Passer au contenu du forum

forum abclf

Le forum d'ABC de la langue française

Mise à jour du forum (janvier 2019)

Remise en l'état – que j'espère durable – du forum, suite aux modifications faites par l'hébergeur.

Pages 1

Répondre

Flux RSS du sujet

Messages [ 18 ]

1 Dernière modification par glop (29-03-2018 18:43:54)

Sujet : Se dérober

Comme il est étrange se verbe.
Si j’ose résumer à ma façon ce que je lus dans les dicos: La robe (rauba) fut tout d’abord un butin ; on volait aux vaincus leurs biens ; on les dérobait.
La robe désigna ensuite plus précisément ce qui habille généralement une personne même si l’on va jusqu’à enrober des confiseries de chocolat…
J’éprouve quelque difficulté à faire le lien direct avec "se dérober".
Sur le cnrtl, un exemple de l’emploie  de cette forme pronominale évoque assez bien le problème :
[10. N'avons-nous pas vu un jour (...), ce pommadin de sacristie, ce merlan gâteux qu'on nomme Auguste Roussel, congédiant, le mufle en l'air deux rétrogradants évêques pliés devant lui et se dérobant à reculons dans leur robe violette... Bloy, Le Désespéré,1886, p. 234]
Je crois avoir compris que les premiers à qui l’on reproche de se dérober sont les chevaux qui refusent d’être montés; ainsi la robe à laquelle ils échappent n’est pas la leur mais celle du cavalier.
Le mot robe désignant par ailleurs le poil et surtout la couleur du poil du cheval.
Récapitulons :
Nous avons des vaincus dérobés
Des chevaux qui se dérobent sous leur cavalier
Des confiseries enrobées de chocolat incapables de se dérober à la gourmandise de petits et des grands.
Mais alors, pourquoi trouve-t-on sur le cnrtl la même étymologie pour "se dérober" et "dérober" ?
[Dér. de l'a. fr. rober « piller, ici un pays » ca 1130 (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 2287) du germ. *raubôn « voler »]

Il me semble pourtant que "se dérober" tout comme "enrober" dérivent simplement de robe.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Re : Se dérober

Tous les mots que vous évoquez dérivent en effet plus ou moins directement de rauba, "butin" (attesté chez Wace).
"se dérober" me semble l'équivalent de "se soustraire", "(faire) disparaître (soi-même)". Pourquoi évoquer la robe d'un cheval ??

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

3 Dernière modification par pfinn60 (29-03-2018 17:15:35)

Re : Se dérober

glop a écrit:

Mais alors, pourquoi trouve-t-on sur le cnrtl la même étymologie pour "se dérober" et "dérober" ?
[Dér. de l'a. fr. rober « piller, ici un pays » ca 1130 (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 2287) du germ. *raubôn « voler »]

Il me semble pourtant que "se dérober" tout comme "enrober" dérivent simplement robe.

Je ne peux pas approfondir vos recherches étymologiques mais je me suis rendu compte de cette ambiguïté dans les années 70 quand j'ai lu La Dérobade de Jeanne Cordelier.

4 Dernière modification par glop (29-03-2018 17:14:32)

Re : Se dérober

@ Lévine

Si j’ai écrit "par ailleurs" la robe du cheval…
C’est simplement pour invalider, si besoin est, l’hypothèse d’un cheval perdant sa robe.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

5

Re : Se dérober

Il semble que dérober et se dérober aient un sème commun : soustraire, enlever, faire disparaître (voler un objet robe : objet, biens).
Quand on dérobe un objet, on le soustrait à la vue, il disparaît. Quand on se dérobe, on s'efface, on disparaît. Un cheval qui se dérobe s'efface devant l'obstacle.
Le mot robe en français s'est réduit au vêtement. En italien, la roba, c'est : les choses, les biens, les vêtements...

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

6 Dernière modification par glop (30-03-2018 22:44:15)

Re : Se dérober

Je ne suis, qu’un humble cheminot épris de justice qui contemple dubitatif un aiguillage.
La robe appartient-elle à celui qui la vole ou à celui qui l’a volée ?
Si le verbe enrober a souvent le sens de "recouvrir d’une enveloppe protectrice" il peut aussi avoir le sens de "dissimuler"
[− P. ext. Déguiser, masquer (une pensée, des intentions...). Ce prêtre sait enrober les plus virulents des poisons dans les plus effroyables des sacrilèges (Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 178):]
http://www.cnrtl.fr/definition/enrober
On pourrait donc se dérober en enrobant !
Mais je m’égare sur une voie de garage car ce que je regrette simplement, à tort ou à raison ?, c’est que "dérober" et "se dérober" soient considérés comme un seul et même verbe.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

7 Dernière modification par Abel Boyer (29-03-2018 18:52:47)

Re : Se dérober

La notice du DHLF est accessible ici :
https://books.google.fr/books?id=Pi8wQT … mp;f=false
Je trouve assez naturel le passage de "dérober" à "se dérober". En revanche, j'ai d'abord désiré en savoir plus sur le sens du préfixe "dé", anciennement "des", dans "desrober". "Rober" avait déjà le sens de voler, donc "des-rober" n'indique pas un sens contraire, antinomique ou privatif (son sens le us courant) mais une sorte de variation sur le même thème. Peut-être analogue au lien entre spolier et dépouiller. C'est semble-t-il le sens augmentatif, amplitif ou extensif, qu'on connaît aussi dans couper/découper, montrer/démontrer, tremper/détremper

8 Dernière modification par Ylou (29-03-2018 18:53:19)

Re : Se dérober

Mais pourquoi Glop ? Il s'agit d'un même verbe qui, quand pronominal a un sens spécifique.
Apercevoir est dans le même cas : j'aperçois une silhouette/je m'aperçois que je me suis trompé
Pour agir, c'est encore plus net : il a agi avec intelligence/il s'agit de ne pas se tromper.
Et il y en a bien d'autres : trouver/se trouver - tromper/se tromper; le comble : douter/se douter, etc.

