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forum abclf » Réflexions linguistiques » Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

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Sujet : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Sur la suggestion de Colline d'or, j'ouvre ici un nouveau dossier consacré à la chasse au serpent de mer, je veux dire à l'insaisissable réforme de l'orthographe.

Je le fais dans l'esprit suivant :
examiner la question, et proposer les moins mauvaises solutions, étant entendu que les bonnes n'existent pas... et que nous n'avons aucune autorité d'aucune sorte !

Que tous ceux qui ont des questions, des propositions, des idées, les notent ici, sans se prendre pour d'infaillibles pontifes, et sans se sentir attaqués personnellement par ceux qui signaleront des failles dans le raisonnement, ou feront des propositions différentes.

Je suggère avant de commencer une bonne prise de Nina Catach (L'orthographe, en Que sais-je ?), suivie d'une pincée de Plumons l'oiseau et d'une goutte de la Grammaire historique de Ferdinand Brunot.

Pourquoi ? parce qu'il n'est pas mauvais de profiter des travaux des prédécesseurs, que cela évite, par exemple, de parler des diphtongues du français, qui ayant disparu entre le Moyen-Age et la Renaissance ne sont plus du tout une préoccupation pour ceux qui veulent écrire au XXIe siècle.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

Sur la suggestion de Colline d'or, j'ouvre ici un nouveau dossier consacré à la chasse au serpent de mer, je veux dire à l'insaisissable réforme de l'orthographe.

Et donc un énième fil sur le même sujet ? Si vous souhaitez que ce soit le seul lieu de débats, et non pas un terrain supplémentaire offert aux bagarres, il vous faudrait clore les autres fils et renvoyer sur celui-ci. Un modérateur peut le faire, non ?

N.B. Le titre est amusant, mais pas très informatif pour les nouveaux venus.

3 Dernière modification par Bookish Prat (02-07-2009 06:48:26)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

[...] une goutte de la Grammaire historique de Ferdinand Brunot.

Cher P'tit prof, je ne résiste pas au plaisir de développer le titre complet du Précis de Grammaire historique de la langue française de Fernand Brunot et Charles Bruneau (ce dernier fut l'élève du premier et la juxtaposition malicieuse de leurs patronymes est, en elle-même, évocatrice des charmes de l'ouvrage tongue). Ce livre,  publié en 1937, n'est pas facile à trouver mais il est téléchargeable sur http://www.archive.org/details/prcisdegrammai00brunuoft  Qui a dit qu'un livre de grammaire devait être ennuyeux ?

Or, taux, gras, feux... Un fil dédié à LA réforme de l'orthographe ?
Je m'étonne que l'on ne rappelle pas plus souvent aux intrépides réformateurs qui s'agitent sur abc que les judicieuses rectifications orthographiques de 1990  sont applicables et licites depuis bientôt vingt ans et que les réticences «idéologiques» à leur application viennent principalement de France (Belgique, Suisse, Canada,  les appliquent sans drame — j'en suis moins sûr pour d'autres pays francophones) et plus précisément des administrations, le corps professoral n'étant pas le dernier à en freiner l'application (par méconnaissance, le plus souvent).
La première rectification, par exemple, qui est une merveille de logique cartésienne : Les numéraux composés sont toujours reliés par des traits d'union. Elle permet enfin de distinguer  vingt-et-un centièmes (21/100) de vingt et un centième (20 + 1/100). Eh bien on est tout surpris  de constater que certains grincheux s'obstinent à biffer deux traits d'union de deux-cent-vingt-et-un ! Si ! si ! wink

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

4 Dernière modification par Naïf (02-07-2009 14:42:40)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Colline d'or a écrit:

Trop de théorie devient inutile quand il s'agit de résoudre des questions concrètes : il m'est arrivé de participer à une discussion sur un autre forum sur la pronominalisation avec en et c'était surprenant de voir combien linguistes et grammairiens (personnes bien plus qualifiées que moi) étaient incapables de se mettre d'accord sur une représentation théorique de la réalité, ce genre de discussion ne fait en rien avancer les choses.

Si vous envisagiez de réformer le système de pronominalisation, effectivement, vous n'étiez pas dans la compagnie requise s'il s'agit d'un forum visité par des spécialistes de la description des langues!

Pardon, bien sûr, de paraître un peu rêche et persifleur, mais bon sang de bois: depuis quand est-il devenu facile de s'entendre sur une représentation théorique de la réalité? Comment pouvez-vous une seule seconde envisager que cela soit "facile" alors que tout prouve le contraire. On avance par approximations successives, par essais et erreurs, choisissant à chaque fois la solution... "la moins pire" comme disent les gamins. Quant à la relation entre "théorie" et "questions concrètes", dites-vous qu'elle est beaucoup plus compliquée que cela: les théories font apparaître tel ou tel aspect de la réalité, à laquelle vous n'accéderez pas sans elles. Tout ce que vous pouvez espérer, c'est la vivre (quoique certains ont émis des doutes),  ou, justement, la transformer... ce qui est aussi un mode de connaissance, comme on sait.

Lorsqu'on souhaite s'entendre sans difficulté, on construit ce qu'on appelle des axiomatiques (le livre de Blanché sur la question est à coup sûr dans Google Books). L'algèbre, la géométrie, la logique formelle sont des axiomatiques. Et reposent sur des lexiques et des règles de combinaison et de calcul déclarées. Plus ou moins en accord avec la réalité (1+1=2 n'est pas vrai dans toutes les situations de la vie), et modifiables: l'espace n'est pas forcément euclidien.

Avec les faits de langue, et l'écriture aussi dans la mesure où elle relève aussi de la sémiotique (cf. TLF), vous n'êtes pas dans une axiomatique. Jusqu'à présent, on ne connaît dans ce domaine que les bidouillages, toujours temporaires et jamais totalement satisfaisants. Et c'est une des forces des écritures: elles sont perfectibles.  A contrario, vous ne pouvez pas amender une axiomatique, vous pouvez seulement en construire une autre.

Vous souhaitez avancer des propositions d'amendement de l'orthographe. C'est une des préoccupations les plus partagées - toutes langues écrites confondues - sur la surface du globe. Avec d'ailleurs de surprenantes constantes d'une langue à l'autre, même lorsqu'on change de culture et de continent. Cela fait sans doute partie du mode d'existence des écritures;  il est plus rare qu'on cherche consciemment à amender de manière systématique autre chose que l'écriture (les contre-exemples se reproduisent d'une langue à l'autre, et sont liés aussi au développement des sociétés: la féminisation des noms de métier, les emprunts etc.)

Et vous avez bien évidemment tout loisir de vous lancer dans cette affaire: Dieu soit loué, la langue n'est pas le pré carré de ceux dont le métier est de la décrire.  Mais on est loin, ce faisant, de chercher un consensus sur "la réalité". Ne vous trompez pas de cible...

Cela dit, bon courage!

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Autre chose : je proposais d'ouvrir autant de fils que de points très concrets à aborder dans le cadre d'une éventuelle réforme,

... ce qui me semble, à moi, très difficile à réaliser : quels sont-ils, ces points très concrets ? Il faudrait les lister, et, bien entendu, on en oubliera...
De plus, points concrets ou pas, il se produira des digressions.

Comme l'inéluctable fatum de ce genre de dossiers est de finir en fourre-tout, il me semble que nous gagnerons un temps fou en commençant en fourre-tout !
Rien n'empêche les intervenants de donner un titre à leur intervention, titre que reprendront ceux qui voudront compléter :
par exemple : tirets, 1, tirets 2, et ainsi de suite.

L'ai-je assez répété ? L'actuelle orthographe du français est un maquis. Elle ne manque pas de logique, mais elle superpose plusieurs logiques différentes et opposées.
Un aménagement partiel est impraticable, la preuve ! La frilosité des éditeurs qui ne l'utilisent pas explique, en partie, la chute de la dernière réforme en date.
Un réaménagement total est impossible, sauf à inventer un nouvel alphabet et à fixer de nouvelles conventions.

Si j'ai ouvert ce dossier, c'est pour permettre à  ceux qui ont des choses à dire de les dire. Je n'en attends pas la Nième réforme !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Sur les traits d'union  1:

La première rectification, par exemple, qui est une merveille de logique cartésienne : Les numéraux composés sont toujours reliés par des traits d'union.

Merveille de logique cartésienne, en effet !

Citation 1 :

Le trait d'union ne sera pas exigé entre le mot désignant les unités et le mot désignant les dizaines. Ex : dix sept.

Citation 2 :

L'usage place un trait d'union entre les éléments d'un adjectif numéral qui forment un ensemble inférieur à cent.
On admettra l'omission du trait d'union.

Le texte 1 est tiré de l'arrêté de tolérance de 1901 (inconnu au bataillon et jamais appliqué), le texte 2 est tiré de l'arrêté de tolérance de 1976 (inconnu au bataillon et jamais appliqué). On note donc qu'en l'espace de soixante quinze (na !) ans, la doctrine n'a pas varié.
En 1990, soit quatorze petites années plus tard, ce trait d'union facultatif devient obligatoire !
Seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, mais je refuse à  voir du cartésianisme dans une telle volte-face.

Volte-face, justement. Ceux qui préconisent volteface ne se sont jamais penchés sur la lecture, son apprentissage et les conditions de lisibilité. L'œil discrimine, et l'intelligence perçoit mieux les petites unités. C'est le phénomène qui rend difficile à déchiffrer, et difficile à mémoriser, le fantaisiste anémélectropedalireculombrosoparacloucycledu savant Cosinus, l'immortelle création de Christophe.
Les traits d'union sont nécessaires à désagglutiner les grumeaux qui seraient sans lui illisibles. Je ne plaide pas pour leur maintien à tout prix, mais qu'on mette une espace à la place :
on écrit bien pomme de terre, écrivons arc en ciel. La réforme de 1990 prône arcenciel. Si on écrit arcenciel, dans cinquante ans d'ici, quand  sera mort le dernier francophone à avoir appris le mot à l'oreille, l'arc-en-ciel deviendra un arsensiel, de même que gageure rime désormais avec beurre.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Ce n'est pas le côté affectif qui m'a fait bondir devant les diphtongues, c'est le côté pédagogique, voire pédago : la diphtongue n'existe plus en français, c'est un constat phonétique.
Je bondis de la même façon quand certains voient des pieds dans les vers français qui ne se comptent que par syllabes.
Rien d'affectif à militer pour la propriété des termes !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Colline, zavé pas honte ? big_smile

http://observatoire-de-la-langue.com/IMG/jpg/balance.jpg

Allons, comme souvent, Grevisse est de bon et sage conseil:

La plupart des linguistes réservent le nom de diphtongue au groupe formé de deux voyelles réunies en une seule syllabe , comme dans l'allemand Baum [ baum] et dans l'anglais boy
[ b?i]. Dans ce sens, il n'y a pas de diphtongues en français.

