languefrancaise.net

DOILLON Albert 1918–2004

nom: Doillon prénom: Albert pseudo: né_à: mort_à: né_en: 1918 mort_en: 2004 pro: fonctionnaire, amateur mc: Doillon

(:bq:) « C'est par l'accumulation des faits de langage, des témoignages, parfois les plus insignifiants à première vue, et par leur rapprochement que nous parviendrons à redresser des erreurs, à combler des lacunes, et par là même à approcher la vérité lexicologique qui échappe si souvent à notre connaissance et à notre jugement. » (Albert Doillon, Bull. 12&13, 07/1976). (:bqend:)

Notice biographique

Les informations constituant la version de départ de cette notice biographique sont empruntées (copié-collé) à la notice Bouquins.

doillon-carte-visite.jpg: 500x375, 15k (2015-04-18 11:53)

Albert Doillon (1918-2004), ancien élève de l'École nationale de la France d'outre-mer, effectua sa carrière en Indochine puis au Cameroun avant d'être affecté à Paris au ministère de la Coopération, comme administrateur en chef de classe exceptionnelle de la France d'outre-mer. Fin 1973, il créa l'association Les Amis du lexique français – Les mots en liberté (ALFRAL) : l'ambition d'Albert Doillon était de regrouper autour de lui des amateurs passionnés de lexicographie, et d'intéresser un public désireux d'approfondir ses connaissances du vocabulaire français populaire. Il obtint le prix spécial du Comité de la SGDL en 1982 et le prix Verdaguer 1990 (Institut de France et Académie française).

Presse

Pépé le dico (06/06/2002, Libération)

Pépé le Dico (Jean-Baptiste Harang, Libération, 06.06.2002)

« Des mots pour le pénis, j'en ai déjà 312 et je ne suis qu'à la lettre G, et encore, sans les régionalismes. »

Albert Doillon, 84 ans aux cerises, collectionne depuis cinquante ans les mots du français familier. Les voilà enfin réunis en six dictionnaires.

On pourrait commencer par le début, comme toutes les histoires, Albert Doillon est né le 13 juin 1918, au Moulin Corda, sur la Superbe, commune de Melincourt, dans les Hautes-Patates. Mais, dans l'histoire d'Albert Doillon, le début ne compte pas, c'est du moins ce qu'il dit, il faudrait sauter une bonne cinquantaine d'années, avant d'arriver à ce qui nous occupe, Albert Doillon, lexicographe, auteur de dictionnaires, et pourquoi pas quatre-vingt-deux ou trois ans, puisqu'il vient de signer ses premiers contrats d'édition, et pas peu, six contrats pour une demi-douzaine de dictionnaires thématiques, et plus si affinités. Sauf que la lexicographie, ça s'attrape petit.

« Oui, on disait "Hautes Patates" pour la Haute-Saône, là-bas, il n'y avait que des pommes de terre. C'était un vrai moulin, le Moulin Corda, avec cette rivière, la Superbe, on y moudait, moulait, non, moudait, comment dites-vous ? Enfin, du blé pour la farine, mon père était gendarme, on allait là où il était affecté. J'ai passé le bac à Besançon, je suis un garçon plutôt lent, mais j'avance, à la naissance, je ne pesais que trois livres, on me requinquait en me faisant sucer un chiffon imbibé de kirsch, et à dix-neuf ans 91 kilos, voyez. La lenteur, je la compensais par la puissance, je lançais le poids, le javelot, de la rigolade, en 1939, je lançais le disque de deux kilos à 39,70 mètres, aujourd'hui, ils sont à 74, le javelot à 41,13, ils sont presqu'à cent, je ne sais pas ce qu'ils bouffent, à 84 ans, je lis l'Equipe tous les jours, mais on ne trouve plus grand-chose, dans l'Equipe, comme mots nouveaux. Je perds la mémoire, j'ai essayé de me souvenir des maisons que nous avons habitées, au 70, rue de Belfort par exemple, à Besançon, rien, impossible d'en revoir la moindre image, en essayant de refaire le plan, tout ce que j'ai trouvé, pourtant je suis fort en dessin, c'est un mot de Gabin pour désigner un truand dans un film : "Qu'est-ce que c'est que ce vieux fourneau ?", fourneau, je ne l'ai pas mis dans mon dictionnaire, c'est trop connu. » A presque 84 ans Albert Doillon lit tout ce qu'il croit moderne, des trucs que les faux jeunes comme nous autres ne lisent même pas, Max, Têtu, FHM, non pas qu'il les lise vraiment, mais il regarde tous les mots, c'est plus fort que lui, il cherche : « Miss Trick, vous connaissez cette rubrique, au point de vue sexe, c'est zéro, le sexe des filles, ils appellent ça le minou, on ne les a pas attendus. Des mots pour le pénis, j'en ai déjà 312 et je ne suis qu'à la lettre G, et encore, sans les régionalismes. »

