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Le forum d'ABC de la langue française

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forum abclf » Réflexions linguistiques » L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

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Messages [ 51 à 78 sur 78 ]

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Je suis tombé sur ce fil alors que je cherchais des informations sur les apocopes et je voulais répondre en apportant une nouvelle explication.
C'est un phénomène qui intéresse plusieurs linguistes et pour ma part, je voudrais tout de suite préciser que je ne suis absolument pas d'accord avec l'idée de jeunisme.
En même temps, l'explication que je vais donner n'explique pas pourquoi en français ce phénomène est si fréquent, bien plus que dans d'autres langues (comme l'espagnol comme quelqu'un le dit ici).
Il y a une notion de "mot minimal" en morphologie prosodique. Cette hypothèse veut que les langues choisissent un schéma prosodique qui constituerait le "mot idéal".
Le mot minimal en français serait de type CVC (der, doc, Jap, etc.) et la structure maximale du mot minimal se composerait de deux syllabes.
Cela n'explique pas directement le pourquoi mais quand même... il s'agirait d'une tendance et d'une volonté d'atteindre ce "mot prosodique" idéal. Et d'après moi l'absence d'accent de mot en français pourrait être une explication de la fréquence de ce phénomène en français...

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Très intéressant.

Je précise qu'il ne s'agit pas d'API :

elatoufolaprof, tapavuldiko, troforlasono, ilébarjolmek : sont-ce des exemples d'idéal prosodique ?

Ce serait probablement à étudier avec les mécanismes de l'oral en français : dislocations et proliférations des pronoms sujets (les phénomènes les plus évidents) combinés avec les apocopes, ça dépote.

Certaines phrases qui nous sont naturelles sont stupéfiantes pour des gens qui apprennent notre langue et ne sont pas habitués à l'absence d'accent tonique, à l'égalité syllabique, aux enchainements et liaisons. C'est vrai que l'apocope s'insère bien là-dedans.

Ce qui est rigolo, c'est que cet "idéal prosodique" propre au langage familier (je suppose), bubonne dans les autres registres de langage qui s'emparent de certains mots pour faire jeune et branché. Et l'idéal y perd probablement des plumes.

Donc je reformule : le langage familier tendrait vers un idéal prosodique et fabriquerait les mots pour. Et ces mots se répandraient dans la langue.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Effectivement, ces mots se propagent dans la langue courante (Cf métro, auto, ciné, etc.)
Qu'ils naissent dans le langage familier, peut-être (encore qu'il faudrait vraiment regarder ça de plus près), mais en tout cas, c'est un procédé qui est plus ancien que certains ne le pensent d'après ce que j'ai lu.
Sinon, l'absence d'accent de mot joue effectivement sur les liaisons et enchainements, sur les chutes de schwas aussi (et sur leur variation), peut-être sur les apocopes, sur le verlan, etc. soit sur le français parlé en général: et tout ce qu'on vient de citer ici sont des caractéristiques qu'on ne retrouve pas forcément dans d'autres langues à un tel degré.
Bon, moi, je ne suis pas du tout spécialiste de morphologie prosodique mais c'est très intéressant en tout cas.

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Rappelons aussi d'autres spécificités du français par rapport aux autres langues romanes,

  • pronom sujet obligatoire

  • tous les pronoms sujets en élision ou liaison dans le langage familier

  • usage immodéré du on

  • suppression du ne

  • présence du pas

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

oliglesias a écrit:

Qu'ils naissent dans le langage familier, peut-être (encore qu'il faudrait vraiment regarder ça de plus près)

Emprunts et langages spécialisés mis à part, j'aurais tendance à croire que c'est le langage familier (et vulgaire, argotique, etc.) qui est le plus grand pourvoyeur de néologismes. Les registres "supérieurs" étant par nature plus conservateurs, leurs inventions sont probablement plus rares, plus "recherchées" et se font selon des mécanismes connus. Je me trompe peut-être du tout au tout et ne demande qu'à être détrompé. Le sujet m'intéresse.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

56 Dernière modification par éponymie (15-03-2014 22:56:19)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Et les idées se bousculent smile

On pourrait aussi expliquer la suppression du ne autant par l'apparition du pas que par le fait que sa présence dérange la perception du pluriel : le [z] initial (zavépadfeu ?, pendant du singulier tapadfeu ? ).

