Passer au contenu du forum

forum abclf

Le forum d'ABC de la langue française

Mise à jour du forum (janvier 2019)

Remise en l'état – que j'espère durable – du forum, suite aux modifications faites par l'hébergeur.

(Page 3 sur 12)

forum abclf » Écriture et langue française » Proust, imposture littéraire ?

Flux RSS du sujet

Messages [ 101 à 150 sur 554 ]

101

Re : Proust, imposture littéraire ?

Personnellement je n'arrive pas à m'y faire !
Encore un exemple

Mais pour que je n'eusse pas été déçu par les paroles que j'entendais prononcer à une personne qui s'appelait Mme de Guermantes, même si je ne l'eusse pas aimée, il n'eût pas suffi que les paroles fussent fines, belles et profondes, il eût fallu qu'elles reflétassent cette couleur que je m'étais dès le premier jour étonné de ne pas trouver dans sa personne et que j'avais fait se réfugier dans sa pensée.
in "Le côté de Guermantes"

Aucun effort de contraction de la phrase.
Ne serait-ce que remplacer, tout simplement "...à une personne qui s'appelait ..." par "..Mme de Guermantes."
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

102 Dernière modification par yd (28-08-2011 16:06:27)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Mais peut-on reprocher à un auteur d'enrober ses paroles et d'entendre satisfaire à l'avance ce qu'il devine être le goût de ses futurs lecteurs? On le voit ici par la multiplication des subjonctifs. Probablement choisit-il ses lecteurs, d'une manière, et je vois que c'est son droit aussi bien que le leur, simplement il ne vous aura pas choisi vous, ni moi non plus.

16h05 Trouvé à l'instant dans le TLFi en recherchant dans l'article voir pour un autre fil (question entre voir et voire) :
La plupart des lecteurs de Proust l'ont aimé et l'aiment encore pour des raisons qui ont peu de chose à voir avec ce qui fait sa valeur (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p. 139).

Fille légère ne peut bêcher.

103 Dernière modification par goofy2 (05-09-2011 14:23:18)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Encore une nouvelle preuve, désignant  le narrateur et Proust comme n'étant qu'une seule et même personne.
Cet extrait, obligatoirement autobiographique, où un jeune "arriviste" sollicite  un piston auprès d'un poète connu. 
On notera qu'il a même, par délicatesse, remplacé le nom d'une comtesse par des astériques.

Il ne connaissait pas les oeuvres de ce poète et n'avait jamais entendu son nom, qu'il prit en note. Or je sus que peu après il avait écrit à ce poète pour lui dire qu'admirateur fanatique de ses oeuvres, il avait fait de la musique sur un sonnet de lui et serait heureux que le librettiste en fit donner une audition chez la comtesse ***. C'était aller un peu vite et démasquer son plan. Le poète, blessé, ne répondit pas.
in "Du côté de Guermantes"

Re : Proust, imposture littéraire ?

Et alors, et après ?
Vous n'aimez pas Proust, ce qui  est votre droit, mais pourquoi nous infligez-vous vos récriminations ? Cela devient lassant, à la longue.

Dans votre message 101 (101, déjà !) vous reprochez à l'auteur une notation fine, à résonance psychologique. Le narrateur écrit personne qui s'appelait Mme de Guermantes, c'est un choix de l'auteur  pour souligner le snobisme du personnage : la personne en tant que telle ne l'intéresse pas, ce qui le fascine, c'est le fait que cette personne s'appelle Mme de Guermantes.

Dans votre message 103, non seulement vous persistez à prendre la fiction pour de la réalité, mais encore vous confondez le narrateur et ses personnages : le narrateur parle d'un jeune poète arriviste, totalement distinct de sa personne, puisqu'il n'en parle que par ouï-dire :

Or je sus que peu après il avait écrit à ce poète...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

105

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

Encore une nouvelle preuve, désignant  le narrateur et Proust comme n'étant qu'une seule et même personne.
Cet extrait, obligatoirement autobiographique, où un jeune "arriviste" sollicite  un piston auprès d'un poète connu. 
On notera qu'il a même, par délicatesse, remplacé le nom d'une comtesse par des astériques.

