C'est un adjectif employé pour souligner le caractère décalé du temps,
C'est un - joli - nom.
En revanche, et même si cette équivalence est en réalité problématique, la théorie esthétique de l’anachronisme des images, telle qu’elle est formulée par exemple par Georges Didi-Huberman dans Devant le temps, semble à même d’éclairer la temporalité des œuvres d’art en général, qu’il s’agisse d’images ou de textes littéraires. De fait, c’est dans des termes tout à fait comparables que Georges Didi-Huberman et Marc Escola rendent compte de la part d’anachronie qui traverse, pour le premier, toute image et, pour le second, toute œuvre littéraire :
[L]es images, certes, ont une histoire ; mais ce qu’elles sont, le mouvement qui leur est propre, leur pouvoir spécifique, tout cela n’apparaît que comme un symptôme – un malaise, un démenti plus ou moins violent – dans l’histoire. Je ne veux surtout pas dire que l’image est « intemporelle », « absolue », « éternelle », qu’elle échappe par essence à l’historicité. Je veux dire, au contraire, que sa temporalité ne sera pas reconnue comme telle tant que l’élément d’histoire qui la porte ne sera pas dialectisé par l’élément d’anachronisme qui la traverse
Définissant non pas le temps, mais les temps de l’œuvre, Georges Didi-Huberman et Marc Escola reconnaissent dans des termes proches l’historicité de toute création esthétique : comme la langue du texte littéraire est datée, l’image est dans l’histoire, et cette historicité interdit une approche purement intemporelle de l’œuvre. Cependant, l’œuvre littéraire, comme l’image, ne cesse jamais de faire événement, elle nous parle depuis le passé, mais au présent. C’est alors d’anachronies de l’œuvre qu’il faudrait parler : anachronie qui traverse l’œuvre et définit sa discordance dans le temps historique, anachronie de la lecture de l’œuvre depuis un présent qu’elle ne peut prévoir et qui actualise ses potentialités enfouies, anachronie, enfin, du lien historique entre les œuvres, qui ne peut être enfermé dans une quelconque loi de successivité.
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