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forum abclf » Réflexions linguistiques » L'erreur de Saussure !

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Messages [ 1 701 à 1 750 sur 4 117 ]

1 701 Dernière modification par chrisor (20-06-2018 09:22:39)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

. Et pour moi, ces mots ont une partie de leur étymon en commun au niveau phonologique...

je suis d'accord avec cette affirmation. Mais cette partie commune /Ka/ est phonologique et non sémantique. Et /k/ a bien évolué en /ch/ en français. Ces mots n'ont a priori aucun sens commun et on ne peut pas dire qu'ils dérivent du même étymon.

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1 702 Dernière modification par chrisor (20-06-2018 10:36:44)

Re : L'erreur de Saussure !

Le mot cave français dérive du latin  classique cavus « creux » et n'a pas évolué en chave.
Le mot caverne est emprunté au latin classique caverna « grotte » et n'a pas évolué en chaverne. Le Le mot catacombe n'est pas devenu chatacombe.
Les mots vocal, capter de captare, capital de capitalis, sarcasme de sarcasmus, délicat de delicatus   ont conservé leur /k/, etc.

Donc le changement de /k/ latin en /ch/ français n'a rien de systématique.

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1 703 Dernière modification par oliglesias (20-06-2018 10:23:33)

Re : L'erreur de Saussure !

Bon, je ne suis pas spécialiste de phonétique historique française, ni d'ailleurs d'étymologie française, mais...

CAVE

TLFi a écrit:

Empr. au lat. cava « fossé » subst. fém. (vies. ds TLL s.v., 718, 45) issu de cava, -orum subst. neutre plur. de cavus (cave1*) « trou, partie creuse ».

"Emprunté au latin" veut bien dire ce que ça veut dire... le mot a été emprunté et comme tout emprunt, si le mot est emprunté après la période pendant laquelle la palatalisation de /ka/ s'est produite, alors il ne connaitra pas ce changement... logique. On vous a déjà dit qu'il y avait les mots populaires et les mots savants et qu'ils ne fonctionnent pas de la même manière.

CAVERNE

TLFi a écrit:

Empr. au lat. class. caverna « grotte » employé aussi comme terme d'anatomie.

Idem

CATACOMBE

TLFi a écrit:

Empr. au lat. chrét. catacumbae « cimetière souterrain », nom donné primitivement à un cimetière situé non loin de la Voie Appienne, composé du gr. κ α τ α ́ « en bas » et du lat. chrét. tumba « tombe »

Idem

VOCAL

TLFi a écrit:

empr. au lat. médiév. vocales « religieux ayant le droit de vote dans une communauté » (Constitut. Fratrum Praedicat. col. 80 ds Du Cange), subst. de vocalis.

Idem.
D'ailleurs à propos de vocal, il existe un doublet (si vous ne savez pas ce que c'est, lisez le fil d'éponymie à ce sujet) provenant de "vocalis": voyelle et vocal.
"Voyelle" est le mot populaire issu de ce mot latin. Vous allez me dire : "pourquoi dans le mot populaire /ka/ n'a pas évolué en "ch"?" Et je veux bien vous répondre (Lévine me corrigera si je dis des bêtises, je vais vous répondre en fonction de ce que je sais de phonétique historique espagnole et donc de ce qui d'après moi a dû se passer en français):
/-k-/ en position intervocalique s'affaiblit: il se sonorise (> /-g/) et ensuite continue de s'affaiblir (c'est pourquoi aujourd'hui il n'y a plus de consonne). La sonorisation s'est produite avant la palatalisation de /ka/. Si cette palatalisation s'est produite dans "cloche" c'est parce qu'en latin classique on avait une géminée (consonne double) /k:/ qui à un moment donné s'est simplifiée en un phonème simple /k/ mais après le changement dont je parlais avant, la sonorisation des occlusives intervocaliques. Donc, une fois que la consonne double s'est simplifiée, elle ne connaitra pas la sonorisation et donc, pourra connaitre la palatalisation de /ka/.

J'ai bon Lévine ?

Bref, tout ça pour dire que la phonétique historique est quelque chose de compliqué peut-être, mais je vous assure que, comme le disait Lévine, elle n'essaie pas de prouver quoi que ce soit (contrairement à vous) et donc ne fait que tenter d'expliquer des changements en observant ce qui se passe... C'est quelque chose de compliqué que vous ne maitrisez pas (et c'est normal puisque ce n'est absolument pas votre domaine), mais malgré tout vous voulez en plus de tout jeter de la linguistique saussurienne, tout jeter de la phonétique historique et ce, sans la maitriser car vous ne la maitrisez absolument pas si vous ne comprenez pas qu'un emprunt est différent d'un mot ayant été utilisé sans discontinuer dans une aire géographique.

1 704

Re : L'erreur de Saussure !

En deux mots (et entre deux copies !!!)

1° Je n'ai jamais dit que vache et chat ou je ne sais quoi avaient une racine i-e commune, ni un étymon latin commun.
2° La séquence /ka/ qu'ils partagent n'est pas nécessairement lexicalement signifiante.
3° Elle ne vaut que pour le latin ; je contrôlerai, mais il est fort possible que ce /ka/ latin ait des origines i-e différentes.
4° Le passage de /ka/ à /cha/ ne vaut que pour les dérivés populaires, par transformation inconsciente du mot latin à l'époque du bas-latin ou du pré-roman dans la bouche des locuteurs d'une aire géographique donnée.
5° La systématisation n'intervient que dans la corrélation des changements phonétiques, non dans la dérivation au sens large. Je vous ai dit qu'il y avait aussi des dérivés savants, c'est à dire des mots forgés consciemment, par un individu, on dit souvent à partir de la Renaissance, mais il y en de nombreux au MA, par calque. le mot cave est de ceux-là.
Si je prends un mot en ca-, capillus, "cheveu", je peux très bien m'amuser à former le mot *capille, je n'ai plus à lui appliquer des traitements phonétiques anciens.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 705

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

En deux mots (et entre deux copies !!!)


4° Le passage de /ka/ à /cha/ ne vaut que pour les dérivés populaires, par transformation inconsciente du mot latin à l'époque du bas-latin ou du pré-roman dans la bouche des locuteurs d'une aire géographique donnée.
5° La systématisation n'intervient que dans la corrélation des changements phonétiques, non dans la dérivation au sens large. Je vous ai dit qu'il y avait aussi des dérivés savants, c'est à dire des mots forgés consciemment, par un individu, on dit souvent à partir de la Renaissance, mais il y en de nombreux au MA, par calque. le mot cave est de ceux-là.
Si je prends un mot en ca-, capillus, "cheveu", je peux très bien m'amuser à former le mot *capille, je n'ai plus à lui appliquer des traitements phonétiques anciens.

Mais je suis parfaitement d'accord avec vous. Merci d'attribuer à l'inconscient le changement /k/ - /ch/.

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1 706

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Ce qui est intéressant avec "cloche" c'est que le français a préféré un terme qui proviendrait du gaulois

Le TLFI dit « apporté sur le continent par les moines irlandais ».

Du b. lat. clocca « id. » (ca 550, domaine angl. ds Latham; cf. 690, Adamnanus [abbé d'Iona en Écosse], Vita Columbae, d'apr. FEW t. 2, p. 792) apporté sur le continent par les moines irlandais.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

1 707

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Vous ne comprenez pas qu'un emprunt est différent d'un mot ayant été utilisé sans discontinuer dans une aire géographique, alors il ne connaitra pas ce changement.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Je vous assure que j'ai très bien compris.

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1 708

Re : L'erreur de Saussure !

Merci pour la précision Alco... Je ne me souviens plus où j'avais lu cette histoire de "gaulois"...
Bon, sur le fond, ça ne change pas ce que je voulais dire.

chrisor a écrit:

Merci d'attribuer à l'inconscient le changement /k/ - /ch/.

Non, je ne crois pas que Lévine ait voulu attribuer à l'inconscient ce changement. De mon côté, j'avais plutôt compris sa phrase "par transformation inconsciente du mot latin" comme le fait que les locuteurs n'ont pas conscience, ne se rendent pas compte que des changements se produisent en synchronie et qu'ils sont source de ces changements. Il ne dit pas que c'est l'inconscient qui provoque ces changements mais que ces changements se produisent sans que nous nous en rendions compte. Pour moi, c'est très différent à ce que vous voulez dire.

