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Le forum d'ABC de la langue française

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forum abclf » Promotion linguistique » Le français et les anglicismes

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Messages [ 151 à 181 sur 181 ]

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Re : Le français et les anglicismes

Titian a écrit:

Sun, fun, bun, gun – et aussi done (pp du verbe do, qu’on ne peux pas traduire avec beaucoup de satisfaction) won, son, love, duck, bucket. Honey, London...  on doit prononcer les tous en même façon.

Tout à fait. La graphie du son /?/ en API = /V/ en X-Sampa est <u> de façon générale. Ce qui ne veut pas dire que tout graphème <u> correspond au phonème /?/ = /V/. C'est-à-dire qu'on à la règle générale suivante : /?/ = /V/ ? <u> (aux exceptions près). Mais la réciproque n'étant pas nécessairement vérifiée dans tous les cas, la règle générale <u> ?/?/ = /V/ est fausse.
Exemples :
pour le mot <put>, on a : <u> ?/?/ en API = /U/ en X-Sampa
pour le mot <truth>, on a : <u> ?/u?/ en API & X-Sampa
pour le mot <bury>, on a : <u> ?/e/ en API & X-Sampa.

Dans le cas particulier des monosyllabes qui se terminent par /?n/ en API = /Vn/ en X-Sampa — comme <sun>, <fun>, <bun> & <gun> — la règle générale /?/ = /V/ ? <u> s'applique.

À la règle générale /?/ = /V/ ? <u>, viennent s'ajouter des règles secondaires (ou des ensembles d'exceptions) :
1] /?/ = /V/ ? <o> pour certains mots : <done>,  <nothing>, <money>, <son>, <won> etc.
La réciproque <o> ? /?/ = /V/ est fausse puisque pour un mot tel que <gone>, on a : <o> ? /?/ en API = /Q/ en X-Sampa.
2] /?/ = /V/ ? <ou> pour certains mots : <country>, <cousin>, <enough>, <touch>, <young> etc.
La réciproque <ou> ? /?/ = /V/ est fausse puisque pour un mot tel que <loud>, on a : <ou> ? /a??/ en API = /aU_^/ en X-Sampa.
3] /?/ = /V/ ? <oo> pour quelques mots : <blood>, <flood>.
La réciproque <oo> ? /?/ = /V/ est fausse puisque pour <soon>, on a : <oo> ? /u?/ en API & X-Sampa.
4] /?/ = /V/ ? <oe> pour au moins un mot : <(he) does>.
La réciproque <oe> ? /?/ = /V/ est fausse puisque pour <shoes>, on a : <oe> ? /u?/ en API & X-Sampa.


Titian a écrit:

Ah oui, et j’ai cité le mot London. Ici, c’est la deuxième syllabe qu’on prononcerait comme la première en fenêtre.
L’un – n – den.

Absolument.
<London> ? /l?nd?n/ en API = /lVnd@n/ en X-Sampa ; soit les règles /?/ = /V/ ? <o> pour la première syllabe (accentuée) et /?/ = /@/ ? <o> pour la seconde (inaccentuée).


Titian a écrit:

Mais à mon avis, ça n’est pas trop comme la première syllabe de fenêtre, mais un peu plus comme  on prononcerait « l’un » sans l’accent nasillard et avec un « n » plus dur.

Attention ! Si tu dénasalises la voyelle écrite <un> dans <l'un> (lequel est transcrit /lœ?/ en API = /l9~/ en X-Sampa) avec adjonction de la consonne nasale <n> en finale, tu finiras prononcer /lœn/ en API = /l9n/ en X-Sampa. Or la première syllabe de <London> est /l?n/ en API = /lVn/ en X-Sampa. Donc la dénasalisation vocalique au profit de la consonne suivante ne suffit pas à rendre la voyelle anglaise. Pour ce faire, il faut non seulement étirer les lèvres quand tu prononces /lœn/ = /l9n/ (à ce stade tu parviens alors à la syllabe  /l?n/ = /lEn/ comme dans <laine>), mais aussi reculer la langue vers l'arrière de la bouche : /?/ = /V/ est une voyelle postérieure comme /?/ = /O/ (le "o" de <porte>) ? le sommet de la langue est situé à l'arrière de la bouche.

