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forum abclf » Écriture et langue française » Au clair de la lune...

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Messages [ 43 ]

Sujet : Au clair de la lune...

Bonjour à tous,

Connaissant ma passion pour notre langue, un ami vient de me soumettre ceci :
« Sachant que sa chandelle est morte et vu qu'il n'a plus de feu, pourquoi le voisin de Pierrot
lui demande-t-il une plume pour écrire un mot ce qu'il serait bien incapable de faire dans le noir complet? »

Et de poursuivre : ne s'agirait-il pas plutôt non d'une plume mais bien d'un allume, vieux mot défini par le Grand Robert comme "un petit morceau de bois allumé, utilisé [...] pour allumer un feu" ?

Bien sûr, se poserait alors le cas de l'adjectif possessif : "Prête-moi ton allume pour écrire un mot" et de la syllabation, qu'on pourrait néanmoins résoudre par l'élision du e muet de "Prêt'-", comme d'ailleurs il est de règle.

Qu'en pensez-vous ?
Quelqu'un avait-il déjà entendu parler de cela auparavant ?

Grand merci d'avance...

2 Dernière modification par Abel Boyer (06-10-2017 21:47:25)

Re : Au clair de la lune...

On a quelque chose de proche raconté ici :
http://www.achyra.org/francais/viewtopic.php?t=4985
https://fr.wikipedia.org/wiki/Au_clair_de_la_lune
Aucune version n'est pleinement convaincante. Et honnêtement, est-ce que le manque de logique de la chanson nous a vraiment gênés quand nous la chantions ? Je ne crois pas.

3

Re : Au clair de la lune...

Si on remplace plume par lume on perd de la matière pour le sens sous-entendu.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

4 Dernière modification par aCOSwt (07-10-2017 10:26:22)

Re : Au clair de la lune...

jiemde a écrit:

...écrire un mot ce qu'il serait bien incapable de faire dans le noir complet?

Votre ami avait-il déjà oublié le titre de la chanson ?
Nous sommes donc très loin de votre "noir complet", j'étais d'ailleurs hier au soir sur ma terrasse et je peux vous assurer que je n'aurais pas eu besoin de lumière artificielle pour écrire un mot.

Non sunt multiplicanda entia sine necessitate!

Re : Au clair de la lune...

Difficile de justifier que l'allume soit devenue une plume, mais l'allume a pu devenir la lune. Lune et plume ne riment pas.
Cependant, je  vois là une rationalisation tardive. AMHA, ce fut toujours lune. Les textes de chansons sont parfois farfelus :

Sur le plancher
Une araignée
Se tricotait des bottes.
Dans un flacon
Un limaçon
En filait sa culotte...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

6

Re : Au clair de la lune...

Oui! big_smile

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Au clair de la lune...

Une citation de 1808 :

https://img11.hostingpics.net/pics/8654931808Auclairdelalune.jpg

(La Marchande de modes, parodie de la Vestale - Étienne de Jouy)

Et dans Les voitures versées (1820), cité par l'article de wikipédia, il s'agit bien d'une plume.

8 Dernière modification par éponymie (08-10-2017 12:54:39)

Re : Au clair de la lune...

La première publication du texte est due à Théophile Marion Dumersan dans son Chansons nationales et populaires de France en 1846.

(Wikipédia)

Il l'avait publié 3 ans auparavant dans Chants et chansons populaires de la France.

https://img11.hostingpics.net/pics/6424171843Auclairdelalune.jpg
(source)

L'air est repris à diverses reprises dans pièces et opérettes dès 1801. Toujours avec des allusions coquines (pensez aussi à tourner la page de notre ouvrage de 1843)

J'ai modifié l'article.

Re : Au clair de la lune...

Un commentaire smile de la première strophe datant de 1824, seulement 4 après les voitures versées :

https://img11.hostingpics.net/pics/20038918240623Auclairdelalune.jpg

(source)

Une variante, éditée également en 1824, parmi d'autres couplets chantés le 15 janvier 1823 pour l'anniversaire de la naissance de Molière :

https://img11.hostingpics.net/pics/2698711824Auclairdelalune.jpg

(source)

On trouve trace de l'ami Pierrot au clair de lune dès 1815 mais la plume n'est documentée qu'à partir des Voitures versées (une autre pièce en citera et rechantera les couplets dès décembre 1820). La chandelle morte se rencontre en 1808, l'adjectif morte et la porte dès 1804 (cf. wikipédia), le clair de la lune sans Pierrot en 1801.

