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forum abclf » Réflexions linguistiques » Le double sens du mot "pourquoi".

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Messages [ 33 ]

1 Dernière modification par kdrm (15-11-2021 23:51:30)

Sujet : Le double sens du mot "pourquoi".

Voilà une réflexion que je me suis faite il y a de cela bien vingt ans lorsque j'en avais 7.

Lorsque l'on demande "Pourquoi ?" à quelqu'un, l'on oublie souvent que le mot a deux sens totalement opposés qui pourtant parviennent à tenir dans la même définition.

Si l'on prend la première définition que l'on trouve sur le web, celui de Larousse.fr, on tombe sur : 1. Cause, raison, motif.

Et si je me souviens bien de mes classes de primaire, la réponse à un "pourquoi" doit être un "parce que..."

En d'autres termes, on pense que la cause et la raison sont deux choses identiques alors qu'elles sont tout à fait différentes.



Lorsque l'on répond à un "Pourquoi" et que l'on invoque une cause, on répond par un "Parce que", on cherche dans l'antérieur, dans la racine, dans l'origine.
Lorsque l'on répond à un "Pourquoi" et que l'on invoque une raison, on répond par "Pour" ; ce qui est le sens premier de la question. On cherche dans le postérieur, dans les branches, dans la prévision des choses.

Exemple :
- Pourquoi lui avoir tiré dessus ?
- Pour qu'il meure
- Pourquoi vouliez-vous qu'il meure ?
- Pour qu'il ne vive plus.
- Pourquoi vouliez-vous qu'il ne vive plus ?
- Pour qu'il ne fasse plus de mal.

Et à l'opposé :
- Pourquoi lui avoir tiré dessus ?
- Parce que j'étais énervé contre lui.
- Pourquoi étiez-vous énervé contre lui ?
- Parce qu'il a baisé ma femme

Lorsque l'on demande "Pourquoi" et que l'on s'attend à entendre une cause, l'on devrait plutôt demander "Parquoi"
Car sinon la question est à double sens et dès lors elle n'en a plus vraiment.

Qu'en pensez-vous ?

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Quand le français en était à ses balbutiements, la notion de cause était assez différente d'aujourd'hui.

Regardez par exemple les 4 causes d'Aristote.

Aujourd'hui, la cause est clairement définie comme antérieure à sa conséquence, c'est un résultat de la pensée scientifique.

Mais à l'époque, la reine des causes était la cause finale. Même Leibniz, au XVIIe, le prenait encore ainsi.

En fait, Leibniz distinguait les raisons nécessaires (la cause initiale), et la raison suffisante (la cause finale). Même en science, il y a toujours cette dichotomie. Par exemple, en Optique (réfraction selon Descartes versus principe de moindre de temps selon Fermat) ou en mécanique (mécanique de Newton versus principe de moindre action de Maupertuis).

De mon point de vue, la préposition "par" évoque un chemin, donc un moyen plutôt qu'une cause originelle (on passe "par" là)

Si je devais imaginer un terme, j'emprunterais au verbe sourdre (latin surgo)

Pourquoi lui avoir tiré dessus ?
Pour le tuer, par le revolver que j'avais en poche, sourdant qu'il m'avait énervé

3 Dernière modification par kdrm (16-11-2021 02:21:01)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Quand le français en était à ses balbutiements, la notion de cause était assez différente d'aujourd'hui.

Regardez par exemple les 4 causes d'Aristote.

Aujourd'hui, la cause est clairement définie comme antérieure à sa conséquence, c'est un résultat de la pensée scientifique.

Mais à l'époque, la reine des causes était la cause finale. Même Leibniz, au XVIIe, le prenait encore ainsi.

En fait, Leibniz distinguait les raisons nécessaires (la cause initiale), et la raison suffisante (la cause finale). Même en science, il y a toujours cette dichotomie. Par exemple, en Optique (réfraction selon Descartes versus principe de moindre de temps selon Fermat) ou en mécanique (mécanique de Newton versus principe de moindre action de Maupertuis).