Il vaut donc mieux renoncer à parler de diphtongue à propos d'un groupe voyelle+ semi-voyelle ou semi-voyelle+voyelle.

«abjuro, maledico et detestor supradictos errores» wink

Poursuivez donc sereinement cette riche réflexion, sans affect.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

9 Dernière modification par Naïf (02-07-2009 18:16:07)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Colline d'or a écrit:

Ce consensus dans l'analyse se justifie par contre pour le système verbal : tout francophone sait l'utiliser mais les représentations diffèrent, la représentation traditionnelle en groupes n'aide en rien à comprendre la logique de la conjugaison, il existe depuis longtemps une autre représentation (radical/désinence) toute simple

Oui, mais non: ce n'est pas "tout simple" quand on a pigé qu'il existait aussi des désinences, ce qu'on sait depuis belle lurette. Le hic, c'est qu'on ne sait pas toujours les découper, ces fichues désinences et qu'on est même tout à fait sûr qu'il ne faut pas toujours les découper. S'il y a consensus, il se dessine progressivement ici.

Les objectifs que l'on se fixe doivent être à la mesure de l'information qu'on veut bien récolter, plus largement: de l'effort qu'on est prêt à consentir.

Le prêt entre bibliothèques fonctionnant parfaitement en Italie, je vous livre les références générales que je recommande ces temps-ci comme première approche de cette question, tous ces textes font très grand cas de la question de l'écriture (Dubois privilégie l'oral, commencez par lui, puis passez à Pinchon et Couté, puis  Huot,  Touratier et Shane, enfin aux autres qui impliquent la connaissance des précédents. A peine un mois de lecture)

Dubois, Grammaire structurale du français: le verbe, Paris, Larousse, 1967.
Huot, Morphologie. Forme et sens des mots du français, chap. 11, Armand Colin, 2001.
Pinchon et Couté, Le système verbal du français, Nathan, 1980
Plénat, "L' 'autre' conjugaison ou De la régularité des verbes irréguliers", Cahiers de grammaire, 3, 1981.
Shane, French Phonology and Morphology, Cambridge, MIT Press, 1968.
Touratier, Le système verbal français, 1996.
Voguë (de), « Ni temps, ni modes : le système flexionnel du verbe en français.», in Vogeleer ,  Borillo,  Vuillaume,  Vetters (eds)  "La modalité sous tous ses aspects", Cahiers Chronos 4, Rodopi, Amsterdam-Atlanta, 1999, pp. 93-114.

Sur l'accent aussi, il y a de quoi faire, vous pensez bien. Pour l'instant, j'en reste à ça, vu que vous aurez ainsi une idée des questions que soulèvent pour l'orthographe des verbes français, en vrac: le fonctionnement du yod et des consonnes finales non prononcées et du "e" muet, la très difficile question de la segmentation en radical-désinence, le rapport entre syllabation et degré d'aperture des voyelles (et l'accent...).

Notez, vous aurez aussi les participes et adjectifs verbaux dans le même paquet. Votre premier point.

EDIT.  Argh, discussion sur  les "diphtongues" pendant que je partais à la pêche de Shane. En gros, l'idée est qu'il faut distinguer le français hexagonal (au moins) d'une langue comme l'anglais, diphtongueuse à souhait.

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

colline d'or a écrit :
la désinence ent des adjectifs, devient ant

Présant
Absant
Latant
Clémant
Innoçant
Décadant

Vous êtes sûr de ce que vous proposez ?
C’est démant !
S

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Questions de méthode, 1

Colline d'or :

Mais il me semble que ce qui est important pour parler de transcription des sons, c'est de parler de phonèmes et de les connaitre. Pourquoi, dans ce cadre, les diphtongues vous posent-elles problème ? Si quelqu'un dit que la séquence [aj] est une diphtongue et si un autre n'est pas d'accord, est-ce que c'est un obstacle insurmontable dans la discussion qui consisterait à savoir comment écrire cette séquence (ail, aille, ay, aye, ...) ?

C'est en effet un obstacle insurmontable dans la transcription des phonèmes que d'ignorer la nature exacte des dits phonèmes.
Il existe une définition de la diphtongue, faite par les phonéticiens, et ce qui ne répond pas à cette définition ne doit pas être désigné de ce nom.
Ce n'est pas du nominalisme, c'est de la rigueur intellectuelle. Il s'agit d'écrire le français, il faut donc commencer par prendre une claire conscience du matériel phonétique du français.
Je vois une erreur de méthode dans la perception du mot ail comme une unique séquence : ail est parallèle à âne : monosyllabe formé d'une voyelle  + consonne. Cette syllabe peut figurer dans un mot, à l'initiale :
ailleurs, anonyme ;
dans le corps du mot :
empailleur, cancanier ;
ou en finale :
portail, bécane.

Puisque vous ne songez pas une seconde à voir une diphtongue dans la   syllabe -ane-, pourquoi en voir une dans la syllabe -ail- ?



Je parle ici ex cathedra, bien que simple soutier du secondaire : les approximations et à peu près, acceptables au café du commerce, ne saurait ici qu'obscurcir la question.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Je reprends ma casquette de modérateur pour m'adresser à Sylvain B... :

Invité

IP: 88.160.196.170
courriel Re: Or, taux, gras, feux...colline d'or a écrit :

la désinence ent des adjectifs, devient ant

Présant
Absant
Latant
Clémant
Innoçant
Décadant

Vous êtes sûr de ce que vous proposez ?
C’est démant !
S

Si c'est tout ce que vous avez de positif et de constructif à dire sur le sujet, changez de bac à sable !
Le son -an- est précisément la voyelle a nasalisée. La démence consiste à l'écrire avec un graphème autre que la lettre a.
Nous sommes au demeurant tout à fait prêts à accepter une autre proposition, du moment qu'elle est motivée et étayée de connaissances solides.

(La prochaine fois, d'ailleurs, je supprimerai purement et simplement les messages de cette encre. Je laisse celui-ci à titre d'exemple à ne pas suivre.)

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

liste des points concrets à aborder 2

Essai de typologie :

* une graphie alternative à cueil et gueil,
* la suppression des o et a dans l'e (partout où il peuvent être remplacés par une autre voyelle et où ils ne sont pas indispensables à une prononciation correcte)
    * suppression du th, du ph, du y ne générant pas de semi-voyelle
    * éventuelle suppression du m (composante d'une nasale) devant un b et un p
    * suppression du ch prononcé )k(
    * correction en  -iller des noms de végétaux en -illier
    * le g prononcé c
    * le i tréma, le y et le yod : harmonisation des conventions d'écriture
    * la désinence ent des adjectifs, devient ant
    * traitement de la chaine en
    * traitement du son k
    * traitement des lettres g et j
    * remplacement du x final par  le s (donc régularisation de certains féminins irréguliers)
    * régularisation de certains féminins (copin / copine)
    * le x prononcé )s( et )z(
    * le ti prononcé ci
    * le g muet
    * le pt prononcé t
    * les mots composés
    * suppression des doubles consonnes en b, d, f, k et p
    * traitement du cc
    * traitement du gg
    * traitement du ll
    * traitement du mm
    * traitement du nn
    * traitement du rr
    * traitement du ss
    * traitement du tt
    * traitement du zz
    * généralisation du è devant un e muet
    * suppression du h muet initial
    * remplacement du h n'appartenant à une chaine ch ou sh
    * maintien d'un accent unique sur la seule voyelle e

Tous ces points ne sont qu’un seul et même point : la correspondance phonème graphème.
Il ne sera résolu que par l’adoption de la convention : un son par signe, un signe par son, qui fonctionne déjà en créole, soit dit en passant.

* le système verbal et les adjectifs verbaux,
    * participe passé (radical et désinence) :
    * accord du participe passé (je pense à une réforme euphonique, sur le modèle de ce qui existe déjà avec l'adverbe tout)

Ces points tiennent au fonctionnement même de la langue, fonctionnement qui ne se décide pas par décrets, contrairement aux conventions orthographiques.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Sur l'adjectif  verbal 1

Il ne serait pas mauvais de réfléchir à la notion d’adjectif verbal listée par Colline d'or : le terme vient de la grammaire latine, où il désigne un fait de langue… totalement inconnu en français !
Que signifie l’expression adjectif verbal, si ce n’est la même  chose que participe : un adjectif tiré du radical du verbe.
On distingue, depuis les grammaires latines, un participe présent et un participe passé, termes très contestables déjà en latin, puisque le participe est une forme verbale qui ne porte pas de marques de temps et de personne ! Il s’agit en fait d’un participe inachevé actif, et d’un participe achevé passif. (Oui, c’est plus long à dire, mais c’est de cela qu’il s’agit ! Je me contenterais personnellement de participe actif/ participe passif.) Et ce que l’on appelle l’adjectif verbal, dans tout ça ? C’est le participe actif, fonctionnant comme un adjectif qualificatif, c'est-à-dire susceptible de prendre des marques d’accord… que le participe prenait au XVIIe siècle :

Et plus loin des Laquais, l’un l’autre s’agaçans,
Font aboyer les chiens et jurer les passans

écrit Boileau dans la satire 6.

Nous ne sommes donc plus du tout dans la convention orthographique, mais dans la description de la langue. Cependant, une description bien faite peut avoir des retombées sur l’écriture… et  nous ne sommes pas sortis de l’auberge !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Transcription du yod 2

la lettre y après une voyelle alphabétique fonctionne comme si il y avait un digramme (oi, ai) suivi d'un i (voi-iage, abbai-ie) qui s'il est suivi d'une voyelle prononcé va générer un yod.

Aïe ! (ce qui s'impose quand on parle de yod...) On dirait que vous avez pris cela dans un célèbre outil de travail dû à des auteurs dont le dévouement n'avait d'égal que l'ignorance linguistique. Ils ont accouche de trucs et de recettes mnémotechniques efficaces, mais que l'on aurait bien tort de prendre pour une description exacte de la langue.

Commençons par oublier les fameux digrammes, qui sont terriblement trompeurs. Ils servent à noter des voyelles que l'on noterait fort bien sans eux : oi, lu [wa] par exemple : digamma et a, aucune raison de mobiliser la lettre o et la lettre i !

