Une histoire très intéressante, avec 5 formes modernes issues du latin, qui exemplifie à merveille nos proto-gallo-roman, gallo-roman et roman-nord-occidental.
Lire au préalable la discussion - datant d'il y a deux ans (comme quoi rien ne se perd ) - dans ce fil : http://www.languefrancaise.net/forum/vi … 56#p125156
Au début :
Latin : vipera
Proto-gallo-roman : entre le IIe et le IIIe siècle, en Gaule, altération en wipera (terme non attesté) sous l'influence de locuteurs germaniques.
Le passage du [p] au [v] se comprend aisément avec l'intermédiaire du [b] (voir certains locuteurs hispanophones qui ne distinguent pas le [v] du [b]) mais je ne sais pas le dater : il est certainement très ancien puisque qu'on le retrouve dans quasiment tous les avatars de vipera.
Dans les zones de plus fraiche latinisation :
Gallo-roman : au Ve, affrication en gw
Gallo-roman : au VIe, perte du w
Ancien français (à partir du IXe) : aboutira à la forme moderne guivre
Ancien français (XIIIe) : emprunt au latin vipera, d'où la forme moderne vipère
Dans les zones frontières de la Gaule plus assimilées (je me concentre sur le nord mais cela vaut aussi pour la frontière du Rhin et la zone du franco-provençal) :
Roman-nord-occidental (entre Ve et VIIe) : transmission du terme proto-gallo-roman avec seule perte du a final
Ancien normand (et ancien picard) : wivre
Ancien normand et ancien picard (XIIe) : vouivre d'où les formes modernes vouivre et vivre
Moyen anglais (ca 1300 ) : emprunt au normand, d'où la forme wiver d'où la forme en anglais moderne qui nous est très récemment revenue sous les formes wyvern, wyverne, la finale en [n]résultant d'une altération
Bien entendu d'autres dialectes du couloir romanique de René Lepelley sont susceptibles d'avoir généré une forme vouivre. Cf. ce message pour se rafraichir la mémoire.
Cela donnera du vert et du bleu. Il me fallait d'abord rédiger ce message pour pouvoir le mettre en commentaire sur le site.
Encore une fois, pour trouver un étymon commun à toutes les formes autres que vipère, on ne peut pas faire autrement que remonter au minimum au IVe siècle, è une époque où le latin était encore plus que vivant : contrairement à ce que l'on lit dans le TLF, vivre n'est pas à considérer comme une variante de guivre, c'en est une lointaine cousine, mais seulement de vouivre.