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Re : Le français et les anglicismes

Une langue dont on se demande constamment comment la prononcer est-elle vraiment utile ?

DEFENSE DE CRACHER PAR TERRE ET DE PARLER BRETON. (Le Ministère de l'Éducation Nationale)

153 Dernière modification par Bookish Prat (10-01-2008 22:21:15)

Re : Le français et les anglicismes

Une langue dont on se demande constamment comment l'écrire est-elle vraiment utile ? big_smile

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

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Re : Le français et les anglicismes

Très drôle votre échange !
Pour vous départager, pourquoi ne pas soutenir une langue aussi simple à écrire qu'à prononcer ? Mais chuut, c'est secret, nom de code EO-1887.

Patoiglob,
J'approuve votre message à l'APLV sur le fait qu'il n'est pas nécessaire de  commencer les langues au primaire (hormis simple initiation, comme pourrait l'être le récent projet européen "FEEL", Funny, Easy and Effective Learning about Countries, Cultures and Languages, qui propose des mots et phrases dans une dizaine de langues européennes).
On fixe des objectifs de niveau en langue démesurés, du style B2 en terminale (impossible sans soutien scolaire et séjours linguistiques), après quoi on en déduit qu'il faut tout augmenter, heures, séjours, soutien, TICE, etc. Un peu de réalisme et de modestie ne ferait pas de mal.
Mais ce curieux site bloque mes messages (pourtant modérés !), pour crime de non conformité au dogme.
Ils ont même mis un avertissement que ce n'était pas un vrai forum (on avait remarqué) mais plutôt un courrier des lecteurs à l'ancienne.

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Re : Le français et les anglicismes

Oups ! Mille excuses à Patoiglob et Torsade de Pointes, le message que je commentais était de TDP et non Patoiglob.
C'était pourtant écrit sur la bouteille, ne pas abuser !

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Re : Le français et les anglicismes

patoiglob a écrit:

Une langue dont on se demande constamment comment la prononcer est-elle vraiment utile ?

Bookish Prat a écrit:

Une langue dont on se demande constamment comment l'écrire est-elle vraiment utile ? big_smile

Oui, c'est plutôt la question de Bookish Prat qu'on "pourrait" se poser car on ne se demande jamais comment prononcer sa langue maternelle. Quand on se pose des questions sur la prononciation d'une langue, c'est qu'elle est étrangère ou du moins non-maternelle.

Par exemple quand un francophone maternel dit /kuvÃ/ en X-Sampa = /kuv??/ en API, il peut se demander s'il doit écrire <couvent> (laquelle graphie est également associée à la chaîne sonore /kuv/), <couvant> ou <couve en>. Il peut même imaginer d'étranges combinaisons : <coup vent>, <coûts vents>. Et s'il est fâché avec laurtograf : <khouvan>, <qouvemps> etc. Mais en aucun cas il hésitera entre /kuvÃ/  = /kuv??/ d'une part, et /kuvi/, /kuvo/, /kuvu/ & /kuvy/ d'autre part.

C'est pareil pour l'anglais.

157 Dernière modification par patoiglob (17-01-2008 20:28:23)

Re : Le français et les anglicismes

Renvoyer le français et l'anglais dos à dos, c'est peut-être de bonne guerre mais ça n'est pas logique.

Le français s'est imposé comme langue universelle au XVIII s. par ses qualités intrinsèques et les valeurs qu'il véhiculait, tandis que sans la puissance britanique, puis états-unienne, nul n'aurait l'idée saugrenue de débourser un liard ni ne griller le moindre neurone pour étudier le disgracieux idiolecte anglonormand.

Et c'est la raison pour laquelle, au moindre signe de faiblesse de l'empire ploutocratique que l'on sait, les classes d'anglais se videront en un clin d'oeil, et l'on s'empressera, sans grands efforts, d' oublier j'usqu'au dernier rudiment de cet idiome que l'on voudra alors ne jamais avoir appris.

C'est alors que se posera pour de bon le problème de la langue internationale...