Dans l'abbaye, par exemple, il n'y a pas la queue d'un yod : il n'y a que deux voyelles, ê et i, nettement distinguées dans la prononciation. C'est l'abeille qui offre la combinaison voyelle ê + yod.
Avec voyage nous avons la totale : digamma +a + yod + a + jé (le phonème pas la lettre !) L'étudiant en FLE serait fondé à nous demander pourquoi des deux a de ce mot, seul le second s'écrit avec la lettre a... C'est ce qui me rend partisan du : un graphème, un phonème, un phonème, un graphème, seule solution logique de l'épineux problème de l'orthographe : à chaque fois que j'entends a, j'écris a...

la voyelle i entre une consonne et une voyelle, génère un yod

Elle ne génère rien du tout, la voyelle i, elle est utilisée pour noter un yod prééxistant, dont la présence s'explique par l'étymologie.
Le i de plier note deux phonèmes : le i de pli-, le yod de -yé. Puisque deux phonèmes il y a, je pencherais pour utiliser deux graphèmes : pliyer, par exemple.

Vous avez une démarche analytique : prendre un par un les mots où figure le son yod, et leur faire un sort individuellement.
Il me semble que la démarche synthétique : décider une bonne fois (fwa) pour toutes d'une graphie unique du yod résoudrait plus rapidement le problème !
Pour noter le yod, l'API utilise la lettre j, mais il a inventé un symbole en forme de z arrondi pour noter le son jé.

Ce qui nous laisse les possibilités suivantes :
utiliser le j pour noter le yod, et le ž/Ž pour noter le son jé ;
utiliser l'upsilon pour noter le yod, et garder le j pour le son jé.

Cette seconde solution a ma préférence, mais ce n'est pas moi qui décide...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

pardon, je ne vous interromps pas, juste un bourdon:

Colline d'or a écrit:

Mais il me semble avoir compris, que de toute façon je devrais me taire, avaler des tonnes de littérature sur le sujet (et sur les autres) pour pouvoir me permettre d'oser prétendre lancer une discussion sur le sujet. Vous vous moquez.

Vous avez mal compris.  J'argumentais comme on le fait dans mon métier, et vous encourageais à aborder votre point 1, puisqu'il vous semblait simple. Il ne l'est pas. Vit (de voir), lut (de lire ne se laissent pas segmenter. Et je vous enjoignais à ne pas trop embrasser, car vous risquez de ne rien étreindre. Aider, c'est faire en sorte qu'autrui puisse faire ce qu'il veut, ou y contribuer; s'il veut trop, l'aider consiste à le lui dire.

Mais vous êtes passé au yod, et les biblios ne vous intéressent pas. Après tout, pourquoi pas? Mais de grâce, pas d'accusation de cuistrerie lorsque les c**s descendent smile

A votre disposition quand vous voudrez smile

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Colline d'or a écrit:

En ce qui concerne les verbes j'ai déjà développé quelque chose ici sur le sujet, je le referai de manière plus synthétique.

D'accord! On reparlera de la segmentation à ce moment-là.

18 Dernière modification par greg (04-07-2009 00:28:05)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Transcription du phonème /j/ dit "le yod" — 5

Où il est question de deux réalisations phonétiques distinctes du même phonème /j/ en position finale : l'une étant la queue de diphtongue [??], l'autre la consonne indépendante [j].

Rappel : un phonème n'est pas un son mais une entité abstraite assimilable à un ensemble métaphysique de sons physiques qu'on choisit de regrouper par considération structurale et non pour des motifs physico-acoustiques. C'est pour cette raison que l'appellation <yod> est bienvenue pour désigner le phone [j] et malvenue dès lors qu'il s'agit du phonème /j/.

Colline d'or a écrit:

Si quelqu'un dit que la séquence [aj] est une diphtongue et si un autre n'est pas d'accord, est-ce que c'est un obstacle insurmontable dans la discussion qui consisterait à savoir comment écrire cette séquence (ail, aille, ay, aye, ...) ?

Non, ce n'est pas insurmontable, c'est sûr. Mais il est inexact de dire que [aj] est une diphtongue puisqu'il s'agit d'une séquence composée d'une voyelle puis d'une consonne, et non de la fusion de deux voyelles. En revanche il est sûr que certains francophones disent autre chose que [t?a·vaj] pour <tra·vail>. Brigitte Fontaine, par exemple, dirait quelque chose comme [t?a?·va???], où [a???] n'est pas une séquence de deux sons mais bien une diphtongue ? un allongement de [a??] en fait. Mais que l'on dise [t?a·vaj],  [t?a?·va???], [t?a·va??] ou [t?a?·va?j], il s'agit toujours de /t?a·vaj/ dans les quatre cas.

D'ailleurs quand <tra·vail> est suivi d'un mot commençant par une voyelle, la syllabation recycle le /j/ en [j], alors même que le locuteur prononce [??] pour /j/ quand <tra·vail> est final ou isolé.

Brigitte Fontaine (phonétique)
<tra·vail> ? [t?a?·va???]
<tra·va·ille_a·vec> ? [t?a?·va?·ja·v?k]

en général (phonétique)
<tra·vail> ? [t?a·vaj]
<tra·va·ille_a·vec> ? [t?a·va·ja·v?k]

dans tous les cas (phonématique = phonologie)
<tra·vail> ? /t?a·vaj/
<tra·va·ille_a·vec> ? /t?a·va·ja·v?k/



Colline d'or a écrit:

transcription du yod - 1

voyage
abbaye

la lettre y après une voyelle alphabétique fonctionne comme si il y avait un digramme (oi, ai) suivi d'un i (voi-iage, abbai-ie) qui s'il est suivi d'une voyelle prononcé va générer un yod.

En effet :
<voy·yage> ? /vwa·ja?/
<a·bbay·ye> ? /a·be·i/.

Le dédoublement factice du graphème <y> permet de mieux cerner la contrepartie orale. Le <e> final dans <abbaye> est muet et l'on voit que <y> donne /i/. Et non pas pas /j/ comme dans <voyage> où le <a> après <y> n'est pas muet.

Ceux de nos amis qui prononcent le trisyllabique /a·b?·i/ pour <abbaye> (et non pas /a·be·i/) n'auront aucun mal à opposer ce mot au dissyllabique  <abeille> qu'ils diront certainement /a·b?j/.



P'tit prof a écrit:

Transcription du yod 2

la lettre y après une voyelle alphabétique fonctionne comme si il y avait un digramme (oi, ai) suivi d'un i (voi-iage, abbai-ie) qui s'il est suivi d'une voyelle prononcé va générer un yod.

Dans l'abbaye, par exemple, il n'y a pas la queue d'un yod : il n'y a que deux voyelles, ê et i, nettement distinguées dans la prononciation. C'est l'abeille qui offre la combinaison voyelle ê + yod.

Je crois que Colline d'or avait précisé les limitations que l'énonciation de sa règle imposait : « qui s'il est suivi d'une voyelle prononcée ». Or le <e> de <abbaye> n'étant pas prononcé, il ne saurait donc y avoir de [j] (yod) dans ce cas. Et c'est très exactement ce que tu disais aussi : « il n'y a pas la queue d'un yod ».



Transcription de la syllabe /wa/ — 1

Colline d'or a écrit:
P'tit prof a écrit:

Commençons par oublier les fameux digrammes, qui sont terriblement trompeurs. Ils servent à noter des voyelles que l'on noterait fort bien sans eux : oi, lu [wa] par exemple : digamma et a, aucune raison de mobiliser la lettre o et la lettre i !

Pourquoi voulez-vous les oublier ? Ils sont là. Pour l'instant oi transcrit le [wa]. Je décris la prononciation de abbaye : dire que le graphème y après un graphème a, o, e ou u a dans la grande majorité des cas le même valeur pour la lecture qu'un double i sert ma démonstration (et c'est efficace avec les apprenants). Doit-on refuser de parler du digramme oi parce que vous avez déjà conclu qu'il faut le supprimer ?

Bien que cela puisse surprendre les apprenants non-francophones (et même les petits francophones en cours d'alphabétisation), la syllabe [wa] peut être légitimement représentée par le digramme <oi>.

Je ne garantis pas l'exactitude de ce qui suit au détail près, mais c'est juste pour illustrer l'évolution diachronique de notre langue parlée par rapport au fixisme d'une orthographe désormais archaïsante, même si elle nous paraît "naturelle" :

<oi> = [o??] (vraie diphtongue)
?
<oi> = [u??] (vraie diphtongue)
?
<oi> = [ue?] (vraie diphtongue)
?
<oi> = [we] (XVIIe s. ? "roué d'Fronce" pour <roi de France>)
?
<oi> = [wa] (aujourd'hui)

Cela vaut-il le coup de réformer la transcription de [wa] ? Si l'on prend en compte l'extraordinaire stabilité du graphisme <oi> à travers les siècles, surtout par opposition à ses avatars sonores, le doute est raisonnablement permis.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Question de méthode 1 : les parallèles ne se rencontrent pas...

Je constate que nous avons ici un dialogue de sourds :
d'un côté, une position pragmatique, concevable (qui a fait et fait toujours la fortune d'un éditeur ) : mettre au point des trucs mnémotechniques et raboter quelques irrégularités ;
de l'autre, une réflexion théorique sur les conditions d'une bonne orthographe, d'une orthographe rationnelle, qui ne verra le jour mais dont on peut toujours rêver.
Dans cette perspective théorique, il est bon de savoir :
quels sont les sons du français ;
comment ils sont transcrits ;
pourquoi ils sont transcrits d'une façon et pas de l'autre.

Le premier exemple est le cas du yod, apparemment très simple : son unique, lettre unique, elle est déjà employée (la preuve !) dans la yole et la yeuse.
La revue générale de toutes les possibilités est un excellent exercice de l'apprentissage de la convention orthographique actuelle, mais de peu d'intérêt pour la mise au point de la convention de demain.

D'un pur point de vue pragmatique, j'avoue ne pas comprendre la proposition de maintenir une diversité de graphies différentes pour un seul son. C'est vouloir compliquer la vie des écoliers de demain, ceux qui ne sont pas encore nés, qui n'ont donc aucune habitude et aucun préjugé concernant la façon d'écrire.
Que nos habitudes nous soient chères, à nous, est une chose. Vouloir les imposer aux générations futures en est une autre !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Quel éditeur ?

La maison Hachette qui depuis 1946 se fait un beurre fou avec la collection Bled.

Je n'en dirais pas de mal, parce que à mes lointains débuts, j'y ai puisé des idées.
Je n'en dirais pas de bien, parce que ayant eu le privilège d'apprendre les langues anciennes (qui avaient été soigneusement écartées de la formation des instituteurs) et de bénéficier des progrès de la linguistique, j'en sais plus long que  les auteurs. Ce serait une malhonnêteté intellectuelle de leur reprocher d'ignorer ce que nul ne leur a enseigné. Mais ma formation n'a pas pu ne pas  m'ouvrir les yeux sur les nombreux défauts de ces sympathiques ouvrages. Je dis bien : sympathiques.
(J'ai aussi beaucoup de sympathie pour ma première grammaire latine, mais ce n'est pas pour cela que je la suis dans ses erreurs : cinq déclinaisons, parisyllabiques, 3e mixte.)