De mon point de vue, la préposition "par" évoque un chemin, donc un moyen plutôt qu'une cause originelle (on passe "par" là)

Si je devais imaginer un terme, j'emprunterais au verbe sourdre (latin surgo)

Pourquoi lui avoir tiré dessus ?
Pour le tuer, par le revolver que j'avais en poche, sourdant qu'il m'avait énervé


On est donc d'accord que "Par" évoque un moyen, mais il évoque des causes lorsqu'on l'utilise de manière antérieure et qu'on lui attribue le "ce" du "parce que" qui était autrefois "par ce que" qui lui désigne clairement une cause ; tandis que "pour" désigne l'objectif, le but à atteindre.

Toujours est-il que la question "Pourquoi" évoque autant des causes que des objectifs et que c'est selon moi une grave erreur de la langue française de ne pas différencier les deux.

"Pourquoi avez-vous fait ça ?" peut tout aussi bien être interprété d'une manière antérieure que postérieure et la réponse donnée peut ne pas correspondre à ce qu'attendait la personne qui a posé la question.

Il y a le pourquoi du "Qu'est-ce qui vous a amené à ça" et le pourquoi du "Dans quel but avez-vous fait ça" et les deux devraient selon moi être différenciés selon si la réponse attendue est "parce que" ou "pour"

On peut aussi bien demander pourquoi lorsque l'on ne comprend pas un objectif que pourquoi lorsque l'on ne comprend pas une cause.

Et transformer l'un des deux en "Parquoi" me semble logique et tout à fait compréhensible lorsque l'on cherche à comprendre des causes et que l'on s'attend à un "parce que" en guise de réponse.

Sinon pourquoi demander "Pour quoi" ? On devrait demander "Par quoi" autrement dit par quel cheminement.



(edit fini)

4 Dernière modification par kdrm (16-11-2021 02:59:35)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Je rajoute que si l'on cherche à connaitre un moyen, on utilise déjà "comment"

5

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

kdrm a écrit:

Sinon pourquoi demander "Pour quoi" ?

Jusqu'à la lecture de cette vôtre phrase, je me suis demandé si la différence entre « pourquoi ? » (causal) et « pour quoi (faire) ? » (final) serait évoquée ici. J'ai eu plusieurs enseignants qui insistaient sur la nécessité de se demander si l'on entend l'un ou l'autre.
Depuis longtemps, « pour » a, entre autres, aussi bien un sens causal (X est connue pour son franc-parler) qu'un sens final (Elle joue pour son plaisir).
Après tout, si j'entends « [purkwa] tu prends ton chien ? », je ne trouve pas gênant de pouvoir répondre soit « Parce qu'il n'aime pas rester seul à la maison », soit « Pour qu'il ne reste pas seul à la maison ». Bien entendu, la cause et la finalité ne sont pas toujours aussi proches l'une de l'autre mais je ne me vois pas dire « Par quoi ? » lorsque j'attends la première dans la réponse.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

6 Dernière modification par florentissime (17-11-2021 15:02:01)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

J'admets bien volontiers que tout ceci n'est pas très cohérent; c'est fonctionnel, mais cela semble fait de bric et de broc. Cela ne simplifie pas l'apprentissage.

Mais pour moi, "par", "per" en latin, représente plutôt un moyen.

En latin il y a :
- pro : devant, en avant, qui a donné 'pour'
- per : à travers, durant, qui a donné 'par'
- post : derrière, en arrière, qui a donné 'puis'.