DEFENSE DE CRACHER PAR TERRE ET DE PARLER BRETON. (Le Ministère de l'Éducation Nationale)

158

Re : Le français et les anglicismes

Il n'y a aucune raison d'attendre que l'anglais décline (il est possible qu'il soit déjà à son apogée) pour poser le problème de la langue auxiliaire internationale !
Il faut faire comme dans tous les projets importants : études de marché, définition des critères, devis, expérimentations, tests de fiabilité, bilans coût/efficacité, temps d'étude/résultats (basés sur le CECRL), et que le meilleur gagne.
On peut se demander pourquoi ce raisonnement, si répandu et si naturel, le choix du meilleur fruit ou de l'outil le plus approprié, n'est pas appliqué à un des problèmes les plus anciens de l'humanité : l'incommunicabilité non pas philosophique mais au sens propre !

Je ne me prive pas de critiquer l'hégémonie de la langue anglaise dans l'UE, certains l'ont peut-être remarqué (ouaf !), mais la France n'a pas le monopole des valeurs humanistes et notre hymne national garde la trace de notre vision musclée du dialogue interculturel, méthode qui a été un jour ou l'autre celle de quasiment toute l'humanité - sauf peut-être les bouddhistes ?
Sur Voltaire : "Il s’exile après sa libération, en Grande-Bretagne (suite à l’ordre qui lui fut donné de quitter le royaume français) de 1726 à 1729, où il découvre la philosophie de John Locke, les théories scientifiques d’Isaac Newton et la caractéristique de la monarchie britannique, dont il assurera la vulgarisation en France dans les Lettres philosophiques."

"Le Parlement de l’Angleterre, en anglais Parliament of England, était le parlement du Royaume d’Angleterre. Créé au XIIIe siècle, il a de plus en plus limité le pouvoir de la monarchie : de tribunal suprême, il est devenu le principal organe de conseil du roi, puis l'arbitre des crises politiques et le censeur éventuel du souverain. Ce rôle de contrôle et de modérateur de la monarchie sera à la base de la démocratie à l'anglaise qui se met en place plusieurs siècles après." (Wikipedia)

159

Re : Le français et les anglicismes

on ne se demande jamais comment prononcer sa langue maternelle

Si, très souvent. Surtout pour les langues avec l'écriture chaotique, comme l'anglais et le français... Les enfants demandent souvent "comment ça se lit" devant un mot inconnu ou quelque peu oublié. Les questions des enfants russes concernent plus souvent la place de  l'accent tonique.

par ses qualités intrinsèques

Qualités intrinsèques?.. Y a-t-il une langue qui n'en possède pas?..

160

Re : Le français et les anglicismes

patoiglob a écrit:

Renvoyer le français et l'anglais dos à dos, c'est peut-être de bonne guerre mais ça n'est pas logique.

Mais là en l'occurrence il ne s'agit ni "du" français ni "de" l'anglais : il s'agit plutôt de la relation, en général non-biunivoque, qui associe oral et graphie. Et c'est assez logique.

Pour prendre un exemple mathématique, on peut considérer la relation R qui, aux phonèmes d'une orolangue quelconque OL, met en rapport les graphèmes de la scriptolangue SL associée (le système d'écriture correspondant à OL).
Cette relation R est telle qu'il existe des graphèmes appartenant à SL qui peuvent être mis en relation avec plus d'un élément de OL. En français, par exemple, le graphème <ch> peut être relié au son /?/ = /S/ ? <chimère> par exemple, ou encore au son /k/ ? <chronique>, autre exemple. En maths on dit que la relation R de OL sur SL n'est pas injective — et donc, a fortiori, pas bijective (pas biunivoque).

C'est le cas pour l'anglais aussi.
La relation  R : OAn ? SAn, où OAn est l'oro-anglais et SAn le scripto-anglais est tout autant non-injective que la relation R : OFr ? SFr (orofrançais & scriptofrançais).
En effet, le graphème <ch> peut être réalisé /?/ = /S/ ? <machine> ou encore /t?? / = /t_S/ ? <chimney>.