Je cherchais à élever le débat, pour le pur plaisir intellectuel, bien que mon esprit penche vers une réforme radicale  et une mise à plat de tous les problèmes.
Si on en reste au niveau du simple pédagogisme, on n'avancera pas d'un pas !


si tout le monde est habitué à lire correctement voyage, travail, feuille, maillot, lier,  racial et si la lecture de ces mots ne pose pas de problème à des apprenants, pourquoi tout chambouler ?

Vous voulez réformer l'orthographe, ou vous ne le voulez pas ? Si on réforme, on chamboule, et si on ne veut pas chambouler, on ne réforme pas.

Voilà pourquoi je dis : corrigenda, at corrigi non potest.
Nous nous sommes embourbés dès le yod, et il reste encore trente-cinq sons à examiner !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

J'ai averti : tout message qui n'apportera pas de l'eau au moulin du monde sera déplacé et archivé.
Il n'est pas nécessaire qu'il soit offensif, il suffit qu'il soit oiseux et hors sujet.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Zimon a écrit:
P'tit prof a écrit:

J'ai averti : tout message qui n'apportera pas de l'eau au moulin du monde sera supprimé.
Il n'est pas nécessaire qu'il soit offensif, il suffit qu'il soit oiseux et hors sujet.

Vous devriez avoir honte. Voyez ce que j'écris sur le fil où vous avez relégué les messages "hors sujet". Et si vous supprimez ce message-ci, je ne participerai plus longtemps à ce forum.

Je crois que, bien que je ne lui ait pas soufflé les messages à supprimer, c'est moi qui sur autre fil d'abord, sur celui-ci ensuite, ai demandé plus de "rigueur dans la modération" Mea culpa donc. C'est moi qui doit partir ? Après tout, je suis un petit dernier.

Bien sûr qu'Internet en général est le lieu qui offre à tous l'occasion de s'exprimer : liberté et égalité (pour la fraternité, on attendra). Ceci dit, si la liberté de s'exprimer pour un, empêche l'autre de suivre un raisonnement dans un discussion complexe, que faut-il faire ? Je n'ai pas refusé de répondre au premier message de Sylvain B., mais bon ...

Le mieux serait effectivement l'autodiscipline sans censure, un consensus mini, mini s'était dégagé entre P'tit prof et moi-même sur la conduite à suivre sur le présent fil, libres aux autres de l'accepter ou non, quitte à commenter, dénigrer comme ils veulent sur un fil parallèle, ou ignorer tout simplement. Si c'est si inacceptable que cela, autant que je parte effectivement. Bon débarras.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Devinette :
qui est le signataire de ces lignes ?

Si vous souhaitez que ce soit le seul lieu de débats, et non pas un terrain supplémentaire offert aux bagarres, il vous faudrait clore les autres fils et renvoyer sur celui-ci. Un modérateur peut le faire, non ?

P.S. Dans l'opération grand nettoyage de printemps, j'ai également débarrassé de mes petites facéties un dossier que j'avais pollué gratuitement. Je puis donc faire aux autres ce que je fais à moi-même...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Et maintenant, si on reprenait calmement la conversation ?

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Question de fonds :

Greg écrit :

Cela vaut-il le coup de réformer la transcription de [wa] ? Si l'on prend en compte l'extraordinaire stabilité du graphisme <oi> à travers les siècles, surtout par opposition à ses avatars sonores, le doute est raisonnablement permis.

Je prends qu'une réforme est nécessaire, et je réfléchis à voix haute sur la façon de s'y prendre.
Les raisons ne manquent pas pour défendre telle ou telle transcription, mais alors, admettons qu'on les défend toutes, et qu'on ne réforme rien. Personnellement, je n'ai jamais eu de problèmes avec l'orthographe, que j'ai absorbée par capillarité, car je lis beaucoup. Je n'ai pas eu à souffrir pour l'acquérir et je m'en accommode fort bien. Seulement je ne suis pas aveugle sur ses défauts.
Bref, je suis pour la réforme, sans être pour la réforme, tout en étant pour la réforme.

Le graphisme  <oi > a été allégrement jeté par dessus bord par les chercheurs du GEREC. Ils écrivent zwazo (oui, oiseau, passé tel quel en créole), ovwa (dans le quel on reconnait au revoir), bonswa (on reconnait bonsoir), et ziyanm, l'igname.
Ce dernier mot est intéressant pour notre discussion : il contient un yod, qui fait diérèse, d'où la notation : zi-yanm.
Quand diérèse il n'y a pas, on note le seul yod : pyé (le pied), boyo (l'intestin, mais on a reconnu boyau, dans sa prononciation originelle).

Le créole est au français ce que le français est  au latin. Les premières transcriptions sont tombées dans le défaut étymologisant : on écrivait qui pour rappeler que le mot venait de « qui ». Puis les créolophones ont dépassé les francophones et mis au point une orthographe phonologique : ils écrivent ki.
Ils n'usent d'ailleurs pas des lettres q et x, et n'ont gardé le c que dans le digramme ch, pour noter le son ché.
Pourquoi ne pas adopter dans la transcription du français ces solutions simples ?

... mais bon, en attendant, je continuerai à écrire oiseau, foi de français (anciennement françois...) !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

26

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Transcription du phonème /j/ dit "le yod" — 6

Un phonème n'est pas un son mais une entité abstraite assimilable à un ensemble de sons.

Le phone [j] est un son consonantique appelé yod.

Le phonème /j/ est un ensemble de phones — en l'occurrence le phone complet [j] et aussi la partie de phone [??] qui est la queue d'une diphtongue (amalgame vocalique).
Soit, pour faire joli :  /j/ ? { [j] ; [??] }.

Le phonème /j/ ne porte pas de nom.

P'tit prof a écrit:

Le premier exemple est le cas du yod, apparemment très simple : son unique, lettre unique, [...].

Le son [j] (le yod) est en effet un phone unique. Le phonème dont il dépend est /j/. L'identité du symbole littéral (le petit "j") entre les crochets et les barres obliques montre assez bien que les variations du type Brigitte Fontaine (voir le n° 5) sont perçues comme étant marginales. Elles sont de toutes façon non phonémiques.

P'tit prof a écrit:

Pour noter le yod, l'API utilise la lettre j, mais il a inventé un symbole en forme de z arrondi pour noter le son jé.

Ce qui nous laisse les possibilités suivantes :
utiliser le j pour noter le yod, et le ž/Ž pour noter le son jé ;
utiliser l'upsilon pour noter le yod, et garder le j pour le son jé.

Cette seconde solution a ma préférence, mais ce n'est pas moi qui décide...

Je pense qu'il est préférable de noter le phone [j] par <y> car la graphie <j> c'est le son /?/ en francophonie.

Exemples (hors toute modif ne portant par sur le phonème /j/) :
<accueillir> ? /a·kø·ji?/ ? <accueyir>
<bouillir> ? /bu·ji?/ ? <bouyir>
<criée> ? /k?i·je/ ? <criyée>
<déployées> ? /de·plwa·je/ ? <déploiyées>
<égayons> ? /e·ge·j??/ ? <égaiyons>
<égayions> ? /e·gej·j??/ ? <égaiyyons>
<fille> ? /fij/ ou /fi·j?/ ? <fiye>
<gargouille> ? /ga?·guj/ ou /ga?·gu·j?/ ? <gargouye>
<habillé> ? /a·bi·je/ ? <habiyé>
<payer> ? /pe·je/ ? <paiyer>
<payiez> ? /pej·je/ ? <paiyyez>
<pays> ? /pe·i/ ? ?<paihis> (car <pays> deviendrait /pajs/)
<soudoyez> ? /su·dwa·je/ ? <soudoiyez>
<taille> ? /taj/ ou /ta·j?/ ? <taye>
<travaillé> ? /t?a·va·je/ ? <travayé>
<voyage> ? /vwa·ja?/ ? <voiyage>.

Pas très jojo ce genre de modif, mais bon, si c'est pour la bonne cause...





Transcription de la syllabe /wa/ — 2

P'tit prof a écrit:

Le graphisme  <oi> a été allégrement jeté par dessus bord par les chercheurs du GEREC. Ils écrivent zwazo (oui, oiseau, passé tel quel en créole), ovwa (dans le quel on reconnait au revoir), bonswa (on reconnait bonsoir), [...]

La graphie <wa> ne me pose aucun problème pour représenter la syllabe /wa/. Le seul truc c'est que la syllabe /wa/ n'est que l'ultime représentant d'une très longue série unifiée par le graphisme <oi>. Il est permis de penser que ce /wa/ se réduira un beau jour en /a/, ou grossira en /wa??/, à moins qu'il ne revienne à son état antérieur : /we/. Ce jour-là on aura l'air bien malin avec notre <wa>...

Je suis pour l'innovation : par exemple <lhirondelle> plutôt que <l'hirondelle>, <lami> et non <l'ami>, <lézeuro> à la place de <les euros>, <dézalligator> contre <des alligators>, <jaurais> pour <j'aurais>, <ilzon> pour <ils ont>, <ilson> pour <ils sont>, mais tout ceci est discutable. Au moins autant que l'équivalence /wa/ ? <wa>.


P'tit prof a écrit:

Le créole est au français ce que le français est  au latin.

On va pas refaire le monde mais il n'est pas sûr que le français dérive du latin. Je verrais plutôt un ancêtre roman à notre langue (et aux langues romanes en général). Un aïeul cousin du latin.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Et une polémique, une !
J'aurais tendance à penser que les gens qui posent que le français ne vient pas du latin ne savent pas le latin... Une intuition, comme ça...

D'ailleurs, il se trouve des gens pour nier que le créole dérive du français.

Cela n'empêche pas le monde de tourner, les latinistes de lire le latin, les francophones de parler français, et les créolophones de parler créole...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

28 Dernière modification par Bookish Prat (04-07-2009 01:52:13)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Sylvain B a écrit:

Le s final du premier centièmes et son absence au second ne permettaient donc pas cette distinction ?