Par conséquent, si je voulais un système cohérent, je proposerais les dualités suivantes :

La cause finale (devant)
Pourquoi / pource que
Le moyen (à travers)
Parquoi / parce que
La cause originelle (derrière)
Puisquoi / puisce que

Pourquoi l'as-tu agressé ?
Pour ce qu'il prenne une leçon.
Parquoi l'as-tu agressé ?
Parce que j'ai trouvé un pic à glace dans ma poche.
Puisquoi l'as-tu agressé ?
Puisce qu'il avoua m'avoir trahi

7 Dernière modification par Chover (17-11-2021 20:04:45)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Mais votre « parquoi » créerait une sacrée confusion eu égard à « par quoi », qu'on trouve dans des questions comme « Par quoi peut-on remplacer la crème fraîche ? »

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

8 Dernière modification par Lévine (17-11-2021 21:24:53)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Pourquoi a le sens causal comme le sens final dès l'ancien français, et c'est normal, car si en logique on ne saurait confondre la cause et le but, dans de nombreuses situations de communication, l'expression du but se présente en fait comme l'expression d'une intention apparue avant la question, donc située à l'origine de l'action.

- Pourquoi sors-tu ton chien ?
    - Parce qu'il est resté enfermé trop longtemps.

2° - Pourquoi sors-tu ton chien ?
    - Pour le faire p...
= parce que j'ai l'intention de le faire p...

Affecter des adverbes interrogatifs distincts reviendrait à anticiper la réponse de l'interlocuteur, donc à le priver de toute liberté !!! Certes, il y a pour quoi pour le but, mais je l'envisage mal ici, et d'autre part les deux mots n'en font toujours qu'un à l'oral...

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Quand le français en était à ses balbutiements, la notion de cause était assez différente d'aujourd'hui.

Regardez par exemple les 4 causes d'Aristote.

Euh...

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Chover a écrit:

Mais votre « parquoi » créerait une sacrée confusion eu égard à « par quoi », qu'on trouve dans des questions comme « Par quoi peut-on remplacer la crème fraîche ? »

Dans les deux cas, c'est l'expression d'un moyen.

Pourquoi remplacer la crème ?
Pour mieux digérer.
Pour ce que la sauce soit plus légère.

Parquoi remplacer la crème ?
Par de la maïzena.
Par ce qui apporte onctuosité.

Puisquoi remplacer la crème ?
Puis ce que je fais un régime.

11 Dernière modification par florentissime (18-11-2021 00:01:26)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Lévine a écrit:

Pourquoi a le sens causal comme le sens final dès l'ancien français, et c'est normal, car si en logique on ne saurait confondre la cause et le but, dans de nombreuses situations de communication, l'expression du but se présente en fait comme l'expression d'une intention apparue avant la question, donc située à l'origine de l'action.

Le but est une cause, une cause finale... c'est d'ailleurs la principale cause des hommes, du moins lorsqu'ils agissent volontairement... [ex : se battre pour une cause]

Ce n'est pas le cas d'une pierre, pour ce que je la lâche, par ce qu'elle tombe, puis ce qu'elle est attirée par
la terre.

Lévine a écrit:

Affecter des adverbes interrogatifs distincts reviendrait à anticiper la réponse de l'interlocuteur, donc à le priver de toute liberté !!! Certes, il y a pour quoi pour le but, mais je l'envisage mal ici, et d'autre part les deux mots n'en font toujours qu'un à l'oral...

Il n'y a aucune privation de liberté ici, c'est simplement s'exprimer avec précision. En effet, l'autre reste libre de mentir et d'user de sa mauvaise foi dans sa réponse

De toute façon, comme évoqué plus haut, la plupart du temps, dans les échanges avec nos semblables, c'est leur but qui est pour nous la principale source d'interrogation.

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Je peine à vous suivre. Vous avez écrit dans votre message numéroté 3 : "Parquoi" me semble logique et tout à fait compréhensible lorsque l'on cherche à comprendre des causes et que l'on s'attend à un "parce que" en guise de réponse.
Or, après mon objection :

Chover a écrit:

Mais votre « parquoi » créerait une sacrée confusion eu égard à « par quoi », qu'on trouve dans des questions comme « Par quoi peut-on remplacer la crème fraîche ? »

vous affirmez :

florentissime a écrit:

Dans les deux cas, c'est l'expression d'un moyen.

