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forum abclf » Pratiques linguistiques » Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

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Messages [ 22 ]

1 Dernière modification par éponymie (09-03-2016 22:32:11)

Sujet : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Dans mes recherches sur la rue Galande, c'est la deuxième fois que je tombe sur un usage de ce genre, je ne la laisse pas passer :

http://img4.hostingpics.net/pics/98712518840117LeFigarorixe.jpg
Le Figaro du 17 janvier 1884

Le CNRTL ne signale pas cette acception vieillie du mot. Ou alors c'est que le journaliste considérait que pour accomplir un tel geste il fallait avoir déjà assassiné ?

2 Dernière modification par glop (09-03-2016 22:42:49)

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Curieux en effet !
À rapprocher, sans doute, de la définition "B4" donnée dans le cnrtl.
[Par exagération : Qui aurait pu tuer dans d'autres circonstances]…
http://www.cnrtl.fr/definition/meurtrier

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

3 Dernière modification par yd (09-03-2016 23:56:40)

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

J'ignorais cet usage, mais à mon avis il paraît avoir été influencé par le sens B dans le TLFi, devenu le plus usuel, de meurtrir :

B. − Blesser quelqu'un (ou, par métonymie, un endroit de son corps) par un choc ou une forte compression qui laisse sur la peau une marque ou une ecchymose.

Il resterait alors à comprendre pourquoi le TLFi à meurtrier (lien donné supra par Glop) ne dit rien d'un tel emploi.

Fille légère ne peut bêcher.

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Probablement parce que cet emploi n'est pas considéré comme légitime. Il faudrait voir si cet emploi se retrouve sous de nombreuses plumes ou n'est qu'un particularisme d'un journaliste.

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Il y a peut-être eu des considérations morales : appeler quelqu'un un meurtrier alors qu'il n'a pas tué risque de faire de lui un vrai meurtrier.

Fille légère ne peut bêcher.

6 Dernière modification par Ylou (10-03-2016 06:13:47)

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Ce meurtrier qui ne tue pas est à rapprocher du noyé qui n'est pas mort (cf le fil : noyade mortelle).

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Peut-être une ellipse fâcheuse de "en puissance" : le meurtrier en puissance.

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Ou en intention. Quelqu'un qui veut tuer mais rate son coup est-il moins meurtrier que celui qui réussit son acte?

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

C'est une question sérieuse ?

L'escrivaillerie semble estre quelque symptome d'un siecle desbordé

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Ça doit marcher comme l'adultère : Mais moi, je vous dis que quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis un adultère avec elle dans son cœur.(Matthieu 5:28)

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Ce verset concerne exclusivement les hommes mariés, les seuls par hypothèse susceptibles de commettre un adultère, chose impossible aux célibataires de l'un et l'autre sexe.
Parlons plus largement d'intention de commission :

Je confesse à Dieu tout-puissant,
Je reconnais devant mes frères
que j’ai péché,
en pensée, en parole, par action et par omission.

Pour rester dans le même domaine...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Abel Boyer a écrit:

Probablement parce que cet emploi n'est pas considéré comme légitime. Il faudrait voir si cet emploi se retrouve sous de nombreuses plumes ou n'est qu'un particularisme d'un journaliste.

Je retomberai peut-être sur l'autre article (qui pourrait être du même journaliste). On verra.

Mais, avec cette idée d'intention, j'ai pensé à faire une recherche avec "l'assassin rate son coup" et "l'assassin manque sa cible" : je n'ai pas trouvé grand chose mais c'est plausible. Imaginons un tueur à gage maladroit à sa première commande, on n'hésitera pas à l'appeler assassin même s'il n'a jamais tué personne. Pourquoi ça ne fonctionnerait pas pour meurtrier ?

Faut-il donc vraiment un meurtre effectif pour faire un meurtrier ? Un exemple basé sur un fait de 1836 mais je ne crois pas que le texte soit d'époque (là n'est pas le problème d'ailleurs) :

Le roi Louis-Philippe sort du conseil des ministres, aux Tuileries, pour se rendre à Neuilly avec la reine et Madame Adélaïde. Louis Alibaud décharge un fusil-canne, « nouvelle invention », sur le roi, « presque à bout portant », « en l’introduisant dans la voiture et l’appuyant sur la portière » ; le meurtrier rate son coup car au même moment le roi bouge la tête pour saluer la garde. « Ce mouvement le sauva ». Alibaud est arrêté immédiatement par un garde qui réussit à l’empêcher de se poignarder lui-même.

(l'affaire Alibaud)

Curieux décidément cette histoire : il doit y avoir sémantique sous roche.

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

On peut être un meurtrier dans l'âme, un meurtrier virtuel, un meurtrier plausible, un futur meurtrier, une graine de meurtrier, un meurtrier raté, malchanceux et maladroit ...

Ici, un extrait d'una analyse du droit congolais  ( vous fermerez les yeux sur l'orthographe fantaisiste...) :

 l y a délit manquée [b]si dans le cas d'un meurtrier maladroit qui manque sa victime [/b]ou lorsque quoique mortellement blessée, la victime est sauvé par la médecine.

