceux qui préconisent "y a qu'à" comme solution à tous les problèmes. Nous ne devrions pas, sur ce forum surtout, montrer un tel mépris envers des gens qui tâchent honnêtement d'en savoir plus.

Et que dire de la vilification (c'est un anglicisme, mais tant pis !) de ses co-forumistes ? Est-ce faire preuve de gros bon sens poujadiste, populiste, et afficher la culture (présumée, ahah !) d'un chauffeur de taxi que railler les «savants lexicographes» qui s'abstiennent (on ne sait pourquoi) de consulter les rares ouvrages de référence français (mais il y en a d'autres, en anglais, en allemand, en russe, en hongrois, etc. ) sur la langue des  Roms lorsqu'ils ont affaire à un vieux  mot d'argot français d'origine incertaine ? Les lexicographes seraient-ils des vaches sacrées ? Est-il impie de dire qu'ils ne se comportent pas toujours en savants honnêtes, ouverts aux doutes, soucieux de comparer les sources ?
Ma petite contribution poujado-populiste à l'étymologie du mot rupin : le mot roupie pourrait bien avoir la même origine que rupin. Pour s'en convaincre ou du moins douter de la validité des origines présentées par PR et d'autres, il suffit de consulter le mot roupie dans... le Petit Robert. Youpi !  Roupie, pour PR, est attesté en 1614,venu par le portugais rupia de l'hindoustani rûpîya argent (sans rapport avec roupiller sur ses lauriers académiques ).« T'as des roupies, t'es donc rupin», logique non ? Hypothèse cependant inexplorée par les savants lexicographes du Robert (qui recopient d'ailleurs, à la virgule près, les trouvailles de leurs prédécesseurs français. Le moribond mais toujours utile TLFi en fait autant).

http://spe.fotologs.net/photo/62/33/0/esanchez/1191906753_f.jpg

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

5 Dernière modification par Pierre Enckell (06-05-2010 14:34:39)

Re : Les savants et la science

Vilification,, cher Bookish Prat ? « Calomnie », « diffamation », vraiment ? Les divergences parfois un peu vives entre ceux que vous appelez des co-forumistes sont pour moi la vie même du forum. Elles montrent que nous ne parlons pas pour ne rien dire.

A propos de la question spécifique que vous soulevez, voici quelques points. Je tâcherai de faire aussi court que possible.

Concernant le Petit Robert : je ne sais pourquoi vous le rendez responsable d’une étymologie que vous jugez contestable. Son premier auteur, Alain Rey, était à l’époque un lexicographe hors pair, qui a su créer un dictionnaire portable exceptionnel. C’était il y a une quarantaine d’années, et la routine s’est insidieusement installée. Il y a dans l’équipe du Robert, que je connais un peu, des gens excellemment formés ; ils (ou elles) ont peu d’influence sur la grosse machine éditoriale que c’est devenu.

De même que pour le Dictionnaire historique d’Alain Rey, quasiment toutes les données historiques et étymologiques du Petit Robert proviennent du TLF ou, plus lointainement, du FEW. Il n’y a pas de chercheurs, dans le sens scientifique ou universitaire, chez Robert ; ou s’il y en a, ils ne cherchent plus.  Si vous voulez citer une étymologie admise, référez-vous donc au TLF. Il est en ligne, et ses notices diachroniques (=historiques, étymologiques), bien qu’elles ne constituent pas sa raison d’être, ont une valeur certaine qui va même en s’améliorant de volume en volume.

Comme tout savoir, l’étymologie n’a rien de définitif ou d’immuable. Elle procède par hypothèses. Personne n’était là au moment où il fallait pour dire « Ah ah ! tripalium « instrument de torture » est en train de se transformer en travail ! ». De toute façon, ce moment même n’a jamais existé. Mais il y a d’autres indices qui appuient très fortement cette transformation, a priori invraisemblable pour tout être doué de gros bon sens. Peut-être viendra-t-il un jour un savant qui proposera une origine différente au mot travail, à l’aide d’un nouveau raisonnement et en tenant compte des textes et des contextes, des conditions historiques et géographiques, de l’évolution phonétique, etc. Si ses preuves sont jugées meilleures et plus convaincantes que les précédentes, les notices des dictionnaires changeront (peu à peu, car il y a toujours de l’inertie dans le processus).

