Bonjour,
Je poursuis ci-dessous cette discussion d'un point de vue strictement linguistique. Mais c'est une légère dérive par rapport au post initial - veuillez m'en excuser.
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gb a écrit:Je pense qu'une partie de notre gêne tient au fait qu'on se demande si c'est « correct », et qu'on n'en est pas bien certain, ce qui fait qu'on hésite par scrupule.
Oui, il faut être attentif à ne pas imposer de prescriptions inédites et imaginaires là où les ouvrages normatifs de référence ne sont pas unanimes ou encore là où ils ne disent rien. Dans ces cas privilégiés où les faits de grammaire ne sont pas (encore) devenus des faits de société, il est loisible de réfléchir.
En l'occurrence, le silence ou la timidité des grammaires normatives s'explique aisément, ces données remettent en question un des piliers de l'enseignement scolaire: l'opposition entre épithète et attribut (dichotomie héritée de l'analyse logique du langage synthétisée par les Messieurs de Port Royal: de nombreux faits de langue ne se lovent pas dans ce lit de Procruste. Quand on pense que les descriptions du chinois ou du vietnamien utilisent ces notions...).
Il ne faut pas non plus s'étonner des différences d'appréciation entre locuteurs (voyez notre désaccord avec gb sur les fleurs écloses): tout le monde a sans doute "raison", simplement nous imaginons plus ou moins aisément les contextes correspondants. Je ne pense pas qu'il soit possible de réfléchir à ces faits hors contexte, sauf pour des énoncés qui se laissent facilement insérer en contexte: (1) Il nous reste une place de libre ne posera de problème à quasiment aucun locuteur de français, je crois.
Un questionnaire diffusé à mon entourage confirme mon impression. J'ai essayé de sauver l'énoncé (b) repris par gb en ajoutant un complément de lieu et une restriction sur la quantité:
(b') Dans mon panier, il y avait seulement une fleur d'éclose.
Les cinq locuteurs consultés disent que cela paraît bizarre (certains demandent d'épeler la séquence [dekloz], ne la comprennent guère, l'admettent du bout des lèvres dans une conversation très familière)
En revanche, tout le monde accepte sans broncher
(a') Zut, il y a encore une fleur de fanée
Il semble qu'il faille un ensemble de termes existants, et que ces termes soient successivement affectés par un procès qui les fait disparaître. Cela explique pourquoi cettte construction fonctionne si bien avec les places libres, les fleurs qui se fanent etc. De la même façon, on dit sans difficulté:
(c) Encore une heure de perdue
(d) C'est toujours une heure de gagnée
qui renvoie au cadran horaire.
A vérifier toutefois (exemple légèrement tangent):
(e) ? Encore un lien de mort sur ce site.
Edit. Piot a entièrement raison d'insister sur la distinction importante entre participes (attention toutefois de ne pas parler de "conjugaison": les participes ne sont pas des formes conjuguées) et adjectifs. Comme lui, j'ai l'impression qu'on rencontrera ici peu d'adjectifs non dérivés de verbes. En outre, libre peut être associé à libéré. Quant à mort, il est à part.