Pas plus d'allume que de lume.

10 Dernière modification par éponymie (08-10-2017 17:27:10)

Re : Au clair de la lune...

D'autres clins d'œil à l'original inconnu. Opérettes et Vaudevilles ne cessent de reprendre - outre notre chanson - des airs connus en en changeant ou adaptant les paroles.

En 1820 :

https://img11.hostingpics.net/pics/7324381820Auclairdelalune.jpg
(source)
Et en 1809 :
https://img11.hostingpics.net/pics/7853261809Auclairdelalune1.jpg
https://img11.hostingpics.net/pics/1265241809Auclairdelalune2.jpg
(source)

Ce qui, avec les découvertes précédentes, tend à confirmer la première strophe :

Au clair de la lune
mon ami Pierrot, cité à partir de 1815
[ … ] -une ou -ume
Pour [ … ] un mot
[ … ] est morte
Je n'ai plus de feu
[ … ]-moi la/ta porte
Pour l'amour de Dieu.

Bien d'autres encore ne reprennent que l'air :

1802 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … =3154522;0
1807 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … rk=21459;2
1808 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … =1566531;2
1810 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … =2639498;0
1811 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … =5171699;2
1812 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … =2467823;2
1813 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … k=643780;0
1813 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=879832;4
1814 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6 … k=236052;4
1815 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=793995;2
1818 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=557942;4
1820 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=364808;4
1820 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … =193134;0#
1820 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … k=708158;0

ou seulement avec le vers éponyme :

1806 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … k=836914;0
1815 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=751076;4

ou, comme celui de 1809, le dernier :

1815 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … k=429186;4

11 Dernière modification par éponymie (08-10-2017 18:45:59)

Re : Au clair de la lune...

Un dernier message, lume pourrait se justifier s'il remplaçait lune, il aurait ainsi l'avantage de laisser la plume tranquille.

Mais c'est bien tardivement, au XXe siècle, que certains ont soulevé le problème :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … rk=42918;4
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … rk=85837;2

Dans le dernier lien est cité l'ouvrage de Jehan Chardavoine datant de 1576, wikipédia en parle également, c'est l'air qui serait commun. Pas les paroles.

La seule trace antérieure que l'on trouve est en 1855 (sans polémique, avec un Pierrot qui tient à sa plume) : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9 … lair". J'y trouve au passage l'expression "à gogo" que je ne croyais pas si ancienne.

P.S.:

https://www.youtube.com/watch?v=7YhTwR5qB3E
https://www.youtube.com/watch?v=J4-Bm6tAM00

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Dans le dernier lien est cité l'ouvrage de Jehan Chardavoine datant de 1576, wikipédia en parle également, c'est l'air qui serait commun. Pas les paroles.

Seul un bout d'air est commun, correspondant au refrain "Gaudinette, je vous aime tant" dont les notes (mais pas tout à fait le rythme) sont celles, trois fois reprises, de "Au clair de la lune, mon ami Pierrot//Prête-moi ta plume, pour écrire un mot//Ouvre moi ta porte pour l'amour de Dieu".
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k70058q/f71.image
http://numerique.bibliotheque.toulouse. … ir/doc.pdf

13 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 09:24:07)

Re : Au clair de la lune...

À lire : https://books.google.it/books?id=VduVDA … mp;f=false

(Bouteloup Philippe, « Au clair de la lune », dans Des musiciens et des bébés. sous la direction de Bouteloup Philippe. Toulouse, ERES, « 1001 bébés », 2004, p. 41-46). J'ai acheté le chapitre avant de le trouver disponible sur GL sad

Il y a une erreur : il ne s'agit pas de Du Marsan mais du Théophile Marion Dumersan (ou Du Mersan) (1780-1849) déjà cité dans le message 8, je ne sais pas d'où l'auteur tire sa date de 1820 qui est celle des Voitures versées, le livre a bien été édité en 1843 et, dans son édition revue et augmentée de 1866, il mentionnera les Voitures versées.