Les raisons qui expliquent les changements phonétiques sont nombreuses : il y a deux grandes tendances l'affaiblissement et le renforcement articulatoires. Et de là, découlent les changements phonétiques. On peut aussi trouver des explications extralinguistiques (influences d'autres langues par exemple). Autrement dit, la chose est complexe, très complexe. Vous, vous cherchez à simplifier les choses en disant que c'est l'inconscient qui dicte tout. Vous êtes le Freud de la linguistique big_smile

1 709

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Je vous assure que j'ai très bien compris.

Non, vous n'aviez pas compris puisqu'on vous avait déjà dit que ces changements phonétiques systématiques ne se produisent pas lorsque les mots sont empruntés plus tardivement. Votre argument disant "oui, mais ces changements phonétiques ne sont pas systématiques parce que dans ces mots ils ne se produisent pas" alors que "ces mots" que vous citiez sont TOUS des emprunts montre manifestement que vous n'aviez pas compris... ou alors vous avez encore écrit trop vite...

1 710

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Mais je suis parfaitement d'accord avec vous. Merci d'attribuer à l'inconscient le changement /k/ - /ch/

Ce changement est tellement inconscient que, vraisemblablement, les locuteurs ont eu, au moins un temps, le sentiment de prononcer /k/ alors qu'ils prononçaient /tch/ ou /ch/ tant l'évolution a été graduelle, bien que globalement assez rapide.

Vous n'avez pas à me dire merci, ce n'est pas une concession ! Encore une fois, ni la phonétique ni la morphologie historiques ne soutiennent de thèse particulière.

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1 711

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Ce changement est tellement inconscient que, vraisemblablement, les locuteurs ont eu, au moins un temps, le sentiment de prononcer /k/ alors qu'ils prononçaient /tch/ ou /ch/ tant l'évolution a été graduelle, bien que globalement assez rapide.

Pour appuyer cela, j'ai assisté un jour à une communication en phonétique acoustique en espagnol où on montrait clairement, spectrogramme à l'appui, que quand quelqu'un prononce "capa" par exemple, le /p/ phonème sourd est en réalité réalisé avec des caractéristiques d'une consonne sonore puisqu'en position intervocalique. Nous n'en avons aucune conscience quand nous parlons, comme les romains ne devaient pas en avoir conscience avant que la sonorisation ne soit complète.

Tout comme aujourd'hui (mais là, c'est un peu plus flagrant), pour reprendre votre exemple à la page précédente, certains locuteurs qui prononcent "moitié" avec une affriquée palatale [t͡ʃ] "moitché" n'en ont probablement pas du tout conscience.

Mais être inconscient du changement (ne pas en être conscient) est-ce synonyme de "c'est l'inconscient qui produit/provoque... le changement" ? Vous savez, chrisor, ce que j'en pense...

1 712

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias, je vous répondrai en ce qui concerne le mot voyelle.

D'autre part, ne pourrait-on pas envisager un tutoiement ? Je l'avais proposé à Ylou, mais elle n'a pas dû le remarquer. Il faut dire qu'il pleut des messages à certains moments !

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 713

Re : L'erreur de Saussure !

Oh moi tu sais, je préfère largement le tutoiement... parfois je m'y perds puisque je crois que certains apprécient peu cela ici... Donc, oui, on peut se tutoyer et j'attends ta réponse sur "voyelle" avec impatience smile

1 714

Re : L'erreur de Saussure !

Je ne suis pas chez moi à l'heure actuelle, et il faut que je contrôle dans mon Bourciez avant de dire n'importe quoi.

D'après l'ancien français voieul, je pense que c'est une forme atypique car le yod n'apparaît que si la voyelle précédant /ka/ est i ou e.

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1 715 Dernière modification par chrisor (20-06-2018 14:44:39)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Mais être inconscient du changement (ne pas en être conscient) est-ce synonyme de "c'est l'inconscient qui produit/provoque... le changement" ? Vous savez, chrisor, ce que j'en pense...

Le verbe clocher dans le sens de boiter n'a pas une étymologie claire :
CNRTL : "Du latin vulg. *cloppicare « id. », dér. de cloppus « boiteux » (v. clopin-clopant) qui remplaça le lat. claudus; rapproché par étymol. pop. de cloche1* (v. FEW t. 2, p. 794)".

Après avoir effectué la recherche du plus grand diviseur de sens de plus de 250 mots de la langue française, il est devenu évident que ce ''codon'' cl évoque soit la notion de fermeture soit la notion d'un bruit retentissant. Les mots ''claudus, cloppicare, cloppus, clopin-clopant et clocher''  comportent tous ce même codon parfois associé au codon ''op'' : saut/écart. L'inconscient des créateurs de ces mots est à l'origine de la répétition de ce codon dans ces mots quelque soit la date de leur apparition pour signifier soit le bruit retentissant de la boiterie soit peut-être indiquer que les boiteux ferment la marche.
Le verbe boiter, it-ot-b, est un rébus qui indique le mouvement (it) de saut (ot) du pied (b).
Le mot argotique ''clop'' a une origine inconnue (FEW t. 21, p. 501)) selon le CNRTL .
Les deux codons ''op'' et ''cl'' en font un rébus : écart (des lèvres) et fermeture (des lèvres), une association de schèmes dynamiques chargé de figurer cette action de ''cloper''.

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1 716

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias, ce que tu as dit au sujet du traitement o (et u) + ca est parfaitement juste, si je puis me permettre de juger. On a bien locare > loer > louer ; jocare > joer > jouer ; carruca > charue > charrue (dans lequel on constate les deux traitements différents de la séquence ca-), etc...

On devrait donc avoir vocalem > *voel, or on a voieul et en FM voyelle. Bourciez signale simplement que "la forme [...] de voyelle (vocalem) n'est pas populaire" 5E. et J. Bourciez, Phonétique française, éd. Klincksieck § 123 2° Rem 1).

Les dicos étymologiques parlent de "forme refaite de l'AF voieul" sans plus de précision.

J'en conclus donc que "voyelle" est une forme refaite sur "voieul" qui, elle-même, est une forme refaite sur vois (voix) smile.

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1 717 Dernière modification par chrisor (20-06-2018 17:28:46)

Re : L'erreur de Saussure !

Le mot secouer, de l'ancien français seco(u)rre dérivant lui même du latin succutere, semble avoir subi la même évolution phonétique, non ?  et il ne s'agit pas de /ca/.
De même nouer dérive du latin nodare et cette fois c'est le d qui disparait.

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1 718 Dernière modification par oliglesias (20-06-2018 17:45:45)

Re : L'erreur de Saussure !

(message effacé, j'avais écrit trop vite et dit une bêtise smile )

Je disais que je pensais qu'en français les occlusives sonores intervocaliques latines devaient probablement finir par tomber systématiquement comme elles le faisaient en espagnol... sauf qu'en espagnol ce n'est pas systématique. Mais peut-être qu'en français oui, l'évolution ayant été plus rapide.

1 719

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

(message effacé, j'avais écrit trop vite et dit une bêtise smile

Vous me rassurez, je me sens moins seul !

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1 720 Dernière modification par chrisor (20-06-2018 18:35:23)

Re : L'erreur de Saussure !

Dans le mot preux issu de l'adjectif  latin vulgaire prode on assiste à la même disparition de l'occlusive intervocalique. Idem pour clou issu du latin classique clavus avec une consonne fricative.

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1 721 Dernière modification par Lévine (20-06-2018 22:08:02)

Re : L'erreur de Saussure !

Pour ce qui est des occlusives sonores intervocaliques, elles disparaissent pratiquement toujours sauf le /b/, qui passe à /v/ dans un environnement vocalique autre que /o/ et /u/.
faba > fève ; caballum > cheval ; cubare > couver ; debere > devoir, mais *debutum > deü > dû ; *tabonem > taon, etc...