Il ne connaissait pas les oeuvres de ce poète et n'avait jamais entendu son nom, qu'il prit en note. Or je sus que peu après il avait écrit à ce poète pour lui dire qu'admirateur fanatique de ses oeuvres, il avait fait de la musique sur un sonnet de lui et serait heureux que le librettiste en fit donner une audition chez la comtesse ***. C'était aller un peu vite et démasquer son plan. Le poète, blessé, ne répondit pas.
in "Du côté de Guermantes"

Bonjour,
Je ne suis ni spécialiste ni lecteur de Proust (encore que ce fil soit en train de me donner envie de le devenir), mais votre intervention pique ma curiosité : en quoi cet extrait est-il « obligatoirement autobiographique » ?
Quant aux astérisques, cela me semble un procédé littéraire commun – de la part de l'auteur – pour donner une sorte d'effet de réalité au narrateur ou au personnage, qui userait effectivement de cette délicatesse.

106

Re : Proust, imposture littéraire ?

Oui. Ce pourrait être qualifié d'acharnement, voire, si Marcel était encore du monde des vivants, de harcèlement (Boby Lapointe aurait sûrement osé il m’harcèle…)

107 Dernière modification par un passant (06-09-2011 05:13:54)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Bonjour,

Sous le pseudonyme de Goofy2 se cache un fin psychologue qui cherche à nous faire partager sa passion pour les œuvres de Marcel Proust.

Quoi de plus efficace que de provoquer la polémique pour attirer l'attention ?

Les uns se replongent dans l'ouvrage avec l'idée d'y trouver substance pour alimenter le débat et certains d'entre eux s'y attardent jusqu'à la dernière page. D'autres apprécient, au fil des extraits, le subtil parfum d'un temps passé plus serein où les personnages s'animent avec lenteur dans des décors bucoliques à la réalité vaporeuse afin que chaque émotion fugace puisse se décrire avec autant de mots qu'exige sa complexité.

Comment faire pour gagner un nouvel extrait ?

M'enfin, Goofy... ! Pourquoi autant de récriminations envers un auteur aussi génial que Marcel Proust ?

En y cherchant des arguments pour nous convaincre de vous recommander de ne pas le lire, vous vous obligez à le lire entièrement et avec attention.
Je ne sais plus exactement de quoi je ne suis pas vraiment convaincu.

108

Re : Proust, imposture littéraire ?

P'tit prof a écrit:

Et alors, et après ?
Dans votre message 101 (101, déjà !) vous reprochez à l'auteur ....

Euh..... je n'ai que 31 messages à mon compteur.
Vous auriez du dire dans le message # 101.

P'tit prof a écrit:

Dans votre message 103, non seulement vous persistez à prendre la fiction pour de la réalité, mais encore vous confondez le narrateur et ses personnages : le narrateur parle d'un jeune poète arriviste, totalement distinct de sa personne, puisqu'il n'en parle que par ouï-dire :

Je n'ai jamais dit que le jeune arriviste était le narrateur.
J'ai simplement dit qu'il m'apparait curieux que l'on soit dans une oeuvre de pure fiction, comme vous le prétendez, où on parle de l'affaire Dreyfus et où on remplace des noms de personnes par des "madame de *****", voire on remplace même des noms de villes par des noms fictifs.

Re : Proust, imposture littéraire ?

Œuvre de pure fiction ne signifie pas utopie : une œuvre de pure fiction peut s'inscrire dans le réel. Autant dire que la Chartreuse de Parme n'est pas une pure fiction car on y assiste à la bataille de Waterloo.
Quant à la mention Mme de *** ou M. de ***, c'est une habitude qui remonte au XVIIe siècle, convention littéraire que Proust adopte en forme de clin d'œil à son lecteur.

Et je persiste à écrire votre message qui porte le numéro 101, votre message 101.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

110 Dernière modification par goofy2 (19-10-2011 16:08:35)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Quel dommage que Proust ait lassé et découragé son lecteur avec les premiers volumes de "A la recherche du temps perdu" , bourrés de verbiages pédantesques; car dans la suite avec " Du côté de Guermantes" son écriture se simplifie comme si quelqu'un d'autre l'y avait incité.

Par exemple, c'est avec une concision brillante qu'il décrit l'anéantissement  du narrateur et sa frustration, de ne pas voir s'accomplir les plans amoureux complexes échafaudés, pendant des jours, dans son imagination.

