La loi, les règles, ne servent à rien d'autre qu'à marquer la transgression. Le commandement « Tu ne tueras point » ou le tabou de l'inceste n'ont jamais empêché qui que ce soit de commettre des crimes mais ils désignent leurs transgresseurs comme se plaçant hors du corps social. Sans que cela n'implique nécessairement de punition !
On connait des sociétés qui ne disposent pas d'un pouvoir judiciaire, le transgresseur est uniquement l'objet d'une rébrobation, on évitera d'aller à la chasse avec lui, il aura du mal à trouver un conjoint, ça s'arrêtera là et, avec le temps, ça se tassera.
Il y a aussi le cas des transgresseurs qui sont déjà, par leurs fonctions, hors du corps social. C'est ainsi que Pharaon pouvait épouser sa sœur, c'est ainsi que quand George Bush a noyé l'Irak sous les bombes, le monde s'est contenté d'un timide « c'est pas bien » mais l'a laissé faire et, aujourd'hui, la chose est presque oubliée.
Je crois qu'il en est un peu de même dans ce débat. De l'avis même exprimé ici par Perkele et Castel, « en Avignon » est ressenti comme une marque de parisianisme : c'est bien une transgression, elle est sans doute fautive mais est-elle condamnable ?
À Nice, on dit couramment « les escaliers » (calque du nissard lu scala) là où les Parisiens disent « l'escalier ». Allez-vous nous en condamner ? Ne serait-ce pas plus simple de considérer qu'ainsi nous nous marquons comme des gens du Midi ?
Je veux bien qu'il y ait des règles, qu'il y ait un bon usage, mais ils ne font rien d'autre que définir des transgressions. Quand celles-ci se multiplient et se généralisent, les règles changent, les langues évoluent ...
Pour moi, l'important est plutôt de savoir si des constructions comme « en Avignon », « en Asnières » se répandent ou tombent en désuétude. Elles ont l'avantage d'éviter l'hiatus mais sont condamnées par les gardiens du sérail, qu'adviendra-t-il d'elles ? Je crois sage de laisser l'usage en décider. Certains trouvent cette attitude libertaire, ja la pense simplement démocratique.
Cordialement,
Dominique
Il n'y a pas de honte à préférer le bonheur. (A. Camus)