________________________
chrisor :
- La racine est l'élément lexical situé le plus haut dans la chaîne de la reconstruction. Le niveau atteint est celui de l'indo-européen, langue ou plus exactement faisceau de langues que l'on estime être à l'origine de toutes les langues entre lesquelles la grammaire comparée a décelé des ressemblances depuis au moins le XVIIIème siècle.
- La racine ne comporte pas de préfixe.
- A cette racine, en principe trilitère (consonne - voyelle e/o - consonne), mais il existe quelques racines quadrilitères, s'adjoignent souvent un suffixe primaire et un ou plusieurs suffixes secondaires, ces derniers apparaissant au niveau indo-européen ou dans les états précédant les langues attestées. Une racine et ses suffixes constituent un thème. Le suffixe primaire permet de neutraliser les nombreuses homonymies, les autres affinent ou modalisent le sens général de la racine.
- Enfin, des désinences apparaissent au niveau indo-européen comme au niveau des langues attestées pour donner un mot. Dans tout mot, tous ces éléments ne sont pas forcément présents, et il existe des "mots racines".
- A l'époque historique, ce qu'on appelle le radical n'est autre que la forme concrète prise dans telle langue par la racine et ses suffixes amalgamés.

Ex : *bher (bh compte pour une seule consonne), "idée de porter" > fero en latin, φέρω en grec (degré -e), брати en vx-slave (брать en russe moderne) (degré réduit), etc...

Ex gen-H3 (H3 graphie une laryngale spéciale) "idée de connaître" > (g)nosco en latin, γνῶναι en grec, знать en russe.

Ex gen-H1, "idée de naître" > genus en latin, > γένος en grec,

Ex gen - w, "idée de courber" > genu (genou) en latin, γόνυ en grec, гнуть (tordre) en russe.

Ces trois racines homonymes sont distinguées par le suffixe primaire.

Exemple d'une formation complète :
lei -kw - o - nti racine + suffixe primaire = "idée de laisser" + suffixe secondaire de formation thématique de présent + désinence de 3ème personne du pluriel > (re)linquunt en latin, λείπουσι en grec,  je ne trouve rien en russe, j'aurais dû choisir un autre exemple !!

J'espère que c'est à peu près clair.

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1 722

Re : L'erreur de Saussure !

Le mots cave, cavité, caverne dérivent du latin cava, caverna et cavitas. Tous ces mots comportent la séquence signifiante ''cav'' avec ''av'' vide, espace et c : chaleur, coupure, union.

La cave peut être perçue comme un ''vide de chaleur'' comme la caverne. L'étymologie officielle cite t-elle une racine p.i.e. pour ces 3 mots ?

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1 723

Re : L'erreur de Saussure !

C'est la racine *kaw, variante de *kew, "cavité, trou".
*kew-l est à l'origine de l'anglais hole, je crois.

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1 724

Re : L'erreur de Saussure !

"hole" se rattache à la famille i.-e. kel- de cellier, pas à celle, keue-, de cave.
https://www.etymonline.com/word/*kel-
https://www.etymonline.com/word/*keue-
http://projetbabel.org/mots/index.php?p=celer

1 725 Dernière modification par Lévine (21-06-2018 08:10:00)

Re : L'erreur de Saussure !

OK, merci ! J'avais bien dit "je crois"...

On a donc le degré /o/ de la racine : *kol ?

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1 726 Dernière modification par chrisor (26-06-2018 09:34:13)

Re : L'erreur de Saussure !

Si cave se rapporte à la racine i.e. keue- cela ne présente que peu d'intérêt en synchronie.
L'important c'est la notion de vide/espace évoquée par les codons Voyelle-Consonne avec la consonne v dont le graphe est un schème simplifié d'un entonnoir dans un mouvement de haut en bas et celui d'une ouverture spatiale (voir) dans un mouvement de bas en haut.  Dans les phrases : Avaler un verre de vin avec avidité / renverser un verre qui se vide dans l'évier, les suites VC: av, ev marquent un mouvement intérieur alors que les suites CV:  ve, vi marquent un mouvement extérieur.

La motivation des mots est étayée par leur articulation comme certaines séquences onomatopéiques dites articulatoires tel ''gl''.

Lévine a écrit :

"La racine est l'élément lexical situé le plus haut dans la chaîne de la reconstruction. Le niveau atteint est celui de l'indo-européen."
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Cette hypothèse de racines communes repose sur le mot comme unité de sens, un mot que l'on réduit à une suite CVC en général que l'on considère comme la racine. Meritt Ruhlen dans son livre ''L'origine des langues'' raisonne de la même manière en tentant de reconstituer des mots premiers. Mais ce ne sont pas des mots qu'il faut rechercher mais des schèmes ou des ''émotèmes'' formés de 1 à 2 lettres avec des voyelles qui en modifient le sens. Dans les langues sémitiques on parle de racines trilitères que Bohas réduit à des racines bilitères avec la notion de trait phonétique. De même le linguiste P. Guiraud analyse les  racines *TIK, *TAK, *TOK  qui pour lui expriment la notion de coup. Mais c'est uniquement la consonne t qui porte ce sens (IK = obstacle, AK = action, OC = choc).
Ce découpage des racines i.E repose encore sur l'arbitraire et il n'existe aucune motivation logique pour cette fragmentation CVC en racines. Encore un concept arbitraire transformé en dogme que personne n'ose remettre en cause.

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1 727

Re : L'erreur de Saussure !

Michel Launay  a écrit :

" Le signe, donc, serait arbitraire. C’est la Science Moderne qui l’affirme. Non pas en tant que science, d’ailleurs (il lui faudrait alors démontrer cette affirmation autrement que par quelques paraboles douteuses), mais plutôt en tant qu’Église et que Discours Dominant. Certes, une fois posé que le signe est arbitraire, on peut se demander comment il se fait que les linguistes trouvent encore quelque chose à en dire, quelle cohérence ils peuvent encore y chercher. C’est sans doute que le Dogme est aussi un Mystère. Quelques grands noms de la linguistique ont bien essayé de montrer que le raisonnement sur lequel se fondait le dogme n’était qu’un nœud de contradictions. Surpris par la violence des tempêtes qu’ils ont alors déchaînées, ils ont sans doute préféré renoncer, ou se contenter ensuite de signaler par allusion que quelque chose, là, continuait d’insister. D’autres voix, périodiquement, essaient de se faire entendre. Il ne peut s’agir, bien entendu, que d’hérétiques ou de rêveurs qui parlent en dehors de la Science. La « rêverie cratylienne », l’expression le dit assez, ne sera plus désormais acceptable que comme rêverie. Dont Genette (1976) pourra tout au plus s’émouvoir ou sourire."

Mais je ne me sens ni hérétique ni rêveur. C'est Saussure qui ne vivait pas sur terre et niait la biologie.

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1 728

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Ce découpage des racines i.E repose encore sur l'arbitraire et il n'existe aucune motivation logique pour cette fragmentation CVC en racines. Encore un concept arbitraire transformé en dogme que personne n'ose remettre en cause.


On ne pose pas la racine, on remonte à elle. Où est l'arbitraire (dans le sens où vous entendez le mot) ???
Plus haut que la racine, il y a sans doute des cimes inexplorées, mais le linguiste s'arrête là où la spéculation commence. Ni la sémantique, ni la pragmatique modernes ne s'aventurent sur le terrain incertain d'une relation nécessaire entre le signifiant et le signifié. Vous pouvez nous donner autant de contre-exemples, ce ne seront que des cas particuliers qui nous interdisent de formuler une loi générale.
Le linguiste n'oublie pas non plus que son objet est l'analyse des faits de langues et non l'étude du langage en soi. Elle n'étudie ni l'apparition du langage chez l'Homme, ni l'anatomie du cerveau, encore moins ses pathologies, et ne confond pas son objet avec celui de l'ethnologue.

Il serait plus simple et plus honnête de présenter votre théorie de la manière suivante :
- Dieu a créé les choses en les nommant (cf. Genèse) ;
- Il a transmis le langage à l'Homme, seul être fait à son image ;
- Mais celui-ci l'a altéré par sa faute (cf la Tour de Babel) ;
- Il en reste cependant des traces présentes dans les diverses langues qui sont autant d'avatars de la langue universelle primitive.

Tenez, ce petit poème vous aidera à espérer :

Babel la ville

Tu es belle et insensée,   
ô ville aux pierres fleuries.   
Ce soir d'été, va, cours, élève-toi !   
Le désert est si calme et si pur ;   
vole jusqu'au vertige !   
Dans le ciel posé sur toi comme une arche,   
une colombe t'a vue.   
Passe, colombe, passez, oiseaux de bel augure !   
Ô pierre vivante et digne,   
sur ton beau piédestal,
unissons-nous, vivons ! 

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1 729 Dernière modification par chrisor (01-07-2018 23:01:15)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

On ne pose pas la racine, on remonte à elle.