Vous contestez l’étymologie du PR (=du TLF, =du FEW, = ?) pour le mot rupin. Avec des arguments textuels, contextuels, historiques, géographiques, phonétiques ? Non. Vous procédez par analogie. Rupin ressemble au mot rom (rrom), d’origine sanskrite, qui signifie « argent ». Voilà votre preuve. Pure analogie, et rien d’autre. Avec un argument de ce genre, je prouverai que la Lune est un fromage, jaune et sphérique, une grosse boule de gouda tournicotant dans le ciel.

L’hypothèse n’est pas nouvelle. Le Dictionnaire historique des argots français d’Esnault (1965) écrit à propos de rupin : « La présence de rup-, noble, puis riche, en divers argots (des Balkans au Portugal) suggère le romani [corrigé : j'avais écrit romain !] roup, rup, argent (métal), mais, en romani, ni la richesse ni la noblesse ne sont liées à ce mot. » En français, la noblesse est dénotée dès l’origine, mais certainement pas la richesse, du moins au 17e siècle quand ce mot apparaît dans la langue argotique et qu’un texte de 1630 parle de « pauvreté rupine », ce qui serait de nos jours un oxymore. Esnault cite donc le mot rom, mais plutôt pour l’écarter. Il est envisageable (je n’étais pas dans leur secret) que les rédacteurs du TLF l’auront suivi. Un dictionnaire n’est d’ailleurs pas le lieu pour proposer une foule de suppositions diverses, qui seront mieux examinées dans un article spécialisé.

L’influence du rom sur l’argot français contemporain est incontestable. Mais elle s’est surtout manifestée au vingtième siècle. Qu’en était-il aux environs de 1600, quand rupin apparaît dans les deux premiers textes argotiques d’une certaine importance (sans compter les ballades villonesques) en 1596 et 1628 ? Pour moi, je n’en sais rien. Si vous le savez, dites-le nous. Il faudrait connaître les rapports entre les Tsiganes et les gueux français d’alors : formaient-ils des groupes séparés ? Y avait-il, au contraire d’aujourd’hui, une interpénétration profonde entre les deux communautés ? Quand Pechon de Ruby, l’auteur de 1596, écrit la Vie généreuse des gueux, mercelots et bohémiens, ce dernier terme désigne-t-il véritablement les Tsiganes, et en a-t-il une expérience personnelle  ? Est-il prouvé que d’autres mots d’origine rom ont été introduits en français à l’époque ? Et cetera. Toutes questions dont ne s’est nullement préoccupée Alice Becker-Ho, auteur illuminé d’un petit livre absurde, Les Princes du jargon, sur les sources présumées rom de l’argot français (je le cite pour qu’on ne le lise pas !...).

Je le répète, je ne suis nullement spécialisé dans l’étymologie. Elle m’intéresse, mais, sauf dans des cas précis où j’aurais de vrais arguments à apporter et une hypothèse plausible à fournir, je peux personnellement mettre en doute certaines de ses données, mais je ne me risquerais pas à les contester ouvertement, et encore moins à les qualifier d’âneries. Les (bons) dictionnaires ont raison, jusqu’à preuve du contraire. Il ne sert à rien d’essayer de tout y casser, comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Vous m'avez fait travailler, cher Bookish Prat. J'ai mis plus d'une heure à rédiger ceci. J'espère que ce n'est pas du temps perdu.

Re : Les savants et la science

Que dire d'un rupin au cul cousu de roupies et qui serait un fieffé rapiat ?

Re : Les savants et la science

Coco 47 bis a écrit:

Que dire d'un rupin au cul cousu de roupies et qui serait un fieffé rapiat ?

Qu'il en aurait moins bavé avec des biffetons de mille euros.

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

Re : Les savants et la science

Au fait, le premier auteur des dictionnaires Robert, c'est... Paul Robert, honoré d'une notice biographique dans le Robert des noms propres.
Sur la page de titre du petit Robert, Alain Rey est donné  secrétaire général de la rédaction.
Qu'il en soit actuellement le seul maitre à bord, et si grand que soit son mérite, n'en fait pas pour autant le premier auteur.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

9 Dernière modification par Pierre Enckell (07-05-2010 18:37:55)

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Au fait, le premier auteur des dictionnaires Robert, c'est... Paul Robert, honoré d'une notice biographique dans le Robert des noms propres.
Sur la page de titre du petit Robert, Alain Rey est donné  secrétaire général de la rédaction.
Qu'il en soit actuellement le seul maitre à bord, et si grand que soit son mérite, n'en fait pas pour autant le premier auteur.

Paul Robert est donné comme auteur du Petit Robert comme Paul-Loup Sulitzer est donné comme l'auteur de ses romans et Maurice Thorez comme l'auteur de ses mémoires. C'est Rey qui a fait tout le travail.
Il n'est d'ailleurs plus du tout le seul maître à bord.