Se dessine une grammaire de l'oral aux antipodes de nos visions traditionnelles.

Bon. J'arrête (pour le moment).

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

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Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

éponymie a écrit:

On pourrait aussi expliquer la suppression du ne autant par l'apparition du pas que par le fait que sa présence dérange la perception du pluriel : le [z] initial (zavépadfeu ?, pendant du singulier tapadfeu ? ).

Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris. Supposez-vous que le maintien du "ne" à l'oral aurait empêché l'élision du "vous n'avez pas" en "z'avez pas" ?

Dans ce cas, je serais d'accord avec vous. Mais je me dis que le "ne" aurait pu tout aussi bien subsister sous cette forme : "n'avez pas". Ça marche tout aussi bien.

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Si ce n'est qu'à l'oral, le [z] est un marqueur du pluriel (lire Claire Blanche-Benveniste). Au point que, quand il est absent, on le met :

"entre quatr'z'yeux" et autres velours du même tonneau.

Il y a un fil là-dessus.

Et on sait parfaitement que l'on peut se passer du ne comme marqueur de la négation.

Ceci dit, je suis tout prêt à reconnaitre que ma supposition est quelque peu aventurée.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

éponymie a écrit:

Si ce n'est qu'à l'oral, le [z] est un marqueur du pluriel (lire Claire Blanche-Benveniste). Au point que, quand il est absent, on le met :

"entre quatr'z'yeux" et autres velours du même tonneau.

Tout à fait. C'est exactement ce que j'ai fait avec mes étudiantes il y a 3 semaines: les liaisons et le pluriel à l'oral.
L'article de Claire Blanche-Benveniste est très intéressant, la "fausse liaison" fonctionnant comme un morphème pluriel antéposé toujours au dernier terme d'une expression.
Aujourd'hui, à part dans certaines expressions comme "entre quatr-z-yeux", il est encore trop souvent considéré comme fautif mais il s'agit tout simplement d'une nouvelle forme de marquer le pluriel à l'oral. Cette fausse liaison n'apparait d'ailleurs pas uniquement avec des numéraux, on peut entendre "des machines à laver-Z-italiennes" (sans liaison entre machines et laver)...

Je trouve ce phénomène tout à fait intéressant. Par contre, sur la négation, je suis plus sceptique quant à votre explication éponymie mais nous en reparlerons sans doute un autre jour... (là, pas le temps désolé)

60 Dernière modification par chrisor (21-03-2014 00:18:17)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

La partie terminale des mots est la partie qui porte un sens général alors que la partie initiale porte le sens spécifique:
Par exemple pour le mot tuméfaction  il s'agit d'une action qui a formé une "tumeur", pour raréfaction d'une action  qui a abouti a rendre rare un élément, pour contraction d'une action qui contracte, etc.
Il en est de même pour les milliers de mots qui se terminent par -ation.
Dans "cinématographe" c'est bien la partie initiale qui est la plus singulière dans le lexique car 72 mots se terminent par graphe alors que 7 sans lien avec cinéma commencent par "ciné". 
 
C'est pourquoi l'apocope modifie peu la spécificité d'un mot et qu'elle s'avère  beaucoup plus fréquente que l'aphérèse qui, elle, supprime la partie spécifique du mot en masquant davantage le sens expliquant qu'elle est une forme de troncation du signifiant employée avec prédilection en argot pour dissimuler le sens du mot.

Cette construction droite gauche ou queue-tête des mots  a démarré dès le stade des onomatopées : crac, clac, flac, tic tac., couac....pour se poursuivre dans les mots : trac, vrac, hamac, bac, sac, lac....

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

chrisor a écrit:

C'est pourquoi l'apocope modifie peu la spécificité d'un mot et qu'elle s'avère  beaucoup plus fréquente que l'aphérèse qui, elle, supprime la partie spécifique du mot en masquant davantage le sens expliquant qu'elle est une forme de troncation du signifiant employée avec prédilection en argot pour dissimuler le sens du mot...