L'expression ''remonter à la racine'' me fait toujours sourire  comme si les étymologistes avaient la tête à l'envers ! Remonter à la source me semble plus judicieux ou alors il faut écrire descendre à la racine. Mais la linguistique officielle n'est pas à une approximation près. Comme vous l'avez précédemment  précisé les racines p.i.e. ont en général la structure CVC ; Je regrette mais ce découpage est arbitraire parce que les linguistes imaginent toujours que le mot est l'unité de sens la plus petite et imaginent que leurs racines est la partie essentielle de ce mot, ce qui manifestement est faux: par exemple les racines *TIK, *TAK, *TOK, *TEK ne sont pas des unités de sens. Les unités de sens sont la consonne t et les doublets de la consonne K avec toute la gamme des voyelles.

   Merritt Ruhlen a avancé la thèse d'une proto-langue mère originelle,  commune à toutes les superfamilles, qui aurait vécu vers 50 000 ans avant notre ère. Selon lui, le premier mot prononcé par l'homme serait la monosyllabe tik («doigt») ou aq'wa («eau»), appartenant à 32 familles de langues et proto-langues reconnues par la majorité des linguistes. Ces linguistes ignorent l'intervention de l'inconscient dans la formation des mots tout comme les auteurs de la Genèse.
Tik n'est ni un mot ni une véritable racine. Ils se contentent de 30% de mots qui répondent à leur théorie pour l'estimer juste.

Le mot doigt français dont la source latine est digitus n'a que peu à voir avec *TIK. Ce mode de raisonnement est aberrant car le mot est un rébus littéral chargé de dépeindre le référent par un ou deux caractères saillants.  La consonne t évoque le coup, la couverture et la terre. La consonne d la direction, la séparation et dieu.
Ce n'est pas une racine à la structure arbitraire qu'il faut rechercher mais les concepts inconscients reliés à un couple de phonèmes et aux phonèmes uniques intercalés. 



  Non seulement on peut se demander si les ressemblances relevées par Ruhlen sont dues ou non au hasard, mais on met en doute la capacité des sons humains à se maintenir sur des dizaines de milliers d'années. Malgré tout, nombreux sont ceux qui reconnaissent au moins à Merritt Ruhlen le mérite d'avoir raison sur le fond: toutes les langues pourraient avoir une source unique, sauf que nous n'en savons strictement rien. L'origine des langues reste toujours une énigme pour la science.


Lévine a écrit:

Ni la sémantique, ni la pragmatique modernes ne s'aventurent sur le terrain incertain d'une relation nécessaire entre le signifiant et le signifié. Vous pouvez nous donner autant de contre-exemples, ce ne seront que des cas particuliers qui nous interdisent de formuler une loi générale.

Si vous relisez mes messages sur le codon ''cl'' vous remarquerez que l'ensemble du lexique français à été analysé et tous les mots ne renvoient qu'aux deux notions de fermeture /retentissement. Ce ne sont pas des cas particuliers contrairement à vos affirmations gratuites. Mais comment convaincre quelqu'un qui fait la sourde oreille et refuse de remettre en cause le dogme de l'arbitraire ? Le signifiant qu'il concerne le mot ou le morphème ou la racine n'a pas pour raison d'être de représenter l'ensemble des caractéristiques du référent mais seulement une ou deux selon la loi pars pro toto du cerveau droit. Le mot ''arbre'' désigne le référent arbre mais uniquement par la ligne brisée  (br) de ses branches et par son sommet prééminent (ar). Penser autrement relève de la croyance au dogme saussurien qui n'est qu'une illusion.Le mot n'est JAMAIS arbitraire il est construit d'unités motivées.

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !

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1 730 Dernière modification par oliglesias (02-07-2018 11:24:11)

Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Le mot n'est JAMAIS arbitraire il est construit d'unités motivées.

Amen.

Vous parlez de dogme saussurien et faites la même bêtise que lui à savoir dire que le mot n'est jamais quelque chose ou qu'il est toujours quelque chose.
Je ne suis pas adepte du dogme saussurien : pour moi le mot n'est pas du tout TOUJOURS arbitraire.
Et je ne serai JAMAIS adepte du vôtre : pour moi le mot n'est pas du tout TOUJOURS motivé.

Et pour revenir à votre long message :

- vous recommencez avec votre histoire que selon les linguistes la plus petite unité de sens est le mot et ça m'énerve de lire cela constamment dans vos écrits. Si vous voulez schématiser pour vos lecteurs soit, mais ici, vous pourriez éviter de dire ces bêtises.

- ne pas voir de choses en commun dans une racine *TIK et le début du mot DIGITUS en latin c'est soit être aveugle, soit de mauvaise foi ou alors ne rien connaitre à la phonétique. *TIK et DIG- sont identiques phonétiquement et les consonnes ne diffèrent que par leur caractéristique de voisement, mais on a bien:
1) une occlusive dento-alvéolaire
2) une voyelle palatale fermée
3) une occlusive vélaire.

Si aujourd'hui, "doigt" n'a plus grand chose à voir (mis à part le maintien après des millénaires de la dento-alvéolaire) c'est précisément parce que les signifiants voient leurs caractéristiques phonétiques évoluer en respectant (la plupart du temps) des règles (systématiques). Si on a perdu deux syllabes en français ici, c'est pour deux raisons :
1) l'affaiblissement progressif des consonnes intervocaliques.
2) la perte de la voyelle post-tonique.
(EDIT: 3) j'ajoute une troisième raison : l'apocope de la voyelle finale)

Et vous n'êtes toujours pas parvenu à me prouver le contraire alors que la phonétique historique, elle, en cherchant les points communs des différentes évolutions phonétiques, a réussi à me convaincre qu'il y a bien des tendances et même des "lois" phonétiques qui expliquent ces évolutions phonétiques. Evolutions dont les locuteurs ne sont pas conscients (dans la synchronie) mais qui n'ont rien à voir avec une manifestation de leur inconscient (individuel ou collectif d'ailleurs ?).

1 731

Re : L'erreur de Saussure !

Et que faites-vous des langues dans lesquelles les consonnes, les groupes de consonnes et les voyelles se modifient non en fonction de leur évolution historique, mais du fait des sons qui les environnent ? On appelle ces phénomènes mutations consonantiques ou harmonie vocalique. Les usagers de ces langues n'ont vraiment pas de chance : ils sont exclus de vos théories, puisque certains de leurs "codons" se transforment ou disparaissent en fonction de leur voisinage...

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 732 Dernière modification par chrisor (03-07-2018 00:32:57)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

- ne pas voir de choses en commun dans une racine *TIK et le début du mot DIGITUS en latin c'est soit être aveugle, soit de mauvaise foi ou alors ne rien connaitre à la phonétique. *TIK et DIG- sont identiques phonétiquement et les consonnes ne diffèrent que par leur caractéristique de voisement.. de l'occlusive dento-alvéolaire...
(...) il y a bien des tendances et même des "lois" phonétiques qui expliquent ces évolutions phonétiques. Evolutions dont les locuteurs ne sont pas conscients (dans la synchronie) mais qui nont rien à voir avec une manifestation de leur inconscient (individuel ou collectif d'ailleurs ?).

Je ne réfute pas les lois phonétiques qui expliquent l'évolution diachronique des signifiants, mais en synchronie les occlusives dento-alvéolaire /d/ et /t/  ont beau ne différer que par leur voisement, elles ne ''codent'' pas du tout pour les mêmes sens: date/tâte, dette/tête, dôme/tome, du/tu,  doute/toute, etc...   Si vous acceptez la possibilité d'une motivation submorphémique vous ne pouvez pas nier que ces consonnes occlusives dento-alvéolaires ne peuvent en aucun cas renvoyer à des sens identiques dans ces quasi  ''homophones''.

Vous écrivez qu'aujourd'hui "doigt" n'a plus grand chose à voir (mis à part le maintien après des millénaires de la dento-alvéolaire) c'est précisément parce que les signifiants voient leurs caractéristiques phonétiques évoluer en respectant (la plupart du temps) des règles (systématiques).

