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forum abclf » Réflexions linguistiques » Conditionnel Passé 2e Forme

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Messages [ 17 ]

Sujet : Conditionnel Passé 2e Forme

Salut à vous.

Comme premier message je vais vous posez une question qui me tracasse un peu.
Tout bon français sait qu'après un Si on emploie l'imparfait et non le conditionnel présent ni le conditionnel passé.  Est-ce que l'emploie du Conditionnel Passé 2e Forme après le Si est une erreur.

Exemple: Si j'eusse parlé français, je n'aurais plus besoin de cours.

(Je ne sais pas si l'exemple est bon, mais je suis certain que vous comprennez quand même ma question.)

Une réponse serait appréciée et merci d'avance.

Bonne journée!

2 Dernière modification par Andreas (07-03-2006 23:25:07)

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Je crois que ce n'est pas une faute.
Torsade de Pointe semble avoir donné déjà la réponse dans un autre sujet dans ce forum.

Ceci devient vraiment insignifiant. - Pas encore assez.

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Et bien, j'ai lu le lien que tu m'as envoyé. Et je n'ai pas trouvé une réponse qui répondait à ma question.  Peut-être ai-je mal lu. En tout cas, merci quand même.

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Bonjour Mariano,

Alexandre Dumas a écrit dans Le Collier de la Reine :
- Monseigneur, répondit Cagliostro, j'ai prêté cinq cent mille livres à monsieur de Rohan. Monsieur de Rohan me doit cinq cent mille livres, et pas autre chose. Si j'eusse désiré toucher des intérêts, je les eusse stipulés dans le reçu...

Et François Villon a écrit dans Je plains le temps de ma jeunesse :
[...]
Hé ! Dieu, si j'eusse étudié
Au temps de ma jeunesse folle
Et à bonnes meurs dédié,
J'eusse maison et couche molle !

Mais quoi ? Je fuyaie l'école,
Comme fait le mauvais enfant.
En écrivant cette parole,
À peu que le coeur ne me fend.
[...]

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Mariano a raison, le conditionnel ne peut se trouver dans la subordonnée par "si"; dans les exemples cités, Dumas et Villon emploient le ... subjonctif plus que parfait; il est vrai que cela ressemble à un tour de passe-passe, néammoins ce subjonctif est exactement identique au passé 2° forme du conditionnel; c'est un héritage du latin ( subj. plus que pft pour l'irréel du passé) et une tournure très littéraire, sans véritable nuance de sens par rapport à " si j'avais désiré", "si j'avais étudié" (toujolurs du plus que pft, mais indicatif cette fois); on dit souvent que la tournure avec le subjonctif exprime davantage le regret que celle avec l'indicatif, ce qui est parfaitement justifié dans le vers de Villon, mais pas du tout dans la phrase de Dumas.
En revanche, dans l'exemple "Si j'eusse parlé français, je n'aurais plus besoin de cours", la concordance des temps est imparfaite, il vaudrait mieux dire:"Si j'eusse parlé français, je n'aurais plus eubesoin de cours" (autrefois); dans la subordonnée, on a employé le subjonctif, dans la principale, le conditionnel.

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

J'aimerais savoir si vraiment en français il existe parallèlement ces deux formes : le conditionnel passé deuxième forme et le plus-que-parfait du subjonctif, car je pensais toujours qu'il ne s'en agissait qu'une mais avec deux appellations différentes, dont la première est impropre.

Merci d'avance !

7

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Tout à fait d’accord avec Martina: la phrase de M. Mariano est incorrecte en raison d’une «discordance» des temps. Les possibilités sont en effet:
Si j'avais parlé français, je n'aurais plus eu besoin de cours (au passé), et:
Si je parlais français, je n'aurais plus besoin de cours (au présent).

Dans la phrase au passé, tant le plus-que-parfait de la subordonnée conditionnelle que le conditionnel passé 1re forme de la principale, ou les deux, peuvent être remplacés par ce qu’il est convenu d’appeler le conditionnel passé 2e forme, lequel n’est autre que le plus-que-parfait du subjonctif. Les possibilités pour le passé sont donc:

Si j'avais parlé français, je n'aurais plus eu besoin de cours.
Si j'eusse parlé français, je n'aurais plus eu besoin de cours.
Si j'eusse parlé français, je n'eusse plus eu besoin de cours.
Si j'avais parlé français, je n'eusse plus eu besoin de cours.