Certes, mais pour l'œil du lecteur pressé, c'est sur l'absence ou la présence d'un s final que repose toute la différence entre 61/100 et 60 +1/100. Une simple faute d'accord ou une coquille peut induire en erreur. Par contre, cette différence de sens devient facilement repérable lorsque l'on utilise, ou non, des traits d'union dans le nombre qui précède. N'en est-il pas ainsi ? big_smile

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Exemples (hors toute modif ne portant par sur le phonème /j/) :
<accueillir> ? /a·kø·ji?/ ? <accueyir> pourquoi deux c quand un k fait l'affaire ? akœyir
<bouillir> ? /bu·ji?/ ? <bouyir>
<criée> ? /k?i·je/ ? <criyée>
<déployées> ? /de·plwa·je/ ? <déploiyées>
déplwayées, à la créole.
<égayons> ? /e·ge·j??/ ? <égaiyons> égêyons : pourquoi s'encombrer d'un a ?
[i]<égayions> ? /e·gej·j??/ ? <égaiyyons>
<fille> ? /fij/ ou /fi·j?/ ? <fiye> [/i]fiy suffit amplement
<gargouille> ? /ga?·guj/ ou /ga?·gu·j?/ ? <gargouye> gargouy suffit amplement
<habillé> ? /a·bi·je/ ? <habiyé> abiyé : pourquoi s'encombrer d'un h sans valeur phonologique ?
<payer> ? /pe·je/ ? <paiyer> pourquoi un a ? pêyer
<payiez> ? /pej·je/ ? <paiyyez>
<pays> ? /pe·i/ ? ?<paihis> (car <pays> deviendrait /pajs/)
pêis, puisque l'on évite les digrammes là où l'accent suffit
<soudoyez> ? /su·dwa·je/ ? <soudoiyez> soudwayez
<taille> ? /taj/ ou /ta·j?/ ? <taye> tay est suffisant
<travaillé> ? /t?a·va·je/ ? <travayé>
<voyage> ? /vwa·ja?/ ? <voiyage>.
vwayaj

Et pourquoi pas ? purkwa pa ?
Ce n'est peut-être pas jojo, mais l'esthétique doit-elle entrer en ligne de compte ?
Si l'on  veut faire joli, à nous les lettres à hampes et jambages, et revenons à rhythme. C'est jojo, rhythme, pas vrai ? On se demande bien pourquoi aujourd'hui on l'écrit rime (ou, dans un second sens, rythme)...

Cela dit, puisqu'il faut une orthographe, je prends l'actuelle. La modifier pose encore plus de problèmes que cela n'en résoudrait : corrigenda at corrigi non potest...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

greg a écrit:

Exemples (hors toute modif ne portant par sur le phonème /j/) :
<criée> ? /k?i·je/ ? <criyée>
<payer> ? /pe·je/ ? <paiyer>
<payiez> ? /pej·je/ ? <paiyyez>
(...)
Pas très jojo ce genre de modif, mais bon, si c'est pour la bonne cause...

Est-ce une bonne cause? Insistons sur l'objectif poursuivi, sciemment ou non: exit  la valeur grammaticale d'une graphie.

On voit que l'unicité se gagne au prix d'une indistinction fonctionnelle. En effet:

a)   <y> représente la finale du radical dans <paiyons> (cf. je <paiye>, qui coexiste avec je je <paie>), <égaiyons>
b)  <y> représente l'attaque syllabique devant voyelle dans <criyons>  (cf. je <crie>, mais pas je *<criye>)
c)  <y> représente le /j/ de l'imparfait qui alterne avec /?/ (je-tu-il(s) chant/?/ - nous chant/j/ons, vous chant/j/ez)

NB. (b) et (c) sont conjoints dans <paiyyons>; une analyse précise pour  <criyyons> (imparf.) est plus aventureuse.

Or écrire "i" partout  singularise, dans l'orthographe reçue, la marque de l'imparfait /j/  (et du subjonctif, en alternance avec "e" muet et exception faite des subjonctifs soyons / ayons, qui deviennent d'ailleurs <soiyons>, <aiyons>)

Sans ce "i", plus possible dans ce cas de parler de terminaison  " -ions" dans les manuels de primaire. Parce que remplacée par le polymorphe <-yons>/<y-ons>/<-y-ons>. Donc analyse morphologique fine en /y/ + /o~/ exigée dès l'étude de l'imparfait dans le primaire.

Il faut alors être cohérent pour les enfants, et supprimer toutes les graphies grammaticales. De loin en loin, cela mène effectivement à un système d'orthographe phonétique. Je n'ai pas suivi les débat sur le fil créé par Zimon, mais il me semblait que Colline d'or ne souhaitait pas cela.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Question de fonds :
Ne le dis-je point ad nauseam : corrigenda, at corrigi non potest ?

Naïf soulève un lièvre de taille :
la graphie doit-elle être simplement phonétique, comme pour le grec et le latin (langues qui au demeurant se parlaient bien plus qu'elles ne s'écrivaient) ?
la graphie doit-elle avoir une valeur grammaticale ?

Il est urgent d'en décider, car c'est vraiment fromage OU dessert : si la graphie doit avoir une valeur grammaticale, l'actuelle remplit pleinement son rôle et  il n'y a pas lieu d'en modifier un iota.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Ceci n'est pas à proprement parler une réponse, c'est seulement mon opinion (et je la partage…) :

P'tit prof a écrit :
[…] puisqu'il faut une orthographe, je prends l'actuelle. La modifier pose encore plus de problèmes que cela n'en résoudrait […]
[…] si la graphie doit avoir une valeur grammaticale, l'actuelle remplit pleinement son rôle et  il n'y a pas lieu d'en modifier un iota.

Ben voilà ! Tout ça pour ça ! Je suis entièrement, totalement, absolument, voire farouchement d'accord.
Si l'actuelle orthographe a parfois des allures de forêt un peu touffue, et même quelquefois de jungle quasi inextricable, elle a l'irremplaçable mérite de vivre ainsi ; les réformateurs de tout poil voudraient en faire une sorte de jardin à la française qui, convenons-en, n'aurait plus qu'un très lointain rapport avec la nature.
Cordialement
S

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Il était nécessaire de mener la réflexion pour arriver à cette conclusion.
N'oublions pas que c'est Colline d'or qui a ouvert le dossier, et que son point de vue d'enseignant du FLE est différent de celui des locuteurs natifs. N'oublions pas non plus qu'il existe une réforme, bien au chaud (ou dans un congélateur) : donc, la question se pose tout de même, ne serait-ce que sur la pertinence des mesures de cette réforme.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

34

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Naïf a écrit:

Est-ce une bonne cause? Insistons sur l'objectif poursuivi, sciemment ou non: exit  la valeur grammaticale d'une graphie.

La réponse est dans la question. De toute façon l'orthographe actuelle est un mélange de plusieurs logiques :

transcrire les sons de la langue parlée
/ty·ty/ ? <tutu>
/ma·???/ ? <marin>

hétérographier des homophones
/de·vi/ ? <des vies>, <dévie>, <dévies>, <dévient>
/le·t??/ ? <les temps>, <les taons>, <l'étang>, <l'étant>, <l'est tant>, <l'étend>, <l'étends>, <les tend>, <les tends>

anticiper la valeur phonique de graphies postérieures
<dévient> ? /de·vi/ opp. <devient> ? /d?·vj??/

modifier la valeur phonique de graphies antérieures
modifier la valeur graphique de sons antérieurs
<aigue> ? /?·g?/ ou /?g/ opp. <aiguë> ? /e·gy/


On peut y renoncer. Mais dans ce cas la graphie ne sera effectivement que le reflet (toujours imparfait) de l'oral. La conjugaison écrite de l'indicatif présent des verbes du premier groupe sera alors calquée sur celle qu'on prononce : /pa?l/ à toutes les personnes sauf /pa?·l??/ à la première du pluriel, sauf encore un homophone de l'infinitif et du participe passé à la deuxième du pluriel ? /pa?·le/.





P'tit prof a écrit:

Naïf soulève un lièvre de taille :
la graphie doit-elle être simplement phonétique, comme pour le grec et le latin (langues qui au demeurant se parlaient bien plus qu'elles ne s'écrivaient) ?
la graphie doit-elle avoir une valeur grammaticale ?

Il est urgent d'en décider, car c'est vraiment fromage OU dessert : si la graphie doit avoir une valeur grammaticale, l'actuelle remplit pleinement son rôle et  il n'y a pas lieu d'en modifier un iota.

On peut écrire le français en cyrillique. Ça ne changerait d'ailleurs absolument rien à notre débat : comment transcrire les syllabes /wa/ et /w??/ ? Pour rendre <loi> et <loin> en cyrillique, écrira-t-on <??a> et <?y?> ou bien <?o?> et <?o??> ? Pareil si on mettait tout ça en alphabet grec.

Le français transcrit doit-il être écrit en alphabet latin ? Le graphisme français, quel que soit l'alphabet retenu, doit-il être exclusivement phonographique ? Non : unique réponse aux deux questions. Écrire la parole c'est rendre visible ce qui s'entend mais aussi visualiser l'inaudible : par exemple les espaces entre les mots. Écrire c'est figer un son fugace à l'aide d'une image durable, mais c'est aussi conférer une valeur au néant sonore : le <s> final du pluriel des noms.

On voit ci-dessous que le morphème graphique <s> est conditionné par le nombre de l'article. L'obligation de choisir ou refuser le morphème <s> (valeur du nombre) subsiste en l'absence d'article (néant sonore) alors que l'oral exclut l'obligation symétrique : 

/la·vwa·ty?/ ? <voiture>
/yn·vwa·ty?/ ? <voiture>
/vwa·ty?/ ? <voiture>

/le·vwa·ty?/ ? <voitures>
/de·vwa·ty?/ ? <voitures>
/vwa·ty?/ ? <voitures>

35 Dernière modification par Naïf (05-07-2009 00:02:21)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

greg a écrit:

Mais dans ce cas la graphie ne sera effectivement que le reflet (toujours imparfait) de l'oral.

Mythologie que cela. La relation de "reflet" (parfait ou imparfait) ne tient pas plus pour écrit/oral que pour l'autre grand couple du genre: "langue/monde". Cela tient à une triple erreur; je détaille illico en quoi elle consiste, puis j'illustre.

1) rapporter bille en tête les stratégies d'écriture à divers types de relation à l'oral, cf. l'omniprésence de "phone" dans les exemples donnés. Genre "hétérographier les homophones", formulation (cocasse, au demeurant, farceur!), qui remplace la description par une interprétation, laquelle interprétation est d'ailleurs discutable.

2) ramener à tort la substance phonique prise en compte dans l'écriture à la réalisation d'éléments discrets (disons, les phonèmes). Car la métaphore du reflet - même infidèle - ne capte pas l'idée qu'on a affaire à des foyers multiples (comme disent les lunettiers): l'organisation de l'écrit sollicite divers niveaux de la matière phonique. Et ce ne sont pas non plus des miroirs de foire.

3) oublier qu'il existe une organisation propre à la matière graphique, indépendante de l'oral ; parce que c'est un système sémiotique comme un autre, et qu'un système, serait-il ouvert comme c'est le cas de l'écriture, engendre des contraintes internes.