Vous raisonnez en diachronie avec l'évolution du son et je raisonne surtout en synchronie avec l'évolution du sens. Pour moi le signifiant ''tik'' est à rapprocher de ''tact'' et de '' toucher'' mais pas du ''doigt" français actuel. L'évolution phonétique du latin digitus au français doigt est pour vous caractérisée par une perte de voyelles ( voyelle post-tonique + apocope de la voyelle finale), alors que pour moi l'orthographe au contraire apporte plus d'information sémantique.: doigt = it, ig, ot, og, oi, d avec les notions de mouvement/fixation préexistante dans digitus, une commande cérébrale avec og, la notion de saut/ôter avec ot absente de digitus l'émotion crainte/admiration avec oi  le passage de l'un à l'autre et la direction avec d que l'on retrouve dans le pointer de l'index. L'inconscient du scripteur ajoute du sens au message inconscient du locuteur.

Phonétiquement l'évolution de digitus à doigt se caractérise par une perte vocalique mais l'inconscient de ceux qui ont établi l'orthographie de doigt a enrichi le signifiant littéral.  En aucun cas en synchronie le sens de la consonne t pourrait remplacer le sens de la consonne d. Le changement de t à d s'est réalisé en synchronie et la modification du voisement n'est pas innocente sémantiquement.
Derrière, sous ou avec l'évolution phonétique se réalise une évolution sémantique phonétique ET graphique plus récemment. L'une et l'autre ne sont pas incompatibles.
Du digitus latin le français doigt et l'italien dito ont conservé le codon it (reconstitué  graphiquement en français )  et les langues anglo-saxonnes avec finger ou Finger le codon ig . Le passage de l'occlusive d à la fricative f anglo-saxonne s'explique t-il par une loi phonétique ?

Il existe deux systèmes linguistiques  différents aux unités conditionnées :
- le système de la langue consciente  de l'hémisphère cérébral gauche dont les unités sont les mots, des mots acquis préfabriqués  avec un lien signifiant global / signifié qui donne l'illusion de l'arbitraire.
- le système de la langue de l'inconscient avec des codons reliés essentiellement aux caractéristiques géométriques  et émotives des référents qui ont été "incarnés" par le biais d'onomatopées imitatives dont le matériau a servi de briques.

Les mots du cerveau gauche ont été préfabriqués par le cerveau droit à partir de codons inconscients; ils ne sont pas nés par génération spontanée sans motivation.

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1 733 Dernière modification par chrisor (03-07-2018 08:39:06)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Et que faites-vous des langues dans lesquelles les consonnes, les groupes de consonnes et les voyelles se modifient non en fonction de leur évolution historique, mais du fait des sons qui les environnent ? On appelle ces phénomènes mutations consonantiques ou harmonie vocalique. Les usagers de ces langues n'ont vraiment pas de chance : ils sont exclus de vos théories, puisque certains de leurs "codons" se transforment ou disparaissent en fonction de leur voisinage...

Je ne connais pas ces langues mais si les codons se modifient avec leur entourage ce ne sont plus pour moi les mêmes codons et le sens doit être modifié.  Les désinences de genre en français - telle celle de séducteur/séductrice  ne sont pas immotivées.  Le codon  ''tr', qui inconsciemment évoque la déviation du droit chemin souvent colorée de l'émotion peur,  apporte une notion péjorative pour le féminin par rapport au masculin. Entre le Casanova séducteur et l'Eve séductrice je ne pense pas que la désinence de genre soit psychologiquement neutre !


Il est certain que si l'on accepte le dogme de l'arbitraire du signe verbal cette variation ne sera qu'une désinence de genre. Pour moi dans cette affaire la langue française est misogyne.

Les désinences verbales ne sont pas que des éléments conjugaison: les subjonctifs d'aller,  valoir ou falloir avec une désinence  ''aille'', une séquence signifiante qui marque le risque de douleur, sont  en accord avec le doute et l'incertitude exprimés par le subjonctif. La désinence -ache de savoir évoque une action ''ac'' qui peut représenter un mouvement dangereux ou une tentative de couper l'hostilité.  Rien n'est immotivé. le temps présent "an'" est inscrit dans le participe présent, le temps passé ''codé'' par la lettre u est inscrit dans des verbes du troisième groupe : perdu, eu, voulu, foutu ...

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1 734 Dernière modification par Lévine (03-07-2018 09:21:02)

Re : L'erreur de Saussure !

"Je ne connais pas ces langues mais si les codons se modifient avec leur entourage ce ne sont plus pour moi les mêmes codons et le sens doit être modifié."

Je faisais allusion à certaines langues finno-ougriennes.
En finnois, un chrisor ne pourrait pas s'interroger sur le sens du groupe uk ou luk ou lk dans le radical luke- du verbe lukea, "lire", pour la bonne raison que que ce k est appelé à disparaître à chaque fois que la dernière syllabe sera fermée.
Ainsi, si je veux dire "je lis", je dois ajouter -n à luke-, mais du fait que je ferme la syllabe, *luken devient automatiquement luen.
De même "tu lis" = luke- + -t >*luket > luet.
Par contre, "il ou elle lit" = luke + e > lukee : miracle, le -k réapparaît parce que la syllabe reste ouverte.

Va-t-on prétendre ici que le radical change de sens au cours de sa conjugaison sous prétexte qu'il se modifie ?   

Je profite de cette petite leçon pour vous rappeler, comme oliglesias, que le mot n'est pas la plus petite unité de sens.
Dans lisons, on peut distinguer une partie porteuse du sens "lexical", et que l'on appelle pour cela lexème (ou sémantème), qui est lis-, et qui se rattache à lire.
Mais il y a aussi une partie -ons, que l'on ne trouve pas dans le dictionnaire parce qu'elle n'est pas isolable et qu'elle ne constitue pas un mot. Mais ce morphème n'en est pas moins signifiant : il indique à la fois le pluriel et la 1ère personne.
Si entre lis- et -ons j'intercale le morphème, -i-, je forme lisions ; il est facile de constater que ce -i- est chargé d'exprimer soit le subjonctif, soit l'indicatif imparfait.

La grammaire historique rend compte de l'évolution de tous ces éléments sans faire de distinction ni de hiérarchie entre eux. Vous constatez d'autre part que les rencontres de "lettres" ne résultent que du jeu de l'association des éléments qui suivent leurs propres lois (absolument universelles en finnois).

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 735 Dernière modification par chrisor (03-07-2018 12:29:55)

Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:


Je faisais allusion à certaines langues finno-ougriennes.
En finnois, un chrisor ne pourrait pas s'interroger sur le sens du groupe uk ou luk ou lk dans le radical luke- du verbe lukea, "lire", pour la bonne raison que que ce k est appelé à disparaître à chaque fois que la dernière syllabe sera fermée.
Ainsi, si je veux dire "je lis", je dois ajouter -n à luke-, mais du fait que je ferme la syllabe, *luken devient automatiquement luen.
De même "tu lis" = luke- + -t >*luket > luet.
Par contre, "il ou elle lit" = luke + e > lukee : miracle, le -k réapparaît parce que la syllabe reste ouverte.

Va-t-on prétendre ici que le radical change de sens au cours de sa conjugaison sous prétexte qu'il se modifie ?

Le problème de votre raisonnement est de croire que le radical est une unité de sens. En français même s'il ne s'agit pas d'une question phonétique les formes conjuguées du verbe lire sont très différentes : lis, lirai, lu . Comme je l'ai écrit précédemment le u de lu marque le passé, le codon ir marque la réflexion et la lettre l qui est le seul élément graphique constant comme en finnois marque la lumière et la distance.

L'apocope est souvent considérée comme purement arbitraire. Le terme ''nu'' provient du bas latin nuditas et en anglais il a conservé le radical latin : ''nude''. Le codon ud pour l'un de ses deux sens exprime le concept ''caché des sens'' et en priorité de la vue. Donc le radical ''nud'' évoque quelque chose ou quelqu'un ''non caché des sens''. Le français a probablement évolué par des formes intermédiaires entre nudité et nu : les formes nu(i)teit, nueté  sont attestées à la fin  des xiie-xves.
Mais en passant de nudité à nu on a perdu le concept ''caché des sens" et réduit simplement à la négation ''n'' avec ellipse du concept d'habillement ou d'enveloppe. L'adjectif nu marque un passé ''u'' et un néant ''n'' alors que l'anglais a conservé la notion ''non caché des sens" dans nude. L'apocope du d en français n'est pas uniquement un problème phonétique articulatoire, elle conduit à un changement notionnel.