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

... sans oublier :
Eussè-je parlé français, que je n'eusse pas eu besoin de cours.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

ou encore:
eusé-je parlé français, je n'avais plus besoin de cours!
emploi de l'imparfait en fonction de conditionnel, signalé dans un autre sujet, par Torsade de Pointe je crois bien.
Pour répondre à Orientale: oui, il existe bien 2 conjugaisons tout à fait identiques, l'une du sbj plus que pft, l'autre, du conditionnel passé 2° forme; ce n'est pas une appellation impropre.

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Orientale a écrit:

J'aimerais savoir si vraiment en français il existe parallèlement ces deux formes : le conditionnel passé deuxième forme et le plus-que-parfait du subjonctif [...]

Merci, Orientale de m'ouvrir les yeux : je n'avais jamais fait attention que, dans mon Bescherelle de Conjugaison, à chaque page, en bas de chaque tableau, écrite en petit comme une clause de contrat d'assurance, on trouve la phrase magique : " Conditionnel passé 2è forme : mêmes formes que le plus-que-parfait du subjonctif. ".
  Je n'avais même jamais remarqué qu'il existât.

elle est pas belle, la vie ?

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Martina :

eussé-je parlé français, je n'avais plus besoin de cours!
emploi de l'imparfait en fonction de conditionnel, signalé dans un autre sujet, par Torsade de Pointe je crois bien.

Eh bien, à vrai dire, je ne m'en souviens plus très bien. Quoi qu'il en soit, la phrase eussé-je parlé français, je n'avais plus besoin de cours me paraît un peu bizarre; j'ai des doutes quant à sa correction. Bien sûr, l'imparfait est de règle dans la subordonnée conditionnelle au présent, mais je ne pense pas qu'on puisse l'utiliser dans la principale, où c'est le conditionnel présent qui doit être utilisé obligatoirement («si j'avais beaucoup d'argent, je m'achèterais...»).

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Oui, mais nous sommes là dans l'irréel du présent, et même l'irréel du passé. L'imparfait est parfaitement correct en ce cas, et même littéraire. Wagner et Pinchon citent cet extrait de Stendhal :

[le mulet] me renversa. « Un peu plus, il était mort », disait mon grand-père.

Les auteurs commentent :

il représente l'enfant qu'était alors Stendhal. Cet il était mort exprime dans le passé une possibilité imminente.

Les mêmes auteurs dénient toute existence au conditionnel passé seconde forme. Ils écrivent :

En français moderne, dans la langue parlée, c'est au conditionnel passé qu'est dévolu le rôle d'évoquer une éventualité passée non réalisée.
Dans la langue écrite cette forme alterne encore souvent, chez les bons écrivains, avec le plus que parfait du subjonctif.

Ce qui est en effet plus logique que de supposer deux tiroirs verbaux rigoureusement homonymes et de sens différent. Le plus que parfait du subjonctif exprime l'éventualité passée non réalisée, en latin irréel du passé, c'est tout simple ! Inutile de le rebaptiser pour la circonstance...
On se croirait dans l'Avare : « C'est à votre cocher, monsieur, ou à votre cuisinier que vous vous adressez ? »

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Conditionnel Passé 2e Forme

martina a écrit:

Pour répondre à Orientale: oui, il existe bien 2 conjugaisons tout à fait identiques, l'une du sbj plus que pft, l'autre, du conditionnel passé 2° forme; ce n'est pas une appellation impropre.

Ma question venait de ce que j'avais pu lire dans le Rapport du Conseil supérieur de la langue française (publié dans les documents administratifs du Journal officiel du 6 décembre 1990) que je cite :

[...]
En conséquence, on conserve l’accent circonflexe sur a, e, et o, mais sur i et sur u il n’est plus obligatoire, excepté dans les cas suivants :
[...]
Au plus-que-parfait du subjonctif, aussi nommé parfois improprement conditionnel passé deuxième forme (troisième personne du singulier) :
[...]

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

P'tit prof a écrit:

Oui, mais nous sommes là dans l'irréel du présent, et même l'irréel du passé. L'imparfait est parfaitement correct en ce cas, et même littéraire. Wagner et Pinchon citent cet extrait de Stendhal :

[le mulet] me renversa. « Un peu plus, il était mort », disait mon grand-père.

Les auteurs commentent :

il représente l'enfant qu'était alors Stendhal. Cet il était mort exprime dans le passé une possibilité imminente.

