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Le forum d'ABC de la langue française

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forum abclf » Promotion linguistique » API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

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Messages [ 51 à 66 sur 66 ]

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Tout à fait d'accord.
Ce qui rend la grammaticalité littéralement indéfinissable.

Lire à ce sujet les pages   19  et 20 de la Grammaire méthodique du français,  Martin Riegel et alii.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

P'tit prof a écrit:

Quand allez-vous enfin comprendre que je ne vous parle pas.
Je ne vous parle pas car vous n'êtes pas à mes yeux un interlocuteur valable, et constructif moins encore.
Je vous fais bien de l'honneur de vous dire cela.
Pé-la !

Quelle condescendance !
Je continuerai néanmoins à vous lire et à souligner, s'il y a lieu, nos points d'accord ou à signaler, le cas échéant, les bourdes, inconséquences et contrevérités émises avec l'autorité prétentieuse d'un p'tit prof.

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

P'tit prof a écrit:

Tout à fait d'accord.
Ce qui rend la grammaticalité littéralement indéfinissable.
Lire à ce sujet les pages   19  et 20 de la Grammaire méthodique du français,  Martin Riegel et alii.

Elle n'est pas indéfinissable du tout, mais terriblement subjective et donc mouvante si l'on ne prend pas garde de bien définir son référentiel grammatical. Mais c'est une situation habituelle en linguistique : les notions de langue française et de mot français sont également extrêmement floues et peuvent nécessiter la fixation d'un référentiel.

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Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

P'tit prof a écrit:

cette conception fait sombrer dans l'agrammaticalité toute la littérature depuis le serment de Strasbourg, sans omettre quelques uns de nos contemporains. C'est  faire beaucoup d'honneur à ce français standard que personne ne parle.

Je reconnais là une doctrine très en vogue selon laquelle tout se vaut, et, dans le domaine du langage, argots, français familier, jargon publicitaire ; le langage standard ne serait donc qu'une lubie gênante de grammairiens dépassés. C'est faire bien peu de cas d'une école qui a réussi, jusqu'à une époque récente, à mettre à disposition de tous un langage commun à tous les francophones, et c'est en même temps jeter aux orties la norme écrite et illustrée par les grands écrivains (Flaubert doit se retourner dans sa tombe).
Vous me faites penser à ces élèves que j'avais en collège qui ne comprenaient rien à Balzac et qui tentaient de justifier leur flemme en disant : « mais m'sieur, ça s'dit plus, on parle pus comme ça ». Facilité, démagogie, refus des contraintes, relativité, monde métissé et tutti quanti
. On connaît la chanson.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Abel Boyer a écrit:
P'tit prof a écrit:

Tout à fait d'accord.
Ce qui rend la grammaticalité littéralement indéfinissable.
Lire à ce sujet les pages   19  et 20 de la Grammaire méthodique du français,  Martin Riegel et alii.

Elle n'est pas indéfinissable du tout, mais terriblement subjective et donc mouvante si l'on ne prend pas garde de bien définir son référentiel grammatical. Mais c'est une situation habituelle en linguistique : les notions de langue française et de mot français sont également extrêmement floues et peuvent nécessiter la fixation d'un référentiel.

D'accord sur: elle est définissable mais subjective.
D'accord sur le problème de langue française. Mon directeur de thèse a notamment coordonné un numéro de la revue langue française intitulé "Le(s) français: formaliser la variation". Très bon numéro d'ailleurs, et je ne dis pas ça parce qu'il s'agit de mon ancien directeur de thèse. Qu'est-ce que le français? Donc, c'est flou, difficile à décrire mais en tout cas, de mon point de vue, il n'y a que peu d'intérêt à se contenter d'être prescriptif et à dire: cela (ne) se dit (pas) en français.

Alco a écrit:

Je reconnais là une doctrine très en vogue selon laquelle tout se vaut, et, dans le domaine du langage, argots, français familier, jargon publicitaire ; le langage standard ne serait donc qu'une lubie gênante de grammairiens dépassés. C'est faire bien peu de cas d'une école qui a réussi, jusqu'à une époque récente, à mettre à disposition de tous un langage commun à tous les francophones, et c'est en même temps jeter aux orties la norme écrite et illustrée par les grands écrivains (Flaubert doit se retourner dans sa tombe).
Vous me faites penser à ces élèves que j'avais en collège qui ne comprenaient rien à Balzac et qui tentaient de justifier leur flemme en disant : « mais m'sieur, ça s'dit plus, on parle pus comme ça ». Facilité, démagogie, refus des contraintes, relativité, monde métissé et tutti quanti
. On connaît la chanson.