Donc le verlan serait peu apocopable. Mah...

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

62 Dernière modification par greg (21-03-2014 12:43:43)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

éponymie a écrit:

On pourrait aussi expliquer la suppression du ne autant par l'apparition du pas que par le fait que sa présence dérange la perception du pluriel : le [z] initial (zavépadfeu ?, pendant du singulier tapadfeu ? ).

Se dessine une grammaire de l'oral aux antipodes de nos visions traditionnelles.

Cette grammaire est la seule qui vaille.
C'est celle que nous apprenons tous sans même nous en rendre compte.





Dans cette grammaire orale, le nombre grammatical de la quasi-totalité des substantifs isolés est le neutre : il n'existe ni singulier formellement opposable à un pluriel éventuel, ni forme plurielle qui serait le pendant d'une forme singulière.
ka - naʁ         canards  canard
Exceptions :
o - pi - to      hôpitaux        /         o - pi - tal      hôpital   





Dans le syntagme nominal, le nombre marqué (pluriel ou singulier) apparaît avec la détermination.

ka - naʁ                                       canards  canard
a - naʁ                                         anars  anar

le - ka - naʁ                                 les canards
le - za - naʁ                                 les anars

- ka - naʁ     lka - naʁ              le canard
la - naʁ                                        l'anar

D'où il suit que le préfixe z est la marque du pluriel de la "moitié" des substantifs non isolés.
Ce préfixe fait fonction d'attaque consonantique.





Le préfixe z est également la marque plurielle du verbe, dépourvu d'attaque consonantique propre et précédé de son pronom sujet.

vu - za - ve                                 vous avez
a - ve - vu                                  avez-vous

vu - sa - ve                                 vous savez
sa - ve - vu                                 savez-vous

nu - zo - ʁjɔ̃                                nous aurions
o - ʁjɔ̃ - nu                                 aurions-nous

nu - so - ʁjɔ̃                                nous saurions
so - ʁjɔ̃ - nu                                saurions-nous





Encore une petite curiosité.
Les pronoms personnels sujets de troisième rang possèdent deux formes.
Une forme dépourvue d'attaque consonantique, il elle on ils elles, si ladite forme précède le verbe conjugué.
Une forme dotée d'une attaque consonantique dentale, til telle ton tils telles, dans le cas contraire.

Pour finir, ceux des pronoms personnels sujets de rang 3 qui sont grammaticalement variables en genre sont grammaticalement invariables en nombre : leur nombre grammatical est le neutre.
il        =    ils
til       =    tils
elle    =    elles
telle   =    telles

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

greg a écrit:

Encore une petite curiosité.
Les pronoms personnels sujets de troisième rang possèdent deux formes.
Une forme dépourvue d'attaque consonantique, il elle on ils elles, si ladite forme précède le verbe conjugué.

Mais puisque nous parlons de l'oral, c'est plus souvent la forme [ i ] que [ il(s) ] qu'on entend.

64 Dernière modification par greg (21-03-2014 13:33:26)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Absolument.

Et, au surplus, on entend non seulement i il til pour l'une quelconque des formes écrites il ils, mais aussi les cinq formes ɛ ɛl ɛlə tɛl tɛlə pour la communauté graphique elle elles.

Sans compter ti et — résiduels.


Les pronoms sujets de rang 3 ont chacun un profil oral très complexe.
Mais tous obéissent à une règle orale commune fort simple : attaque consonantique soit nulle soit t.


La transcription de la règle orale est variable.

Soit t est suffixé au verbe graphique par un t final :
vient  peut  sait  est        /        viennent  peuvent  savent  sont

Soit t demeure hors du verbe graphique :
mange  mangera  mangea  va

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

greg a écrit:
éponymie a écrit:

On pourrait aussi expliquer la suppression du ne autant par l'apparition du pas que par le fait que sa présence dérange la perception du pluriel : le [z] initial (zavépadfeu ?, pendant du singulier tapadfeu ? ).

Se dessine une grammaire de l'oral aux antipodes de nos visions traditionnelles.