Pourquoi remplacer la crème ?
Pour mieux digérer.
Pour ce que la sauce soit plus légère.

Parquoi remplacer la crème ?
Par de la maïzena.
Par ce qui apporte onctuosité.

• Cause, moyen et finalité (« Pour mieux digérer ») se valent-ils pour vous ?
• En grammaire traditionnelle, l'agent n'est pas forcément une personne : ne peut-on voir un tel complément dans « Par de la Maïzena » ? (Actif : De la Maïzena remplace la crème.)
• La phrase « Avec une petite cuiller, j'ai remplacé la crème par de la Maïzena » ne comporte-t-elle pas, elle, un authentique complément de moyen ?
• Proposez-vous vraiment « Pour ce que la sauce soit plus légère » ?

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Chover :
1° Le message '3' n'est pas moi.
2° Précisément, je distingue cause originelle, moyen, cause finale, ce pour quoi je proposai les dualités :
Puisquoi / Puis ce que
Parquoi / Par ce que.
Pourquoi / Pour ce que.
3° les moyens peuvent très bien se cumuler.

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:
Lévine a écrit:

Affecter des adverbes interrogatifs distincts reviendrait à anticiper la réponse de l'interlocuteur, donc à le priver de toute liberté !!! Certes, il y a pour quoi pour le but, mais je l'envisage mal ici, et d'autre part les deux mots n'en font toujours qu'un à l'oral...

Il n'y a aucune privation de liberté ici, c'est simplement s'exprimer avec précision. En effet, l'autre reste libre de mentir et d'user de sa mauvaise foi dans sa réponse

De toute façon, comme évoqué plus haut, la plupart du temps, dans les échanges avec nos semblables, c'est leur but qui est pour nous la principale source d'interrogation.

Mais enfin, je ne vais pas demander à mon interlocuteur de me préciser si la sortie de son chien obéit à une cause initiale ou à une cause première afin de pouvoir choisir le bon mot interrogatif ! Il va me prendre pour un personnage de Molière (s'il a des lettres)...

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Chover :
1° Le message '3' n'est pas moi.

Oh, excusez-moi.

florentissime a écrit:

2° Précisément, je distingue cause originelle, moyen, cause finale, ce pour quoi je proposai les dualités :
Puisquoi / Puis ce que
Parquoi / Par ce que.
Pourquoi / Pour ce que.
3° les moyens peuvent très bien se cumuler.

Je n'ai sans doute pas été assez prudent. Mon exemple était mal choisi.
Certes, si la Maïzena remplace la crème, on dira au passif que la crème est remplacée par la Maïzena, une phrase où je vois l'agent « par la Maïzena ». Mais à partir de l'actif  « J'ai remplacé la crème par de la Maïzena », on obtient le passif « La crème a été remplacée par moi par de la Maïzena », avec le seul agent « par moi ». De là à faire de « par de la Maïzena » un complément de moyen…  La comparaison avec l'authentique complément de moyen « par la main » dans « Papa me tire par la main » ne me semble pas aller dans ce sens.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Lévine : personnellement, je n'ai jamais ce besoin de demander pourquoi quelqu'un sort son chien, car ça me semble évident. L'exemple n'est pas très judicieux à mon avis.

Personnellement, je m'imaginais réaliser un interrogatoire de police, où il me fallait poser des questions précises, pour déterminer :
° le mobile (pour quoi),
° l'arme du crime (par quoi)
° le déclencheur de l'acte (puis quoi)

Tu vois donc bien que la liberté était au cœur de mes préoccupations.