...car un coup de sonnette ayant retenti, je courus ouvrir la porte de l'antichambre au cocher qui me rapportait la réponse.
Je pensais que ce serait " Cette dame est en bas" ou " Cette dame vous attend ", mais il tenait à la main une lettre. J'hésitai un instant à prendre connaissance de ce que Mme de Stermaria avait écrit, qui tant qu'elle avait la plume en main aurait pu être autre, mais qui maintenant était, détaché d'elle, un destin qui poursuivait seul sa route et auquel elle ne pouvait plus rien changer. Je demandai au cocher de redescendre et d'attendre un instant, quoiqu'il maugréât contre la brume.
Dès qu'il fut parti, j'ouvris l'enveloppe. Sur la carte : Vicomtesse Alix de Stermaria, mon invitée avait écrit:" Je suis désolée, un contretemps m'empêche de diner ce soir avec vous à l'ile du bois. Je m'en faisais une fête... Regrets. Amitiés"
Je restai immobile, étourdi par le choc que j'avais reçu. A mes pieds étaient tombées la carte et l'enveloppe, comme la bourre d'une arme à feu quand le coup est parti.
in " Le Côté de Guermantes - chapitre 3"

Re : Proust, imposture littéraire ?

Concision brillante, c'est sûr, quand on pratique des coupures !
Dans mon édition de la Pléiade, votre concision brillante va de la page 383 à la page 395.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

112 Dernière modification par goofy2 (18-10-2011 20:12:43)

Re : Proust, imposture littéraire ?

P'tit prof a écrit:

Dans mon édition de la Pléiade, votre concision brillante va de la page 383 à la page 395.

Curieux votre remarque à propos d'une coupe dans le texte original .
Un passage d'une quinzaine de lignes dans une édition (éditions Jean de Bonnot) s'étendrait sur une dizaine de pages (Gallimard- collection La Pleiade).( ? ?)
bizarre.

113

Re : Proust, imposture littéraire ?

La bande à Bonnot à peut-être perpétré un hold-up pour économiser sur le papier…

114

Re : Proust, imposture littéraire ?

… a (sans accent), bien sûr !

Re : Proust, imposture littéraire ?

Sylvain B a écrit:

… a (sans accent), bien sûr !

De l'inconvénient d'être invité perpétuel sans avoir les droits du p'tit dernier inscrit… big_smile

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

Un passage d'une quinzaine de lignes dans une édition (éditions Jean de Bonnot) s'étendrait sur une dizaine de pages (Gallimard- collection La Pleiade) ?

Les fac-similés de l'œuvre de Proust  aux Éditions J. de Bonnot sont à la Bibliothèque de la Pléiade ce que sont les papiers Carambar à l'Éthique de Spinoza.

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

117 Dernière modification par goofy2 (19-10-2011 14:02:32)

Re : Proust, imposture littéraire ?

P'tit prof a écrit:

Concision brillante, c'est sûr, quand on pratique des coupures !
Dans mon édition de la Pléiade, votre concision brillante va de la page 383 à la page 395.

Monsieur,
Je pense que vous êtes dans l'erreur (ainsi que le drôlatique Bookish Prat) et que vous avez du confondre le passage que je cite avec un autre.

Voici un lien vers le texte electronique intégral d' '" A  la recherche du temps perdu"  publié sur un site dédié à Marcel Proust.

http://alarecherchedutempsperdu.org/marcelproust/240

Le passage que je cite et qui commence par
"...car un coup de sonnette ayant retenti"
et se termine par
" .... quand le coup est parti."

débute à la ligne 45 de la page qui s'affiche à l'écran.

Contrairement à vos dires, vous constaterez que les Editions Jean de Bonnot ont respecté le texte intégral, et je ne vois pas comment vous pouvez affirmez, de manière péremptoire, que "la Pleiade"  fournirait un texte différent (hors commentaires) et beaucoup plus long  (12 pages selon vous) de cette scène ! !

Je suis donc dans l'attente de vos preuves (un lien vers une image d'une copie du texte des éditions de la Pleiade, en votre possession, et source du litige qui nous oppose).

118 Dernière modification par pascalmarty (19-10-2011 15:39:44)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Tiens, mon édition Quarto Gallimard (texte intégral en 2400 pages) ne comporte aucun chapitre III pour le Côté de Guermantes. Mais un Le côté de Guermantes I et un Le côté de Guermantes II, divisé lui-même en deux chapitres.
Pour ce qui est des éditions de Bonnot, elles n'ont jamais constitué une référence, dans quelque domaine que ce soit. En revanche, Gallimard (NRF) est l'éditeur de toute la Recherche à partir des Jeunes filles.
De toutes façons, ainsi que cela saute aux yeux, la citation extraite du lien indiqué est ici incomplète. La voici telle que dans le lien en question :
« ce que Mme de Stermaria avait écrit, qui tant qu'elle avait la plume en main aurait pu être autre, mais qui maintenant était, détaché d'elle, un destin qui poursuivait seul sa route et auquel elle ne pouvait plus rien changer. Je demandai au cocher de redescendre et d'attendre un instant, quoiqu'il maugréât contre la brume. Dès qu'il fut parti, j'ouvris l'enveloppe »
Bien que peu amateur de Proust moi-même, je ne peux m'empêcher de remarquer que le jugement définitif sur Proust, imposteur littéraire, avait donc vraisemblablement été émis à la seule lecture du Côté de chez Swann et des Jeunes filles. Or après Guermantes, il reste encore beaucoup à lire et il serait peut-être bon de l'avoir fait avant d'émettre d'autres avis sur cet auteur…

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

119

Re : Proust, imposture littéraire ?