Cette grammaire est la seule qui vaille.

Elle est la seule qui vaille quand on est gosse et qu'on aspire la langue comme une éponge. J'essaye de rendre la langue la plus intuitive possible mais même pour les trucs les plus évidents (l'homophonie des pluriels réguliers, des formes verbales du singulier pour nombres de temps, etc.), il y a trop d'exceptions, de normes graphiques à prendre en compte (il faut bien au moins enseigner à lire et donc associer l'écrit à l'oral même en l'y subordonnant), de registres de langue (même réduits à un set de trois représentations théoriques) pour que cette grammaire "naturelle" ne se télescope pas avec la grammaire de pépé. Elle reste d'une aide puissante mais dire que c'est la seule qui vaille me semble plus qu'exagéré : c'est aussi elle - j'imagine - qui est à l'origine du "ça se dit" / "ça  se dit  pas" si difficile à extirper en chacun de nous, cela suffit à montrer ses limites.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

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Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Pour l'inconscient   collectif langagier français  la lettre n  marque (pour l'un de ses deux sens en minuscule  la négation.
Pour pas l'inconscient  joue avec l'ambiguïté.  Pour les substantifs un "pas" de vis devrait s'écrire avec un p minuscule relié au Sens de petitesse, pour les Pas de homme et les premiers Pas d'un enfant, le P majuscule de la Progression semble le plus pertinent.
La séquence "as"  démontre l'importance de l'orthographe et la suprématie du conditionnement graphique littéral sur le phonémique.
En effet "as" correspond aux concepts opposés de création /destruction, ce dernier sens  s'imposant  dans les formes négatives "ne pas".  La notion de destruction de "as" de pas peut être suffisante pour annuler une proposition d'où  l'oubli ou la disparition de n dans la langue orale  des jeunes.
Quant à la lettre s l'un de ses deux sens est relié au Sens d'enveloppe ce qui explique son usage en français et à un degré moindre en anglais pour marquer le pluriel.

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

chrisor a écrit:

La séquence "as"  démontre l'importance de l'orthographe et la suprématie du conditionnement graphique littéral sur le phonémique.
En effet "as" correspond aux concepts opposés de création /destruction, ce dernier sens  s'imposant  dans les formes négatives "ne pas".  La notion de destruction de "as" de pas peut être suffisante pour annuler une proposition d'où  l'oubli ou la disparition de n dans la langue orale  des jeunes.

Que doit-on en déduire ? Qu'il ment ?

Ne nous faites pas dériver ce fil avec vos théories s'il vous plait, il faudrait d'ailleurs en ouvrir un autre mais comme je me suis lancé dans les doublets... J'peux point tout faire.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

oliglesias a écrit:
éponymie a écrit:

Si ce n'est qu'à l'oral, le [z] est un marqueur du pluriel (lire Claire Blanche-Benveniste). Au point que, quand il est absent, on le met :

"entre quatr'z'yeux" et autres velours du même tonneau.

Tout à fait. C'est exactement ce que j'ai fait avec mes étudiantes il y a 3 semaines: les liaisons et le pluriel à l'oral.
L'article de Claire Blanche-Benveniste est très intéressant, la "fausse liaison" fonctionnant comme un morphème pluriel antéposé toujours au dernier terme d'une expression.
Aujourd'hui, à part dans certaines expressions comme "entre quatr-z-yeux", il est encore trop souvent considéré comme fautif mais il s'agit tout simplement d'une nouvelle forme de marquer le pluriel à l'oral. Cette fausse liaison n'apparait d'ailleurs pas uniquement avec des numéraux, on peut entendre "des machines à laver-Z-italiennes" (sans liaison entre machines et laver)...

Juste pour dire signaler que cela ne semble pas dater d'hier, Vaugelas en parlait déjà en condamnant une prononciation "on-z-a". S'agissait-il à tout coup d'un on employé pour nous ? Était-ce bien déjà le phénomène relevé par CBB ? Je n'en sais rien mais j'ai pensé que cela valait la peine de remonter le fil pour le signaler (je suis tombé dessus en cherchant une citation de Vaugelas pour un autre sujet).