Or (*hors, *ores):

-  il existe en français des graphies quasi-logographiques (cf. proches donc des caractères chinois, plus exactement ces caractères chinois dont la clef ou l'autre élément indique très vaguement une classe de monosyllabes). Peu nombreuses mais très fréquentes. Exemple: est, hauts .
Si les gens râlaient de ne plus voir la cime du cocotier dans le mot "ile" (réformé) débarrassé de son "î", c'est bien qu'ils avaient le sentiment que cela fonctionne aussi de cette manière.

- Dans les cas, majoritaires, où quelque rapport systématique avec l'oral se laisse apercevoir, il existe des procédés d'écriture syllabique: gants ([g-] lié au choix de "a"] /gens ([?] lié au choix de [e]), camps [k]/cents [s]), et même des trucs tout à fait étranges, quoique liés à l'oral: h- initial de "hérisson", notation des consonnes finales muettes, "e" muet (je suis pour imposer la lecture de Dell en première année, ça décoiffe :-)  )

- Les doubles consonnes, les accents (sans parler des traits d'union et autres les apostrophes) se distribuent suivant des règles largement indépendantes de l'oral.

Les lettres - voire les graphèmes - étant exploitées de diverses manières, toute règle qui s'applique  systématiquement à une lettre (un graphème) revient à remettre en question cette hétérogénéïté, et a un contre-coup sur l'ensemble de l'orthographe.

Ouaille not? Mais dans ce cas, c'est créoliser (au sens de P'tit Prof) la graphie du français que l'on veut. Et il faut alors chercher une notation proche des notations phonologiques de jadis (disons, la façon dont Martinet décrivait le parler de sa maman).  Pas du tout ce que vise Colline Dort.

Dore?

D'ores?

D'or!

----
après-coup: j'ai essayé de rétablir les "s" qui manquaient, changé une virgule, et rendu son dû à un César. C'était écrit trop vite....

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Pouvez-vous nous déplier ce mystère ?

(je suis pour imposer la lecture de Dell en première année, ça décoiffe :-)  )

Je suppose bien que vous n'avez pas écrit Dell pour Delly (qui ne décoiffaient rien du tout, les pauvres !), mais de quoi parlez-vous ? Et de quelle première année ? La première année de Maternelle ? la première année d'école, celle où l'on apprend à lire ? la première année de Collège ? (non vous eussiez dit 6e) la première année de Lycée ? (non, vous eussiez dit seconde) la première année de licence ? mais de quelle licence ?

(Et NON, je ne vanne pas, je n'ironise pas, je veux vraiment comprendre.)

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

37 Dernière modification par Naïf (05-07-2009 00:09:14)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Oui, pardon, j'écrivais très vite, c'est le genre de parenthèses qui ne vaut pas tripette, ça.
Ergo... yahoo.fr.... requête +dell +phonétique .... copier-coller:
Dell, François 1973 Les règles et les sons, introduction à la phonologie générative, Paris, Hermann, 282 p. (rééd. 1985, 297 p.).
Livre qui s'est vite imposé comme référence dans ces études-là, notamment pour le "e muet". S'adresse aux chercheurs et aux étudiants. Mais je tiens que quiconque le veut peut devenir étudiant (en France et autres contrées privilégiées, s'entend), ou chercheur s'il a beaucoup de temps à soi.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Mille mercis !

Je prends bonne note, et je tâcherais de mettre la main dessus pendant mes proches vacances. Cela m'évitera de dire des bêtises à la rentrée !
(De toutes façons, vu ma profession, je n'ai jamais cessé de faire mes études... J'en suis actuellement à bac + 45 et ce n'est pas fini : il y a toujours du nouveau à savoir.)

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

39 Dernière modification par greg (05-07-2009 16:50:46)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Naïf a écrit:

1) rapporter bille en tête les stratégies d'écriture à divers types de relation à l'oral, cf. l'omniprésence de "phone" dans les exemples donnés. Genre "hétérographier les homophones", formulation (cocasse, au demeurant, farceur!), qui remplace la description par une interprétation, laquelle interprétation est d'ailleurs discutable.

L'hétérographie des homophones est, par définition, un phénomène proprement graphique sans équivalent à l'oral : l'écrit distingue ce que la parole confond. Le phénomène inverse s'observe aussi : hétérophonie des homographes ? <couvent> /ku·v??/ et <couvent> /kuv/ ou /ku·v?/. On est loin d'une idéologie phonocratique smile ! Mon propos n'était pas de réduire l'écriture à un vulgaire sous-produit de l'oral : si l'écrit procède de l'oral, il n'en reste pas moins vrai que la graphie obéit à une logique propre.

Ce qui t'a probablement choqué, c'est l'affirmation que l'écriture sert à hétérographier des homophones. C'est pourtant ce qui se passe avec <doigt> et <doit>, <boue> et <bout>, <nid> et <ni>, <corps> et <cor> etc. Pareil quand on passe du lexique à la morphologie : <dois> et <doit>, <parles> et <parlent>, <était> et <étaient>, <maison> et <maisons> etc.



Naïf a écrit:

2) ramener à tort la substance phonique prise en compte dans l'écriture à la réalisation d'éléments discrets (disons, les phonèmes). Car la métaphore du reflet - même infidèle - ne capte pas l'idée qu'on a affaire à des foyers multiples (comme disent les lunettiers): l'organisation de l'écrit sollicite divers niveaux de la matière phonique. Et ce ne sont pas non plus des miroirs de foire.

On ne peut qu'être d'accord avec toi car ce que tu dis est très vague. Est-ce que tu peux préciser avec des exemples ?



Naïf a écrit:

3) oublier qu'il existe une organisation propre à la matière graphique, indépendante de l'oral ; parce que c'est un système sémiotique comme un autre, et qu'un système, serait-il ouvert comme c'est le cas de l'écriture, engendre des contraintes internes.

Nous sommes d'accord sur ça aussi !... smile  Je ne vois décidément pas où tu veux en venir : en quoi la logique propre au graphisme (et en particulier ses contraintes internes) lui interdit-elle de procéder de l'oral ? Je parle ici surtout du graphisme propre au français plus que des systèmes idéographiques. Il me semble que l'écriture traditionnelle du français à l'aide de l'alphabet latin est bien phonographique (basée sur du discret sonore) même si elle n'est pas que cela, non ?

Exemple : le graphème <c>.
Sa valeur première est /k/ (principe phonographique) : <car> ? /ka?/, <Caen> ? /k??/, <cor> ? /k??/, <cœur> ? /kœ?/, <cure> ? /ky?/, <cour> ? /ku?/, <clou> ? /klu/, <cri> ? /k?i/, <hamac> ? /a·mak/, <avec> ? /a·v?k/, <pic> ? /pik/, <toc> ? /t?k/, <duc> ? /dyk/, <bouc> ? /buk/.
Sa valeur seconde est /s/ (toujours le principe phonographique) pour peu que l'environnement graphique s'y prête (contrainte purement graphique) : <ceux> ? /sø/, <cil> ? /sil/, <ciel> ? /sj?l/,  <cygne> ? /si?/, <cyan> ? /sj??/, <factice> ? /fak·tis/, <ici> ? /i·si/.
On peut détailler davantage ou passer à d'autres graphèmes (par exemple <ch> ? /?/ et /k/) et on vérifiera que le graphisme français est d'abord phonographique (même s'il n'est pas que cela).



Naïf a écrit:

-  il existe en français des graphies quasi-logographiques (cf. proches donc des caractères chinois, plus exactement ces caractères chinois dont la clef ou l'autre élément indique très vaguement une classe de monosyllabes). Peu nombreuses mais très fréquentes. Exemple: est, hauts .
Si les gens râlaient de ne plus voir la cime du cocotier dans le mot "ile" (réformé) débarrassé de son "î", c'est bien qu'ils avaient le sentiment que cela fonctionne aussi de cette manière.

L'exemple de <est> prête à confusion dans le mesure où il sanctionne une homographie d'hétérophones : /e/ et /?st/. Selon moi les idéogrammes seraient plutôt des symboles du genre <%> pour /pu?·s??/ ou /pu?·s??·ta?/, <2> pour /dø/ ou <+> pour /plys/. On peut y ajouter <svp> & <stp> pour /sil·vu·ple/ et /sil·t?·ple/, <Mme> pour /ma·dam/, <mdr> pour /m??·d?·?i?/.

Mais il est vrai que des graphèmes ont parfois une fonction idéographique : c'est le cas du <g> dont je parlais plus haut ? distinction entre <doigt> et <doit>. Ici le comportement idéographique du <g> sert à hétérographier des homophones. smile:) C'est sûr que <î> dans <île> possède une fonction idéographique très expressive. Dans ce cas, et contrairement au <g> de <doigt>, l'idéographie du <î> ne sert pas à différencier des homophones puisque la suppression du circonflexe n'entrainerait aucune homographie avec <il> : c'est le <e> final qui garantit l'hétérographie (voir le <ile> "réformé" dont tu parlais). La passage de <île> à <ile> ne poserait qu'un problème au pluriel : homophonie et homographie ? <iles> ? {terres entourées d'eau} ou {iliaque}.



Naïf a écrit:

- Dans les cas, majoritaires, où quelque rapport systématique avec l'oral se laisse apercevoir, il existe des procédés d'écriture syllabique: gants ([g-] lié au choix de "a"] /gens ([?] lié au choix de [e]), camps [k]/cents [s]), et même des trucs tout à fait étranges, quoique liés à l'oral: h- initial de "hérisson", notation des consonnes finales muettes, "e" muet [...]

Ce que tu nommes « procédés d'écriture syllabique » c'est exactement ce que j'avais noté par l'expression « modifier la valeur phonique de graphies antérieures ». De même que <ca> commande /ka/ et <ce> exige /s?/, quand on lit <ga> et <ge> on dira /ga/ et /??/. C'est la même chose avec les graphèmes complexes, tels les digrammes <an> et <en> (dont /??/ est l'élément commun de leurs contreparties orales) :
<candeur> ? /k??·dœ?/
<centime> ? /s??·tim/
<ganté> ? /g??·te/
<gentil> ? /???·ti/.
On le voit bien : ce n'est pas la présence du phonème /??/ qui détermine la valeur orale du <g> ou du <c>. C'est plutôt l'alternance entre ses représentants : les digrammes <an> et <en>, qui eux-mêmes relèvent du principe phonographique.





Destin du graphème <e> (indûment réputé "muet") en position finale — 1

P'tit prof a écrit:
greg a écrit:

Exemples (hors toute modif ne portant par sur le phonème /j/) :
<accueillir> ? /a·kø·ji?/ ? <accueyir>

pourquoi deux c

Parce que les exemples ne visent qu'à illustrer un paramètre, et un seul : « (hors toute modif ne portant par sur le phonème /j/) ». Même principe  pour les graphies <déploiyées>, <égaiyyons>, <habiyé>, <paiyer>, <paihis>, <soudoiyez> et <voiyage> ? ce ne sont pas des "produits finis" (propos de nouvelle orthographe) mais des expériences limitées au seul phonème /j/.