Bookish Prat a écrit:

l'inconvénient d'être invité perpétuel

Peut-être, mais c’est une incitation supplémentaire à tourner sept fois sa plume dans l’encrier avant de valider ce que l’on a écrit…

120 Dernière modification par goofy2 (19-10-2011 19:43:38)

Re : Proust, imposture littéraire ?

pascalmarty a écrit:

Pour ce qui est des éditions de Bonnot, elles n'ont jamais constitué une référence, dans quelque domaine que ce soit. En revanche, Gallimard (NRF) est l'éditeur de toute la Recherche à partir des Jeunes filles.

Oui enfin bon, les éditions de Bonnot sont fidéles au texte publié sur le site internet et offrent des livres de grande valeur pour les collectionneurs .Ce qui n'est pas négligeable.
J'attends toujours de voir les fameuses 12 pages supplémentaires et inédites de "bonus" (le lecteur en a pour son argent ?) des éditions Gallimard.:lol:

121 Dernière modification par pascalmarty (19-10-2011 17:47:50)

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

les éditions de Bonnot (…) offrent des livres de grande valeur pour les collectionneurs

Je ne voudrais pas avoir l'air désagréable, et puis on s'éloigne de Proust, mais il n'y a sans doute que Jean de Bonnot pour avoir jamais prétendu ça. Ou alors c'est que nous ne parlons pas des mêmes collectionneurs. wink
Je n'ai pas le courage de relire tout Guermantes pour vérifier s'il y a ou non des bouts (voire des pages) qui continuent de manquer dans la version éditée sur Internet. Je suis quand même allé faire un tour sur Gallica pour vérifier dans l'édition originale (Gallimard…), mais le moteur de recherche, largement mal foutu, ne reconnaît pas de Mme de Stermaria. Ne sachant où chercher (je ne connais pas ce truc par cœur), et vu la lenteur avec laquelle les pages défilent, je n'ai pas approfondi. Mais s'il y a un endroit où trouver en toute certitude le texte original, c'est bien là.

P. S. Je ne voudrais pas paraître trop sévère pour les éditions de B. Après tout, si elles ont trouvé leur public c'est très bien qu'elles existent. Mais cuir ou pas, il ne s'agit jamais que d'emboîtages, comme n'importe quelle reliure industrielle. De grâce ne confondons pas bradel et authentique reliure artisanale. Sauf à des naïfs, ces bouquins ne se revendront jamais plus cher qu'ils n'ont été achetés.

Au-delà du lit de lait de l'Aude élue, un énorme orme étendait sa sombre ombre.

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

Oui enfin bon, les éditions de Bonnot sont fidéles au texte publié sur le site internet et offrent des livres de grande valeur pour les collectionneurs .Ce qui n'est pas négligeable.

D'accord avec pascalmarty, les livres de Jean de Bonnot ont du clinquant, mais ils n'attireront que les collectionneurs ne collectionnant que les Jean de Bonnot ; les autres, s'ils sont un peu affairistes, seront très déçus que leur valeur au mieux stagne, et, s'ils ne sont qu'amateurs, se rendront vite compte des défauts inhérents à la méthode du grand tirage.
On rencontre par ailleurs de nombreuses coquilles au fil des textes présentés, prouvant que leur révision n'a pas été le souci primordial.
Mais ils sont très bon marché, sont agréables à regarder et à toucher et le contenu est lisible.
Acceptons-les donc pour ce qu'ils sont, sans les dénigrer mais sans affirmer qu'il s'agit de «livres de grande valeur pour les collectionneurs».

123

Re : Proust, imposture littéraire ?

pascalmarty a écrit:

Je n'ai pas le courage de relire tout Guermantes pour vérifier s'il y a ou non des bouts (voire des pages) qui continuent de manquer dans la version éditée sur Internet.