Perso, moi aussi je connais la chanson (la vôtre j'entends)... cette fameuse chanson qui dit " Facilité, démagogie, refus des contraintes, relativité, monde métissé et tutti quanti" ça aussi c'est de la démagogie et de la belle que de mettre dans le même sac tous ceux qui ne vénèrent pas et ne se prosternent pas devant la beauté (sic), grandeur (sic) et universalité (et resic) de la langue française (ou anglaise, ou espagnole, etc.)
Oui, d'un point de vue linguistique, TOUTES les "langues" se valent (tant les argots que les différents dialectes que les langues officielles et "standard").
Par contre, il est indéniable que d'un point de vue plus "social", le "standard" a un intérêt et offre des possibilités impossibles à retrouver dans ces autres langues: union d'un peuple autour d'une langue (quoique personnellement je doute de cet intérêt mais c'est un autre sujet et je ne suis même pas sûr d'être complètement "contre" d'ailleurs), justice sociale grâce à l'école républicaine (à laquelle je serai éternellement reconnaissant moi, enfant d'ouvriers immigrés)...

Mais de grâce ne comparez pas P'tit prof (peut-être aurez-vous à présent la même image de moi) à des collégiens, qui, adolescents, effectivement justifient avec des raisons peu valables (mais on peut les en excuser à leur âge) leur méconnaissance, leur flemme et parfois leur inculture flagrante. Là, c'est un autre problème qui se pose: l'intérêt de la lecture face à d'autres médias plus facilement consommables, notamment.

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Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

oliglesias a écrit:

Oui, d'un point de vue linguistique, TOUTES les "langues" se valent (tant les argots que les différents dialectes que les langues officielles et "standard").

Là, je reconnais bien le point de vue des linguistes, pour qui Flaubert et le verlan, c'est à mettre sur le même plan. Mais linguiste est une spécialité, et vous comprendrez, j'espère, que le francophone non spécialisé que je suis ne pense pas comme le linguiste, pas plus que comme l'informaticien ou le publicitaire, tous regardant à travers le filtre de leur spécialité.

oliglesias a écrit:

Mais de grâce ne comparez pas P'tit prof (peut-être aurez-vous à présent la même image de moi) à des collégiens, qui, adolescents, effectivement justifient avec des raisons peu valables (mais on peut les en excuser à leur âge) leur méconnaissance, leur flemme et parfois leur inculture flagrante.

Votre position de linguiste ne vous met pas à l'abri d'une mauvais interprétation, puisqu'à aucun moment je n'ai comparé P'tit prof à ces collégiens incultes. Je dis simplement que dire que personne ne parle le français standard, c'est refuser à ce français standard son rôle de norme de laquelle on doit se rapprocher pour se comprendre et avoir accès à la culture écrite. C'est, en même temps, cracher dans la soupe, puisque vous et moi (et P'tit prof) nous avons été formés à ce français standard qui nous a permis d'étudier, éventuellement de sortir d'une condition d'enfant d'ouvriers immigrés, et enfin qui nous permet de débattre ici par écrit, comme nous pourrions aussi bien le faire oralement.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

57 Dernière modification par oliglesias (09-09-2013 16:27:19)

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Désolé mais quand on lit votre message vous sous-entendez (moi, j'avais l'impression que vous le criiez) que ceux qui disent que Flaubert et le verlan c'est la même chose sont démagos... Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une mauvaise interprétation. Vous avez dû choisir vos termes avec soin je pense, non?
Et bien les mots de P'tit prof vous les incluez dans cette "doctrine en vogue" que vous critiquez tant... et surtout le "Vous me faites penser à ces élèves que j'avais en collège" montre quand même que vous trouvez que l'attitude de P'tit prof ne doit pas être si éloignée que cela de celle de vos collégiens (sinon il ne vous aurait pas fait penser à eux...)

