CABOTIN, INE, subst.
Gén., péj.
A.− Comédien.
1. Vx. Comédien ambulant. Il nous vient une troupe de cabotins (Ac. 1835-1932).
Rem. Attesté dans la plupart des dict. généraux.
2. Usuel, fam., gén. péj. Comédien de second rang ou d'un jeu trop extérieur. Cabotin de province. Synon. fam. cabot :
1. ... la figure de mauvais mouton d'une femme parlant haut, avec une voix qui a le diapason du théâtre, affichant très haut l'estime qu'a pour elle son chef de claque, mauvaise cabotine d'opéra-comique, qui pue le théâtre, ses poses, ses jalousies et son argot, ... E. et J. de Goncourt, Journal, 1860, p. 708.
− [En parlant d'un animal, et de ce fait moins péj.] Les chiens sont d'incroyables cabotins (J. de La Varende, Le Souverain seigneur, 1953, p. 114).
B.− P. comp. et p. métaph. :
2. ... le ménage Wasselin m'apparaît comme un couple de cabotins jouant leur vie à la façon d'une pièce tragi-comique. G. Duhamel, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, p. 80.
3. Celles [les femmes] d'aujourd'hui sont des cabotines, les cabotines de l'amour, répétant de chic une pièce qu'elles jouent par tradition et à laquelle elles ne croient plus. Il leur faut des cabotins pour leur donner la réplique et mentir leur rôle comme elles. J'entends par cabotins les pitres du monde ou d'ailleurs. Maupassant, Notre coeur, 1890, p. 456.
− P. ext. Personne qui manque de naturel, dont les attitudes, les manières sont trop étudiées et trop théâtrales :
4. J'ai vu, au cours de mes études, des sujets de Luys, de Dumontpallier, de Charcot, devenir de vrais cabotins d'amphithéâtre, disant « ma lésion » comme ils auraient dit « mon rôle », transformés, pour le coup, en « m'as-tu vu » achevés. L. Daudet, L'Homme et le poison, 1925, p. 115.
− Emploi adj. :
5. À Paris, on n'écoute jamais son voisin de table, à moins qu'il ne soit très amusant. Ce n'était pas le cas pour Quesnay de Beaurepaire, un peu solennel et cabotin à mon gré... L. Daudet, Au temps de Judas, 1920, p. 40.
6. − Écoutez, remarqua Olivier Mainville posément, je me demande parfois d'où vous pouvez tenir ce ton cabotin. Et puis, vous venez de rater votre effet de scène, mon petit. Bernanos, Un Mauvais rêve, 1948, p. 883.
PRONONC. ET ORTH. : [kabɔtε ̃], fém. [-tin]. On relève la forme cabottin dans Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop.].
ÉTYMOL. ET HIST. − 1807 cabotin « comédien ambulant » (Feydel, Rem. sur le dict. de l'Ac., 42 dans Quem.) ; 1834 « mauvais acteur » (Berthoud dans Larch. 1861, p. 57) ; d'où 1890, supra ; cf. 1899 (Virm. Suppl., p. 56 : Cabotin [...] Dans le peuple on applique cette expression à tous ceux qui jouent l'amour, la sincérité, la conviction). Orig. incertaine. Soit du nom de Cabotin (hyp. adoptée par la plupart des dict. ainsi que par W. F. Schmidt, p. 17) qui aurait été un célèbre comédien ambulant à la fois directeur de théâtre et charlatan sous le règne de Louis XIII (M.E. Fournier dans Courrier de Vaugelas, 15 juill. 1875, p. 43 cité par Littré), hyp. repoussée par F. Letessier dans Fr. mod., t. 20, 1952, pp. 116-117, le nom de Cabotin n'étant cité, selon lui, que fort tardivement (1858) par E. Fournier, loc. cit. [à la suite de Littré, le nom de Cabotin est attesté dans Lar. 19eet 20e et Lar. encyclop.]. Soit, dans la mesure où l'existence de Cabotin paraît hypothétique, extension de sens du pic. cabotin « homme de très petite taille » (Jouanc.; cf. se caboter « rester petit ») terme attesté dès la fin du xviiies. dans P. Daire, Dict. pic., gaul. et fr. au sens de « petit badin », c'est-à-dire « petit sot » (Fr. mod., loc. cit.) à rattacher au lat. caput « tête » (FEW t. 2, 1, p. 335a) ; v. aussi P. Emrik, Bulletin de la Société des Antiquaires de Picardie, 1949, pp. 148-165. L'hyp. d'une dérivation de caboter*, les acteurs ambulants voyageant par petites étapes (DG), est séduisante mais insuffisamment étayée.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 151.
BBG. − Letessier (F.). Notes lexicol. Fr. mod. 1952, t. 20, pp. 116-118. − Pamart (P.). Écriture artiste et créations verbales. Vie Lang. 1970, p. 306 (s.v. cabotinement). − Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 444 ; t. 3 1972 [1930], p. 527. (tlfi:cabotin)
- cabotin adj. THÉÂTRE - TLF, cit. L. Daudet, 1920 ; PR[72], GLLF, ø d.
- 1774 - «Au mot de confession, toute la bande cabotine frémit.» Confession gén. d'Audinot, 9 (Rouen, Lemonnyer, 1880) - J.S.
- cabotin n.m. péjor. CARACT. "par ext." - TLF, cit. L. Daudet, 1925."comédien ambulant" : GLLF, Mat. I, ND3, 1770 ; BW5, 1807 ; FEW (2/I, 15a), 1808, D'Hautel ; DG, 1835, Acad. ; L, ø d ; "comédien sans valeur" : E, 1807, D'Hautel ; PR[73], 1808 ; GLLF, 1866, Lar. ; L, ø d.
- 1736-37 - «Maupertuis, ce carême, / Doit revenir, dit-on. / Il me dicta le thème / Que j'ai fait sur Newton ; / Tu sauras le système / Des meules de moulin / De ce cabotin.» Voltaire, Corresp., Adieux de Voltaire, I, 1499 (Gallimard) - P.E. (bhvf:cabotin)
- Remarque : je retrouve cette source (édition 1739) avec : calotin, au lieu de cabotin. (gb)
- De cabaust : auberge (les comédiens parisiens méprisent leurs confrères ambulants obligés réduits à jouer dans les cabots en province). (Ducange cité par DEL)
- Les cabotins, qui allaient autrefois de bourg en bourg s'installer sur des tréteaux pour amuser les gens par des pitreries grossières. (GEN)
- Orig. incert., soit nom d'un comédien ambulant sous Louis XIII, soit mot picard, « homme très petit » (fin XVIIIe), du lat. caput « tête » ; soit, d'après Guiraud, à rapprocher du provençal far cabot « saluer », doublet de capoter « faire signe avec la tête ». (GR)
- Aurait été le patronyme d'un comédien ambulant de l'époque de Louis XIII. (Montvalon)
- Peut-être de cabotage, d'après le mot qui désigne les petits voyages que font les navires marchands en allant commercer de port en port. (Huart1839)