Idem pour l'allemand : R : OAl ? SAl (Al pour allemand).
La relation R n'est pas une injection (ni donc une bijection) puisque le graphème <ch> peut être prononcé /ç/ = /C/ comme dans <ich>, ou encore /x/ comme dans <Bach> et enfin  /?/ = /S/ comme dans <Chauffeur>.

C'est un trait commun de l'allemand, de l'anglais et du français : la relation R : OL ? SL n'est ni bijective ni injective quelle que soit L.

Autrement dit, le fait que le système graphique ne puisse prétendre représenter terme à terme tous les phonèmes de la langue orale est une caractéristique commune de l'allemand, de l'anglais et du français.


patoiglob a écrit:

Le français s'est imposé comme langue universelle au XVIII s. par ses qualités intrinsèques et les valeurs qu'il véhiculait, tandis que sans la puissance britanique, puis états-unienne, nul n'aurait l'idée saugrenue de débourser un liard ni ne griller le moindre neurone pour étudier le disgracieux idiolecte anglonormand.

L'ancien français était également le vernaculaire universel de l'Europe occidentale médiévale. Mais ni au Moyen-Âge ni au temps des Lumières le français ne s'est imposé par ses seules qualités linguistiques : c'est la force (économique & militaire) et l'ascendant (intellectuel & culturel) des *francophones* qui lui ont conféré ce statut, à présent détenu par les *anglophones*. Après on peut discuter de la façon dont cette influence se répartit entre force et économie d'une part, et pensée et culture d'autre part, mais c'est un autre débat.


patoiglob a écrit:

Et c'est la raison pour laquelle, au moindre signe de faiblesse de l'empire ploutocratique que l'on sait, les classes d'anglais se videront en un clin d'oeil, et l'on s'empressera, sans grands efforts, d' oublier j'usqu'au dernier rudiment de cet idiome que l'on voudra alors ne jamais avoir appris.

Ça c'est sûr. Mais ça tient moins à l'extrême faiblesse (en dépit des apparences) de l'anglais dans notre pays qu'à la puissance du français en France.


patoiglob a écrit:

[...] le disgracieux idiolecte anglonormand.

C'est pas gentil pour la *vraie* langue ultramanicaine : l'ancien français d'Angleterre qu'on appelle "anglo-normand" (bien qu'il ne soit ni anglais ni normand...). L'anglais moderne a largement été façonné par l'ancien français d'Outremanche, mais on ne peut les confondre.

161

Re : Le français et les anglicismes

skirlet2 a écrit:

on ne se demande jamais comment prononcer sa langue maternelle

Si, très souvent. Surtout pour les langues avec l'écriture chaotique, comme l'anglais et le français... Les enfants demandent souvent "comment ça se lit" devant un mot inconnu ou quelque peu oublié. Les questions des enfants russes concernent plus souvent la place de  l'accent tonique.

Non, jamais. À moins d'être sourd et muet. Tu peux te demander comment *se lit* un mot (de ta langue maternelle) inconnu de toi, auquel tu serais confrontée pour la première fois via l'écrit. Mais sortons de l'écrit. Si tu dois utiliser à l'oral un mot déjà connu de toi, tu *sais* comment tu dois le prononcer. Et si c'est ce mot t'es inconnu, c'est que tu l'auras *entendu* prononcer par d'autres : c'est en premier lieu sa forme phonologique que tu assimileras, avant même son sens et sa graphie.

Pour les mots déjà connus d'eux à l'oral, les enfants confrontés à un système graphique complexe ne savent pas, dès le départ, *associer* une forme phonologique connue à la forme graphique qu'ils découvrent. Exemple : tous les enfants de 5 ans savent dire /møsjø/ = /m2sj2/. Mais quand ils vont à l'école, on leur apprend que /møsjø/ = /m2sj2/ s'écrit <monsieur>, et non pas que /møsjø/ = /m2sj2/ existe ni comment le dire, puisqu'ils l'utilisent et savent le prononcer bien avant l'alphabétisation.

À mon avis un aveugle de naissance et analphabète en braille ne se demandera jamais comment prononcer sa langue maternelle.

L'ambiguïté vient de ce que, après un certain âge ou niveau d'instruction scolaire, la proportion des mots nouveaux acquis via l'écrit augmente considérablement, créant ainsi l'illusion que l'oral découle de l'écrit.