Chover : oui, ta réflexion était un peu rapide. Mais la mienne aussi  En effet, les prépositions peuvent avoir un rôle spécifique relativement au verbe auxquelles elles se rattachent. Ce qui remplace quelque chose est toujours introduit par la préposition "par" dans le prototype du verbe remplacer :
"par de la maïzena" ressemble donc plutôt à un objet indirect qu'à un moyen. Dans d'autres formulations, on écrirait, par exemple, "je substitue la maïzena à la crème."

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Lévine : personnellement, je n'ai jamais ce besoin de demander pourquoi quelqu'un sort son chien, car ça me semble évident. L'exemple n'est pas très judicieux à mon avis.

On peut très bien imaginer un contexte dans lequel cette question ne sera nullement indiscrète. Il est d'autre part facile de prendre d'autres exemples ; ça ne changera rien au fond.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

18 Dernière modification par florentissime (20-11-2021 01:27:56)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Levine :
Ce n'est pas une question d'indiscrétion.

Comme je l'ai écrit plus haut, la plupart du temps, ce qui nous interroge chez autrui, c'est sa volonté, chose que l'on ne voit pas, mais qui guide ses actes.

Or une volonté, c'est une cause finale, et cela appelle donc un pourquoi.

La cause première, qui pousse à l'acte par déterminisme, concerne surtout les objets étudiés par les sciences.; et vous m'accorderez que jamais on ne va leur poser directement la question des raisons de leurs actes, puisqu'ils ne sauraient répondre et évoquer les lois qu'ils subissent.

J'imagine mal Newton questionner la pomme qui lui est tombée sur la tête : "pomme, pourquoi es-tu tombée ?"
Et la pomme de lui répondre
"Parce que je le voulais !"

Non, Newton s'est demandé à lui-même : "puisquoi la pomme est-elle tombé ?"
Puis, il s'est répondu :
"Puisque la Terre attire à elle tous les corps". "Mais parquoi ?", se dit Newton. "Parce que la force de gravitation donne à la pomme une accélération constante vers le centre de la terre"

En vérité, la seule question qui met en cause une intimité, qui est indiscrète, c'est la question "Pourquoi ?"

C'est pourquoi on y répond généralement avec "parce que", ceci pour sauvegarder notre jardin secret.

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Levine :
La cause première, qui pousse à l'acte par déterminisme, concerne surtout les objets étudiés par les sciences.; et vous m'accorderez que jamais on ne va leur poser directement la question des raisons de leurs actes, puisqu'ils ne sauraient répondre et évoquer les lois qu'ils subissent.
J'imagine mal Newton questionner la pomme qui lui est tombée sur la tête : "pomme, pourquoi es-tu tombée ?"
Et la pomme de lui répondre
"Parce que je le voulais !"

Ne s'éloigne-t-on pas de la grammaire ? Quoi qu'il en soit, l'impossibilité où sont les objets de répondre aux questions sur les lois qu'ils subissent ne change rien à ces lois. Des lois dont les hommes parlent. Dans le cadre d'études scientifiques ou dans la vie quotidienne :
« Je me demande pourquoi mon piano se désaccorde si vite.
– Parce qu'il est trop près du radiateur. »
« Pourquoi les fraises sont(-elles) meilleures cette année ?
– Parce qu'il a fait plus beau. »
« Héléna, pourquoi ton pantalon est(-il) mouillé ?
– Parce qu'une voiture m'a éclaboussée ! »
Dans ces échanges, où les relations de cause concernent des objets, je ne vois que des causes initiales. Aucune cause finale.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

20 Dernière modification par florentissime (20-11-2021 14:20:09)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Chover : Tes exemples sont pertinents.

Et ils montrent combien l'emploi du pronom interrogatif "pourquoi" n'a pas de sens dans ces cas, du point de vue de son étymologie.

Il est évident que ni un piano, ni des fraises, ni un pantalon n'ont de volonté.

Ce sont des causes premières d'une situation qu'il question. Mais si on veux laisser la liberté de répondre sur la cause ou le moyen, le plus simple est d'utiliser "que".

