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forum abclf » Écriture et langue française » expression valise : démonter au pilori

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Messages [ 12 ]

1 Dernière modification par éponymie (16-01-2017 08:17:02)

Sujet : expression valise : démonter au pilori

C'est dans le Point d'aujourd'hui :

La papesse de la théorie du genre déboulonnée

Un livre démonte au pilori l'œuvre de la philosophe américaine Judith Butler, pourtant célébrée pour ses travaux sur les minorités.

Je n'ai pas accès à l'ensemble de l'article mais je suppose qu'il s'agit d'un joyeux mélange entre "mettre au pilori l'œuvre", "démonter l'œuvre" et pourquoi pas "mettre au pilon l'œuvre".

Heureuse ou malheureuse cette expression ? S'il s'agit de mettre au pilori d'abord et de démonter ensuite, c'est pas joli, joli comme manière de faire smile

P.S.: et comme "monter au pilori" existe aussi, il y a de quoi faire du Devos avec cette innovation.

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Re : expression valise : démonter au pilori

On a aussi clouer au pilori.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : expression valise : démonter au pilori

Monter au, descendre du, clouer au, mettre au pilori ont toutes eu un sens propre avant d'en prendre un figuré.

Ici nous sommes uniquement dans un sens figuré qui ne me semble pas très heureux : je suppose qu'il s'agit de déconstruire véhémentement et publiquement une théorie mais faire de l'imagé sans l'image, c'est très artificiel.

Re : expression valise : démonter au pilori

L'expression est en tout cas correcte dans la version que je lis en ligne :
http://img11.hostingpics.net/pics/356476Capture.png
www.pressreader.com/france/le-point/20170112/282209420544439
Il est tout à fait possible que la version que vous avez lue soit le résultat d'un repentir incomplet, l'auteur ayant remplacé "cloue" par "démonte" mais oubliant d'enlever "au pilori", ou au contraire que l'expression soit le résultat d'une mauvaise transcription du titre original.

5 Dernière modification par éponymie (16-01-2017 10:30:36)

Re : expression valise : démonter au pilori

L'article que vous nous donnez datant d'il y a quatre jours, dans l'état de notre documentation, c'est "au pilori" qui a été ajouté.

http://img11.hostingpics.net/pics/89140620170116dmonteraupilori.jpg

que ce qui soit malheureux soit une expression, une transcription ou une correction, cela dénote au minimum un manque d'attention. Et explication ne vaut de toute façon pas absolution.

Re : expression valise : démonter au pilori

L'expression a été corrigée en "cloue au pilori". Les commentaires y seront pour quelque chose :

Où la "journaliste" a pu voir l'expression "démonte au pilori"… ce qui ne veut strictement rien dire !
On "cloue" ; on est "condamné", on "met" au pilori, mais on n'y a jamais été "démonté" !

Article intéressant, merci. L'usage d'un jargon est, effectivement, souvent une tactique classique de prise de pouvoir : celui qui ne comprend pas est amené à croire que l'auteur est plus intelligent que lui, et a donc nécessairement raison. Amusant, votre néologisme "Un livre démonte au pilori... "

(source)

7 Dernière modification par Nils (04-04-2017 11:45:23)

Re : expression valise : démonter au pilori

Salut,

Je suis étudiant en français et je suis tombé sur une expression que vous pourriez peut-être expliquer. Dans une préface de Candide, on traite les problèmes qu'avait Voltaire avec la justice (ou plutôt avec la censure). Je ne comprends pas de quelle sorte de punition qu'il s'agit dans la phrase suivante: "... Voltaire apprend que le Parlement a condamné au pilori et au feu ses Lettres subversives..." (Bordas, Paris: 1984)

Je sais ce que c'est qu'un pilori, mais à quoi servirait-il d'y mettre un livre? Est-ce que c'est un sens figuré? En quoi consistait alors ce châtiment? De la censure, de l'incinération des livres? De mettre Voltaire à la pilori et de faire brûler ses Lettres?
Merci à l'avance!

Nils
Göteborg, Suède

8 Dernière modification par P'tit prof (04-04-2017 12:08:28)

Re : expression valise : démonter au pilori

Ce n'est pas un sens figuré : le livre était exposé sur le pilori, afin que tout le monde le voie, même ceux qui ne savaient pas lire. Puis, toujours en public, le bourreau le brûlait.
L'Émile de Rousseau connut le même sort... sur dénonciation  de Voltaire !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : expression valise : démonter au pilori

Merci beaucoup, P'tit prof, pour ces renseignements! Très intéressant. Mais quel manque de caractère de la part de Voltaire...

Re : expression valise : démonter au pilori

Nils a écrit:

Je ne comprends pas de quelle sorte de punition qu'il s'agit dans la phrase suivante: "... Voltaire apprend que le Parlement a condamné au pilori et au feu ses Lettres subversives..." (Bordas, Paris: 1984)
Je sais ce que c'est qu'un pilori, mais à quoi servirait-il d'y mettre un livre? Est-ce que c'est un sens figuré? En quoi consistait alors ce châtiment? De la censure, de l'incinération des livres? De mettre Voltaire à la pilori et de faire brûler ses Lettres?

