yd a écrit:Les premiers opérateurs ne furent-ils pas les opératrices d'avant les centraux automatiques ? Il me semble ensuite que le mot fut repris pour ceux qui passaient des opérations sur les marchés financiers, travaillant essentiellement au téléphone - c'est toujours assez vrai : il y a peut-être un fait de langue intéressant à étudier.
Le centre de ressource textuel et lexical cite comme première trace un emploi du terme par Nicolas Oresme, au XIIIe siècle, je cite :
1374. (serfs) operateurs «qui accomplissent, exécutent» (Oresme, Yconomique, éd. A. D. Menut, 334c, p.818)
yd a écrit:On n'est tout de même pas obligé de réduire une personne à son métier, même si on doit en effet s'en soucier et se soucier aussi de la dénomination des métiers.
Je ne vois pas où j'aurai affirmé une telle chose.
J'ai seulement affirmé que lorsque le terme du métier est dérivé d'une production concrète (le cloutier fait des clous, le menuisier fait des menus huis, le charcutier fait de la chair cuite), en pensée, le produit est à son producteur comme une pomme à son pommier, comme une poire à son poirier, comme un fruit à son arbre. C'est un objet concret qui est produit, qui est donc susceptible de possession.
J'ai aussi affirmé que dans une économie où les tâches sont divisées, il y a plusieurs participants à la production, chacun ne faisant qu'une seule opération : le tourneur ne fait que tourner, le fraiseur ne fait que fraiser, le soudeur ne fait que souder; aucun de ces participants ne produit un objet en tant que tel, une œuvre, mais réalise une simple action, laquelle n'est pas susceptible de possession.
J'en ai ensuite déduit que le changement dans la manière de construire les termes est révélateur d'un changement dans l'approche du travail, que ce changement correspond certainement à la fin de l'économie artisanale, où l'ouvrier est propriétaire de sa production, et sa substitution par une économie industrielle, où l'opérateur est salarié. C'est-à-dire, le rétablissement discret du servage.
yd a écrit:La question n'est pas que les langues seraient illogiques, et ce n'est d'ailleurs étymologiquement pas logique de dire cela. Mais en langue aucune logique ne peut aller jusqu'au bout. C'est vrai pour la désignation des métiers comme pour le reste.
Je te l'accorde.
yd a écrit:La qualité d'un mécanisme est sa précision ; tout ce qu'il demande c'est de l'huile.
La qualité d'une langue tient au contraire dans le jeu qu'elle permet. C'est tout l'inverse, donc.
Belle tentative d'analogie. Sauf que la langue n'est pas le mécanisme, mais la clé du mécanisme, le mécanisme étant l'intellect qui contient en lui ces deux rouages : L'intellect conscient et logique, séquentiel et précis; l'intellect inconscient et métaphorique, parallèle et diffus. Une parole peut faire appel à l'un de ses deux plans, au choix, voire aux deux en même temps, ce qui parfois fait rire.
yd a écrit:Si un mécanisme a du jeu il va coincer, et plus on le sollicitera plus il coincera.
En langue, c'est l'insuffisance de jeu qui amène à coincer. Au pire, quand on n'arrive pas à dénommer un métier de façon satisfaisante on peut toujours emprunter à une autre langue. S'il n'y avait que ces emprunts-là je signe tout de suite.
Ce n'est pas si simple, tout mécanisme doit avoir un certain jeu, sinon, c'est là qu'il coince.
En langue, il y a toujours une multitude de moyen de dériver un terme, en cas de collision homophonique.
Il suffit de changer de métaphore.