Ajout : j'aurais dû dire : Ce sont les Rey. Jeannine Rey-Debove en a peut-être fait autant que son mari.

Re : Les savants et la science

Encore un cramage de blaze, quoi...

Bien entendu que la notion d'auteur unique d'un dictionnaire est une vue de l'esprit, ces entreprises étant nécessairement collectives. Très certainement Josette Debove en a fait autant et même plus que son mari, directeur de l'entreprise du Robert historique.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Josette Debove

Oui, lapsus, désolé.

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Bien entendu que la notion d'auteur unique d'un dictionnaire est une vue de l'esprit, ces entreprises étant nécessairement collectives.

C'est exact pour des dictionnaires généraux du français (encore que... Richelet ? Furetière ?... Littré pour l'essentiel ?). Mais bien entendu que la notion d'auteur unique de dictionnaires plus spécialisés correspond parfaitement à la réalité, croyez-moi. tongue

Re : Les savants et la science

Pourquoi vous croirais-je ?

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Pourquoi vous croirais-je ?

D'une part, parce je n'ai pas l'habitude de mentir sur ce forum (ni ailleurs).

D'autre part, parce que j'ai écrit, à moi tout seul comme un grand, trois ou quatre dictionnaires.

Re : Les savants et la science

C'est bien beau, mais cela ne m'oblige pas à vous croire.
Je ne vous dois pas la soumission de ma raison.

Eussiez-vous écrit  la notion d'auteur unique de dictionnaires plus spécialisés correspond parfaitement à la réalité, que je l'eusse admis sans la moindre discussion, mais ce croyez-moi, non vraiment, ça ne passe pas ! Surtout de la part de quelqu'un qui prouve son sérieux en tirant la langue...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

16 Dernière modification par Pierre Enckell (08-05-2010 02:28:18)

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Je ne vous dois pas la soumission de ma raison.

J'avais rédigé toute une réponse argumentée, et puis je renonce. Vous êtes insensible aux arguments. Et comme vous voulez toujours avoir le dernier mot, je vous le laisse. Et zut.

17

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Bien entendu que la notion d'auteur unique d'un dictionnaire est une vue de l'esprit, ces entreprises étant nécessairement collectives.

Différents cas sont sûrement possibles et il faudrait commencer par définir ce qu'on appelle un auteur. Juridiquement, dès que quelqu'un participe, il est peu ou prou un auteur.
Mais pour essayer de rédiger un bon dictionnaire, individualisé et différent des autres, il faut d'abord et nécessairement un patron, quelqu'un qui en a le projet. Si l'on est tout seul, c'est limpide (mais probablement plus difficile : il faut tout faire et personne ne va vous contredire). S'il y a une équipe, elle travaille, collecte, recherche, fouille, rapporte, contribue, discute, enrichit, conteste, mais c'est le patron qui doit trier, orienter son équipe, décider s'il faut chercher ici ou là, accepter tel type de lexique ou non, d'après le projet qu'il a en tête. Chez les cuisiniers, le chef n'est pas tout seul à préparer le repas, parfois il est absent, mais c'est sa cuisine que vous mangez. Dans l'art, n'est-il pas vrai les peintres qui faisaient travailler leurs élèves n'étaient pas rares ?
La pluralité des participants n'est absolument pas incompatible avec la présence d'un auteur qui donnera à la création, dictionnaire ou mécanique, un caractère particulier et identifiable. S'il y a une équipe, il faut un chef.
J'aurais donc tendance à penser que la vue de l'esprit consiste à croire que le travail d'équipe s'oppose à l'œuvre individuelle. Ce n'est pas du foot wink
Mais pour le plaisir de la contradiction, on peut dire  l'inverse.

Peut-être que le dictionnaire de l'AF est-il, lui (celui d'aujourd'hui), un dictionnaire sans auteur. Si c'est un peu le cas, est-ce une qualité ?

Je ne sais pas ce qu'il en est du Petit Robert ; mais le Grand est – j'espère ne pas me tromper – l'œuvre de Paul Robert qui l'a porté sur ses épaules (il a écrit un petit livre à propos de sa genèse).

Re : Les savants et la science

gb a écrit:

Je ne sais pas ce qu'il en est du Petit Robert ; mais le Grand est – j'espère ne pas me tromper – l'œuvre de Paul Robert qui l'a porté sur ses épaules (il a écrit un petit livre à propos de sa genèse).