Si vous mettez en doute, à la fois l'intégrité du texte publié par les éditions Jean de Bonnot et le site internet de référence, soit deux sources totalement différentes..... ça devient limite paranoia.
Si l'édition la Pleiade est, selon vous, la seule qui fait foi, il suffit de faire une photocopie de la page incriminée et de la mettre sur un site d'hebergement d'images (puisque j'ai l'impression que ce forum ne permet pas l'affichage direct d'images dans le texte des réponses postées ).
Mais ne me demandez pas, non plus, d'acheter à mes frais "A la recherche du temps perdu" dans la collection La Pleiade pour comparer, et voir s'il existe  deux versions  divergentes du texte se rapportant à la scène du cocher remettant la lettre de Mme de Stermaria (ce que je ne crois pas.)

124 Dernière modification par éponymie (19-10-2011 20:45:38)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Dans la collection Folio classique, Le Côté de Guermantes, conforme au texte de la Pléiade, ce texte (tel que complété par Pascal) se trouve dans Le Côté de Guermantes II, chapitre deuxième, p. 380. 20 lignes mais avec des différences (ponctuation et une phrase en plus) :

...car un coup de sonnette ayant retenti, je courus ouvrir la porte de l'antichambre au cocher qui me rapportait la réponse. Je pensais que ce serait : " Cette dame est en bas" ou " Cette dame vous attend." Mais il tenait à la main une lettre. J'hésitai un instant à prendre connaissance de ce que Mme de Stermaria avait écrit, qui tant qu'elle avait la plume en main aurait pu être autre, mais qui maintenant était, détaché d'elle, un destin qui poursuivait seul sa route et auquel elle ne pouvait plus rien changer. Je demandai au cocher de redescendre et d'attendre un instant, quoiqu'il maugréât contre la brume. Dès qu'il fut parti, j'ouvris l'enveloppe. Sur la carte : Vicomtesse Alix de Stermaria. Mon invitée avait écrit :" Je suis désolée, un contretemps m'empêche de diner ce soir avec vous à l'ile du bois. Je m'en faisais une fête.Je vous écrirai plus longuement de Stermaria. Regrets. Amitiés." Je restai immobile, étourdi par le choc que j'avais reçu. À mes pieds étaient tombées la carte et l'enveloppe, comme la bourre d'une arme à feu quand le coup est parti.

Clarifié.

Re : Proust, imposture littéraire ?

Les éditions de Proust, c'est un véritable casse-tête.
En principe, l'édition qui fait foi est la dernière édition parue du vivant d'un auteur, et révisée par lui.
Dans le cas de Proust, le problème vient de ce qu'il est mort avant d'avoir mis la dernière main à son texte.
Sont donc définitifs les textes publiés de son vivant, Swann et les Jeunes filles. Pour les autres, on dispose d'un texte dactylographié, et de manuscrits.
Pour gérer l'urgence, Gallimard a publié ces manuscrits dans la collection blanche, mais très vite le texte de la blanche est apparu fautif.
Deux hommes courageux, Pierre Clarac et André Ferré se sont donc attaqués au texte et ont procuré (c'est comme ça qu'on dit...) une édition critique (c'est comme ça qu'on dit), c'est-à-dire donnant les variantes. Cette édition Pléiade, en trois tomes donne un très précieux index des noms de personne et des noms de lieux, avec résumé et indication des pages.
Cette édition fut longtemps l'édition de référence des universitaires.
Quand Proust est tombé dans le domaine public, de nouvelles éditions ont paru.
Ce qui explique que l'on puisse avoir un texte différent selon l'édition que l'on a : la blanche, princeps, la première Pléiade, la seconde Pléiade, les folio et les GF et enfin la Quarto, un pavé qui rassemble la totalité du texte sous une seule couverture.
Ainsi, la Pléiade découpe Guermantes en chapitres, et pas la Quarto.

Extrait de la notice de Mme de Stermaria :

[...]Saint-Loup lui a demandé un rendez-vous pour moi : II, 347-350 ; une lettre d'elle : 370, 374, 381 ; attente déçue : 383-395, 398, 577, 860, 933, 1012, 1035, 1120, 1125 [...]

Le passage partiellement cité par goofy se situe dans la tranche attente déçue, dont on voit qu'elle occupe un nombre considérable de pages...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

126

Re : Proust, imposture littéraire ?

Par là, l'artiste donne, en l'instantanéisant, une sorte de réalité historique vécue au symbole de la fable, le peint et le relate au passé défini.

in "Le côté de Guermantes"

Curieux barbarisme .
Qui employé, en outre, au participe présent,  écorche singulièrement l'oreille !