Au début, rien n'est commencé

Bon, mais il n'y a pas que le javelot dans la vie. « J'étais nul en maths, il me fallait trouver une école sans matière scientifique au concours, j'ai essayé l'Enfom, Ecole nationale de la France d'outre-mer, la coloniale si vous préférez, j'ai été recalé en 1938, et après, comme il y avait la guerre, ils ont pris n'importe qui, un an d'école, un an de guerre, une deuxième année d'école, jusqu'en 45, les communications étaient pratiquement coupées avec les colonies, on ne faisait rien. » Albert Doillon fit pourtant ses quinze années de colonies, à Saigon jusqu'à Diên Biên Phû, à Douala jusqu'à l'indépendance du Cameroun. Il n'en dit rien, n'a pas la moindre opinion sur l'empire perdu, sur la décolonisation qui se fait sous ses yeux, qui rend caduque son métier d'administrateur colonial. Il dit seulement que ce qu'il entend sur l'Algérie, les corvées de bois, la torture, il a vu pire en Indochine et qu'on n'en parle jamais. Devant sa compagne (blanche), il évoque des femmes jaunes et des femmes noires, l'enfant qu'on leur fait, ceux qu'elles ont déjà, sans trop de respect, avec une immense tristesse qu'il chasse comme une mouche. En 1960, il s'enferme dans un bureau au ministère, à Paris, et s'ennuie sans la moindre ambition devant des colonnes de chiffres qui ne lui disent rien, au mot ambition il s'ébroue de désolation.

Voilà pourquoi il n'est pas nécessaire de commencer par le début, au début, rien n'est commencé, Albert Doillon trouve sa voie en 1964, en vacances, à Annecy : « Ne me demandez pas pourquoi, mais je me suis mis à ramasser des mots, des mots vivants, nouveaux, des mots qui ne figuraient dans aucun dictionnaire et que pourtant on pouvait entendre et lire, il suffisait d'ouvrir les oreilles, les dictionnaires existants me déplaisaient, ils consignaient une langue morte. Ça devait être dans l'air, puisque, l'année suivante, parut le dictionnaire de Gaston Esnault, les Argots, chez Larousse, sans cesse pillé depuis, jamais égalé, ce type est mort à 97 ans, couvert de milliers de fiches qui dorment quelque part à Quimper, qui va s'en occuper ? Personne ! »

Albert Doillon se lève, il le fera sans cesse pendant tout l'entretien, comme si le moindre de ses dires devait être attesté par un document, une déformation de lexicographe, il revient avec « son » Esnault, déchiqueté jusqu'à l'âme, sans couverture, les pages défaites, mélangées, cul par-dessus tête, qu'il lit sans lunettes, à moins qu'il ne les sache par coeur : « C'est mon deuxième exemplaire, le premier est retourné à la poussière. » Il maugrée contre les suivants, le Dico du français non conventionnel, chez Hachette, de Cellard et Rey (qu'il fustige au bénéfice d'un plaisant anagramme), en 1980, et l'Argot de Colin, Mével et Leclère, Larousse, 1990: « Ces livres-là sont dépassés trop vite, à force de trop vouloir être à la mode. Pour faire un bon travail, il faut de la curiosité, le désir de comprendre, et, surtout de la modestie, on ne doit pas écrire "cette expression a disparu": qu'est-ce qu'ils en savent ? Est-ce qu'ils vont aux réunions des anciens de Saint-Cyr vérifier qu'à quatre-vingts ans, ils ont cessé de s'appeler pique-boeuf ? »

Le « français en liberté »