Que le piano joue-t-il faux ?
Puisque il est trop près du radiateur, parce que le gradient de température y est trop fort, le piano se désaccorde.

Que les fraises sont-elles si bonnes ?
Puisqu'il a fait très beau, parce que cela a favorisé leur production de sucre,  les fraises sont très bonnes cette année.
...
C'est plus court et moins tendancieux.

21

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Tes exemples sont pertinents. Et ils montrent bien que, dans ces cas, l'emploi du pronom interrogatif "pourquoi" n'a pas de sens, du point de vue de son étymologie.

Est-ce si sûr ? D'après le Robert DHLF, « pour » remonte au latin pro, dont le Gaffiot définit ainsi l'un des nombreux sens : 8 en raison de, en vertu de : pro tua prudentia Cic. Fam. 4, 10, 2, en raison de ta sagesse.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

22

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Ce sont des causes premières d'une situation qu'il question. Mais si on veux laisser la liberté de répondre sur la cause ou le moyen, le plus simple est d'utiliser "que".

Que le piano joue-t-il faux ?
Puisque il est trop près du radiateur, parce que le gradient de température y est trop fort, le piano se désaccorde.

Que les fraises sont-elles si bonnes ?
Puisqu'il a fait très beau, parce que cela a favorisé leur production de sucre,  les fraises sont très bonnes cette année.
...
C'est plus court et moins tendancieux.

Mais incompréhensible par la quasi totalité des francophones.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

23 Dernière modification par Lévine (20-11-2021 15:10:29)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

En ancien français, pour peut introduire le but, la cause, le moyen, la condition, la manière, l'idée de comparaison, l'idée de substitution, l'idée de correspondance mesurable entre deux termes...

Ne nous plaignons pas, il y a eu du progrès depuis.

Laissons la langue aller, elle sait ce qu'elle fait.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Chover : ce fil de discussion concerne les réflexions linguistiques, non les pratiques langagières usuelles. Peu importe donc que les réflexions aboutissent à des choses qui soient compréhensibles actuellement.

Levine : "la langue sait ce qu'elle fait"

Ce genre de réflexion confine à la pensée magique. La langue n'est pas un Être qui pourrait avoir une volonté. La langue est un outil partagé par une communauté, et cet outil est plus ou moins performant à remplir son rôle.

Si tu arrives à ce genre de confusions, c'est parce que le français est totalement ambigu dans l'expression des divers genres de cause, comme il est question ici.

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Chover : ce fil de discussion concerne les réflexions linguistiques, non les pratiques langagières usuelles. Peu importe donc que les réflexions aboutissent à des choses qui soient compréhensibles actuellement.

C'est Alco qui a évoqué la question de la compréhensibilité.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

26 Dernière modification par Lévine (20-11-2021 19:11:05)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Chover : ce fil de discussion concerne les réflexions linguistiques, non les pratiques langagières usuelles. Peu importe donc que les réflexions aboutissent à des choses qui soient compréhensibles actuellement.

Levine : "la langue sait ce qu'elle fait"

Ce genre de réflexion confine à la pensée magique. La langue n'est pas un Être qui pourrait avoir une volonté. La langue est un outil partagé par une communauté, et cet outil est plus ou moins performant à remplir son rôle.

Si tu arrives à ce genre de confusions, c'est parce que le français est totalement ambigu dans l'expression des divers genres de cause, comme il est question ici.

Aucune transcendance dans ma formule : la langue n'appartient à aucun individu, mais à la communauté, justement, et indépendamment de sa volonté.

Aucune langue n'est imparfaite, de même qu'aucune langue, du point de vue strictement linguistique, ne peut être dite primitive : un système linguistique est toujours plus ou moins en équilibre, donc parfait si on l'envisage en synchronie. Si la langue avait voulu faire la différence entre la cause et le but dans "pourquoi", soyez assuré qu'elle l'aurait faite.