Exact. Ce premier dictionnaire, qui s'appelait Le Robert tout court, en six volumes et un supplément si je me souviens bien, a été remplacé depuis par le Grand Robert en neuf volumes, lequel est un peu plus qu'une version revue et  corrigée.
Après Larousse l'instituteur et Littré le médecin, Robert, qui avait soutenu une thèse sur le commerce des agrumes, est un nouvel exemple d'individu qui, sans formation particulière à l'origine, a créé un dictionnaire faisant référence.

Re : Les savants et la science

Quand je réponds à P’tit Prof ou que je l’interpelle, je lui donne en général, par politesse, du « Cher P’tit Prof ». Il a récemment épinglé cette formule. Je vais donc tâcher de rester impersonnel à son égard.

L’adjectif savant antéposé, écrit P’tit Prof au début de ce fil, prend une nuance ironique, soulignant qu’il n’y a là aucune science véritable.

C'est faux. Je l'ai déjà renvoyé au TLF, mais voici un choix plus riche d'exemples. J'ai consulté les attestations des mots savant, savante, savants et savantes dans la base Frantext, pour les années les plus proches de nous : 1987-2006. Cette base recense 166 textes (=ouvrages) pour la période ; mon dépouillement en traite un peu moins, car j’ai omis les citations tirées de publications posthumes (Catherine Pozzi, J.-R. Huguenin, Mendès France, Perec). Il y a en tout 401 attestations du mot, dont beaucoup concernent l’emploi substantif. Voici les exemples que j’y ai trouvés où l’adjectif est antéposé.

I. L’adjectif s’applique à des personnes

Le savant et scrupuleux Ferdinand Lot (Gracq)
ce savant jeune homme (Kristeva)
ce très savant marabout (Bâ) de hardis et savant ingénieurs (id.) savants spécialistes (id.)
un savant philosophe (Serres)
le savant journaliste (Sollers)
Wilkins, le savant pétrarquiste (Roubaud) le savant professeur (id.)
le savant observateur (Pontalis) les savants théologiens (id.)
notre mère, la savante sorcière (Chaix)
de savants milâtes (Chamoiseau)
de savants érudits (Ormesson)
nos savants Hippocrates (Gault)

II. L’adjectif s’applique à des productions humaines

un savant et nerveux demi-tour (Pouy)
savant article (Serres)
un savant système de captation (Rouaud)
un savant jeu de bandelettes (Lanzmann)
un savant assemblage de mots (Makine) une savante synthèse (id.)
un savant mélange d’ingénuité et de cynisme (Vaneigem)
le savant discours (Pontalis) une savante et subtile étude (id.) leurs savantes études (id.)
la savante direction (Bienne)
savante menuiserie (Boudard)
la savante exégèse d’un poème (Fourest)
des vers aux savantes dissonances (Mertens) ces savantes exégèses (id.)
de savantes méthodes (Groult)
de savants diagrammes (Jonquet)
de savants ouvrages (Verheggen)
les savants calculs de probabilités (Roubaud)

III. L’adjectif a une valeur figurée, esthétique ou poétique

le savant dégradé de l’ouate (Bianciotti) ce savant concert de carrés (id.)
savant dégradé (Pontalis)
de savantes herbes (Césaire) savants fûts d’orgueil (id.)

Si je compte bien, ce sont 39 attestations contemporaines. A la lecture, aucune ne semble souligner ironiquement qu’il n’y a là aucune science véritable.

P’tit Prof est professeur dans le secondaire, si j’ai bien compris. Est-ce qu’il enseigne beaucoup de bêtises de ce genre à ses élèves ? L’autre jour déjà, il a produit ici des contresens absolus à propos des rimes masculine et féminine ; maintenant, c’est une théorie sur la place de l’adjectif qui est contredite par les faits. Il faudrait qu’il apprenne (il n’est jamais trop tard) à vérifier ses affirmations avant de les rendre publiques. Cela m’épargnerait la désagréable tâche de montrer à tout bout de champ, preuves à l’appui, qu’il se trompe dans les grandes largeurs.

Re : Les savants et la science

Hé bien, je n'aurai pas froid cet hiver...

A la tienne, Étienne, à la tienne mon vieux ! T'as le bonjour de Jeannine, pardon, de Josette...

Pas de chance avec les anthroponymes : se nommait Amadou (prénom) Hampâté (patronyme) Bâ (nom du clan).