127 Dernière modification par yd (22-10-2011 20:00:02)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Au moins quelques dictionnaires reconnaissent instantanéiser, et le Larousse reconnaît même instantanéisation, http://www.larousse.fr/dictionnaires/fr … tion/43421, il est vrai dans le seul usage technique de transformer le lait en poudre soluble instantanément. Le TLFi [tlfi]http://www.cnrtl.fr/definition/instantan%C3%A9iser[/tlfi] ose aller plus loin, en reprenant la même citation de Proust :

Instantan(é)iser, (Instantaniser, Instantanéiser) verbe trans. Rendre instantané, reproduire en un instantané. Le peintre a cherché à instantaniser, en quatre coups de crayon, des poses, des attitudes du peuple au spectacle (Goncourt, Journal, 1892, p. 260). L'artiste donne, en l'instantanéisant, une sorte de réalité historique vécue au symbole de la fable, le peint et le relate au passé défini (Proust, Temps retr., 1922, p. 422).

À vérifier : l'usage accepté par le TLFi pourrait bien être relié à l'invention de la photographie.

Fille légère ne peut bêcher.

Re : Proust, imposture littéraire ?

C''est les Goncourt qui ont commencé ! C''est les Goncourt qui ont commencé ! C''est les Goncourt qui ont commencé !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

129 Dernière modification par goofy2 (28-10-2011 16:47:48)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Je relève plusieurs barbarismes dans "Le Côté de Guermantes".

...au point que la marquise d'Amoncourt, laquelle, par besoin de parler, manie psychologique, et aussi manque de sensibilité, finissait souvent par dire des sottises, avait pu répondre à quelqu'un qui était venu la condoléancer sur la mort de son père, M. de Montmorency...
in "Le côté de Guermantes

Connue pour bonne, Mme de Guermantes recevait les téléphonages, les confidences, les larmes de la délaissée, et ne s'en plaignait pas.
in "Le côté de Guermantes

Re : Proust, imposture littéraire ?

C'est que vous devenez... barbarant, à la longue...

Le Tlfi répertorie condoléancer sous la vedette condoléance. Il le signale comme rare et littéraire, et l'illustre... par votre citation.
Mettons que c'est un hapax, mais il est construit selon les lois de dérivation du français. On a vu pire par la suite.

Pris aussi dans le Tlfi, article téléphone  :

DÉR. Téléphonage, subst. masc. a) Vieilli. Action de téléphoner; communication téléphonique. Synon. usuel coup de téléphone*. Le téléphonage a duré une demi-heure. Le soir du 4 septembre, à six heures, à Bar-sur-Aube, après des téléphonages avec Paris et Gallieni, Joffre décidait l'offensive générale, la bataille de la Marne (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1918, p. 325); b) Télécomm. Transmission des télégrammes par téléphone. (Dict. XXe s.).  [].  1re attest. 1912 (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], p. 427); de téléphoner, suff. -age*.  Fréq. abs. littér.: 13.

Le mot existe, il est attesté ailleurs que chez Proust. Le trouver dans une correspondance privée atteste qu'il est du registre familier, a-littéraire, un peu comme notre SMS.
Son emploi par Proust est une preuve de modernité... et sans doute aussi d'ironie aux dépens des personnages.

.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

131

Re : Proust, imposture littéraire ?

L'adjectif rapiat, qualifiant une personne avare, doit rester invariable.

Proust ne se gène pas pour l'accorder au féminin.
Cet auteur se permet toutes les entorses à la grammaire.

- oui je sais, elle est très rapiate, interrompit la princesse.
in "le côté de Guermantes"

132

Re : Proust, imposture littéraire ?

Excusez-moi, mais c’est — encore une fois – un jugement à l’emporte-pièce : Larousse (même le petit) se borne à préciser :

(Le féminin rapiate est rare.)

Quant au même Petit Larousse, mais dans sa version de 1905 — celle donc que Proust aurait pu consulter — il nous dit :

RAPIAT (pi-a),
E
adj. (du lat. rapere, enlever). Pop. Avide, cupide.

Il prévoit donc bien l’accord au féminin… (dictionnaire1905.u-cergy.fr/index2.php? … av=Valider)

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

L'adjectif rapiat, qualifiant une personne avare, doit rester invariable.

Proust ne se gène pas pour l'accorder au féminin.
Cet auteur se permet toutes les entorses à la grammaire.