Donc le texte -  au moins la première strophe - dans sa version “officielle” est bien écrit quelque part entre 1790 et 1820.

Est-ce Du Mersan qui le figea définitivement en 1820 pour les Voitures versées ? Ce qui est certain, c'est qu'il connaissait le compositeur Dugazon (1782-1826) qui repris notre air et pour qui il adapta en français l'air de trois “canzonnettes” italiennes.

Le livre des chansons date de 1944, l'auteur est Henri Davenson, pseudonyme – ô surprise ! - d'Henri Irénée Marrou. Je ne le trouve pas en accès gratuit sur la Toile.

Quoi qu'il en soit, la plume tient toujours bon.

Re : Au clair de la lune...

La notice du dictionnaire lyrique Larousse

https://img15.hostingpics.net/pics/788223Dictionnairelyrique703.jpg

(source)

Le dolce momento est devenu un dolce concento...

Le texte du vaudeville était déjà de Dupaty mais s'il y avait déjà quelques chansons, pas de clair de lune.

15 Dernière modification par Abel Boyer (11-10-2017 15:12:38)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Et dans Les voitures versées (1820), cité par l'article de wikipédia, il s'agit bien d'une plume.

éponymie a écrit:

Il y a une erreur : il ne s'agit pas de Du Marsan mais du Théophile Marion Dumersan (ou Du Mersan) (1780-1849) déjà cité dans le message 8, je ne sais pas d'où l'auteur tire sa date de 1820 qui est celle des Voitures versées, le livre a bien été édité en 1843 et, dans son édition revue et augmentée de 1866, il mentionnera les Voitures versées.
[...]
Est-ce Du Mersan qui le figea définitivement en 1820 pour les Voitures versées ?

Les Voitures Versées de Boïeldieu ont été montées à l'Opéra-Comique (salle Feydeau, mentionnée par Larousse) en avril 1820, mais elles ont été créées à Saint-Pétersbourg, au Palais de l'Ermitage, en 1808 !
http://data.bnf.fr/13948395/francois-ad … s_versees/
Je suppose que la partition contenait déjà les Variations sur Au Clair de la Lune, mais c'est difficile à vérifier en ligne. En tout cas, l'oeuvre restera au théâtre de Saint-Pétersbourg jusqu'en 1818 ! C'est ce qui expliquerait -- peut-être -- la prolifération avant 1820 d'allusions à cette musique fameuse, notamment dans tout un flot de variations pour toutes sortes d'instruments.
Voici un enregistrement de ces fameuses variations de Boïeldieu, avec d'abord les couplets en italien puis en français.
https://www.youtube.com/watch?v=BJPY1ys0qSs&t=2321s
et une partition (tardive), voire page 146 :
http://petrucci.mus.auth.gr/imglnks/usi … ees_VS.pdf
Gustave Dugazon, cité plus haut, fils de la fameuse Dugazon qui a donné un substantif à la langue française, semble être simplement l'arrangeur de divers morceaux de la partition, pour piano et pour d'autres instruments.
https://img15.hostingpics.net/pics/838597Capture.png

16 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 15:30:04)

Re : Au clair de la lune...

Abel Boyer a écrit:

Les Voitures Versées de Boïeldieu ont été montées à l'Opéra-Comique (salle Feydeau, mentionnée par Larousse) en avril 1820, mais elles ont été créées à Saint-Pétersbourg, au Palais de l'Ermitage, en 1808 !
http://data.bnf.fr/13948395/francois-ad … s_versees/
Je suppose que la partition contenait déjà les Variations sur Au Clair de la Lune, mais c'est difficile à vérifier en ligne.