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

21

Re : Les savants et la science

Ce qui fait l'attrait de l'ironie, c'est que ce pourrait ne pas en être.
Pour qu'il y ait ironie (dire pour vrai ce qu'on tient pour faux ?), il faut qu'il y ait un semblant de doute (plus ou moins levé par l'auteur) : « Le savant auteur ... » peut être élogieux ou railleur. Tout dépend wink

22

Re : Les savants et la science

gb a écrit:

ironie (dire pour vrai ce qu'on tient pour faux ?)

Votre définition est celle de l'antiphrase, figure plus générale. L'ironie est aussi dans les eaux troubles du sarcasme, de la moquerie, de la feinte etc.

23

Re : Les savants et la science

Bingo ! : Morier, Dict. poétique, 1961 dit à antiphrase : synonyme d'ironie wink
Et, au premier sens d'ironie : « Figure de rhétorique par laquelle on exprime le contraire de ce que l'on veut faire entendre » (assez proche de ma proposition qui, si ma mémoire ne l'a pas trahi, était celle d'un prof de ma jeunesse).

Ce que je voulais relever, c'est que rien n'est ironique « en soi » : l'existence d'une charge ironique dépend de la volonté du locuteur. « Savant auteur » sera probablement sérieux si l'on parle de Michel Foucault et sera sûrement ironique si l'on parle de Jean-Pierre. Ironie n'est pas vérité.

24 Dernière modification par Pierre Enckell (09-05-2010 22:16:27)

Re : Les savants et la science

gb a écrit:

Ce qui fait l'attrait de l'ironie, c'est que ce pourrait ne pas en être.
Pour qu'il y ait ironie (dire pour vrai ce qu'on tient pour faux ?), il faut qu'il y ait un semblant de doute (plus ou moins levé par l'auteur) : « Le savant auteur ... » peut être élogieux ou railleur. Tout dépend wink

Juste  : ce n'est pas la fausse "règle" mécanique de l'emplacement de l'adjectif  qui détermine son sens, mais c'est tout le contexte qu'il faut considérer.* J'ai donné ci-dessus des fragments généralement trop courts pour qu'on puisse en juger, mais les passages donnés par Frantext sont bien entendu plus longs et plus clairs.   

Encore à propos de cette distinction adjectif postposé = sens propre / adjectif antéposé = sens métaphorique (mais est-ce que P'tit Prof la soutient encore ? il s'est gardé de la réaffirmer) : un grand homme, ça peut être Napoléon, en effet, mais une grande femme, c'est une femme mesurant environ 1 m 80 ou plus... Et si savant postposé a toujours le sens propre, Molière aurait dû écrire les Savantes femmes...
L'affaire me paraît entendue. Si j'ai réussi à convaincre P'tit Prof, c'est un faux concept de moins que ses élèves auront à apprendre.

* ajout : à quelques secondes près, cher Gb, nous avons dit la même chose.

Re : Les savants et la science

Delphine Denis, Anne Sancier-Chateau, Grammaire du français :

... certains adjectifs, en général courts, très fréquents [...] peuvent être qualificatifs s'ils sont postposés, mais perdent ce sens propre en antéposition....

Martin Riegel, Jean-Christophe Pellat, René Rioul, Grammaire méthodique du français :

Page 182
Adjectifs à place variable
Les adjectifs à place variable se divisent en deux catégories, selon qu'une différence de sens nettement marquée est associée ou non aux deux positions.
Adjectifs à double interprétation
[...] Antéposés au nom, ils modifient directement le contenu notionnel du nom auquel ils se rapportent pour en faire une propriété complexe. [...]
La diversité des incidences de l'adjectif à la matière notionnelle du nom est à l'origine d'une série d'oppositions sémantiques : un brave homme/un homme brave — une pauvre femme/une femme pauvre — une vraie histoire/une histoire vraie, etc.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Les savants et la science

gb a écrit:

Bingo ! : Morier, Dict. poétique, 1961 dit à antiphrase : synonyme d'ironie wink
Et, au premier sens d'ironie : « Figure de rhétorique par laquelle on exprime le contraire de ce que l'on veut faire entendre »

Morier faisait ce qu'il pouvait dans les limites qu'il se fixait. Voyez vous-même les emplois respectifs des mots (l'un étant un terme froid, l'autre une notion riche en connotations). Et puis, la littérature sur l'ironie est pléthorique.

Quant à position gauche vs position droite, on ne peut pas sérieusement la réduire à une citation rapide d'une grammaire généraliste.

Bref, il y a de la simplification dans l'air...

27 Dernière modification par Pierre Enckell (09-05-2010 23:17:52)

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Delphine Denis, Anne Sancier-Chateau, Grammaire du français :

... certains adjectifs, en général courts, très fréquents [...] peuvent être qualificatifs s'ils sont postposés, mais perdent ce sens propre en antéposition....