L'année de sa vocation soudaine, Albert Doillon emménage dans ce petit deux pièces de la rue Lauriston, dans le seizième arrondissement de Paris, où il nous reçoit aujourd'hui, quatre étages sans le moindre ascenseur pour hisser ce lanceur de poids octogénaire d'un bon quintal, pas ou peu de bibliothèque, l'ordinateur antique sur la table de la salle à manger, la télé qui débite du Roland-Garros sans se mêler de la conversation, le cabernet sucré qui attend au frigo et les galettes de Saint-Michel, deux verres seulement, Ida n'en prendra pas, elle fait semblant de suivre le tennis et ne quitte pas des yeux l'homme qu'elle ne quitte plus d'un pas depuis trente-six ans, elle n'a pas attrapé le virus du dico permanent. « Elle m'a beaucoup aidé, prévient Albert, surtout pour le vocabulaire de la blanchisserie, vu qu'elle était blanchisseuse, debout tous les matins à cinq heures, payée au cul du panier. » Pendant neuf ans, et peut-être pour partie dans son bureau de fonctionnaire des DOM et des TOM, Albert Doillon tient un journal, le journal des mots qu'il ramasse, en vrac, comme ça, sans savoir ce qu'il en fera, jusqu'en 1973 où la retraite à 55 ans lui ouvre un horizon de temps libre à sa mesure.

Il met au point son concept du « français en liberté » : populaire, argot, jargon et néologisme. Il crée l'ALFRAL, association des Amis du Lexique FRAnçais en Liberté. Publie BEL, Bulletin d'études lexicographiques, servi à tous les membres de l'association. Jacques Cellard, qui tient à l'époque une rubrique sur le langage dans le journal le Monde, le cite à plusieurs reprises dans ses chroniques. En 1982, le bulletin compte plus de 150 abonnés, aujourd'hui, sous le titre Dico Plus (« j'ai remarqué que ce titre était celui d'une rubrique dans Téléstar, tant pis »), une cinquantaine de correspondants lui restent fidèles. Albert Doillon entreprend des publications de vocabulaires thématiques par les Mots du cirque, sur les conseils de François Caradec, il en envoie un exemplaire, qui restera longtemps lettre morte, aux éditions Fayard. Caradec le fait entrer à la Société des gens de lettres, il s'y ennuie. Il est lancé dans son grand oeuvre, le Dictionnaire permanent des mots en liberté, avec l'aide de ses correspondants, dont un instituteur en retraite, monsieur Prigniel, auquel il voue un culte et une admiration sans limite. Il lui consacre une monographie, le Trésor de Maître Prigniel (1903-1987). Mais, après treize années de labeur, et 1 400 pages rédigées, il jette l'éponge au mot cécoinces, oui, cégoinces, quoi, vous ne connaissez pas ? Comme cézigues, « lui », si vous préférez. Il publie (il dit «publier», mais bien sûr son travail est à compte d'auteur, des polycopiés reliés sur sa table de cuisine, et diffusés aux seuls abonnés de l'association), des textes sur les mots qui lui tiennent à coeur, trampoline, condom, mégot, bistrot, des monographies, les mots du costume civil, de l'argent, la santé, la violence, le sport (à l'occasion des Jeux olympiques de Barcelone en 1992, réactualisé aujourd'hui chez Fayard), et, en deux volumes, le Superdico, qui porte en sous-titre, plus gros que le titre, « Enrichissez vos dictionnaires », et recense tous les mots nouveaux collectés entre 1966 et 2000, 10 000 entrées, à paraître chez Fayard. À la demande du président (c'est ainsi qu'il nomme, avec un respect infini, Claude Durand, le patron de la Librairie Arthème Fayard), il compile un dictionnaire du sexe : « J'avais une centaine de pages, comme ça, pour voir, pris dans Anne Salva ou d'autres, j'ai ajouté ce que je n'avais pas mis dans mon sexe, et voilà, 400 pages, ça suffit, non ? » Parce qu'en septembre dernier, un miracle s'est produit, à plus de quatre-vingts ans, Albert Doillon a signé six contrats d'édition, six d'un coup, avec « le président », un à-valoir et 3 500 exemplaires pour chaque, une collection pour lui tout seul, « les Mots en liberté » : le Dico du sport, le Dico de la violence (disponibles depuis hier), le Dico du sexe (fin 2002), et, pour plus tard, le Dico de l'argent, le Dico de la santé, et le Superdico, en deux volumes. Il dit : « Je suis très heureux, je n'ai pas la moindre illusion. » Après le miracle, Albert Doillon nous a fait une petite dépression, perdu l'appétit et quelques kilos, vu son tremblement s'accentuer un peu, reçu dans le dos ce qu'il appelle « les coups de poignards de la dactylo » à force de taper sur la vieille bécane Macintosh, pleuré sur sa mère, morte à 53 ans sans jamais avoir cessé de travailler, « au fond je crois bien que les formules très personnelles de cette femme admirable, tout le contraire de mon père, m'ont donné le goût de tout cela », pleuré sur ses deux frères morts trop jeunes à 63 ans (René et Norbert), le petit cueilleur de mots à la retraite est devenu professionnel, ce qui passait pour une manie est salué comme un travail de titan compétent. Il a fallu digérer. Et s'y remettre. La langue n'attend pas.