J'étais tombé sur cette notice, qui m'a permis d'aller consulter la version de 1806 du Séducteur en voyage, on y retrouve les personnages (Florville et Élise qui nous ferons le duo sur Au clair de la lune en 1820, madame de Melvac et Dormeuil) mais pas notre chanson. Cette œuvre - le Vaudeville - portait dès l'édition de 1807 le titre Les voitures versées : https://books.google.it/books?id=3xE-Tv … mp;f=false

Dans la biographie de Boyeldieu :

1808, Les voitures versées, opéra comique en 2 actes, livret de E. Dupaty, créé à  l'Hermitage de Saint-Petersbourg le 16 avril 1808 [titre précédent : Le Séducteur en voyage ; revu et recréé à l'Opéra-Comique de Paris le 29 avril 1820 ; manuscrit à la bibliothèque du théâtre à Saint-Petersbourg]

La notice que vous citez parle également de version révisée en 1820. Au clair de la lune n'a pas attendu Les voitures versées pour être régulièrement cité, adapté et pastiché,  on l'a vu plus haut mais ce n'était pas seulement dans les théâtres.

Il faudra vraiment trouver le livret de Saint-Pétersbourg pour voir si notre air y figure, cela n'a effectivement rien de certain comme votre prudent peut-être le soulignait.

Merci mille fois pour l'enregistrement !

P.S.: et merci aussi pour la Dugazon. Ce genre de recherche permet toujours de découvrir toute une galerie de personnes et personnages.

Re : Au clair de la lune...

Sur des couplets à la mode et quelques airs composés par Doche, Dupaty écrivit un premier livret en 1806 pour
un vaudeville donné à l’Opéra-Comique, intitulé Le Séducteur en voyage, et sous-titré les Voitures versées. Il reprit l’ouvrage en 1820 pour Boieldieu en inversant titre et sous-titre, et en réécrivant partiellement son livret

(Source, pdf à télécharger)

Comme vous le voyez, difficile de s'y retrouver, beaucoup d'ouvrages postérieurs du XIXe semblent également s'y perdre un peu. Il semblerait que Boyeldieu n'intervient qu'en 1820.

18

Re : Au clair de la lune...

En voici un autre enregistrement de 1860 qui est à peine audible.

https://archive.org/details/FirstSounds … nautogram_

19 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 16:02:17)

Re : Au clair de la lune...

Lire également ceci : https://books.google.it/books?id=gFtetm … mp;f=false

Il est fort possible qu'à Saint Petersbourg Boyeldieu ait réutilisé le Vaudeville de Dupaty (il reprenait des pièces données à Paris et n'inventait pas) mais la suite spécifie bien que l'auteur (Dupaty) l'a presque entièrement refait pour le théâtre Faydeau (création de 1820).

P.S.: donc, au point où nous en sommes, le plus vraisemblable serait qu'en 1808, Boyeldieu ait adapté le Vaudeville de 1806 à Saint Pétersbourg et qu'en 1820, il ait créé une œuvre nouvelle sur le livret refondu par Dupaty qui y aurait intégré Au clair de la lune.

20 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 15:55:42)

Re : Au clair de la lune...

pfinn60 a écrit:

En voici un autre enregistrement de 1860 qui est à peine audible.

https://archive.org/details/FirstSounds … nautogram_

On parie que c'est celui qui est en post-scriptum dans le message 11 smile ?

21 Dernière modification par Abel Boyer (11-10-2017 17:04:54)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Il est fort possible qu'à Saint Petersbourg Boyeldieu ait réutilisé le Vaudeville de Dupaty (il reprenait des pièces données à Paris et n'inventait pas) mais la suite spécifie bien que l'auteur (Dupaty) l'a presque entièrement refait pour le théâtre Faydeau (création de 1820).
P.S.: donc, au point où nous en sommes, le plus vraisemblable serait qu'en 1808, Boyeldieu ait adapté le Vaudeville de 1806 à Saint Pétersbourg et qu'en 1820, il ait créé une œuvre nouvelle sur le livret refondu par Dupaty qui y aurait intégré Au clair de la lune.