Mais n'insistez pas, voyons. Vous pouvez mettre ce passage en gras, en majuscules, en rouge, en corps 24, il n'appuiera jamais la règle que vous avez donnée comme générale sous # 1. Est-ce que savant est court et très fréquent ? Grand répond à ces caractéristiques, mais puisqu'une grande femme et un homme grand forment un couple d'une taille élevée, la phrase de ces dames ne s'applique pas non plus.

Ajout. Je relève une fois de plus, P'tit Prof, que vous avez modifié votre texte sans que cela laisse de trace. Cette fois-ci ce n'est pas le remplacement d'un passage par un autre, mais l'addition d'une deuxième citation tirée d'une autre grammaire. Pour autant que je sache, vous êtes peut-être en train d'en ajouter une troisième pendant que j'écris ceci. Quand nous autres membres ordinaires d'ABC modifions ou ajoutons quelque chose, l'heure de la dernière modification s'inscrit au bas du message : comme ci-dessous.
Comme ce n'est pas le cas pour les modérateurs,  semble-t-il, il serait correct et honnête que vous indiquiez vous-même le moment où vous avez opéré un changement ou un repentir. La succession des messages et des réponses en deviendrait plus claire.

Re : Les savants et la science

J'insisterai si je veux insister !
Histoire de vous prouver que vous ne m'avez nullement convaincu...

Vous pouvez mettre ce passage en gras, en majuscules, en rouge, en corps 24, il n'appuiera jamais la règle que vous avez donnée comme générale sous # 1.

1)Ce passage me donne raison sur la valeur de sens de la variation antéposition/postposition.
2)Une fois de plus vous commettez un contre-sens : je n'ai jamais donné de règle générale concernant savant, j'ai éclairé mon propre choix stylistique, en m'appuyant sur une propriété générale des adjectifs qualificatifs.
Propriété  établie par plus qualifiés que moi, et vos récriminations et contorsions n'y changeront rien.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Pas de chance avec les anthroponymes : se nommait Amadou (prénom) Hampâté (patronyme) Bâ (nom du clan).

Il faudrait avertir les Maliens qu'ils se trompent gravement en lui donnant BA comme nom de famille. big_smile

http://palaiscultureahb.net/

Re : Les savants et la science

Si vous avez trouvé sur ce site une notice biographique et un commentaire du nom du grand ethnologue, vous serez bien aimable de me dire où : je n'ai rien trouvé de tel.

Je m'en fie à la parole de l'auteur, qui écrit :

... la princesse Diarra Aguibou Tall (Diarra [fille de] Aguibou du clan Tall...

Donc :
Amadou Hampâté Bâ, Amadou, fils de Hampâté  du clan Bâ.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

... la princesse Diarra Aguibou Tall (Diarra [fille de] Aguibou du clan Tall...

Donc :
Amadou Hampâté Bâ, Amadou, fils de Hampâté  du clan Bâ.

Evidemment, cher P'tit Prof, je ne suis nullement expert en anthroponymie malienne. Vous non plus, peut-être ? Mais j'aime chercher. Quand on cherche Ba au  Mali, on trouve ceci :

http://iq.maliphonebook.com/pagesblanch … 1&q=ba

Dans ce même annuaire, le nom de Hampaté donne un seul résultat, où il est en seconde position sur trois noms, comme pour A. Hampaté Bâ.

Le téléphone est probablement plus répandu en France qu'au Mali. Dans les pages blanches françaises on ne trouve aucun Hampaté, mais 2977 Ba, dont la très grande majorité porte des prénoms musulmans africains. J'en déduis que, selon toute vraisemblance Ba est un nom de famille malien, et que Hampaté (ou Hampaté Ba) ne l'est pas.

La biographie de A.H. Bâ sur le site que j'ai indiqué dit qu'il était le fils de Hampaté Bâ. Il aurait donc inséré le nom de son père entre son prénom et son nom de famille, comme semble l'avoir fait la princesse que vous citez. Il s'agirait dans ce cas d'un "patronyme" (ce n'est peut-être pas le mot exact), correspondant par exemple à ben / bent *** en arabe, ***-vitch / -vna en russe, ***-son / -dotter en suédois, etc. Mais en France comme au Mali, je crois bien que son nom de famille est Bâ, et rien d'autre.

De digression en dérive, nous voici une fois de plus bien loin du fil initial !

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Si vous avez trouvé sur ce site une notice biographique et un commentaire du nom du grand ethnologue, vous serez bien aimable de me dire où : je n'ai rien trouvé de tel.