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Re : Le français et les anglicismes

Autrement dit, le fait que le système graphique ne puisse prétendre représenter terme à terme tous les phonèmes de la langue orale est une caractéristique commune de l'allemand, de l'anglais et du français.

Oui, mais à des degrés divers, je crois même que les linguistes le présentent en pourcentage de correspondance phonétique écrit-oral, l'anglais détenant le record absolu du nombre de graphèmes, 1120 je crois, contre 190 pour le français, non ?
J'ai cherché un article en ligne sur ce sujet (le pourcentage dans diverses langues), mais sans succès.

L'ambiguïté vient de ce que, après un certain âge ou niveau d'instruction scolaire, la proportion des mots nouveaux acquis via l'écrit augmente considérablement, créant ainsi l'illusion que l'oral découle de l'écrit.

Je ne comprends pas cette volonté de séparer sytématiquement écrit et oral, alors qu'ils sont liés.
S'ils ne l'étaient pas, on pourrait prononcer "eTcétéra" ou "eKcétéra", au choix du client, alors que la graphie est fixée : etc. Une langue qui ne serait qu'orale serait soumise à d'énormes glissements phonétiques en fonction des régions, même en ayant des règles de grammaire. Et comment faire des règles de phonétique ? même les symboles que vous utilisez sont écrits.

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Re : Le français et les anglicismes

Tu peux te demander comment *se lit* un mot (de ta langue maternelle) inconnu de toi, auquel tu serais confrontée pour la première fois via l'écrit.

Possible qu'il existe une différence subtile entre "prononcer" et "lire à haute voix", mais de telles nuances m'échappent...

Autrement dit, le fait que le système graphique ne puisse prétendre représenter terme à terme tous les phonèmes de la langue orale est une caractéristique commune de l'allemand, de l'anglais et du français.

La liste est bien plus longue smile

Je ne comprends pas cette volonté de séparer systématiquement écrit et oral, alors qu'ils sont liés.

Moi non plus, je ne comprends pas.

164

Re : Le français et les anglicismes

skirlet2 a écrit:

Tu peux te demander comment *se lit* un mot (de ta langue maternelle) inconnu de toi, auquel tu serais confrontée pour la première fois via l'écrit.

Possible qu'il existe une différence subtile entre "prononcer" et "lire à haute voix", mais de telles nuances m'échappent...

C'est vrai, la lecture non-silencieuse (à voix haute ou basse) et la parole (hors lecture) ont en partage l'acte de prononcer des sons articulés. Mais elles diffèrent sur un point essentiel : la lecture est une restitution orale de symboles graphiques dont l'association arbitraire est par nature une codification de la langue orale, alors que la parole n'est rien moins que l'activation directe cette langue orale. 

Il est possible de buter sur l'interprétation des symboles graphiques, soit parce qu'on ignore la valeur sonore associée à certaines combinaisons de lettres, soit parce qu'une même combinaison est susceptible de correspondre à deux (ou plusieurs) sons distincts. Pour reprendre l'exemple de <monsieur>, il n'y aucune raison pour qu'un élève de CP qui rencontre cette graphie pour la première fois ne le prononce pas  /m??sjœ?/ = /mÕsj9R/. Et ceci ne veut pas dire que l'élève ignore que /møsjø/ = /m2sj2/ est un mot qui sert à désigner les adultes de sexe masculin. Tout ce qu'on peut en conclure c'est que la lecture de <monsieur> peut conduire à une erreur, non de prononciation, mais de décodage du système graphique (par simple ignorance), alors que la prononciation de /møsjø/ = /m2sj2/  est acquise avec ou sans l'alphabétisation (et donc la lecture), sauf pathologie particulière (dysarthrie etc), mais c'est une autre débat.

Par conséquent, et pour clarifier ma position dont tu relevais l'imprécision, je pense qu'on peut se demander comment prononcer sa langue maternelle quand on la lit, mais non comment la prononcer quand on la parle.



krokodilo a écrit:

L'ambiguïté vient de ce que, après un certain âge ou niveau d'instruction scolaire, la proportion des mots nouveaux acquis via l'écrit augmente considérablement, créant ainsi l'illusion que l'oral découle de l'écrit.

