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Le forum d'ABC de la langue française

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Je suis complètement d'accord avec vous. En tant que professeur de français, et juste amoureuse de la langue française, ces liaisons oubliées m'écorchent les oreilles.
Hélas, j'avoue ne plus me battre depuis longtemps contre cela.

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J'arrive comme les carabiniers. Remarque préliminaire : personne de sérieux ne s'est jamais risqué à dire que les liaisons sont obligatoires après la partie conjuguée du groupe verbal et après le nom dans le groupe nominal, il y aura bien une raison à cela.

Alco a écrit:

Qu'on le veuille ou non, l'observance de l'usage des liaisons est un marqueur du niveau culturel, ou du moins elle est ressentie comme telle par les personnes cultivées. On est quand même en droit de se poser des questions quand des personnalités haut placées se laissent aller à des pratiques langagières relâchées.

Quand on regarde des émissions des années 60 ou 70 dans lesquelles le langage était encore très controlé, on constate que la pratique de la liaison était étendue et allait bien au delà des rares identifiées comme obligatoires, cet usage a largement disparu et s'est probablement réduit à un marqueur social : je suis méchant mais je crois qu'en plus d'éventuellement constituer la marque des personnes cultivées, c'est aussi bien souvent l'instrument de ceux qui veulent se montrer cultivés.

Si les politiques renoncent à cet instrument, il y a aussi une raison à cela. Mauvaise en l'occurrence, pour des gens qui évoluent probablement dans des milieux dans lesquels on ne parle pas "comme ça", puisqu'il s'agit de caresser le potentiel électeur dans le sens du poil.

Je crois que ça fait désormais belle-lurette que la forme du langage ne trahit pas vraiment le niveau de culture et de connaissance.

Deuxième remarque : après 5 ans d'abstinence, je viens de faire une immersion de 10 jours en France et j'ai été tout surpris d'entendre des personnes que je ne définirais pas ignorantes employer nouveau pour nouvel et ne pas faire une liaison avec très (une dame de 80 ans et une autre de 48) et j'en ai probablement laissé passer d'autres.

43

Et il n'est pas facile non plus de retrouver l'historique, car lorsque Delamothe en 1592 (en haute de mon précédent message, le 38e) « officialise » le système des liaisons, il en parle comme s'il existait depuis longtemps et comme s'il était naturel aux locuteurs et à la langue. La prononciation du français lui paraît visiblement facile et d'ailleurs il le dit.

Je reconnais que le parallèle historique avec l’amuïssement des consonnes finales est déséquilibré, car il faudrait pouvoir suivre sur les deux plans ce qu'en ont dit, graduellement, les grammairiens. L'essentiel de ce que l'on sait ou de ce que l'on croit relève davantage d'une reconstitution tardive et théorique que d'une vraie reconstitution historique.

On devine qu'à une époque, à la louche vers 1500, on a fait apparemment table rase, puisque par exemple on repartira de rien quand Ménage, je crois, tente le premier dictionnaire étymologique, avec une grande crainte de se tromper, puisqu'il s'en est expliqué. Si donc il nous manque des travaux de grammairiens contemporains en gros avant 1600, on ne sait pas si les évolutions leur ont semblé naturelles, comme allant d'elles-mêmes - concernant la liaison on peut vraiment se le demander -, n'attirant pas leur attention, ou s'ils travaillèrent ou débattirent sur ces questions.

Vous aurez remarqué que les deux principaux sites sur lesquels je me suis appuyé se trouvent avant tout consacrés à la musique et au chant. Hasard des recherches, peut-être, mais il n'empêche que je n'ai pas trouvé une documentation de ce niveau sur des sites directement consacrés à la langue. Il est vrai que par la poésie on retrouve beaucoup de choses et qu'elle est d'un apport extrêmement précieux, mais d'un autre côté on semble bien en être réduits là. Entre les évolutions de la langue et les évolutions en poésie il y a de nombreux ponts mais on n'a aucune idée de la largeur et de la profondeur entre les deux rives, le tout demeurant dans un épais brouillard.

42

Pas facile pour un étranger de pratiquer les liaisons du français. Il ne semble pas qu'il y ait pas ce phénomène dans les autres langues européennes, pas en allemand, en tout cas, où le coup de glotte s'impose avant une voyelle en position initiale.
En breton, au contraire, les liaisons se font, mais en sonorisant les consonnes finales sourdes devant voyelle.

41

Marlon Brando était-il nul en matière de liaison?


https://www.facebook.com/Ina.fr/videos/ … 355941614/

40

La première à être amuïe aurait été le m, dès le début de l'ère chrétienne

Elle avait déjà  disparu au temps de Cicéron. On le sait, car dans les vers les finales en --m (-am, -em, -um...) s'élident devant voyelle.