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Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Rien n'est moins sûr.
Voir le un laid homme  — cité par Antoine Cauchie dans sa grammaire de 1570 —  prononcé un lai zomme alors que le nombre est bien singulier : formellement et sémantiquement.

Comment le prononcerait-on de nos jours ? Un lai domme ? Un lai omme ?

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

greg a écrit:

Comment le prononcerait-on de nos jours ? Un lai domme ? Un lai omme ?

Et un lai tomme ? smile

Donc hypothèse infirmée et parenthèse fermée.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

éponymie a écrit:

Et un lai tomme ? smile

On dit bien effectivement un gran tomme. Pourquoi pas, si ce n'est que ce n'est pas l'ordre habituel et que ce n'est donc pas reconnaissable.

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Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Pour revenir à l'italien, il faut dire que l'apocope est prévu par la grammaire italienne et ne peut être aucunement assimilé au phénomène français qui relève plutôt de l'argot, du moins au moment de sa création. L'apocope est possible chaque fois qu'une voyelle finale non accentuée est précédée de l, r, m ou n. Voici quelques exemples tirés de Petite grammaire de l'italien de François Revardeaux. (Presses Universitaires de  France 1999)

alcuno : alcun modo;
grande  : gran casa
bel ragazzo
Signore : Signor Direttore

Il y a toutefois des exceptions.

Verbum

In principio erat Verbum

73 Dernière modification par éponymie (21-04-2014 20:27:40)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Serait-ce une histoire de définition ?

Effectivement cette chute de la voyelle finale (parfois de la syllabe finale) n'est pas assimilable à une apocope  tel qu'on l'entend en français : comme pour "un bel homme" en français, il s'agit d'euphonie. Tout comme il arrive d'ajouter un d à e, o et a devant une voyelle.

On met un même mot - apocope - sur deux phénomènes très diffèrents; d'ailleurs l'italien parle de troncamento pour les cas que tu donnes, tout en connaissant par ailleurs le terme apocope. Comme le signale les grammaires de l'italien (dont celle de François Revardeaux), l' "apocope" italienne obéit à des règles assez bien définies, le mot change de forme sous certaines conditions. C'est la terminologie française pour parler de l'italien qui pêche.

L'apocope française est inconditionnée, irraisonnée, souvent systématique et n'entre pas dans les grammaires de base au contraire de l'italien. C'est ce que percevait bien iMario lorsqu'il a lancé le fil : il ne lui est pas venu à l'idée de comparer le phénomène français à la "troncation" italienne.

P.S. : Oliglesias était réticent à admettre que l'apocope soit un produit du langage familier, alors l'argot...

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Le français aussi ne connaît-il pas l'apocope/troncamento : c'est l'élision : la horloge ==> l'horloge. C'est évidemment très limité.

75 Dernière modification par éponymie (21-04-2014 20:38:26)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

En français comme en italien, l'élision est marquée par un signe typographique, l'apostrophe. Il s'agit donc encore d'un autre phénomène.

https://lewebpedagogique.com/famillesdemots/files/2021/10/Les-doublets-en-fran%C3%A7ais.pdf

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Une des apocopes les plus pénibles est celle qui concerne la philosophie.

Car la question à se poser est unique : tel philosophe a-t-il été professeur de philosophie ?

Si oui : poubelle.

Donc poubelle pour la quasi-totalité, incluant les antiques qui ont créé des écoles.

Socrate n'était pas professeur, il parlait pieds nus gratuitement aux gens dans la rue, ce qui a défrisé la bien-pensance de l'époque qui l'a assassiné légalement.

Pour tous les autres, étant qu'il sont rémunérés par l'État, une vérité sera toujours supérieure à toute vérité à savoir l'État.

Or, autre exemple, Nietzsche a été professeur de philo certes mais de philologie, il était professeur de grec ancien à Bâle et à aucun moment professeur de philosophie, ce qui l'eût mis directement à la poubelle comme tous les autres dans ce cas.

Quand on est payé par l'État, on ne peut pas être philosophe car alors on n'est pas libre de sa pensée puisque l'État est une vérité indépassable.