Je ne comprends pas cette volonté de séparer sytématiquement écrit et oral, alors qu'ils sont liés.
S'ils ne l'étaient pas, on pourrait prononcer "eTcétéra" ou "eKcétéra", au choix du client, alors que la graphie est fixée : etc. Une langue qui ne serait qu'orale serait soumise à d'énormes glissements phonétiques en fonction des régions, même en ayant des règles de grammaire. Et comment faire des règles de phonétique ? même les symboles que vous utilisez sont écrits.

skirlet2 a écrit:

Moi non plus, je ne comprends pas.

L'oral n'est pas lié à l'écrit : l'écrit procède de l'oral. Des pans entiers de l'humanité (actuelle ou révolue) se passent de l'écrit. Toi et moi avons parlé bien avant de pouvoir lire ou écrire. Et si nous avions vécu dans une société orale, nous aurions pu continuer notre chemin et vivre notre vie en ignorant la lecture et l'écriture. Je ne dis pas ça pour dévaloriser l'écrit ou en minimiser l'importance, mais pour en souligner la relativité par rapport au fait primordial qui est la parole (parole sonore pour la plupart d'entre nous, et parole signée pour ceux qui utilisent la LSF par exemple).

Pour répondre à la question de Kroko, je pense qu'on ne "fait" pas des règles phonétiques, comme on ne saurait "faire" la gravité. On peut constater l'existence de la gravité et, éventuellement, en discerner les contours pour tenter d'en expliquer le fonctionnement. C'est pareil pour la phonétique : on ne peut qu'écouter et essayer de décrire ce qu'on entend. Il serait tout à fait possible d'imaginer une grammaire du français basée sur la phonologie. Voici un simple aperçu pour le phénomène de la "liaison" : tout substantif commençant par une voyelle est préfixé par /z/ quand celui-ci est au pluriel et précédé de l'adjectif possessif à la première personne du pluriel ; dans le cas contraire il n'est pas préfixé (invariable). Exemples illustrant cette règle :
/no/ + /ami/ ? /nozami/
/no/ + /ide/ ? /nozide/
/no/ + /lybi/ ? /nolybi/
/no/ + /papje/ ? /nopapje/.
Cette règle, comme toutes les règles, comporte des exceptions :
/no/ + /eRo/ ? /noeRo/.
Ce qui d'ailleurs permet de différencier /eRo/ de /zeRo/ au pluriel :
/no/ + /zeRo/ ? /nozeRo/ (ce mot commençant par une consonne suit la règle)
/no/ + /eRo/ ? /noeRo/ (ce mot commençant par une voyelle est une exception à la règle).

D'autre part les glissements phonétiques se produisent en dépit de l'extrême rigidité de la codification de la langue écrite. Bien des francophones disent /??i/ = /SHi/ tout en écrivant <je suis> (et beaucoup plus rarement <j'suis> ou <chuis>). Beaucoup de Méridionaux disent /m?n??/ = /mEnÃ/ alors qu'il n'écrivent pas *<mènant> pour <maintenant>.

La phonétique a recours à une écriture symbolique spécifique pour *transcire* les sons de la langue. La langue écrite aussi. Mais ce qui distingue la phonétique de la langue écrite c'est que la première peut (et devrait) être dispensée par audio alors que ce support est, par définition, inaccessible à la seconde. Je dirais que les alphabets API & X-Sampa ont été conçus pour des échanges *écrits*, comme en ce moment via le net, mais en aucun cas ils ne sont les sons. smile


skirlet2 a écrit:

Autrement dit, le fait que le système graphique ne puisse prétendre représenter terme à terme tous les phonèmes de la langue orale est une caractéristique commune de l'allemand, de l'anglais et du français.

La liste est bien plus longue smile

C'est sûr ! smile

krokodilo a écrit:

Oui, mais à des degrés divers, je crois même que les linguistes le présentent en pourcentage de correspondance phonétique écrit-oral, l'anglais détenant le record absolu du nombre de graphèmes, 1120 je crois, contre 190 pour le français, non ?
J'ai cherché un article en ligne sur ce sujet (le pourcentage dans diverses langues), mais sans succès.