- oui je sais, elle est très rapiate, interrompit la princesse.
in "le côté de Guermantes"

Petite confusion : ce n'est pas Proust, l'auteur, qui use de la forme rapiate, mais son personnage, la princesse.
L'auteur ménage, à mon sens (il faudrait vérifier le contexte, je ne retourne pas au texte pour deux lignes...), un contraste entre le statut social élevé de la dame, et son registre d'expression familier.

C'était l'étape : mon chien n'a pas pu vous mordre, il est toujours attaché.

De plus, comme on vous le signale ci-dessus, la forme existe et est considérée comme correcte.
C'était l'étape : et d'abord, je n'ai pas de chien.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

134

Re : Proust, imposture littéraire ?

La lecture de Proust est longue et il y a des rochers. Mais quand on part à l'assaut d'un sommet de l'Everest, la montée est longue et il y a des difficultés.

Le plaisir que connaissent les grands sportifs et les aventuriers est inséparable des difficultés qu'ils rencontrent.

Une lecture tout le temps facile prive de cette victoire sur la difficulté.

La lecture de la recherche du temps perdu achevée, on est aussi heureux qu'au sommet de l'Everest. On contemple, au-dessous de nous, ces centaines de personnages, ces paysages, ces histoires, toute cette comédie humaine, tout cela dont on fait aussi partie, d'une richesse infinie, que l'on voit autrement maintenant, d'un autre oeil, d'un autre point de vue.

Du haut de cette lecture achevée, on aperçoit des liens entre les personnages, les espaces, les temps, des logiques profondes, des interactions, une cartographie.
Tout cela procure un immense plaisir.

En retournant dans la plaine, on n'oublie plus le coup d'oeil du sommet, chaque chose nous apparait plus riche de sens et de relations.

Cette expérience est irremplaçable. Peu d'oeuvres la donnent comme Proust. On est très loin d'une imposture.

Re : Proust, imposture littéraire ?

goofy2 a écrit:

L'adjectif rapiat, qualifiant une personne avare, doit rester invariable.

Proust ne se gène pas pour l'accorder au féminin.
Cet auteur se permet toutes les entorses à la grammaire.

- oui je sais, elle est très rapiate, interrompit la princesse.
in "le côté de Guermantes"

Proust n'aurait pas respecté une règle de grammaire inventée par Goofy2 ? Mais que fait la police du langage ?

« Jeunesse, folies. Vieillesse, douleurs ». Proverbe rom.

136 Dernière modification par goofy2 (03-11-2011 16:51:38)

Re : Proust, imposture littéraire ?

Les raisons pour lesquelles Proust  n'écrit pas tout simplement
"nous sommes passés devant..."
dans cet extrait de dialogue de la duchesse (personnage au langage chatié) , m'échappent complètement !

Mais enfin l'autre jour j'ai été avec la grande-duchesse au Louvre, nous avons passé devant l'Olympia de Manet.
in "Le côté de Guermantes"

137

Re : Proust, imposture littéraire ?

Pourquoi aurait-il dû obligatoirement insister sur le résultat de l'action et non sur l'action elle-même, évoquée dans le passé? Juste parce que vous ne savez pas que le verbe passer peut se construire avec l'auxiliaire avoir au passé composé?

Dans ce cas, on exprime le fait de se transporter d'un lieu à un autre, et non le résultat, le fait d'être passé.

Depuis quand peut-on s'exprimer ainsi? Depuis fort longtemps, c'est qu'il en a passé de l'eau sous les ponts wink

Au fond, grâce à cette lecture de Proust, vous découvrez tant de nuances diverses de votre langue que vous devriez le remercier wink

" Wer fremde Sprachen nicht kennt, weiß auch nichts von seiner eigenen."   J.W.v.Goethe

138

Re : Proust, imposture littéraire ?

regina a écrit:

Juste parce que vous ne savez pas que le verbe passer peut se construire avec l'auxiliaire avoir au passé composé?

L'auxilliaire avoir, d'accord dans le cas de  "Nous avons passé pas mal de temps à comtempler le tableau"
Mais l'utiliser dans le contexte " Hier en visitant le musée,  j'ai passé devant la Joconde" est grammaticalement incorrect.
C''est une formulation caricaturale pour imiter  un parler "paysan" ....mais c'est tout.

Re : Proust, imposture littéraire ?

Pas du tout : c'est la forme correcte, surtout à l'époque de Proust.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

140

Re : Proust, imposture littéraire ?

Pourtant, n'importe quel élève de CM qui s'amuserait à écrire
"hier, j'ai passé devant l'école"
dans une redaction, se verrait infliger une faute.