Bref, pour le linguiste que je suis (ne les/nous mettez pas tous dans le même panier, si vous saviez les divergences qu'il peut y avoir entre eux/nous!!!), Flaubert et le verlan ne sont pas à mettre sur le même plan. Flaubert m'intéresse pour décrire l'état de la langue à son époque, pour décrire son idiolecte, etc. Le verlan peut m'intéresser pour d'autres raisons (création lexicale, expressivité de la langue orale, état de la langue actuelle, etc.). Donc, non, ils ne sont pas sur le même plan, mais pour moi, ce sont des objets d'étude. Vous comprendrez, j'espère, que le linguiste et francophile que je suis ne pense pas comme vous à hiérarchiser les différentes langues... j'ai assez vu de gens souffrir de discrimination linguistique pour continuer à entendre parler de la grandeur et supériorité de la langue française.


Quant à:

Alco a écrit:

Je dis simplement que dire que personne ne parle le français standard, c'est refuser à ce français standard son rôle de norme de laquelle on doit se rapprocher pour se comprendre et avoir accès à la culture écrite. C'est, en même temps, cracher dans la soupe

1) Le français standard n'existe pas: c'est un fait. Vous ne le parlez pas (il suffit de faire un test: parlez, enregistrez-vous et comparez. Il y aura forcément des différences avec la norme/le standard). Par contre (et c'est vrai que cela n'a pas encore été dit) tout locuteur vise à s'approcher un maximum de cette norme. C'est son rôle (à la norme). Positif ou négatif? Chacun son avis. Nécessaire ou pas? Pareil. C'est un sujet complexe de toute façon... Oui, une langue véhiculaire est utile à l'intercompréhension. Non, pour se comprendre et vivre ensemble on n'a pas besoin de vouloir éliminer les vernaculaires. Voilà mon point de vue.

2) Personnellement, je ne crache pas dans la soupe puisque j'ai écrit que je serai éternellement reconnaissant envers l'école républicaine et son enseignement du français qui m'a permis de devenir qui je suis aujourd'hui.

58 Dernière modification par regina (09-09-2013 20:03:18)

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

On parle de la grammaire présente dans les manuels

Oliglesias

Je leur dirai qu'elle est agrammaticale s'ils prétendent s'exprimer en "français standard" (je me doute que cette notion est plus pratique que théorique)

Abel Boyer

Ce qui cloche ici, c'est cette référence aux manuels ( de grammaire) et au " français standard".
C'est un peu comme si on prenait cette notion relativement nouvelle ( 20ème siècle), développée par la linguistique au sein d'une réflexion théorique, pour l'appliquer soudain à un " référentiel" rassurant qui ne correspond pas au concept initial.

Pour la linguistique , cette notion de grammaticalité n'est pas liée au français standard: en fait, est grammaticale toute phrase qui peut être produite ( quel que soit le niveau et le registre de langue :vulgaire, familier, argotique, régional, standard, soutenu) par un locuteur natif (ah!l'oreille native chère à Bookish wink) . C'est ce qui fait qu'une personne pourra identifier une phrase comme appartenant à sa langue maternelle, qu'elle soit bien formulée, mal formulée...

Autrement dit ,

une phrase grammaticale obéit à des règles qui sont constitutives de la nature d'une langue.

Nous sommes bien loin là du français standard et de la grammaire normative. c'est bien de grammaire descriptive qu'il s'agit.

Sera  donc agrammatical un énoncé qui ne peut absolument pas être produit par un locuteur francophone de naissance.

D'où les multiples appels à collaboration bénévole venant régulièrement d'étudiants en linguistique, où l'on nous propose x et encore x énoncés pour lesquels il faut dire, si possible spontanément, si l'énoncé nous semble possible ou pas.  ( voir fils adéquats en ce moment!)

Le hic de ce concept d'agrammaticalité, c'est qu'il fonctionne bien en synchronie.( Et encore, c'est à voir...)  Mais dès qu'on s'intéresse à une langue en diachronie, dans son développement, il y a problème. C'est, à mon avis, là-dessus que P'tit prof a posé le doigt.

Car, lorsque nous prenons un texte ( à défaut d'enregistrement, parbleu!) du XVII ème ou du XVIème, par exemple: certes, cela paraîtra parfois bizarre, il y aura des tournures que nous ne connaissons peut-être pas, que nous ne produirions pas , mais d'une part, nous reconnaîtrons tout de même qu'il s'agit d'une seule et même  langue ( la nôtre, dans un état antérieur), d'autre part, nous saurons spontanément identifier que ces énoncés n'appartiennent pas à une autre...