C'est bien possible. Je vais voir de mon côté si je trouve des infos.

165

Re : Le français et les anglicismes

Aujourd'hui, sur France-info, une journaliste a présenté un Français qui pratiquait la pêche "no kill".
Si j'ai bien compris, il s'agit d'une activité où le pêcheur fautif n'est pas tué par le garde-pêche, mais simplement jeté à l'eau (sans ses bottes, sinon il coule).

166

Re : Le français et les anglicismes

Avez-vous vu le nouveau site Franceterme ? Enfin une initiative officielle sur la terminologie, qui nous rapprochera un peu du Québec. Apparemment, on va pouvoir y proposer de nouveaux termes, dans la rubrique "boîte à idée":
http://franceterme.culture.fr/FranceTerme/

167

Re : Le français et les anglicismes

Sauf erreur, ça n'a rien de neuf que l'habillage. Il me semble qu'il s'agit strictement de la base Criter, inaccessible aujourd'hui, qui listait les terminologies parues au JO. Il y a 4274 entrées aujourd'hui.

La boîte à idées est nouvelle et serait sûrement intéressante si son fonctionnement n'était pas du type centralisme démocratique. Imaginez un peu : il faut adresser à quelqu'un d'indéfini une proposition qui apparemment ne sera ni vue ni discutée quelque autre visiteur et attendre qu'elle passe devant une commission pour être publiée au JO avant de revenir sur le site... Autant dire que dans le meilleur des cas, vous aurez une proposition de remplacement alors que le mot à remplacer sera devenu irremplaçable.

On aurait pu faire autrement : repérer les mots à évaluer, les mettre en ligne prestissimo, proposer des équivalents, inviter à en proposer, en indiquant des pistes, des règles, etc., les évaluer, les faire voter, motiver les choix et les valider rapidement. Et donner une médaille aux heureux contributeurs.
Mais c'est mieux que rien, bien sûr.

168

Re : Le français et les anglicismes

Pour une fois que je faisais preuve d'optimisme !

169

Re : Le français et les anglicismes

Le site va peut-être s'améliorer, c'est sa première mouture. Surtout, il est beaucoup plus visible et a bénéficié d'un article du Monde. Mais ce n'est pas nouveau.

170

Re : Le français et les anglicismes

Je viens de voir que "fuiter" (telle information a fuité dans la presse) n'était pas dans mon Littré, alors qu'il me semble assez courant, à défaut d'être littéraire ou aussi élégant que filtrer, outre le conflit avec le verbe fuir. De plus, le TLFI l'indique comme remontant déjà à 1944 avec Queneau, voire Chateaubriand (adj. fuitive).
Bref, je me demande si nos dicos n'acceptent pas plus facilement les nouveaux anglicismes (comme coach, buzz, mais je n'ai pas regardé s'ils y sont déjà) que nos propres néologismes, ce qui serait tout de même un comble.
Fuitons français !

171

Re : Le français et les anglicismes

Le TLFi ne note pas exactement le sens de «fuiter» contenu dans «une information a fuité». Mais c'est mieux que rien.
Quant à savoir si les dictionnaires enregistrent plus facilement les mots étrangers que les mots français, on peut espérer que non smile : théoriquement, c'est la diffusion du mot qui devrait orienter les choix, c'est-à-dire la diffusion dans le corpus utilisé.
En fait, une étude systématique seule pourrait en dire plus : relever les termes étrangers, évaluer leur diffusion ; il faudrait aussi voir les sorties, et comparer.

172

Re : Le français et les anglicismes

Je viens de lire sur un site d'infos le mot "freezing" (manifestation où les gens se figent quelques minutes).
Peut-être pourrait-on, sur ABC, discuter collégialement des équivalents possibles aux anglicismes, avant de les proposer dans la boîte à idées du site France-terme ?
Dans le cas présent, je crois qu'il ne faut pas chercher bien loin, puisque l'expression informatique "figeage d'écran" est déjà assez répandue, et que "figeage" me paraît tout à fait convenir.