Philocorbier, marcassinade...

Le numéro 68 du Dico-Plus, daté de mars 2002, est bouclé, il porte en sous-titre : « Pour la mise à jour permanente des connaissances lexicales, XXVIe année, nouvelle formule ». On peut y lire l'édito d'Albert Doillon : « L'année 2001 a été particulièrement cruelle pour notre Association qui a perdu deux très anciens abonnés, le Professeur d'Université Bernard Offner de Paris et Jean-Baptiste Montagne de Strasbourg. Elle nous a surtout ravi Paul Janssen de Liège qui s'est suicidé le 30 avril dernier à l'âge de 56 ans dans des circonstances dramatiques qui sont pour moi une énigme absolue. Ami le plus cher depuis 1978, animateur hors pair, passionné du lexique en liberté, spécialiste des musiques modernes et des slangs anglo-saxons, c'est une perte irréparable pour notre groupe. Nous avons aussi laissé en route notre sympathique correspondant de Londres K.E.M. George qui, jeune retraité, a choisi de se consacrer uniquement désormais à sa langue maternelle. En ce qui concerne nos programmes, l'ère de nos grandes monographies est close. Et tout nouvel ouvrage ne pourrait voir le jour que dans le cadre des activités de la librairie Arthème Fayard de Paris, à laquelle nous sommes liés par contrat. » On y sent comme le regret d'avoir été rançonné par la gloire, de ne plus pouvoir vocabuler entre soi, dans la joie et la bonne humeur comme en attestent les 54 pages qui suivent. Échantillons.

  • Bandouiller, v. intr. : n'avoir qu'une vague érection ; familier, cf. Max, août 2001 : (test d'un « sex-expandeur ») « Mon sexe bandouille un moment, une petite demi-heure, et tout redevient normal. » Déjà vu précédemment et attesté en 1912.
  • Monocouillu, n.m. : homme qui n'a qu'un seul testicule ; Max d'avril 2001, « monocouillus célèbres » (Napoléon, Armstrong).
  • Beaufouillard, adj. : sens ? (composé de « beaufs » ?); Epok juillet 2001. Jean-Marc Cerrone (inventeur du disco) : « Il compose avec le groupe de rock beaufouillard Toto. »
  • Néobossiste, n.m. : musicien de la bossa-nova ; cf. Libération du 1er août 2001: « Les tons suaves du néobossiste Marcio Faraco... »
  • Philocorbier, n.m. : collectionneur de corbillards (une trentaine en France) ; FHM de février 2002.
  • Marcassinade, n.f. : action de jeu décisive à proximité de la ligne de but adverse ; jargon du rugby, le JDD du 3 juin 2001: « Bory hérite du ballon aux 22 mètres et déchire la défense adverse dans une marcassinade dont l'héritier de Saint-André a le secret. » Le terme, imagé, semble évoquer « le cochon dans le maïs ».
  • Trouilloteuse, n.f. machine destinée à trouer les billets de banque dévalorisés ; terme d'argot banquier, cf. le JDD du 16 décembre 2001 (déjà dans le Canard enchaîné du 29 août 2001).
  • Génuphallation, n.f. : voir la citation ; cf. Max de janvier 2002 : « L'acte d'insérer son pénis entre les genoux du partenaire s'appelle la génuphallation. »
  • Jajamania, n.f. : idolâtrie populaire à l'adresse de Laurent Jalabert, dit « Jaja », coureur cycliste français, vainqueur de deux étapes du dernier tour de France, et détenteur du maillot à pois du meilleur grimpeur, TV2, le 5 août 2001.
  • Robbemania, n.f. engouement pour l'oeuvre littéraire de Robbe-Grillet ; cf. le Nouvel Observateur du 18 octobre 2001, François Reynaert parle de panthéanisation (?) et de Robbe-Mania.
  • Doillon, n.m., selon Albert Doillon, un doillon est un petit tonneau. 1,81 mètre, 108 kilos, 84 ans.