Et  Hugo (cité par Grevisse, avec d'autres exemples), écrit: "s'il n'avait pas plu dans la nuit du 17 au 18 juin 1815, l'avenir de l'Europe était changé. "
Il est vrai que l'emploi de l'indicatif actualise le procès: c'est un irréel, mais si proche de la réalité (il s'en est fallu de si peu, quelques gouttes de pluie!) qu'on lui ouvre le droit à l'indicatif.
à noter que Grevisse aussi nie l'existence d'un passé 2° forme du conditionnel:" la langue littéraire peut mettre, dans la subordonnée et la principale, (...) le plus- que- parfait du subjonctif, équivalant, dans la subordonnée, au plus-que-parfait de l'indicatif, et dans la principale, au conditionnel passé" (p.1193). Et de renvoyer à un § 740 où il précise:" le plus-que parfait du subj. peut avoir, notamment dans les propositions conditionnelles, le sens du conditionnel passé (= seconde forme du conditionnel passé). Il faut se garder de confondre cette seconde forme du conditionnel passé etc..." mais quelques lignes plus loin: "H. Yvon fait judicieusement remarquer : il ne faut attribuer au conditionnel passé qu'une forme: j'aurais fait"

Orientale a écrit:

Ma question venait de ce que j'avais pu lire dans le Rapport du Conseil supérieur de la langue française (publié dans les documents administratifs du Journal officiel du 6 décembre 1990) que je cite :

[...]
En conséquence, on conserve l’accent circonflexe sur a, e, et o, mais sur i et sur u il n’est plus obligatoire, excepté dans les cas suivants :
[...]
Au plus-que-parfait du subjonctif, aussi nommé parfois improprement conditionnel passé deuxième forme (troisième personne du singulier) :
[...]

merci de nous signaler cet extrait, et de  poser ce problème; le débat est ancien , puisque déjà mon édition de Wagner et Pinchon (1962! mais c'est un héritage) analyse le verbe de la principale comme un subjonctif plus-que-parfait! Je ne sais pas quand a pu naître la confusion, mais il me semble qu'elle est ancienne aussi. Je vais me livrer à quelques recherches.

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

P'tit Prof :

Oui, mais nous sommes là dans l'irréel du présent, et même l'irréel du passé. L'imparfait est parfaitement correct en ce cas, et même littéraire.

En effet, oui. À tous les exemples déjà cités, j’ajoute ceux que je trouve dans le Bon Usage, avec l’explication de Grevisse:

Un imparfait de conséquence infaillible, marquant un futur du passé et se substituant à un conditionnel passé pour indiquer la certitude :
Cette sérosité qui est tombée sur vos jambes, où en ÉTIONS-nous si elle fût tombée sur votre poitrine ? (SÉV., 13 sept. 1677.) - Elle mit la main sur le loquet. Un pas de plus, elle ÉTAIT dans la rue (HUGO, Les Misér., I, 5, 13). - Si vous n'étiez pas venu, je vous FAISAIS appeler (A. FRANCE, L'Orme du mail, p. 62). - Sans moi, vous LAISSIEZ éteindre le feu! (R. MARTIN DU GARD, Jean Barois, p. 35.) - Il n'avait qu'à parler et je lui CHANGEAIS son verre (J. RENARD, Poil de carotte, Honorine).

Mais cependant... Je relis la phrase «Eussé-je parlé français, je n’avais plus besoin de cours»; si elle m’apparaît correcte à présent, elle ne me semble pas avoir le même sens que «si j’eusse parlé français, je n’avais plus besoin de cours». La phrase «Eussé-je parlé français, je n’avais plus besoin de cours» ne doit-elle pas s’entendre comme: «Eussé-je même parlé français, je n’avais plus besoin de cours», c’est-à-dire : «même si j’avais parlé français, je n’aurais pas eu besoin de cours» (ce qui serait un peu un contresens ; on s’attendrait plutôt à: «même si j’avais parlé français, j’aurais eu besoin de cours de toute façon»).

Est-ce que je m’embrouille ?

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

Le passage du Bon Usage cité ci-dessus est le §718, 3e.

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Re : Conditionnel Passé 2e Forme

On trouve aussi, chez Pascal, la phrase suivante:

Le nez de Cléopâtre : s'il eût été plus court, toute la face de la terre aurait été changé. (P.180), où eût été est bien un conditionnel passé 2e forme.

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