Sur le site du Palais de la culture, cliquez sur Présentation.
Sur la page Présentation, cliquez à la première ligne oùsque c'est marqué "cliquez ici", et vous arriverez à la notice biographique demandée.

Il faut montrer un peu de curiosité dans la vie et chercher à explorer des voies diverses (et peut-être même Google, horreur !). Il y a moins de risques, du coup, de mourir idiot.

Re : Les savants et la science

J'ai échappé au pire : ce message ne commence pas par cher !
Deo gratias !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

vous arriverez à la notice biographique demandée.

Dont wikipédia a réalisé le copier/coller, mais où ne figure aucune glose du nom Amadou Hampâté Bâ.

Evidemment, cher P'tit Prof, je ne suis nullement expert en anthroponymie malienne. Vous non plus, peut-être ?

Moi, si.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Les savants et la science

P'tit prof a écrit:

Evidemment, cher P'tit Prof, je ne suis nullement expert en anthroponymie malienne. Vous non plus, peut-être ?

Moi, si.

Dans ce cas-là, je serais heureux si vous vouliez bien me montrer où je me suis trompé dans mes recherches et raisonnements du # 31. Je ne demande qu'à apprendre.

P.S. Je tâcherai d'éviter de vous donner du cher, à l'avenir, puisque cela vous gêne. C'est pour moi une simple formule de politesse, qui n'implique pas de sentiments particuliers mais qui peut adoucir une interpellation.

Re : Les savants et la science

Encore des gens qui se trompent ?

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ba_(nom_de_famille)

Re : Les savants et la science

Il faut aussi exiger que les archivistes sénégalais corrigent leur index :

http://www.archivesdusenegal.gouv.sn/indexB.htm

Re : Les savants et la science

Et l'Ecole des hautes études en sciences sociales, de tout évidence composée d'ignares :

http://www.editions.ehess.fr/nos-auteurs/

39 Dernière modification par Pierre Enckell (10-05-2010 20:24:14)

Re : Les savants et la science

Et le catalogue des éditions Présence africaine (page 24), apparemment rédigé par des Eskimos :

http://www.ordiecole.com/presence_africaine2008.pdf

Vite, vite, monsieur l'Expert, il faut dire à tous ces gens qu'ils commettent une grossière erreur !

40

Re : Les savants et la science

Le premier qui cède a gagné !
http://smileys.sur-la-toile.com/repository/Combat/xlaser.gif

(je ne saurais sur qui parier).

Re : Les savants et la science

P'tit prof doit souper, il ne répond plus à Pierre Enckell.
Le titre de super-lourds est en jeu ce soir, Pierre Enckell mène aux poings, euh... aux points.

Re : Les savants et la science

gb a écrit:

Le premier qui cède a gagné !
http://smileys.sur-la-toile.com/reposit … xlaser.gif

(je ne saurais sur qui parier).

smile J'ai déjà cédé une fois sur ce fil (# 16 plus haut), et il se peut que je le fasse ici aussi si monsieur l'Expert continue son festival de mauvaise foi. Mais ce n'est pas gagner qui m'intéresse, et j'ai depuis longtemps renoncé à convaincre P'tit Prof, buté dans ses absurdes certitudes. J'aimerais seulement mettre d'éventuels lecteurs en garde contre ses propos. Et puis, c'est vrai, j'aimerais bien aussi qu'il se taise quand il n'a rien à dire. smile

Re : Les savants et la science

Pierre Enckell a écrit:

Vite, vite, monsieur l'Expert, il faut dire à tous ces gens qu'ils commettent une grossière erreur !

Voilà bientôt douze heures et plus que la dernière de ces angoissantes questions a été posée. Le monde entier retient son souffle, dans l'attente des réponses. Il vous supplie, monsieur l'Expert, de ne pas le laisser languir.