P'tit prof a écrit:

<fille> ? /fij/ ou /fi·j?/ ? <fiye> fiy suffit amplement
<gargouille> ? /ga?·guj/ ou /ga?·gu·j?/ ? <gargouye> gargouy suffit amplement
<taille> ? /taj/ ou /ta·j?/ ? <taye> tay est suffisant
<voyage> ? /vwa·ja?/ ? <voiyage> vwayaj

J'aurais dû noter qu'en français <voyage> peut être /vwa·ja?/  ou /vwa·ja·??/. Comme <fille>, <gargouille> et <taille>, le mot <voyage> est passible de deux syllabations suivant que le locuteur relève de la phonologie méridionale ou septentrionale.

Si tu souhaites que le système écrit "colle" à langue parlée, il va bien falloir examiner l'opportunité de supprimer le <e> final dont le rôle est phonologique chez les méridionalisants :
/taj/ — /ta·j?/ pour <thaï> — <taille>
/ku?/ — /ku·??/ pour <cour> — <courent>
/ba?/ — /ba·??/ pour <bar> — <barre>
/p??/ — /p?·??/ pour <pair> — <père>
/mal/ — /ma·l?/ pour <mal> — <malle>
/g?lf/ — /g?l·f?/ pour <golf> — <golfe>.

40 Dernière modification par Naïf (05-07-2009 17:08:04)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

(crénom, j'ai essayé tous les codages de mon actuel navigateur, aucun ne me donne tous les signes phonétique utilisés par greg, j'arrive à compléter en général, mais quelque fois, j'hésite)

Oui, mon message était mal cadré, rédigé vite. En outre, tenir compte des particularités du forum: nul a parte possible: même une réaction à un post  est en même temps - qu'on le veuille ou non - adressée aux compagnons de route, à la cantonade...

Ne retenir que ma jérémiade sur le mot "reflet" (et une autre entre parenthèses: je disais bien "logographique"; je ne parlais pas de l'idéographie, illustrées par les émoticônes /smilies/, par exemple).

---------

Pour le reste, je vais devenir fumeux, donc on ne lira pas, ou on ne se plaindra pas d'avoir lu  (si je savais faire mieux en très bref, j'aurais la théorie du siècle):

J'insistais sur le piège que constitue la métaphore du reflet (même en précisant ne...que + imparfait). "Reflet", a fortiori s'il est repris par "servir" ensuite, nous tient dans une conception ancillaire: écriture au service de l'oral.

Or cela ne colle pas. Non seulement avec les données des grammairiens et linguistes, mais aussi, en vrac, celles des  anthropologues, archéologues, sociologues, philosophes, psychanalystes, neuropsychologues (d'autres aussi, peut-être, mais c'est à peu près le panel que j'ai plus ou moins  exploré sur la question, et qui me semble pertinent). 

Parce que l'oral est parfois au service de l'écriture (cf. le style livresque). Parce que "cela ne fonctionne pas pareil" (pas d'homologie), parce que les zones du cerveau convoquées ne sont pas les mêmes, parce que l'écrit n'est pas une donnée universelle chez l'humain (mais qu'on n'a toujours pas compris comment il fallait interpréter ce slogan!) et tutti quanti.

Pour faire bref, je dirai cela sous forme de credo: ma conviction est qu'écriture et oral sont des ordres de faits disjoints, desservant chacun des usages séparés, liés à des pratiques sociales différentes. Des gestuelles distinctes  (d'une part l'oral avec ses sons et ses mimiques et autres gesticulations), d'autre part l'écrit avec ses traits, ses supports, etc.

Leur relation mutuelle est envisagée dans deux (au moins!) types de pratiques sociales:

1) Spéculation scientifique. On construit une théorie. J'entends: une élaboration imaginaire et abstraite qui rend possible un passage entre les deux. Par exemple:  offre une base de comparaison, ou constitue un procédé de mise en correspondance.

Exemple. On commence à s'en apercevoir maintenant, la phonologie européenne (disons "linéaire", pour la distinguer de celles qui ont suivi) s'est largement constituée comme une telle théorie, appliquée aux langues écrites et parlées sur le pourtour méditerranéen. D'où la peine qu'on a à la mettre en oeuvre pour décrire les langues d'Asie orientale ou d'Afrique subsaharienne! La phonologie linéaire est un enfant de nos écritures. Des idées proches ont été développées par S. Auroux, entre autres.
D'où, peut-être aussi, les difficultés qu'a engendrées dans le Primaire l'introduction de la phonologie. On a pris pour un outil d'analyse efficace ce qui n'était qu'un truc inventé entre l'oral et l'écrit et qui servait à penser le rapport entre les deux. (je citais le grand linguiste qui utilisait ses théories pour... inventer une écriture au parler de sa maman!) Je charge le trait, parce que s'il fallait nuancer, le post[s]e[/s]* serait trois fois plus long.

2) mettre en oeuvre des systèmes normatifs attelant plus ou moins l'écrit sur l'oral et/ou l'oral sur l'écrit, à des fins pratiques. C'est thème du présent fil.
Mais je pense que ces objectifs pratiques - et donc très sérieux!- ne pourront pas [s]faire[/s] justifier  l'économie d'une réflexion sur l'écrit(ure) en soi, bien au contraire. Par exemple, je considère qu'il est de mon devoir - lorsque j'ai une minute de libre - de souligner l'inadéquation des déclarations rapides du genre "Ceci est illogique", lorsque l'absence de "logique" pointée est tout simplement un hiatus entre oral et écrit. L'hiatus est premier, constitutif du rapport écrit oral.

J'avais prévenu...

PS. * Si-si, y a des "e" muets, la preuve. Mais bon, cf. les bouquins.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Greg :

Si tu souhaites que le système écrit "colle" à langue parlée, il va bien falloir examiner l'opportunité de supprimer le <e> final dont le rôle est phonologique chez les méridionalisants :

Ça fonctionne dans les deux sens.
Les septentionalisants (ouf !) ne prononcent pas ces e, bien qu'ils soient écrits. Les méridionalisants les prononceront, même s'ils ne sont pas écrits... La langue s'apprend à l'oreille.
D'ailleurs, certains prononcent déjà des lettres non écrites, comme le svarabhakti que l'on entend dans ar(que)-boutant ou ar(que) de triomphe.



Je ne tiens précisément à rien : comme je l'ai dit, mon orthographe est bonne, quand j'hésite, je consulte mon dictionnaire et bousculer mes petites habitudes ne me sourit pas spécialement.
Mais on peut toujours réfléchir à voix haute et lancer des propositions...

Il ne s'agit pas tant de faire coller l'écrit à l'oral : l'écrit est battu par définition dans la course sans fin entre les deux, car la prononciation évolue plus vite que les habitudes d'écriture.
Cependant, il arrive que l'écrit se venge sournoisement, transformant le ch'ni en chEniL, le ch'tel en chEPtel, le barri en barriL et la gageure, rimant avec coupure, en gageure rimant avec beurre.

Pour éviter, dans la mesure du possible, la répétition de ce phénomène, totalement différent d'un évolution phonétique naturelle je propose l'éviction des lettres parasites sans valeur grammaticale : rétablissons le donteur et le sculteur, par exemple.
Le cas du e qui fut prononcé, mais ne l'est plus, est évidemment litigieux.
Si l'on devait tenir compte des réalisations en discours, pour l'écriture de la langue, il y aurait autant d'orthographes que de locuteurs.
Si l'on devait ne pas tenir compte des réalisations en discours, on en viendrait vite comme dans la célèbre blague, à écrire élastique et prononcer caoutchouc.

Conclusion ? Y en a pas !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

Si l'on devait ne pas tenir compte des réalisations en discours, on en viendrait vite comme dans la célèbre blague, à écrire élastique et prononcer caoutchouc.

Un peu de rigueur s'impose ici: "prononcer" et "lire" ne sont pas la même opération. Seule la seconde implique et met en jeu l'écrit. Le rapport de la prononciation à l'écrit est une autre affaire. Prononce-t-on jamais de l'écrit?
Merci de ne pas effacer, c'est tout à fait crucial.

43 Dernière modification par gb (07-12-2018 21:39:33)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Mais pourquoi effacerai-je ?
J'ai menacé, pour éliminer les parasites de tout poil, de déplacer les interventions hors sujets.
Cela pour assurer la sérénité des débats, en l'honneur de Pierre B., à qui j'ai offert les clés du Royaume, et qui —allez y comprendre quelque chose ! — s'en est cru chassé.
(Et soit dit en passant, merci de me prendre pour un crétin incapable de faire la différence entre une blague gratuite et une intervention majeure... )


Vous ne connaissez donc pas l'histoire talmudique, des deux maitres de la yeshiva ? L'un propose, l'autre approuve, jusqu'à ce que le premier s'emporte :
« Je ne te demande pas d'aller dans mon sens, je veux que tu me contredises ! »
Condition impérative pour que la pensée avance...

Cela dit, je ne sais pas pour vous, mais moi, quand je lis, « j'entends » les mots résonner dans ma tête.
Sur ce point, le témoignage des sourds de naissance serait intéressant : que se passe-t-il dans leur tête quand leurs yeux décodent une chaine de caractères ?

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

Pierre B., à qui j'ai offert les clés du Royaume, et qui —allez y comprendre quelque chose ! — s'en est cru chassé.

Effectivement, ce serait bête de laisser filer cette occasion (j'espère que tout le monde aura compris et accepté le fonctionnement de ce fil). En espérant que  vous continuerez héroïquement à supporter  des positions qui vous insupportent.

Je vais donc revenir, avant que la discussion ne dérive trop. Je me suis chassé tout seul (je suis un sujet sensible, comme l'orthographe), pas la peine de repartir dans des explications ni des polémiques.

Je vais simplement prendre le temps de résumer mes positions précédentes (et celles des autres d'ailleurs) et de bien relire tout ce qui s'est dit depuis avant-hier.

Zimon ne veut pas se voir contacté à propos de l'altercation de vendredi, alors je répète ici : Zimon revenez s'il vous plait.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

Ne vous en faites pas pour Zimon : il revient toujours...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

En patrouillant sur le Net, je suis tombé sur le site personnel d'Eveline Charmeux,
www.charmeux.fr/dictée.html

C'est plein de choses intéressantes, dans la ligne de nos préoccupations.

P.S. En espérant que  vous continuerez héroïquement à supporter  des positions qui vous insupportent.