Ci-joint une interessante étude sur cette question de la grammaticalité/agrammaticalité qui montre qu'on est loin de posséder une notion qu'on puisse utiliser si simplement dans l'approche d'énoncés.

http://www.persee.fr/web/revues/home/pr … _84_1_3594


Par ailleurs, une réserve tout de même, concernant cette tournure  qui a fait discuter:

" Je fais mon petit frère faire ses devoirs"

Pour qu'on puisse l'identifier comme une tournure ancienne restée présente  quelque part dans la langue, il faudrait qu'elle puisse être produite aujourd'hui et reconnaissable comme telle par tout un groupe. Si tel est le cas, si dans une région de la francophonie a subsisté au sein d'un groupe parlant français, une telle tournure, alors, oui, elle est grammaticale , selon ces critères de la linguistique. S'il s'agitssait d'une tournure propre à un seul individu ou une seule famille, alors ce serait un idiolecte, difficile alors de dire d'où il vient. Il pourrait aussi bien être un calque d'une autre langue, tout dépend alors de l'histoire linguistique de cet individu ou de cette famille.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Pour qu'on puisse l'identifier comme une tournure ancienne restée présente  quelque part dans la langue, il faudrait qu'elle puisse être produite aujourd'hui et reconnaissable comme telle par tout un groupe. Si tel est le cas, si dans une région de la francophonie a subsisté au sein d'un groupe parlant français, une telle tournure, alors, oui, elle est grammaticale , selon ces critères de la linguistique

Ce qui est bien le cas.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Oui. Alors le problème qui se pose avec cette définition c'est celle de la taille de ce groupe...

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

De  300 000 à 400 000 personnes, si l'on se fie aux chiffres du recensement,  en excluant les nouveau-nés et les locuteurs importés  de l'Hexagone.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Je parlais de la définition en général, pas de l'expression concernée en particulier. smile

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Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

Mais je ne vois pas bien en quoi la taille du groupe devrait intervenir dans cette notion...


il faudrait qu'elle puisse être produite aujourd'hui et reconnaissable comme telle par tout un groupe. Si tel est le cas, si dans une région de la francophonie a subsisté au sein d'un groupe parlant français,

Possible que je me sois mal exprimée, mais il me semblait clair que j'entendais par " groupe" dans ce contexte la population d'une région du monde donnée, parlant français. Et peu importe que cette population soit composée de millions d'individus ou seulement de quelques milliers. Si ce groupe francophone produit une tournure de phrase commune, celle-ci ne saurait être qualifiée d'agrammaticale.

Il me semble d'ailleurs nécessaire ( puisqu'on aborde la question de la taille d'un groupe parlant une langue) de signaler que le groupe des locuteurs francophones de l'Hexagone ( de métropole) se monte, selon les derniers chiffres de L'Insee à 63, 7 millions d'individus alors que l'ensemble des francophones dans le monde est de 250 millions. Autant dire que les Français de métropole sont minoritaires sur ce plan- là et qu'en linguistique, il est impossible de réfléchir à la langue française en ignorant ce que cette langue produit ailleurs.

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

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Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

regina a écrit:

Il me semble d'ailleurs nécessaire ( puisqu'on aborde la question de la taille d'un groupe parlant une langue) de signaler que le groupe des locuteurs francophones de l'Hexagone ( de métropole) se monte, selon les derniers chiffres de L'Insee à 63, 7 millions d'individus alors que l'ensemble des francophones dans le monde est de 250 millions. Autant dire que les Français de métropole sont minoritaires sur ce plan- là et qu'en linguistique, il est impossible de réfléchir à la langue française en ignorant ce que cette langue produit ailleurs.

Je pense que vous avez raison de relativiser le rôle des Français sur l'évolution de notre langue ; mais il faut ramener leur poids à sa juste valeur : il n' y a pas 63.7 millions de francophones de l'hexagone face à 186,3 millions d'autres francophones, mais à placer en regard des X millions de francophones du Québec, des Y millions de francophones d'Afrique de l'ouest, etc.,

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

regina a écrit:

Ce qui cloche ici, c'est cette référence aux manuels ( de grammaire) et au " français standard".
C'est un peu comme si on prenait cette notion relativement nouvelle ( 20ème siècle), développée par la linguistique au sein d'une réflexion théorique, pour l'appliquer soudain à un " référentiel" rassurant qui ne correspond pas au concept initial.