Re : Les savants et la science

Il n'y a plus d'abonné au numéro que j'ai demandé.
A moins de nouvelles contestations, je ne compte plus intervenir sur ce fil. Mais cette histoire me paraît instructive. Je la résume :
I. Comme j'ai reproché à Bookish Prat son usage péjoratif du mot savant, il s'explique. P'tit Prof le soutient, et affirme que savant est péjoratif quand il précède le nom.
II. Je réponds assez longuement à Bookish Prat à propos de son argument étymologique. L'aurais-je convaincu ? En tout cas, il ne poursuivra pas la controverse.
III. Très incidemment, dans ma réponse à Bookish Prat, j'ai nommé Alain Rey. En spécialiste de la digression, P'tit Prof s'en saisit et démarre toute une salade. Plus loin, dans une réponse, je lui dis "croyez-moi", dans le sens où j'aurais dit "je vous en assure". Le voilà qui monte sur ses grands chevaux : "Pourquoi vous croirais-je ?" Fatigué par ce type de discussion, je finis par abandonner.
IV. Après avoir repris des forces, je reviens sur le sujet d'origine. J'établis une liste de 39 exemples où l'adjectif savant est antéposé, sans que le sens soit péjoratif.
V. Une fois de plus, pour éviter de répondre, P'tit Prof se saisit d'un détail. J'ai nommé les auteurs des exemples ; parmi eux, Amadou Hampâté Bâ, écrivain malien. P'tit Prof me reproche de l'avoir appelé Bâ. Je lui explique pourquoi je crois effectivement que Bâ est un nom de famille malien, tout en spécifiant que je ne suis pas un expert en anthroponymie malienne. - "Moi, si" ! répond P'tit Prof, aussi sincère qu'un arracheur de dents.
VI. Ah, s'il est expert, alors... Mais je trouve sur la Toile une multitude d'exemples à lui opposer. Va-t-il dire "Ah, j'ai fait erreur" ? Non. Il ne dit plus rien.
Il est irritant d'avoir à faire face à une telle mauvaise foi et à une telle défausse, quand on croit comme moi qu'une discussion raisonnable et raisonnée peut faire avancer le schmilblick, et que la recherche de faits est utile et nécessaire pour déterminer la vérité.

Re : Les savants et la science

Pierre Enckell a écrit:

monsieur l'Expert

Voici donc résumé le combat d'un savant monsieur contre un monsieur Savant... smile

46

Re : Les savants et la science

Pierre Enckell a écrit:
P'tit prof a écrit:

Au fait, le premier auteur des dictionnaires Robert, c'est... Paul Robert, honoré d'une notice biographique dans le Robert des noms propres.
Sur la page de titre du petit Robert, Alain Rey est donné  secrétaire général de la rédaction.
Qu'il en soit actuellement le seul maitre à bord, et si grand que soit son mérite, n'en fait pas pour autant le premier auteur.

Paul Robert est donné comme auteur du Petit Robert comme Paul-Loup Sulitzer est donné comme l'auteur de ses romans et Maurice Thorez comme l'auteur de ses mémoires. C'est Rey qui a fait tout le travail.
Il n'est d'ailleurs plus du tout le seul maître à bord.

Ajout : j'aurais dû dire : Ce sont les Rey. Jeannine Rey-Debove en a peut-être fait autant que son mari.

« Il n'est d'ailleurs plus du tout le seul maître à bord »
C’est, hélas, tellement vrai !
Pierre Enckel, dont j’admire et le talent et... la patience, parle d‘or en même temps qu’il est orfèvre en la matière. Les amateurs du DCLF ont pu remarquer qu’il est dépourvu de l’habituelle (antéposé, ici) table chronologique. Estomaqué, sidéré, lors de ma première consultation, mais pas paralysé, j’ai eu l’occasion, au Salon du livre, d’en demander la raison à l’auteur (?).
Devinez sa réponse ! La vérité, chers lexiphiles, je vous la livre : la table du DHLF devait être refondue pour ce nouveau dictionnaire, mais l’éditeur a pressé... Alain Rey lui-même !
Hallucinant, hein ?
J’ai une autre mauvais nouvelle : le TLF restera tel quel et ne sera pas mis à jour. Ah, s’il s’appelait Treasury, Mme Pécresse lui accorderait sans doute plus d’attention, Pascale me l’a avoué…

Re : Les savants et la science

Jacques Groleau a écrit:

le TLF restera tel quel et ne sera pas mis à jour.

Il n'en a jamais été question. Il serait inimaginable de publier une version revue et corrigée de ces 16 immenses volumes qui se sont déjà fort mal vendus. Le TLF, disait Bernard Quemada, est le dernier dictionnaire papier.
Pour le TLFi, c'est autre chose. Un dictionnaire informatisé reste toujours améliorable à peu de frais, et on ne peut se prononcer définitivement sur sa caducité. D'ailleurs, un élément du TLFi est en train d'être révisé, très (trop?) lentement, certes. Voir TLF-Etym sur le site de l'Atilf.

Jacques Groleau a écrit:

Pascale me l’a avoué…

Oui, mais Mathilde est d'un autre avis, Charlotte aussi, et Simone réserve sa réponse... smile

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