Ce ne sont pas les positions qui m'insupportent (quelle idée...) mais les attitudes : je ne supporte pas le mépris, la morgue pontifiante et sa variante, le ton protecteur, les blagues idiotes (sauf quand j'en suis l'auteur...nobody's perfect...) et les insultes. Ce n'est pourtant pas moi que l'on a qualifié de dément, ici, mais c'est un terme que je ne puis accepter.
P.P.S. On me dira que dément ne qualifiait pas la personne, mais la proposition, et que ce dément était amené pour la rime. Il n'empêche que le rôle du modérateur est de mettre le holà à ce style de débordement quand le thème de la discussion est grave et les contributions sérieuses.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

47 Dernière modification par greg (06-07-2009 01:23:52)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

Pour éviter, dans la mesure du possible, la répétition de ce phénomène, totalement différent d'un évolution phonétique naturelle je propose l'éviction des lettres parasites sans valeur grammaticale : rétablissons le donteur et le sculteur, par exemple.

Ça alors, tu m'en bouches un coin ! J'ignorais totalement que le <p> de <dompteur> & <sculpteur> ne se prononçait pas. J'ai vérifié et effectivement le TILF ne propose que le <p> muet, sans variante. Je suis alors victime de la revanche de l'écrit sur l'oral ? tongue En tout cas j'aurai du mal à écrire <donteur> & <sculteur> sachant que je prononce un /p/ invisible. C'est le même problème que rencontreront les Méridionaux avec la suppression du <e> final prétendûment muet.



P'tit prof a écrit:

Ça fonctionne dans les deux sens.
Les septentionalisants (ouf !) ne prononcent pas ces e, bien qu'ils soient écrits. Les méridionalisants les prononceront, même s'ils ne sont pas écrits... La langue s'apprend à l'oreille.
D'ailleurs, certains prononcent déjà des lettres non écrites, comme le svarabhakti que l'on entend dans ar(que)-boutant ou ar(que) de triomphe.

Si on pousse ta logique jusqu'au bout, on pourrait également écrire <plouz> pour <pelouse>, <dsu> pour <dessus>, <plot> pour <pelote>, <rvenu> pour <revenu>, <jnou> pour <genou>. Cela ferait sans doute plaisir à ceux des septentrionalisants qui s'expriment ainsi, mais j'ai bien peur que les Méridionaux demandent l'asile politique à Monaco...

Pour ce qui concerne  <arc-boutant>, l'infiltration du [?] interconsonantique n'est pas une lettre non écrite mais un son intercalaire. C'est d'ailleurs ce que svarabhakti et épenthèse signifient à peu de chose près. La différence avec le <e> final pseudo-muet, c'est que ce <e> est une représentation graphique du phonème /?/ dans la phonologie de type méridional alors que le [?] épenthétique dans <arc-boutant> est un phone, pas un phonème. C'est phonologie contre phonétique. Les deux phénomènes ne sont donc pas comparables.



Naïf a écrit:

J'insistais sur le piège que constitue la métaphore du reflet (même en précisant ne...que + imparfait). "Reflet", a fortiori s'il est repris par "servir" ensuite, nous tient dans une conception ancillaire: écriture au service de l'oral.

Je reviens sur ton développement au sujet de la métaphore du reflet en espérant être pardonné pour cette digression sans rapport direct avec la réforme orthographique. Si ce message devait nuire à la clarté du salon, dites-le moi et j'ouvrirai un autre salon pour poursuivre cette "sous-discussion".

J'ai immédiatement tiqué sur les contributions éventuelles que la « neuropsychologie » apporterait à la linguistique pour ce qui relève de la cohabitation de deux codes, l'un oral, l'autre graphique, chez le locuteur. Le niveau d'alerte est passé au rouge à la lecture du terme « homologie » presque aussitôt glosé par le constat empirique que fait la biologie : « les zones du cerveau convoquées ne sont pas les mêmes ». Certes. Mais si je frappe le plancher avec mon pied ou avec ma main, le contact du membre avec le sol produira un bruit dans les deux cas bien que ce contact ait été initié par des zones différentes de mon cerveau. Quand j'aperçois un alléchant poulet grillé dans une rôtisserie et que je dis « Tiens ! Et si on se faisait un poulet ce soir ? », les lèvres prononcent le nom de ce que voient les yeux, la correspondance se fait sans qu'il soit besoin que tout se passe dans la même  région cervicale. C'est si vrai que les zones activées pour lire ou écrire ne sont pas les mêmes : la télécommande neuronale de la main est un système utile pour noircir du papier, pas pour lire ce qui est écrit. Pourtant ce profond divorce biologique n'entame en rien l'unicité linguistique de l'écriture : elle est une, mais biface (un peu comme le signe saussurien). Pareil à l'oral : entendre n'est pas parler — ne serait-ce que par la nécessité faite à la phonation de programmer et orchestrer une activité musculaire préalable à la réalisation de la parole. Ce qui est demandé à la phonation ne se retrouve pas dans l'audition. Et pourtant l'oral, d'essence double, conserve son intégrité linguistique. Enfin il ne faut pas perdre de vue que nombre de chercheurs en aphasiologie réfutent vigoureusement les conceptions localisationnistes (division géographique du phénomène linguistique ? découpage du cerveau en zones dévolues à une tâche ou à une activité).

Je pense qu'il en est de même pour les rapports qu'entretiennent parole et écriture (alphabétique ou syllabique). La biologie nous renseigne sur leur altérité mutuelle — le bon sens aussi : uerba uolant, scripta manent. On a vu aussi que l'oral et l'écrit ont chacun leur dualisme intrinsèque. Mais rien de tout cela ne me paraît pertinent au niveau linguistique. Une limitation quand même : ce jugement concerne surtout les écritures dont le soubassement phonographique reste incontournable. L'écriture du français montre assez bien a linéarité discrète commune aux chaînes graphique et orale. Je te rejoins bien sûr pour ce qui est des écritures non-alphabétiques ou non-syllabiques : dans ce cas les graphèmes ne représentent pas des sons, mais des mots, des morphèmes, du sémantisme en tout cas — dont rien dans la transcription ne permet de deviner la prononciation. Un idéogramme peut d'ailleurs recevoir plusieurs valeurs phoniques. Dans ce cas la correspondance entre oral est écrit ne va plus du tout de soi, en effet : c'est le sémantique qui relie les deux.

Ce qui nous ramène à une autre de tes remarques, que je trouve très belle et très juste :  « La phonologie linéaire est un enfant de nos écritures ». Si l'on admet que notre alphabet français dérive de celui du latin, lui-même tiré du grec via l'étrusque, on peut en conclure que nous utilisons un avatar de l'alphabet phénicien, issu de l'écriture hiéroglyphique égyptienne. Et effectivement les hiéroglyphes pouvaient être appréhendés comme des phonogrammes ou des idéogrammes. Il y aurait eu d'abord l'idéogramme, ensuite seulement le phonogramme, dont la valeur phonique était par convention l'initiale (phonème ou syllabe ?) de la contrepartie orale du signe écrit. Ton analyse se tient totalement en diachronie, mais qu'en est-il en synchronie ?   

Quant à la remarque sur la non universalité de l'écriture humaine, elle me paraît difficilement recevable. Car s'il en allait autrement, cette objection devrait également être opposée à la langue parlée : les sourds et les muets s'en passent depuis la nuit des temps.

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

C'est d'ailleurs ce que svarabhakti et épenthèse signifient à peu de chose près

La différence, c'est que le svarabhkti intercale une voyelle, et l'épenthèse une consonne.

Ils ne sont pas totalement ignorants, les professeurs du secondaire...

Pour ce qui est de la graphie du e caduc, j'avais déjà avancé :

Le cas du e qui fut prononcé, mais ne l'est plus, est évidemment litigieux.
Si l'on devait tenir compte des réalisations en discours, pour l'écriture de la langue, il y aurait autant d'orthographes que de locuteurs.

L'orthographe n'est pas l'oral gelé, mais un code particulier, au fonctionnement   idéographique : telle suite de lettres signifie un mot, que chaque locuteur réalise selon ses habitudes.
Quand je vois pelouse, je lis en effet [pluz], et [pœluzœ] me fait me demander si je n'ai pas affaire à un extra-terrestre...
Écrivons pelouse, et que chacun le décode à sa guise.
Ou plutôt, écrivons peluse, pour prévenir un futur [pœloyz] : moins il y a de lettres, et mieux c'est !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

49 Dernière modification par greg (06-07-2009 08:13:20)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

P'tit prof a écrit:

La différence, c'est que le svarabhkti intercale une voyelle, et l'épenthèse une consonne.

Je ne crois pas que l'épenthèse se limite aux consonnes : l'épenthèse peut être vocalique. Je dirais que le svarabhkti est un cas particulier d'épenthèse.


P'tit prof a écrit:

Le cas du e qui fut prononcé, mais ne l'est plus, est évidemment litigieux.

Qui fut ?!  smile  Qui est !!


P'tit prof a écrit:

Quand je vois pelouse, je lis en effet [pluz], et [pœluzœ] me fait me demander si je n'ai pas affaire à un extra-terrestre...
Écrivons pelouse, et que chacun le décode à sa guise.
Ou plutôt, écrivons peluse, pour prévenir un futur [pœloyz] : moins il y a de lettres, et mieux c'est !

Oui, tout est relatif. Ceux qui disent /p?·lu·z?/ sont sidérés d'entendre [pluz] pour le /p?·luz/ du Nord. Au fait, tu n'es donc pas favorable au digramme <ou> pour représenter le phonème /u/ ? Et pour le phonème /y/ de /dy?/ = <dur>, que préconises-tu ?

50 Dernière modification par Naïf (06-07-2009 09:11:44)

Re : Or, taux, gras, feux... (réforme d'orthographe)

@ greg - je n'ai fait que nommer plusieurs des serpents de mers qui hantent les discussions sur le sujet, et qui me semblent devoir être au moins présents sur ce fil. Il faut en effet redire que chacun de ces points est diversement interprétable.

Pertinence linguistique? Immédiate, mais ce n'est pas le point: l'auteur l'a bien dit au début: "objectif pratique". C'est donc l'écriture en tant que phénomène à géométrie variable qui est convoqué. (pas sûr d'ailleurs que les phénomènes linguistiques soient homogènes, qu'il y ait un sens à continuer cette "linguistique de la langue" du Genevois)

Conséquence pratique de ma harangue: comparer tout de go formes écrites et productions orales sans précautions de méthode ni début de théorisation (pas de pratique sans théorie, combien de fois faudra-t-il le dire?!) invalide l'approche d'emblée à mes yeux. N'interviendrai ici - peut-être, si on le veut - que pour des points d'analyse: de l'écrit (en soi), ou de l'oral (en soi).

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