P'tit prof a écrit:

Ce n'est pas un sens figuré : le livre était exposé sur le pilori, afin que tout le monde le voie, même ceux qui ne savaient pas lire. Puis, toujours en public, le bourreau le brûlait.
L'Émile de Rousseau connut le même sort... sur dénonciation  de Voltaire !

Bonjour Nils. Malheureusement, l'explication de P'tit Prof est vraisemblablement controuvée. Je ne crois pas qu'il y ait eu à l'époque des Lumières d'exposition de livre au pilori, si tant est qu'il y en ait eu avant cette époque.
La phrase que vous avez lue est probablement une coquille pour "mettre au pilon". En fait, à cette époque, les condamnations du Parlement portant sur des livres indiquaient le plus souvent que les livres devaient être lacérés et brulés.
C'est le cas de l'arrêt du Parlement pour les Lettres philosophiques de Voltaire :

ARRÊT DE LA COUR DU PARLEMENT, QUI ORDONNE QU’UN LIVRE INTITULÉ « LETTRES PHILOSOPHIQUES » PAR MONSIEUR DE VOLTAIRE, À AMSTERDAM, CHEZ E. LUCAS, AU LIVRE D’OR, MDCC XXXIV, CONTENANT VINGT-CINQ LETTRES SUR DIFFERENTS SUJETS, SERA LACÉRÉ ET BRÛLÉ PAR L’EXECUTEUR DE LA HAUTE JUSTICE.
[...]
LA COUR a arrêté et ordonné que ledit livre sera lacéré et brûlé dans la cour du palais, au pied du grand escalier d’icelui, par l’exécuteur de la haute justice, comme scandaleux, contraire à la religion, aux bonnes mœurs et au respect dû aux puissances
[...]
Et ledit jour, 10 Juin 1734, onze heures du matin, à la levée de la cour, en exécution du susdit arrêt, le livre, y mentionné, a été lacéré et jeté au feu par l’exécuteur de la haute justice, en présence de nous, Marie-Dagobert Isabeau, l’un des trois premiers et principaux commis pour la grand’chambre, assisté de deux huissiers de ladite cour.

http://www.monsieurdevoltaire.com/pages … 05964.html

Pour ce qui est de l'Émile de Rousseau, il fut effectivement condamné au même sort, c'est-à-dire lacération et feu, par un arrêt de la Cour du Parlement de 1762 qu'on peut lire intégralement ici :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8601472q/f1.image

Quant à la prétendue dénonciation de l'Émile de Rousseau par Voltaire, elle ne concerne pas l'arrêt de la Cour du Parlement de Paris, mais, selon les soupçons de Rousseau, les suites données dans cette affaire par le Conseil de Genève. Il semble que Rousseau, avec sa maladie de la persécution, ait tout à fait exagéré les soupçons. 

Il est donc bien établi que la persécution du parlement rendait Rousseau inviolable et sacré à Voltaire, qui écrivait quelque temps après, avec l'accent de la sincérité, à M. Lullin, secrétaire d'État de Genève: «Je ne suis point ami de M. Rousseau, je dis hautement ce que je pense sur le bien et sur le mal de ses ouvrages; mais, si j'avais fait le plus petit tort à sa personne, si j'avais servi à opprimer un homme de lettres, je me croirais trop coupable.» (5 juillet 1766) Encore une fois, il est impossible d'admettre la fable d'après laquelle Voltaire aurait été l'instigateur des sévérités du Conseil de Genève, et Voltaire calomnié a cette fois raison de s'écrier: «Rousseau est un grand fou et un bien méchant fou, d'avoir voulu faire accroire que j'avais assez de crédit pour le persécuter, et que j'avais abusé de ce prétendu crédit. Il s'est imaginé, ajoute-t-il, que je devais lui faire du mal, parce qu'il avait voulu m'en faire, et peut-être parce qu'il lui était revenu que je trouvais son Héloïse pitoyable, son Contrat social très insocial, et que je n'estimais que son Vicaire savoyard dans son Émile: il n'en faut pas davantage dans un auteur pour être attaqué d'un violent accès de rage.» (24 janvier 1766)

http://agora.qc.ca/documents/rousseau-- … marie_caro

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Re : expression valise : démonter au pilori

Hélas, seuls les humains étaient mis au pilori
Poteau ou appareil tournant sur un pilier situé sur une place publique, auquel on attachait un condamné, avec un carcan au cou, pour l'exposer aux regards de la foule et marquer ainsi son infamie.
Une tige en charpente, que mettait en mouvement un cabestan caché dans l'intérieur du petit édifice, imprimait une rotation à la roue, toujours maintenue dans le plan horizontal, et présentait de cette façon la face du condamné successivement à tous les points de la place. C'est ce qu'on appelait tourner un criminel.
CNRTL
Si bien qu'on pouvait être mis au pilori, y être monté ou descendu, ou encore attaché, voire cloué, ou exposé.
Heureusement que de nos jours l'expression n'est plus valable qu'au figuré; et d'ailleurs on peut effectivement rencontrer, bien sûr au sens figuré : mettre un livre au pilori.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

12 Dernière modification par Nils (05-04-2017 10:14:56)

Re : expression valise : démonter au pilori

Merci à vous, tous les deux. Quel privilège de pouvoir demander directement aux Français. Et je suis content d'apprendre que Voltaire ne soit probablement pas coupable d'une telle dénonciation /Nils

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