Sujet : Variantes lexicales de la francophonie (démanché, débordé)
Deux termes entendus le même jour, lors d'une conversation avec deux dames camerounaises en visite en Europe m'ont surprise et même embarrassée pour le second.
Précisons au préalable que ces deux personnes sont bilingues, ayant pour langue maternelle l'éton, une langue bantoue, et le français pour langue seconde, utilisée à l'école et dans les administrations. Elles parlaient d'ailleurs un français soigné, exempt de tournures fautives ou de familiarités.
Les deux mots en question appartiennent à la langue courante, mais étaient utilisés dans un sens tout à fait inhabituel sur l'Hexagone. Comparant le beau soleil ( parler de la pluie et du beau temps, quoi de plus facile? ) de leur pays aux frimas du Luxembourg , l'une d'elle me dit qu'à « Yaoundé, on se promenait démanché » Une tournure ancienne, réminiscence de l'époque où les manches étaient amovibles? Pourtant, nulle trace dans le Littré par exemple, ni dans les anciennes éditions du dictionnaire de l'Académie?
Quelques moments plus tard dans la conversation, l'autre, restée jusque là silencieuse, expliqua suite à une remarque amusée d'une tierce personne sur son mutisme, qu'elle n'était pas timide, mais « qu'il y a des moments où on est tant débordé qu'on ne peut que se taire. »
Sachant que nous devisions, assises autour d'une table chargée de mets pour un banquet de noces et qu'elle n'avait rien d'autre à faire qu'à déguster, converser et se divertir, comment comprendre ce débordé-là?
Dépaysée? C'était pour elle un premier voyage hors d'Afrique, un premier contact avec le monde européen. Le changement de bord, de lieu aurait été si important qu'elle en aurait perdu le goût de parler?