La philosophie est le lieu où aucune tyrannie ne peut pénétrer : l'État n'a rien à y faire.

Nietzsche suppliait les États de cesser d'enseigner la philosophie dans les écoles mais les arrivistes cherchent une carrière et se soumettent à la bien-pensance des écoles qui les nourrissent.

Que ne feraient pas ces minus habentes pour un salaire, pour une situation sociale, insultant de ce fait la grande et belle philosophie dont ils sont évidemment incapables ?

Donc cette apocope-là est particulièrement scandaleuse ici car on peut être professeur de philo sans être professeur de philosophie.

Depuis les nuit des temps, les vrais philosophes se comptent, pour cette raison, sur les doigts de la main gauche de Django Reinhard.

Bien à vous

77 Dernière modification par yd (22-04-2014 13:06:33)

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

Je dirais que la philosophie est la discipline, même en ce qu'elle est une discipline, la plus mal enseignée au lycée, et que de toute façon, sans prendre le temps de partir des Grecs, on y pédale dans la choucroute. Combien de lycéens, et combien de bac + 40, n'ont-ils jamais entendu parler de Parménide, et ne sont-ils jamais allés au-delà, chez Cicéron, du raseur phraseur ambulant déambulant ? À Rome au forum c'était tous les jours qu'on rasait gratis : l'apocope du poil de barbe à l'aube de l'heure moderne qui inventa la télévision, le rasoir électrique qui n'attend pas Madame d'ores et déjà que pousse la barbe.

Fille légère ne peut bêcher.

Re : L'apocope... Pourquoi "couper la queue" aux mots ?

éponymie a écrit:

Serait-ce une histoire de définition ?

Effectivement cette chute de la voyelle finale (parfois de la syllabe finale) n'est pas assimilable à une apocope  tel qu'on l'entend en français : comme pour "un bel homme" en français, il s'agit d'euphonie. Tout comme il arrive d'ajouter un d à e, o et a devant une voyelle.

On met un même mot - apocope - sur deux phénomènes très diffèrents; d'ailleurs l'italien parle de troncamento pour les cas que tu donnes, tout en connaissant par ailleurs le terme apocope. Comme le signale les grammaires de l'italien (dont celle de François Revardeaux), l' "apocope" italienne obéit à des règles assez bien définies, le mot change de forme sous certaines conditions. C'est la terminologie française pour parler de l'italien qui pêche.

L'apocope française est inconditionnée, irraisonnée, souvent systématique et n'entre pas dans les grammaires de base au contraire de l'italien. C'est ce que percevait bien iMario lorsqu'il a lancé le fil : il ne lui est pas venu à l'idée de comparer le phénomène français à la "troncation" italienne.

P.S. : Oliglesias était réticent à admettre que l'apocope soit un produit du langage familier, alors l'argot...

Effectivement, il ne faut pas confondre ces deux phénomènes.
Sinon, je voudrais préciser que je considère l'apocope (dont on parle dans ce sujet) ou la troncation (pour être plus clair) comme un phénomène naturel, effectivement, probablement plus utilisé dans les différents argots mais qui ne se limite pas à ceux-ci.
Le mot "ciné" (double troncation: cinématographe > cinéma > ciné) en est un exemple.
Il faut préciser aussi que souvent on se retrouve avec des "doublons" où le mot tronqué apporte souvent une nuance présentant un référent plus "concret". Prenons comme exemple le mot "manifestation": il a deux acceptions
(voir http://www.cnrtl.fr/lexicographie/manifestation )
La seule qui puisse être tronquée est la deuxième. La première ne peut pas l'être.
Si on prend d'autres mots (les maladies par exemples), on voit bien que, bien que leur emploi soit "familier", ces apocopes permettent d'introduire une nuance. Dire d'une personne qu'elle est "schizo" ne veut pas dire que cette personne souffre de "schizophrénie".
Par contre, on peut aussi observer l'apparition de tout un tas de mots tronqués dans certains sociolectes (ou argots) comme par exemple chez les étudiants (prof, dissert, compo, exam, etc.)

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