Le mot n'est pas un signe arbitraire coupé de la réalité comme Saussure l'a prétendu. Quand il s'est agi de nommer l'homme ''sans habit'' l'onomaturge avait l'homme nu en face de lui. Imaginer qu'avec 150 codons vous devez caractériser de la manière la plus brève possible cet homme nu. Dans la mesure ou l'habillement est devenu la norme soit comme en anglais on retient le concept de non caché des sens  du nudités latin qui s'explique par la pudeur voire les moeurs prudes anglaises soit on se contente de cet aspect dépouillé: être sans habit (dépouillé) ou avec des habits en lambeaux (haillons) est un dénuement qui expose au risque douloureux physique ou psychique. Saussure reconnait que la langue est un système mais je ne crois pas qu'il ait évoqué la connotation sémiotique qui au départ n'était que phonétique et est devenue aussi et surtout graphique: quand on écrit ''nu''  et non ''nud'' on envisage les autres mots apparentés dont nudité ainsi que les antonymes. Les scripteurs qui ont fixé l'écrit français parlaient tous le latin et l'orthographe de doigt est influencé par digitus.

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Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

L'apocope est souvent considérée comme purement arbitraire.

Qui considère cela ?
L'apocope n'est pas arbitraire (normalement), mais dépend de raisons phonétiques : l'accent tonique qui fait que les voyelles atones sont plus faibles, plus instables et tombent. Rien d'arbitraire là-dedans, cela dépend de la force que l'on donne à la syllabe tonique. En Espagne, au Moyen-Âge, on a connu un phénomène "bizarre" appelé 'apocope extrême'. Extrême car elle ne répondait pas aux lois phonétiques du castillan mais était plus que très probablement due à l'influence des parlers de France à l'époque (forte présence de membre du clergé des territoires "français" venus pour former les futurs hommes d'Eglise de Castille après la Reconquête de certains territoires, importance des "français" dans la cour castillane, importance du pèlerinage à St Jacques, etc.). Bref, cette apocope extrême (on pouvait dire "el diz" au lieu de "él dice", "noch" à la place de "noche", etc.) qui ne répond pas à des critères phonétiques et linguistiques pourrait peut-être être considérée comme arbitraire mais même pas...

Concernant une autre de vos remarques selon laquelle en submorphémie /t/ et /d/ seraient totalement différents. Je ne veux pas m'avancer, mais je pense que ce n'est pas toujours vrai. J'ai écouté certains collègues parler de submorphémie et eux-mêmes s'aperçoivent qu'il faut plus prendre en compte la phonologie plutôt que la graphie (en espagnol c'est évident mais ça devrait l'être encore plus en français) et quand je parle de phonologie je pense aux archiphonèmes, aux allophones qui sont considérés par eux comme étant UNE MÊME UNITÉ de sens. Et je me demande même si dans certains cas ils ne considèrent pas comme une même unité submorphémique des phonèmes différents mais qui diffèrent uniquement par une caractéristique (notamment, pour /t/ et /d/, le voisement...) : il faudrait que je demande.

Vous, vous êtes très loin de ça puisque dans "doigt" vous considérez TOUTES les lettres ce qui moi, me parait absurde (un enfant, un analphabète ou d'autres personnes n'ont aucune idée qu'on écrit /dwa/ avec ce "g" et ce "t" qui sont des restes étymologiques). Pour moi, c'est et ça restera le gros point noir de tout ce que vous racontez. Je ne peux adhérer à cela et vous aurez beau me dire que l'écrit prime sur l'oral pour vous, je ne suis pas d'accord ou alors, les enfants et les analphabètes en disant la même chose que nous ne voudraient pas dire la même chose dans leur inconscient.

Je serais beaucoup plus disposé à croire ce que disent mes collègues quant à la submorphémie, que ces unités de sens peuvent regrouper plusieurs sons, archiphonèmes ou même phonèmes selon leurs caractéristiques phonétiques (et donc, physiques).

1 737 Dernière modification par chrisor (03-07-2018 12:46:01)

Re : L'erreur de Saussure !

à Oliglesias:

Analphabète ou cultivé l'homme a ''gobé" des mots tout faits. Ceux qui interviennent sur ce site ont un niveau élevé de français écrit et oral. Vous ne parvenez pas à admettre qu'il existe deux niveaux de langue, un conscient et un inconscient.  L'inconscient a participé à la création des mots qui seront acquis par transmission dans le système conscient. En fonction de notre culture du langage nous n'avons pas le même inconscient. Mais si l'inconscient est l'acteur principal de la création de mots à partir du matériau onomatopéique, son code est réinstallé dans tout cerveau humain qui a subi un apprentissage de sa langue. Cependant la notion de masse qui est inscrite par ''od'' dans la graphie de poids était perçue par vous avec le mot poids et même par un analphabète qui a une certaine culture de la langue orale et des notions de physique. Le p de poids n'a rien à voir avec le p de pouah qui lui a été tranféré par mépris à la notion de petitesse.

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1 738 Dernière modification par oliglesias (03-07-2018 12:45:53)

Re : L'erreur de Saussure !

Non, décidément, ça ne me convainc pas...

D'ailleurs, justement pour moi il n'y avait probablement rien de plus conscient que la création de mots à partir d'onomatopées... puisqu'il s'agit "d'imitations" de bruits.
Pour la racine ou le mot *TIK pour désigner doigt, je veux bien voir une origine onomatopéique là-dedans et donc une origine motivée, mais elle n'avait probablement rien d'inconscient.
C'est pour cela que je ne suis pas d'accord avec Saussure (ou ses élèves) quand il dit que le signe linguistique est arbitraire car pour moi il est fort possible que l'origine de bon nombre de mots soit motivée et ait donc une relation plus ou moins directe avec la réalité.
Vous, vous considérez que les locuteurs en diachronie ont "modifié" les mots qu'ils utilisaient parce que le sens inconscient évoluait. Moi, je considère que c'est une explication bien trop simpliste du changement linguistique.
Vous, vous considérez que TOUT est motivé dans les mots aujourd'hui (autant sur le point de vue phonétique que graphique) et moi je suis prêt à entendre que certaines séquences peuvent être submorphémiques dans le sens où dans certains contextes un locuteur peut utiliser tel ou tel autre mot (parfois avec telle ou telle autre variante phonétique) afin de "dire" quelque chose, quelque chose de plus ou de différent (en ajoutant ou en supprimant un ou des phonèmes).

Personne jusqu'à aujourd'hui n'est parvenu à me prouver et à me convaincre que c'était systématique. Je ne pense pas être borné pour autant ni conditionné par je ne sais quoi.

1 739 Dernière modification par Lévine (03-07-2018 14:23:34)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

C'est pour cela que je ne suis pas d'accord avec Saussure (ou ses élèves) quand il dit que le signe linguistique est arbitraire car pour moi il est fort possible que l'origine de bon nombre de mots soit motivée et ait donc une relation plus ou moins directe avec la réalité.

Attention : tu dois savoir que Saussure ne se place que dans la perspective synchronique, d'où sa modernité à une époque où le comparatisme fait fureur.
C'est d'ailleurs pourquoi chrisor lui fait ici un mauvais procès.

Pour Saussure, quelle que soit l'histoire du mot, le signifiant "cheval" n'a pour un francophone aucun lien naturel avec l'image mentale de l'animal (je simplifie, car le signifié a sa part d'arbitraire), pas plus que les signifiants horse en anglais ou лошадь en russe.

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Re : L'erreur de Saussure !

Lévine a écrit:

Attention : tu dois savoir que Saussure ne se place que dans la perspective synchronique, d'où sa modernité à une époque où le comparatisme fait fureur.
C'est d'ailleurs pourquoi chrisor lui fait ici un mauvais procès.

Pour Saussure, quelle que soit l'histoire du mot, le signifiant "cheval" n'a pour un francophone aucun lien naturel avec l'image mentale de l'animal (je simplifie, car le signifié a sa part d'arbitraire), pas plus que les signifiants horse en anglais ou лошадь en russe.

Oui, oui, je le sais... C'était moderne et surtout ça a renouvelé toute la linguistique... Il n'empêche que l'absence de nuance me gêne. L'absence de référence à une possible motivation historique des signes, l'absence de nuance quant aux onomatopées et autres formes "d'imitation" en synchronie, tout ça, ça continue de me gêner aujourd'hui...

Mais j'avoue, ça me gêne moins que l'absence totale de nuance chez chrisor tongue

1 741 Dernière modification par Lévine (04-07-2018 14:14:12)

Re : L'erreur de Saussure !

Je savais que tu savais smile, mais ta remarque m'a un peu étonné.