Un individu ou un groupe peuvent influer sur l'orthographe ou l'adoption d'un alphabet, ou tenter d'introduire des innovations, comme le pronom iel (depuis 1980, je crois). Mais l'écriture est un fait secondaire pour les linguistes ; quant au "iel", qu'on prononcera d'ailleurs [yel], attendons qu'il s'impose naturellement avec les problèmes qu'il pose pour l'accord à l'oral.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

levine a écrit:

Si la langue avait voulu faire la différence entre la cause et le but dans "pourquoi", soyez assuré qu'elle l'aurait faite.

Vous réitérez dans cette pensée magique des langues qui auraient une finalité propre.

Soyons sérieux, une langue n'est qu'un outil. Soit cet outil est efficace, soit il ne l'est pas. Si une langue évolue difficilement, c'est qu'on la pratique sans réfléchir, par habitude.

28

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Mais oui, c'est une façon de parler, mais l'Histoire montre que l'évolution d'une langue échappe à ses locuteurs, c'est pourquoi je la personnifie. Avez-vous lu la ouvrages classiques des grands linguistes du XXème siècle ?

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29 Dernière modification par florentissime (21-11-2021 00:54:43)

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Si il y a bien une constante, depuis le xviii siècle, c'est l'émergence de cette pensée magique, avec notamment le concept d'égrégore, qui s'est insinué partout en sciences humaines et politiques.

Donc non, je n'ai pas lu vos grands linguistes, sauf par bribes, et pour tout vous dire, dès les principes, ils ne m'intéressent pas.

Je suis venu à la langue via la théorie mathématique des langages et l'informatique logicielle, lesquels me paraîssent beaucoup plus sérieux et rationnels.

Cette omniprésence du "pourquoi" est en soi l'indice d'une personnification erronée de choses qui n'ont pas à l'être.

30

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Le contresens absolu de vos deux premières lignes montre qu'en effet, vous ne connaissez pas la linguistique, dont les méthodes d'investigation ont parfois des rapports avec les théories mathématiques, justement. Mais je parle bien de méthodes d'investigation, pas de tentatives illusoires d'action sur la langue.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Mais je ne cherche pas ici à agir sur la langue.
Globalement, les recherches liguistiques qui scrutent les usages ne m'intéressent pas.
Ce qui m'intéresse, c'est l'art du langage, c'est-à-dire : comment mobiliser des compétences en techniques langagières en vue de communiquer efficacement les choses qui doivent l'être.

Le fil du forum est "réflexions linguistiques", non pas "réforme de la langue", ni "guide des usages".

Ainsi, je dis qu'une langue efficiente se doit de distinguer clairement cause première, moyen, et cause finale. Le terme "pourquoi", selon son étymologie, interroge une cause finale, mais le français va l'employer dans des situations différentes.

C'est d'ailleurs assez récent il me semble. Historiquement, on utilisait aussi "que" (celui dérivé de quia, contraction de que et jam).

On pourrait aussi dériver certains adverbes interrogatifs de la même manière :
Quehui : qu'est-ce qui fait que désormais ? marquant une cause qui s'inscrit dans le temps.
Quehui le piano se désaccorde-t-il ?
Puisque le radiateur a été allumé...

Quici : qu'est ce qui fait qu'ici ? Marquant une cause qui existe dans un lieu.
Quici le piano se désaccorde-t-il ?
Puisqu'on l'a déplacé près du radiateur.

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

florentissime a écrit:

Le terme "pourquoi", selon son étymologie, interroge une cause finale

Il me semblait que mon message numéroté 21 ci-dessus, avec la citation de Cicéron, montrait l'erreur que l'on commet lorsqu'on affirme cela sans nuance.

Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement… (Nicolas BOILEAU). Si possible !

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Re : Le double sens du mot "pourquoi".

Je me permets de rappeler aussi le message 23.

Mais entre nous, Chover, je crois que c'est peine perdue...

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