(Source : copié sur http://www.france-mail-forum.de/)

Doillon, le vieil homme et les mots (22/06/2002, Le Temps)

Venu accidentellement à la lexicographie, l'auteur du « Dico de la violence » et du « Dico du sport » (84 ans) aime le français vivant, c'est-à-dire familier, populaire, argotique.

Isabelle Martin, Samedi 22 Juin 2002, Le Temps

Albert Doillon, 84 ans, appartient à l'espèce des lexicographes individualistes qui collectionnent les mots par curiosité. Cet ancien administrateur colonial au Vietnam puis au Cameroun, qui a pratiqué dans sa jeunesse le lancer de poids et de javelot, s'ennuie quand il revient à Paris travailler au Ministère de la coopération. Un jour de vacances à Annecy, en 1964, c'est le déclic: « Ne me demandez pas pourquoi, raconte-t-il dans Libération, mais je me suis mis à ramasser des mots, des mots vivants, nouveaux, des mots qui ne figuraient dans aucun dictionnaire et que pourtant on pouvait entendre et lire, il suffisait d'ouvrir les oreilles, les dictionnaires existants me déplaisaient, ils consignaient une langue morte. » Ce qui l'intéresse, c'est ce qu'il appelle le français en liberté: la langue familière, populaire, argotique ainsi que les néologismes. Il fonde l'Association des amis du lexique français en liberté et un Bulletin d'études lexicographiques envoyé à tous ses membres, puis entreprend de publier des polycopiés thématiques connus de quelques initiés. Grâce à l'un d'eux, François Caradec (à qui est dédié son Dico de la violence), Fayard et son président Claude Durand créent spécialement pour lui la collection Les mots en liberté. Après les deux volumes qui l'inaugurent aujourd'hui, elle accueillera à la fin de l'année un très riche Dico du sexe, qui sera suivi du Dico de l'argent, du Dico de la santé et d'un Superdico en deux volumes répertoriant 10 000 mots nouveaux collectés entre 1966 et 2000. On peut cueillir les premiers fruits de cette longue récolte buissonnière mais méthodique en consultant l'original Dico de la violence : ses frontières mal définies lui valent de couvrir un vaste domaine, de l'incivilité au crime organisé. Le lexicographe est là pour verser au dossier sa moisson de mots rares, d'abasourdir (tuer) à zuter (embêter). Et d'expressions imagées, empruntées à divers vocabulaires : celui de la religion fournit « faire sa prière » (s'entraîner à dégainer très vite, dans l'argot policier), « ouvrir le tabernacle » (étriper) ou « mission » (expédition de pillage) ; celui de la musique comprend le célèbre violon, aujourd'hui en perte de vitesse, mais aussi la clarinette (pince-monseigneur), les flûtes (pistolets), la polka ou la java (correction), la danse ou la valse (volée de coups, raclée). Le lecteur va de mots connus en surprises: si le sens d'« avoir les abeilles » est à peu près clair (être énervé), il est plus difficile en revanche de deviner qu'« abreuvoir à mouches » signifie estafilade, plaie sanguinolente. En annexe, Albert Doillon propose un divertissement à sa façon avec un panorama de la violence verbale qui s'appuie sur ses vastes lectures. Parmi les injures, termes dépréciatifs, formules offensantes, il cite comme le comble du raffinement l'expression « terrine de gelée d'andouille » (1910) ; pour les jurons et imprécations, il nous apprend que Balzac usait de « nom d'un petit bonhomme », Victor Hugo de « ventre et boyaux » et Céline de « merde à Dieu ». Quant aux nombreux termes inamicaux (c'est un euphémisme!) visant divers métiers ou individus, on se contentera de citer le joli « tête d'endive ! » proféré par une Réunionnaise à l'adresse d'un Blanc (1998).

(Source : copié sur http://www.payot.ch/)

Doillon par Duneton...