Saussure n'ignorait sans doute pas la complexité de la question ; je pense que son approche est simplement un parti pris pour aborder les faits de langue avec un autre regard et surtout d'autres outils d'analyse. Si j'isole -ons et -mes comme morphèmes marquant la 1ère personne du pluriel, je constate leur différence, j'étudie leur fréquence, leur distribution, etc... dans un corpus donné, mais je n'ai que faire de leur origine. Cette dernière ne m'apportera rien dans l'étude du système de la langue contemporaine. Il m'importe peu par ailleurs que -m ait tel ou tel sens ésotérique, même si je suis séduit par la chrisorologie... Ce n'est pas se mettre des œillères que de ne considérer que la synchronie (dans le cas que j'évoquais, évidemment), il s'agit d'assurer le plus de rigueur possible à l'analyse que l'on se propose de mener.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

1 742

Re : L'erreur de Saussure !

Je suis tout à fait d'accord avec toi, enfin peut-être pas "tout à fait" mais en grande partie. Moi-même je fais beaucoup plus de synchronie que de diachronie. Mais travaillant beaucoup sur la variation, j'ai tendance à considérer qu'on ne peut pas prétendre expliquer la variation en synchronie sans tenir compte de la diachronie.
On peut laisser de côté totalement la diachronie pour expliquer le système morphologique, ou syntaxique, ou phonétique... mais dès lors que tu vas toucher à la variation dans ce système, tu touches également à la diachronie parce que si variation il y a c'est bien parce qu'on se trouve aujourd'hui à un instant t dans l'évolution de la langue où ses deux variantes cohabitent (ce qui n'a pas toujours été le cas et qui ne sera probablement pas le cas plus tard) parfois avec des nuances de sens, parfois avec des différences de registre ou de style mais aussi parfois sans aucune différence (d'après moi) ce qui gêne considérablement les guillaumiens notamment qui, d'un point de vue strictement synchronique, vont défendre que si on a deux variantes différentes on a deux sens ou fonctions différentes. Chrisor n'est pas très éloigné de cette optique.
Moi oui.

1 743

Re : L'erreur de Saussure !

Bien sûr. On pourrait dire aussi qu'à chaque instant t, le système s'est rééquilibré et qu'on peut tout à fait l'étudier valablement. Le problème que tu soulèves est particulièrement aigu en ancien français.

Ce n'est pas tout à fait le même sujet, mais je trouve intéressant ce que dit Martinet à propos de la nécessité de ne pas "aller trop loin" dans le domaine de la diachronie dans ses Éléments de linguistique générale (éd. Armand Colin p. 176) :

[...] "il est très difficile de marquer exactement la causalité des changements linguistiques à partir des réorganisations de la structure sociale et des modifications des besoins communicatifs qui en résultent. Les linguistes, une fois qu'ils ont reconnu l'influence décisive de la structure sociale sur celle de la langue, n'auront de chance d'atteindre à quelque rigueur que s'ils limitent leur examen à une période assez restreinte de l'évolution d'un idiome et se contentent de relever dans la langue même les traces d'influence extérieures et de noter les réactions en chaîne que celles-ci ont pu y déterminer, sans remonter aux chaînons prélinguistiques de la causalité. Certains traits de la langue étudiée devront être nécessairement considérés comme des données de fait dont on ne saurait justifier l'existence qu'à l'aide d'hypothèses invérifiables. L'objet véritable de la recherche linguistique sera donc, ici, l'étude des conflits qui existent à l'intérieur de la langue dans le cadre des besoins permanents des êtres humains qui communiquent entre eux au moyen du langage."

PS : Je ne prêche pas pour ma paroisse, j'adore la grammaire historique !!!

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1 744

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:
chrisor a écrit:

L'apocope est souvent considérée comme purement arbitraire.

Qui considère cela ?
L'apocope n'est pas arbitraire (normalement), mais dépend de raisons phonétiques ...



d'après le CNRTL  : définition d'apocope : coupure qui affecte la finale d'un mot, soit par chute phonétique d'un élément, soit par abrègement arbitraire.`` (Mar. Lex. 1951) :

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Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Concernant une autre de vos remarques selon laquelle en submorphémie /t/ et /d/ seraient totalement différents. Je ne veux pas m'avancer, mais je pense que ce n'est pas toujours vrai. J'ai écouté certains collègues parler de submorphémie et eux-mêmes s'aperçoivent qu'il faut plus prendre en compte la phonologie plutôt que la graphie (en espagnol c'est évident mais ça devrait l'être encore plus en français) et quand je parle de phonologie je pense aux archiphonèmes, aux allophones qui sont considérés par eux comme étant UNE MÊME UNITÉ de sens. Et je me demande même si dans certains cas ils ne considèrent pas comme une même unité submorphémique des phonèmes différents mais qui diffèrent uniquement par une caractéristique (notamment, pour /t/ et /d/, le voisement...) : il faudrait que je demande.


Pour moi les consonnes  t et d en début de phrase ou en consonnes redoublées possèdent chacune 3 sens différents :
t = coup (rythme) généralisé au temps, terre et couverture
d = direction, séparation, dieu

Il est possible que certains ''th''soient en rapport avec dieu : théo, athée.   

Qiant à la plupart de ces deux consonnes elles appartiennent à des codons de deux lettres initiés par une voyelle : at, et, it, ot, ut    -      ad, ed, id, od, ud.
Chaque codon possède deux sens, ceux formés avec t sont surtout liés u mouvement et ceux avec d  sont plus ''intellectuels''.

En synchronie française actuelle il n'existe pas de lien sémantique entre ces deux séries de codons: t et d ne sont jamais permutables sans changement de sens.

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1 746 Dernière modification par chrisor (04-07-2018 12:54:28)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Non, décidément, ça ne me convainc pas...

D'ailleurs, justement pour moi il n'y avait probablement rien de plus conscient que la création de mots à partir d'onomatopées... puisqu'il s'agit "d'imitations" de bruits.

Vous, vous considérez que TOUT est motivé dans les mots aujourd'hui (autant sur le point de vue phonétique que graphique) ..; 

Personne jusqu'à aujourd'hui n'est parvenu à me prouver et à me convaincre que c'était systématique. Je ne pense pas être borné pour autant ni conditionné par je ne sais quoi.

oliglesias, nous sommes tous bornés. Nous avons tous subi un triple conditionnement lors de l'acquisition de notre langue maternelle : syllabique, sémantique et tonique (expressif).

Nous ''fonctionnons'' donc avec des mots qui sont des unités de sens de notre discours dont la matière signifiante est considérée comme arbitraire par rapport à leur signifié selon Saussure et pour laquelle vous acceptez un certain degré de motivation.

Il est probable que le ''protolangage'' humain était gestuel et onomatopéique. Le problème de la conscience est ardu. Conscient, préconscient, subconscient, inconscient, tous ces mots montrent une graduation entre les niveaux de conscience. Je pense même que l'on peut considérer deux types de conscience:
- celle de notre cerveau droit qui est holistique, globale, immédiate, non verbale : c'est celle de la sensation d'exister, de respirer, une conscience synesthésique qui n'a pas besoin de mots .
-celle de notre cerveau G qui est analytique, qui se réalise par la médiation de mots que nous avons appris par conditionnement répétitif.

Pour que cette conscience analytique, cette conscience de, puisse exister il faut déjà un certain niveau de langage. Alors les premières onomatopées n'ont pas été créées en pleine conscience mais avec un certain degré de conscience de l'imitation de différents bruits. Ensuite la formation des rébus que constituent nos mots du cerveau G s'est réalisée à partir du matériau sonore de ces onomatopées. Le fait que les onomatopées actuelles répondent toutes au code de l'inconscient témoignent de leur ancrage dans le langage tels des vestiges, des fossiles des proto-onomatopées. Le niveau de conscience a sans doute diminué lors de la formation des premiers mots pour disparaître dès leur transmission. Vous et moi n'avions aucune idée que le signifiant Tibet est un rébus signalant un niveau (et) haut perché ou élevé (ib) de la Terre. La transmission de ces mots-rébus les a transformés en chaîne sonore énigmatique que certains (sans formation biologique) se sont empressés de qualifier ''arbitraire". Avant même ces proto-onomatopées devaient exister des cris émotifs dont nos interjections modernes sont des descendants évolutifs. Quand il  ressent une douleur l'homme primitif ''pré" loquens'' devait émettre des sons proches de Ah !  La vocalisation,  bouche grande ouverte, du A sert d'exutoire au ressenti douloureux et si la douleur persiste plus d'une seconde l'homo en souffrance serre les mâchoires faisant évoluer la voyelle ouverte en voyelle fermée i ou u . Quel enseignant vous a appris que   -  lors des funérailles de votre aïeul dont la dépouille était couverte d'une gerbe de glaïeuls lors de son départ pour un Ailleurs  car il s'était fait ''zigouiller'' sur un champ  de bataille par un coup de baïonnette ou une rafale de mitraillette : /aïe/ et /ouï/ étaient des vestiges onomatopéiques de nos cris de douleur, des signaux algiques que nous ne savons plus entendre ? 