Pourtant, on considère souvent que le "français standard" est justement décrit dans ces grammaires. Si le concept de "français standard" est relativement nouveau c'est qu'avant on parlait de "bon français" par exemple, mais le résultat est le même, on parle sensiblement de la même chose bien qu'aujourd'hui certaines grammaires fassent plus référence à l'usage (comme Grevisse) qu'avant.

regina a écrit:

Pour la linguistique , cette notion de grammaticalité n'est pas liée au français standard: en fait, est grammaticale toute phrase qui peut être produite ( quel que soit le niveau et le registre de langue :vulgaire, familier, argotique, régional, standard, soutenu) par un locuteur natif (ah!l'oreille native chère à Bookish wink) . C'est ce qui fait qu'une personne pourra identifier une phrase comme appartenant à sa langue maternelle, qu'elle soit bien formulée, mal formulée...

Là, je ne suis pas vraiment d'accord. J'ai lu assez de commentaires dans des articles ou manuels de linguistique affirmant que tel énoncé ou tel autre est agrammatical ou ne se dit pas dans telle ou telle autre langue alors qu'on peut aisément l'entendre ou le lire, pour ne pas être d'accord avec votre affirmation.
Mais je trouve intéressante votre remarque qui se concentre sur le locuteur natif. Je l'ai déjà dit, je travaille essentiellement sur des idiolectes parce qu'on a remarqué que chaque locuteur possède sa propre grammaire personnelle potentiellement différente (voire très différente) de celle d'un autre locuteur de sa langue maternelle. Tout cela est dû au fait que tout le monde cherche à s'approcher de "l'idéal" que représente la norme sans jamais y arriver (pour moi, c'est normal puisque cet idéal n'existe pas). C'est pourquoi les questionnaires d'acceptabilité grammaticale (qu'on trouve fréquemment notamment ici, j'en ai moi-même fait un mais je ne l'avais pas posté ici... désolé!) sont assez fréquents mais c'est pourquoi aussi ils ne sont pas forcément très fiables ni acceptables ni pertinents scientifiquement si on n'utilise que cet outil. Et ce, pour plusieurs raisons: la notion de grammaticalité d'un énoncé est très subjective du fait des différentes grammaires individuelles: tout le monde n'accepte pas la même chose. Mais aussi parce que les locuteurs n'ont pas forcément conscience de ce qu'ils produisent comme énoncé. On a remarqué en effet que des locuteurs peuvent considérer un énoncé comme agrammatical, inacceptable et, selon eux, impossibles à produire dans leur idiolecte alors qu'ils le produisent dans la réalité.

Autrement dit ,

une phrase grammaticale obéit à des règles qui sont constitutives de la nature d'une langue.

Nous sommes bien loin là du français standard et de la grammaire normative. c'est bien de grammaire descriptive qu'il s'agit.

Sera  donc agrammatical un énoncé qui ne peut absolument pas être produit par un locuteur francophone de naissance.

Là, je suis d'accord... mais le problème est que certains locuteurs francophones de naissance ne produiront jamais certains énoncés alors que d'autres oui et vice versa. Donc, les vrais énoncés agrammaticaux seraient-ils ceux qu'AUCUN locuteur francophone de naissance ne peuvent produire? Si oui, comment le vérifier? Comment vérifier qu'AUCUN locuteur natif ne peut produire ou n'a produit tel ou tel énoncé? C'est impossible!


Le hic de ce concept d'agrammaticalité, c'est qu'il fonctionne bien en synchronie.( Et encore, c'est à voir...)  Mais dès qu'on s'intéresse à une langue en diachronie, dans son développement, il y a problème. C'est, à mon avis, là-dessus que P'tit prof a posé le doigt.