Il ne sera puni pour empoissonnement si après avoir administré du poison à sa victime, il lui fait un contre poison qui la sauve. L'hypothèse de l'error personnae ne constitue pas un délit manqué. Cette hypothèse de l'aberatio ictus se réalise lorsque le mal que l'on avait l'intention de faire à une personne déterminée est tombé sur une autre personne que l'agent n'avait par en vue  

http://www.memoireonline.com/05/12/5833 … tee10.html

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Je distingue le cas de Garçon (le message 1 d'Éponymie), qui en frappant au bras avec un couteau montre son intention de blesser et commet l'acte dans l'intention de blesser, en même temps qu'il prouve, en frappant au bras, n'avoir pas voulu tuer, du cas d'Alibaud (le message 12 d'Éponymie) qui a l'intention de tuer, commet l'acte en vue de tuer, sans y réussir bien malgré lui - tel que les faits sont rapportés.

Dans le cas d'Alibaud, je n'hésite pas moi non plus à parler de meurtrier au sens plein actuel.
Dans le cas de Garçon je m'abstiens de parler de meurtrier, sans quoi je risque qu'à cause de moi - au moins en partie - la prochaine fois il ne fasse pas la différence entre frapper au bras et frapper mortellement.

Je voudrais dire encore qu'en ce qui me concerne je fais évidemment une très nette différence entre celui qui, ayant pensé sérieusement à me tuer, s'abstient à temps de passer à l'acte, et celui qui n'hésite pas à passer à l'acte, excusez-moi. Les conséquences ne sont pas du tout les mêmes, et bien évidemment le degré de la faute non plus.

Fille légère ne peut bêcher.

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

yd a écrit:

J
Je voudrais dire encore qu'en ce qui me concerne je fais évidemment une très nette différence entre celui qui, ayant pensé sérieusement à me tuer, s'abstient à temps de passer à l'acte, et celui qui n'hésite pas à passer à l'acte, excusez-moi. Les conséquences ne sont pas du tout les mêmes, et bien évidemment le degré de la faute non plus.

D'accord avec vous s'il s'abstient à temps de passer à l'acte. Mais si je ne dois la vie qu'à une cause extérieure, un événement ou une personne, j'estime que mon agresseur est un meurtrier. Et qui d'ailleurs peut tenter à nouveau sa chance une autre fois.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Légalement, le point de vue diffère selon que l’on se trouve en France ou aux USA.
En France, le délit d’intention n’existe pas ; d’ailleurs les cinéastes ont souvent basé les scénarii des films policiers (d’action) sur le fait que pour obtenir la condamnation des malfaiteurs, il fallait attendre qu’ils passent à l’action.
Aux USA, la loi est différente ; on se souvient que la seule personne se trouvant sur le sol américain qui fut condamnée pour sa participation aux attentats du 11 septembre, se trouvait en prison au moment des faits.
Cela dit, en France, la création du délit d’association de malfaiteurs a obligé les cinéastes à se remettre en question.
Concernant les condamnations pour meurtre, Il n’en reste pas moins que c’est seulement lorsque l’agression physique d’une personne conduit celle-ci à la mort qu’il en est question.
Les juges font la distinction entre ceux qui ont frappé avec intention de tuer et ceux qui ont frappé sans intention de tuer. Par contre j’ignore ce qui est prévu lorsque le décès survenant longtemps après l’agression est tout ou partie imputable aux conséquences de celle-ci.
Quant à ceux qui ont frappé sans parvenir à tuer alors qu’ils en avaient l’intention, sont-ils ou non des meurtriers ?

Depuis l’abolition de la peine de mort, il est difficile d’avoir un avis tranché. hmm

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

éponymie a écrit:
Abel Boyer a écrit:

Probablement parce que cet emploi n'est pas considéré comme légitime. Il faudrait voir si cet emploi se retrouve sous de nombreuses plumes ou n'est qu'un particularisme d'un journaliste.

Je retomberai peut-être sur l'autre article (qui pourrait être du même journaliste). On verra.

En voici un autre (Le Petit Journal, 8 aout 1877)

http://img15.hostingpics.net/pics/79222518770808LePetitJournalmeurtrier.jpg

18 Dernière modification par yd (26-03-2016 01:24:24)

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Ils disent « après boire » comme nous disons « après diner », mais le TLFi (I, A, 2, c) n'y voit qu'une locution sans chercher davantage d'explications :

− Vieilli
♦ Après boire.
Après avoir bu.
Remarque. Encore attesté au XXe siècle par DG, Ac. 1932 et Rob.

Fille légère ne peut bêcher.

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Merci 'éponymie'. Dans les deux cas, il s'agit d'un meurtre manqué, et il y a un certain abus à parler de meurtrier, en tout cas en droit français.

Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

yd a écrit:

Ils disent « après boire » comme nous disons « après diner », mais le TLFi (I, A, 2, c) n'y voit qu'une locution sans chercher davantage d'explications :

− Vieilli
♦ Après boire.
Après avoir bu.
Remarque. Encore attesté au XXe siècle par DG, Ac. 1932 et Rob.

Pour moi "après boire" n'est pas vieilli bien que je ne l'utilise pas tous les jours. Et que dire de "après manger" qui me semble bien vivant aussi ?

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

Dans l'ouest, si quelqu'un est après boire, c'est qu'il est en train de boire...

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

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Re : Un meurtrier qui meurtrit mais ne tue pas

être après + verbe à l'infinitif est une forme progressive qu'on rencontre aussi dans le sud est.
Mais il diffère totalement de après boire.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

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