N'a-t-on pas le même préfixe que dans l'ancien desporter (s'ébattre) ? ou dans déambuler ou débattre ?

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

9 Dernière modification par glop (29-03-2018 19:02:26)

Re : Se dérober

pfinn60 a écrit:

Je ne peux pas approfondir vos recherches étymologiques mais je me suis rendu compte de cette ambiguïté dans les années 70 quand j'ai lu La Dérobade de Jeanne Cordelier.

Je n'ai pas lu ce livre pourriez-vous en dire plus?

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

10 Dernière modification par glop (29-03-2018 19:05:44)

Re : Se dérober

Ylou a écrit:

Mais pourquoi Glop ? Il s'agit d'un même verbe qui, quand pronominal a un sens spécifique.
Apercevoir est dans le même cas : j'aperçois une silhouette/je m'aperçois que je me suis trompé
Pour agir, c'est encore plus net : il a agi avec intelligence/il s'agit de ne pas se tromper.
Et il y en a bien d'autres : trouver/se trouver - tromper/se tromper; le comble : douter/se douter, etc.

N'a-t-on pas le même préfixe que dans l'ancien desporter (s'ébattre) ? ou dans déambuler ou débattre ?

La question que je pose est: Celui qui est dérobé se dérobe-t-il?

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

11 Dernière modification par pfinn60 (30-03-2018 13:08:29)

Re : Se dérober

glop a écrit:
pfinn60 a écrit:

Je ne peux pas approfondir vos recherches étymologiques mais je me suis rendu compte de cette ambiguïté dans les années 70 quand j'ai lu La Dérobade de Jeanne Cordelier.

Je n'ai pas lu ce livre pourriez vous en dire plus?

Sans entrer dans les petits détails, c'est l'histoire autobiographique d'une prostituée qui se dérobe et se fait dérober par des clients qui lui posent un lapin.

12

Re : Se dérober

Se dérober = se "voler" à la vue des autres, s'y soustraire. Je ne vois vraiment pas ce qui vous pose problème.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Se dérober

On n'est pas plus aimable...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

14

Re : Se dérober

Je répondais à glop.

Pour ce qui est de l'étymologie :
- rauba (germ.) donne robe dans le sens de "butin" (XIIème). Le mot robe, par glissement de sens en arrive à désigner toute sorte de vêtement, sans doute parce que les étoffes étaient parfois chères, voire luxueuses (cf. les descriptions dans les romans) et aisément transportables, donc particulièrement convoitées par les larrons.

- raubon (germ.) donne rober (XIIéme) (avec modification de la désinence verbale) dans le sens de "voler", "piller".
Sur rober, on forme derober (dérober) (fin XIIème), plus expressif, avec le préfixe "de" qui indique la privation ; dérober qqn, c'est le dépouiller de qqch.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

Re : Se dérober

Lévine a écrit:

Sur rober, on forme derober (dérober) (fin XIIème), plus expressif, avec le préfixe "de" qui indique la privation ; dérober qqn, c'est le dépouiller de qqch.

Je ne crois pas que ce soit le sens de ce suffixe ici, comme je l'indique plus haut.

16

Re : Se dérober

C'est possible. Mais je crois qu'il a été formé sur le modèle de despolier (dépouiller) < lat despoliare, mot à mot "prendre des dépouilles venant de qqn"
Disons que si le régime est un animé, de(s) exprime la privation, si le régime est un non animé (l'objet volé), de(s) exprime l'origine.

Mais ce n'est que mon avis.

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

17

Re : Se dérober

Abel Boyer a écrit:

La notice du DHLF est accessible ici :
https://books.google.fr/books?id=Pi8wQT … mp;f=false
Je trouve assez naturel le passage de "dérober" à "se dérober". En revanche, j'ai d'abord désiré en savoir plus sur le sens du préfixe "dé", anciennement "des", dans "desrober". "Rober" avait déjà le sens de voler, donc "des-rober" n'indique pas un sens contraire, antinomique ou privatif (son sens le us courant) mais une sorte de variation sur le même thème. Peut-être analogue au lien entre spolier et dépouiller. C'est semble-t-il le sens augmentatif, amplitif ou extensif, qu'on connaît aussi dans couper/découper, montrer/démontrer, tremper/détremper

J'avoue que le "dé" augmentatif, amplitif, extensif ne m'avait pas effleuré.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

18

Re : Se dérober

Merci pour toutes vos réponses.

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

Messages [ 18 ]

Pages 1

Répondre