Reconnaissez oliglesias que ces cris quasi spontanés de douleur des onomatopées françaises aïe et ouille , pour lesquelles Saussure croit que le signifiant se confond avec le signifié,  sont exprimés sans grande conscience. Et nous sommes totalement inconscients qu'elles marquent encore au fer rouge nos mots actuels.  Comme moi vous être le fruit des ''entre-ailles'' maternelles. La science médicale a heureusement permis d'atténuer cette condamnation biblique à la douleur de la femme qui accouche. Dès que le travail devient moins supportable l'obstétricien moderne fait ''périr le dur râle'' grâce à la péridurale. Là encore l'halètement dont on apprend à la parturiente (pas forcément riante) à maîtriser le rythme, est un signifiant qui possède la séquence al, un codon inconscient qui évoque le volume d'air expiré difficilement avec un sens généralisé au mal. Qui est conscient que cette notion de mal est portée uniquement par le submorphème ''al'' dans mal et algie (propage ie le passage ag du mal).

Conclusion : tout est motivé et tout est quasi inconscient !

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Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

d'après le CNRTL  : définition d'apocope : coupure qui affecte la finale d'un mot, soit par chute phonétique d'un élément, soit par abrègement arbitraire.`` (Mar. Lex. 1951) :

Ah ben si le CNRTL le dit, c'est forcément que j'ai tort...
roll

Bon, j'admets que je parlais de l'apocope en diachronie (déformation professionnelle) mais en synchronie non plus elle ne parait pas arbitraire. Plutôt que de me fier à une définition qui date des années 50 (MAROUZEAU (Jules). - Lexique de la terminologie
linguistique, français, allemand, anglais, italien. 3e éd. augm. et mise à jour. - Paris, P. Geuthner, 1951) voire même plus tôt (il a écrit ce "lexique" à la fin des années 30), je préfère me fier à ce qui se dit actuellement à ce sujet.

Tenez chrisor, si l'apocope en français vous intéresse, lisez donc l'article de Françoise Kerleroux intitulé Sur quelles bases opèrent l'apocope ?.

Je l'ai lu il y a quelque temps déjà, mais si mes souvenirs sont bons, on voit bien qu'aujourd'hui les linguistes (qui travaillent sur ce sujet) ne considèrent pas l'apocope comme arbitraire parce que :
- elle suit un schéma prosodique particulier.
- elle n'est pas applicable à tous les mots et le "choix" des mots qui peuvent être apocopés n'est pas arbitraire non plus.

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Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

Tenez chrisor, si l'apocope en français vous intéresse, lisez donc l'article de Françoise Kerleroux intitulé Sur quelles bases opèrent l'apocope ?.  .

Merci beaucoup; Je vais lire cet article mais avec ma vision des choses : pour moi le mot se construit de la droite vers la gauche avec la notion la plus générale d'abord et la plus précise en dernier. Le professeur n'est généralement plus un fesseur !  Sourire.

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Re : L'erreur de Saussure !

chrisor a écrit:

Vous et moi n'avions aucune idée que le signifiant Tibet est un rébus signalant un niveau (et) haut perché ou élevé (ib) de la Terre.

Je veux bien concevoir que le mot qui a donné "Tibet" ait été motivé dans sa langue d'origine, encore que, vous devriez prouver l'existence de ces codons dans cette langue-là. Vous ne pouvez pas inclure un mot entré en français à travers le portugais qui lui-même l'avait emprunté à des langues turques. Pourquoi ? Parce que nous n'avons pas vraiment eu le choix. Il s'agit, a priori, d'un emprunt tout à fait classique. Les européens ne devaient pas avoir de mot pour désigner cette zone géographique montagneuse probablement parce qu'elle ne la connaissait pas.
J'ai regardé un peu quelle pourrait être l'étymologie de "Tibet". Dans des langues arabes et turques cela désignerait des "hauteurs, un haut pays"... mais d'où sortent-ils ce mot ? Il s'agirait peut-être d'une adaptation d'un mot chinois qui désignait non pas les hauteurs mais tout simplement la population.

Bref, si c'est motivé, ça a drôlement voyagé et ça a drôlement changé de sens inconscient (j'ai lu que la première syllabe qui commençait par un T en chinois désignait "la population de/les habitants de" et que c'est la deuxième syllabe qui introduisait le lieu d'où venait ces populations.

Tout ça pour dire que je veux bien admettre qu'il y ait à un moment donné (au début) l'introduction d'un mot dans une langue qui "inconsciemment" soit porteuse de sens. Mais j'ai du mal à croire qu'en français aujourd'hui, (et même au moment de l'emprunt) ce soit le cas. Si on a emprunté ce mot là, précisément, c'est parce que c'était le seul qui désignait cette "nouvelle réalité". C'est donc plutôt un choix des portugais du XVIIè siècle. Les français n'ont rien choisi inconsciemment, ils se sont contentés d'utiliser le seul mot disponible.

1 750 Dernière modification par chrisor (04-07-2018 17:47:48)

Re : L'erreur de Saussure !

oliglesias a écrit:

J'ai regardé un peu quelle pourrait être l'étymologie de "Tibet". Dans des langues arabes et turques cela désignerait des "hauteurs, un haut pays"... mais d'où sortent-ils ce mot ? Il s'agirait peut-être d'une adaptation d'un mot chinois qui désignait non pas les hauteurs mais tout simplement la population.

Bref, si c'est motivé, ça a drôlement voyagé et ça a drôlement changé de sens inconscient (j'ai lu que la première syllabe qui commençait par un T en chinois désignait "la population de/les habitants de" et que c'est la deuxième syllabe qui introduisait le lieu d'où venait ces populations.

La deuxième syllabe ? Vous voulez dire "bet'' ?

Le mot Tibet en français est le niveau extrêmement (b) élevé (ib) de la Terre. Quelque soit la langue d'emprunt un mot est toujours ''francisé'" et pour moi il est accepté dans la langue française dans la mesure où le rébus sémantique qu'il introduit est adapté au référent.  Dans le rébus de Tibet j'ai ajouté le sens de b correspondant à la notion '' extrême''  si l'on place un accent expressif ou tonique sur cette consonne.

Le codon ib évoque le concept d'élévation, de haut perché que l'on retrouve dans Galibier dans gibet, gibbon, hibou, libellule, ibis, tibia, guibole...  Mais ce sens ''élevé'' concerne aussi le nombre : ribambelle, tribu, bribe (multitude brisée). Le mot Bible peut être ''entendu'' comme un éblouissant (bl) Haut (ib) Verbe  (B) ou une aveuglante (bl) multitude (ib)  de verbes (B). Donc dans le mot Tibet ce codon ib peut évoquer l'un ou l'autre de ces deux sens : le sens ''élevé en nombre"" peut correspondre à ''il y a du peuple'', un mot ou ''pl'' signifie ''beaucoup''.

Dans l'article sur la formation des formes apocopées, les auteurs expliquent que l'apocope  a pour résultat de fournir un signifiant distingué à la "représentation" individuelle  par opposition à la dénotation du lexème et à son sens, qui sont, eux, partagés et objectifs. Ainsi au "lexème crocodile,  peut être substituée la forme apocopée croco quand il figure dans un énoncé où il désigne le matériau (un sac en croco), mais non pas quand il désigne l'animal (*j'ai vu deux crocos dans le grand bassin).
Pour moi une des raison de cette apocope réside sur la notion de courant  (il) et d'onde (od)  qui ne sont pas utiles pour désigner la nature saurienne du sac à main. La séquence ''croc'' marque un choc cassant ou mortel et les expressions actuelles des jeunes ne démentiraient pas cette appellation admirative : ''c'est mortel''.

Donc croco et crocodile désignent certes le même référent mais disent de lui des choses différentes.

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