Une vidéo de Claude Duneton racontant sa visite à Doillon existait (...ou gardez-moi de mes amis... ; voir aussi, sur le même air, la préface de Duneton à Argot.Doillon2010) ; elle a disparu. Lien mort : http://www.youtube.com/watch?v=ygEnEz__m6c (gb)

Évaluations faite par Doillon

Extraction automatique des évaluations de Doillon relevées dans la bibliographie des dictionnaires d'argot.

14 évaluations récupérées dans 14 pages (sur 1098 pages testées) 1,67 seconds Synthèse des évaluations faites par Doillon

  1. « Première source d'argot importante du XIXe siècle » (Doillon Argent)
  1. « Notations sérieuses, sans grandes suprises. » (Doillon Argent)
  1. « Petit dictionnaire précieux donnant un aperçu, bien documenté, des expressions d'aujourd'hui, dont la plupart ne sont pas dans les dictionnaires généraux. » (Doillon Argent)
  1. « apport déterminant qu'a été pour nous un ouvrage des plus réussis (...) Les mots de la médecine » (Doillon Sante).
  1. « Malgré l'ambition affichée par les auteurs, ne réussit pas à remplacer Esnault 1965, chez le même éditeur ; les données de notre grand argotiste sont passées au crible, triturées, laminées, de sorte qu'il en résulte quantité d'imprécisions et d'erreurs de détail. Le seul véritable mérite de l'ouvrage est la prise en compte de nombreuses citations d'écrivains, de littérateurs, ou de médias contemporains, d'ailleurs très souvent insuffisamment exploitées. Énormes lacunes dans les datations. L'édition de 1999 portant le titre de Dictionnaire de l'argot français et de ses origines remet un peu d'ordre dans la maison, notamment en ce qui concerne les dates. Le langage des jeunes reste nettement sous-représenté. » (Doillon Argent)
  1. « Particulièrement précieux » (Doillon Argent)
  1. « Particulièrement précieux » (Doillon Argent)
  1. « Particulièrement précieux » (Doillon Argent)
  1. « Cet ouvrage monumental [...] ratisse une bonne partie du XIXe siècle [...] il est beaucoup moins bien documenté en ce qui concerne les créations du français contemporain, en particulier de l'argot qui est presque complètement passé sous silence. De consultation malaisée, en raison de sa présentation par thèmes et de l'insuffisance de son index, se révèle très approximatif pour les datations. » (Doillon Argent)
  1. « De loin, le glossaire le plus complet sur l'immense vocabulaire, très composite, né dans la guerre des tranchées ; nombreuses premières attestations ou confirmations de l'argot populaire parisien. » (DoillonArgent).
  1. « Fourre-tout très inégal qui renferme quelques éléments inédits, pas toujours bien datés, et noyés dans un verbiage trop fréquent. » (Doillon Argent)
  1. « un petit ouvrage [...] au contenu très insuffisant comparé à l'ampleur du sujet, et l'auteur dilapide beaucoup trop d'esprit et d'énergie à faire des rapprochements entre des locutions qui n'ont probablement pas de liens entre elles. » (p. 10) [...] « Survol un peu rapide, habilement présenté de locutions relatives à l'argent, mais l'auteur qui reste flou quant aux datations a le tort, à notre avis, de vouloir trop prouver. Quelques erreurs de jugement. » (Doillon Argent)
  1. Doillon (Albert). Le dico de la violence écrit que l'édition de 1735 est « la meilleure édition, sinon la plus complète. Les éditions postérieures (notamment celle de 1786) n'ont plus rien voir avec l'auteur sans doute disparu vers 1750 » (Barsi 2003 parle d'un décès antérieur à 1735). Globalement le même avis chez Enckell 2004 et chez Barsi 2003. À l'inverse, YP écrit à propos des éditions 1786 et 1808 qu'elles « sont de beaucoup plus développées, et les plus recherchées ». (gb)
  1. « vaste compilation (plus de 13000 mots ou locutions), octobre 2002 ; résultat d'un choix personnel de l'auteur dans le vocabulaire des petits glossaires contemporains spécialisés, et pour les métiers non répertoriés jusqu'ici, résultats d'enquêtes linguistiques sur le tas, non datées, non localisées, ce qui ne garantit pas, de manière irréfutable, l'authenticité et l'actualité du “matériel” considérable accumulé. De place en place, des anachronismes surprenants. » (Doillon Argent)