Là, c'est une évidence que de dire qu'il est absurde de dire qu'un énoncé du XVIème est agrammatical aujourd'hui.
Il n'y a aucun intérêt à cela puisqu'il ne s'agit pas de la même grammaire. Mais je pense que personne (ni spécialistes ni non spécialistes) ne se risquerait à utiliser le concept de grammaticalité d'un énoncé en diachronie. Ceux qui le feraient prendraient de gros risques... smile


Ci-joint une interessante étude sur cette question de la grammaticalité/agrammaticalité qui montre qu'on est loin de posséder une notion qu'on puisse utiliser si simplement dans l'approche d'énoncés.

http://www.persee.fr/web/revues/home/pr … _84_1_3594

Merci pour le lien. Je l'ai survolé rapidement mais je le lirai avec plus d'attention. Mais il est évident que ce concept d'agrammaticalité est problématique puisqu'il sert à juger de la correction ou non d'un énoncé (là, je suis d'accord avec l'auteur de l'article) et que cela est tout au mieux sans intérêt en linguistique. Mais je ne pense pas que le problème vienne tant des linguistes que des locuteurs eux-mêmes qui semblent adorer juger qu'un énoncé n'est pas "français"...
Combien de fois ai-je entendu que "j'y dis" n'est pas français? Combien de fois entend-on "si je pourrais..." ne se dit pas en français?
Et bien, ces remarques de locuteurs natifs sont bien des jugements de grammaticalité d'un énoncé qu'ils considèrent ne pas appartenir à leur langue. Le problème est que leur langue (le français) qui est la même que celle de son interlocuteur est pourtant à la fois différente (puisqu'il s'agit de deux idiolectes différents).

Re : API et dyslexie : découverte bizarrement tardive d'un vieux scandale

regina a écrit:

Mais je ne vois pas bien en quoi la taille du groupe devrait intervenir dans cette notion...


il faudrait qu'elle puisse être produite aujourd'hui et reconnaissable comme telle par tout un groupe. Si tel est le cas, si dans une région de la francophonie a subsisté au sein d'un groupe parlant français,

Possible que je me sois mal exprimée, mais il me semblait clair que j'entendais par " groupe" dans ce contexte la population d'une région du monde donnée, parlant français. Et peu importe que cette population soit composée de millions d'individus ou seulement de quelques milliers. Si ce groupe francophone produit une tournure de phrase commune, celle-ci ne saurait être qualifiée d'agrammaticale.

Il me semble d'ailleurs nécessaire ( puisqu'on aborde la question de la taille d'un groupe parlant une langue) de signaler que le groupe des locuteurs francophones de l'Hexagone ( de métropole) se monte, selon les derniers chiffres de L'Insee à 63, 7 millions d'individus alors que l'ensemble des francophones dans le monde est de 250 millions. Autant dire que les Français de métropole sont minoritaires sur ce plan- là et qu'en linguistique, il est impossible de réfléchir à la langue française en ignorant ce que cette langue produit ailleurs.

Ben pour moi il y a toujours un problème avec cette notion de "groupe". J'ai l'impression que pour vous "groupe" c'est la population d'un pays parlant français... si c'est cela, je ne peux pas être trop d'accord avec cela tellement il y a de variation dans le français de France (métropole). Je ne crois pas que l'on puisse mettre dans le même groupe un locuteur né dans le bassin parisien, un autre né dans un village de l'Isère, un autre né à proximité de Lille ou de Marseille ou de Rennes...
Il y a bien des différences importantes au sein même du territoire métropolitain pour qu'on puisse parler d'un seul groupe.
Et après il y a d'autres groupes, qu'on prend en compte dans les études sociolinguistiques (niveaux socioculturels, âge, sexe, etc.)
C'est pour cela que je m'interrogeais sur la notion de nombre de locuteurs d'un groupe.
Un énoncé comme "En fous-toi!" pourra être totalement accepté (puisque produit très fréquemment) par un groupe de jeunes (je confirme que cela s'entend très très souvent...) mais pas par le reste de la population. Malgré tout, ne correspondant pas à la grammaire standard, il pourra être considéré comme agrammatical, non? et pourtant un groupe de locuteurs francophones de naissance produit cet énoncé, donc, d'après votre "définition", cet énoncé devrait être considéré comme grammatical.

Bon, je me rends compte que je deviens relou là... (quoi! je vois que le mot "relou" est souligné en rouge quand j'écris... ce mot verlan n'existerait-il pas en français?) d'autant que moi, ce concept de grammaticalité me fait doucement rire puisque je le critique assez souvent. smile

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