Après French24, French-info ! où j'ai entendu il y a deux semaines "credit crush", mais comme nous sommes dans une phase transitoire avant le passage à l'anglais wink, la journaliste a bien voulu traduire par "fermeture du robinet à crédit" (je ne me rappelle plus exactement), conséquence de la récente panique financière.
Il faut reconnaître qu'il n'est pas évident de trouver une expression courte et imagée, fermeture du crédit ne convient pas, puisqu'il est plutôt restreint que fermé.
Resserrement, durcissement, limitation du crédit ? Ce dernier me semble le plus simple.

173

Re : Le français et les anglicismes

On y jouait dans les cours de recréation, dans mon enfance.
Variante de « un, deux, trois, soleil ! » : au signal, il fallait s'immobiliser dans une pose, grotesque si possible, et tenir cette pose sans bouger jusqu'au signal suivant.
Nous appellions cela jouer à la pose, comme le modèle qui pose pour un peintre, mais le terme pause, au sens de arrêt, conviendrait aussi.

Bref, il existe déjà un nom français pour cette chose française. Inutile de déranger une commission de teminologie !

174

Re : Le français et les anglicismes

(L'instit) - Ojourdui nouz allon zaprandr a konte lez wazo. Jobig, kont avek mwa : enwazo, deu...

(Jobig) - Deunwazo ?...

(L'instit) - Non ! Deuzwazo ! Trwa ... ?

(Jobig) - Trwazwazo ?...

(L'instit) - Wiiiii ! Trebien ! Katr ?...

(Jobig) - Katrzwazo ?...

(l'instit) - Nooooooon !!! Katrwazo ! Senk ? ...

(Jobig) - Senkwazo ?

(L'instit) - Wiiiii ! Bravo ! Sis ...

(Jobig) - Siswazo ?

(L'instit) - Non. Sizwazo. Set...

(Jobig) - Setzwazo.

(L'instit) - NON ! SETWAZO !!!!

(Jobig) - A pi taka le konte twa meum te nwazo !!! ...

DEFENSE DE CRACHER PAR TERRE ET DE PARLER BRETON. (Le Ministère de l'Éducation Nationale)

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Re : Le français et les anglicismes

La chose est-elle purement française?.. Nous, on avait un jeu très similaire (qui existe toujours) : "La mer s'agite - un, la mer s'agite - deux, la mer s'agite - trois... Silhouette marine, fige-toi!" Et ça s'appelait "jouer à la mer s'agite", ou "à la silhouette marine", ou "à fige-toi".
Sinon "figeage" et "limitation du crédit" me paraissent tout à fait convenables.

Patoiglob : super ce dialogue! lol C'est un peu comme le comptage des oeufs en russe big_smile

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Re : Le français et les anglicismes

patoiglob a écrit:

A pi taka le konte twa meum te nwazo ! ...

Trotop, sherpatoua, steteksto onwazo big_smile ! Pliiiiz, etimologiz-nou stegzotic Jobig roll.

Re : Le français et les anglicismes

Pliiiiz, etimologiz-nou stegzotic Jobig roll.

On cherche une étymologie amérindienne et voilà que... Bon sang, mais c'est bien sûr ! Jobig, c'est Joseph en breton ! Z'êtes retors, patoiglob big_smile !

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

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Re : Le français et les anglicismes

Mort de rire, big_smile Patoiglob, ek C lan.
La bu de fran C é dan je re.

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Re : Le français et les anglicismes

Très intéressant merci pour le partage !

180 Dernière modification par vh (28-08-2022 21:51:19)

Re : Le français et les anglicismes

L'anglais sweat shirt /swĕt/ (chemise à sueur) est  prononcé en franglais sweet shirt /swēt/ (chemise à friandises, chemise sucrée).


PS: Sans doute Mary Poppins a-t-elle charmé les Francais avec ses friandises toot sweet (transcription intentionnelle homophone de l'emprunt tout d'suite).

L'image avec VH est celle de la signature de Victor Hugo sur l' un de ses dessins.

Re : Le français et les anglicismes

Shirt est d'ailleurs souvent omis en français.  On parle juste d'un  "swit".

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