Re : Proust, imposture littéraire ?

Alors, il faudrait également sanctionner Gérard de Nerval :

Elle a passé, la jeune fille...

ou Edmond Rostand :

CYRANO
                                                     Vous ?… au contraire !
J’ignorais la douceur féminine. Ma mère
Ne m’a pas trouvé beau. Je n’ai pas eu de sœur.
Plus tard, j’ai redouté l’amante à l’œil moqueur.
Je vous dois d’avoir eu, tout au moins, une amie.
Grâce à vous une robe a passé dans ma vie.

...entre autres...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

142

Re : Proust, imposture littéraire ?

Encore une preuve, avec cet aparté littéraire, que c'est Proust qui s'adresse directement à son lecteur, et non pas un narrateur qui serait un personnage fictif d'"A la recherche du temps perdu".

( On voit pour d'autres raisons, dans un dictionnaire de l'oeuvre de Balzac où les personnages les plus illustres ne figurent que selon leurs rapports avec la Comédie humaine, Napoléon tenir une place bien moindre que Rastignac, et la tenir seulement parce qu'il a parlé aux demoiselles de Cinq-Cygne.)
in "Le côté de Guermantes"

Re : Proust, imposture littéraire ?

Encore une preuve, avec cet aparté littéraire, que c'est Proust qui s'adresse directement à son lecteur, et non pas un narrateur qui serait un personnage fictif d'"A la recherche du temps perdu".

Une preuve ? où ça, une preuve ?
Effectivement, nous sommes là devant ce qui s'appelle une intervention d'auteur. Ce n'est pas Proust qui a inventé ce procédé, que l'on trouve chez Stendhal... et chez Balzac. Depuis Jakobson, on appelle cela du métalinguistique.
Cette réflexion, c'est le narrateur-auteur qui la formule, c'est le narrateur-auteur qui s'adresse directement au lecteur.
Mais cela ne prouve pas que cette voix narrative soit celle de Proust.
Je ne nie pas que Proust n'ait mis un peu de lui dans son narrateur, mais Proust, le moi social Proust n'est pas le narrateur.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

144 Dernière modification par goofy2 (09-11-2011 12:58:50)

Re : Proust, imposture littéraire ?

A quoi riment ces sempiternelles boursuflures dans la conjugaison des verbes (exemple ici avec le verbe rester) qui ressemblent à de vilains pâtés sur une copie; alors qu'on voudrait y voir un, soit-disant, style littéraire admirable.

Aucune de ces dames fleurs ne partit avant la princesse de Parme. La présence de celle-ci – on ne doit pas s'en aller avant une Altesse – était une des deux raisons, non devinées par moi, pour lesquelles la duchesse avait mis tant d'insistance à ce que je restasse.

in "Le côté de Guermantes"

145

Re : Proust, imposture littéraire ?

Bah, si tu n'aimais pas l'imparfait du subjonctif, il faudrait sur le champ que tu te l'amputasses.

    On trouve d'aileurs, pas loin de cet alexandrin, une forme rare et succulente, un conditionnel passé seconde forme, surcomposé : « Eussiez-vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut... »

elle est pas belle, la vie ?

146

Re : Proust, imposture littéraire ?

Proust eût pu être drôle en choisissant le verbe répeter, mais même pas.

Re : Proust, imposture littéraire ?

La pelle se moque du fourgon. Qui écrit soit-disant n'a pas de reproches à fait à restasse. Restasse est correct, lui.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

148

Re : Proust, imposture littéraire ?

Piotr a écrit:

On trouve d'aileurs, pas loin de cet alexandrin, une forme rare et succulente, un conditionnel passé seconde forme, surcomposé : « Eussiez-vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut... »

Pourquoi "surcomposé" ? Il me semble que le surcomposé pour ce temps serait quelque chose comme :

"Vous eussiez eu eu ..."  : et si c'est facile à construire, je vois mal comment on pourrait l'utiliser. Il n'y a pas de conditionné dans le passé, seulement du non réalisé.

149

Re : Proust, imposture littéraire ?

P'tit prof a écrit:

. Restasse est correct, lui.

oui, mais la proximité de répétasse et de la princesse de Parme aurait eu un bel effet de drôlerie. lol

Re : Proust, imposture littéraire ?

Un effet de drôlerie ? Vous voulez dire que les pets sentent la violette ?
De toutes façons, répétasse ne fait pas sens dans la phrase que vous citez.

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

Messages [ 101 à 150 sur 554 ]

forum abclf » Écriture et langue française » Proust, imposture littéraire ?