39

Vers la fin de cet enregistrement, Kirk Douglas dit : Nous sommes [] avec… en prononçant le s final de sommes.
Ce contretemps de liaison s’explique par le choix hésitant du mot suivant.
J’ai perçu un certain raffinement ou tout au moins de l’habileté  dans cette façon de faire participer la "consonne de liaison" à un instant d’hésitation.

38

Ce que disait Delamothe en 1592, cité dans un livre anglais qui cite lui-même Charles Thurot :

Nous joignons tellement nos mots ensemble par une mutuelle liaison et proportion de voyelles et consonantes qu’il semble que chasque comma n’est qu’un mot : car encore qu’il y en ait quelquefois sept ou huict, ils sont si bien mariez et enchainez ensemble, qu’on ne les peut disjoindre, sans rompre les reigles de la vraye et naturelle prononciation.

Comma est ici au sens latin, ou plus exactement grec ; en français le sens est curieusement inversé :

Emprunté au latin comma, -atis (grec κ ο ́ μ μ α « membre de phrase ») « membre de phrase, période » en latin classique ; « signe de ponctuation » et terme de musique en bas latin.

Merci au Wikipédia allemand de nous renseigner sur Charles Thurot - son livre est dans Gallica -, puisque le Wikipédia français l'ignore, et quasiment tout Google en français. Le TLFi heureusement cite son nom. 

La page histoire de l'orthographe citée dans mon précédent message a un pendant, la page histoire de la prononciation, qui dit que la nasalisation, à mon avis très importante sur la question de la prononciation de la consonne finale ou de toutes les consonnes, remonterait au XIe siècle.

Puis en IV, 1, elle situe l'amuïssement des consonnes finales, en se démarquant des autres pages que j'avais citées, entre le VIIIe et le XIIIe siècle, le r, la plus résistante, cédant au XIIIe siècle. Mais on a vu que tout était loin d'être fini au XIIIe siècle. La première à être amuïe aurait été le m, dès le début de l'ère chrétienne - mais comment est-on remonté aussi haut ? -, en tant que terminaison de l'accusatif.

La suite m'est assez énigmatique, en particulier la déclinaison à deux cas :

En général, la consonne finale disparaissait devant le s du pluriel, mais se conservait au singulier, avant le XIIIème siècle : un arc / des arcs [aRk / aRs], un chat / des chats (= "tchate" / "tchasse"). Après le XIIIème, elle disparaît dans tous les cas.

Certaines situations permettent à la consonne de se conserver, selon la place ou l'emploi, comme on constate encore aujourd'hui dans plus (= davantage / ou négation), six, dix (x = s / z / ou muet), vingt. Ex : six filles, six enfants, il y en a six ; il y en a plus / il n'y en a plus.

Le s et le t correspondant à des désinences disparaissent à la fin du siècle => fin de la déclinaison à 2 cas, accomplie pour le XIVème.

Je finis par me demander si la velléité de conserver trace des déclinaisons n'aurait pas été la véritable raison de la prétendue prononciation des consonnes finales et si elle n'aurait pas pesé particulièrement lourd en poésie.

Ce qui distingue le français, phonétiquement, de toutes les langues voisines, historiquement ou géographiquement, dans lesquelles on prononce toutes les consonnes, c'est son exclusivité - je me trompe peut-être - 1) du e muet, 2) des nasales. L'amuïssement des consonnes, finales ou non, pour moi c'est important mais au second plan. Le coup du e muet (voir la citation de Batteux dans mon message précédent), que je trouve, oui, génial, pourrait bien expliquer à lui seul l'engouement, pendant quelques siècles, de toute l'aristocratie européenne pour notre langue.

37

Merci pour ces érudites contributions  , j'apprends plein de choses sur les tribulations historiques de notre langue et les fluctuations du "bien parler".
Je voyais les choses de l'étroit point de vue du gars irrité qu'on ne s'exprime plus aussi "bien" que dans sa jeunesse , et c'est vrai qu'il y a eu une formidable accélération dans cette "dégradation" (les guillemets pour marquer une distance avec mon étroitesse d'esprit initiale!).
Mais , mon irritation vient également de ce que je crois déceler dans cette évolution du langage de nos dirigeants : une certaine affectation...J'ai l'impression qu'ils se forcent à parler ainsi (par démagogie ?).

36

Il faudrait  ajouter à la liste  la  prononciation forcée des doubles consonnes (ex. Em-ma est  émue), langage liturgique de la dictée rituelle hebdomadaire du lundi matin.