L'activité de Boïeldieu à Saint-Pétersbourg est assez bien documentée et il y a donné pas mal d'opéras.
http://www.operette-theatremusical.fr/2 … boieldieu/
https://books.google.fr/books?id=1BLHsv … mp;f=false
Boïeldieu a utilisé le premier livret de Dupaty pour ses Voitures Versées de 1808, mais c'est bien sa musique à lui, et non la musique du vaudeville de 1806 (musique de Doche) qui ont fait le succès de la partition à Saint-Pétersbourg.
En 1820, le livret primitif dont les faiblesses premières avaient été signalées, a été repris, mais je ne sais pas dans quelle mesure la musique a été aussi modofiée. Il est fort possible que Boïeldieu ait ajouté de nouvelles pages, et peut-être ces variations.
Je note dans la Bibliographie de la France d'août 1820 un grand nombre de Variations diverses sur Au Clair de la Lune. Je ne sais pas s'il est raisonnable de penser que les représentations d'avril 1820 aient déjà pu susciter cette abondante littérature composée, gravée et recensée en aout de la même année.
https://img15.hostingpics.net/pics/454792Capture.png
https://books.google.fr/books?id=_JxJAA … mp;f=false
En revanche, deux ans plus tard, oui, clairement, certaines compositions mentionnent la provenance des Voitures versées.
https://img15.hostingpics.net/pics/370746Capture1.png
https://img15.hostingpics.net/pics/303245Capture2.png
https://books.google.fr/books?id=Y10oQv … mp;f=false

P.-S. Finalement, la réactivité de la presse de l'époque m'épate, mais dès juin 1820, la Bibliographie fait clairement référence aux Voitures versées.
https://img15.hostingpics.net/pics/391307Capture.png
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6451361k/f327
Il est vrai que Boïeldieu éditait ses propres œuvres et a peut-être orchestré une campagne publicitaire ! De plus, je crois que les Voitures versées ont aussi été représentées à Rouen, la ville de Boïeldieu, quelques années avant Paris, mais je ne sais pas dans quelle version.
Cela dit, et pour en revenir à l'air, j'ai trouvé d'autres Variations sur Au Clair de la Lune en 1815 :
https://img15.hostingpics.net/pics/550339Capture.png
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6451394z/f127
ce qui montre la popularité de l'air avant 1820 (popularité confirmée par le fait qu'il a servi de timbre à beaucoup d'autres textes comme l'ont montré les nombreuses citations de Gallica dans le message 10 plus haut).

22 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 17:11:54)

Re : Au clair de la lune...

Il y a bien eu une parodie-vaudeville qui citait explicitement les Voitures versées dès décembre 1820. Si l'oeuvre a eu un tel succès, on peut supposer que les compositeurs ont profité de l'aubaine et de la mode pour produire et monnayer rapidement toutes sortes de variations.

C'est bien ce que l'on voit à notre époque avec un nouvel épisode de la Guerre des étoiles, un nouveau pape ou un nouveau bébé royal. Les marchands du temple sont toujours là.

P.S.: vous avez modifié votre message quand je rédigeais le mien. Pour la représentation en Normandie en 1817, je suis aussi tombé dessus, il s'agissait du vaudeville de 1806. Je ne peux pas mettre sur le forum tout ce que je trouve.

23

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:
pfinn60 a écrit:

En voici un autre enregistrement de 1860 qui est à peine audible.

https://archive.org/details/FirstSounds … nautogram_

On parie que c'est celui qui est en post-scriptum dans le message 11 smile ?

Heureusement, je n'ai pas joué mon va-tout parce que vous avez raison.  C'est le même enregistrement.

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Il y a bien eu une parodie-vaudeville qui citait explicitement les Voitures versées dès décembre 1820. Si l'oeuvre a eu un tel succès, on peut supposer que les compositeurs ont profité de l'aubaine et de la mode pour produire et monnayer rapidement toutes sortes de variations.

Ce succès immédiat de l’œuvre et notamment des Variations sur Au clair de la Lune est évoqué dans la note 8 ici :
https://books.google.fr/books?id=1BLHsv … mp;f=false

Je vois qu'en juin 1820, une folie-vaudeville semblait aussi profiter de l'aubaine, sous le titre Le Clair de lune ou les Trois Vampires, avec des Variations sur l'air connu, par Blanchard.
https://books.google.fr/books?id=eFVoAA … mp;f=false

25 Dernière modification par Abel Boyer (11-10-2017 18:29:57)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

P.S.: vous avez modifié votre message quand je rédigeais le mien. Pour la représentation en Normandie en 1817, je suis aussi tombé dessus, il s'agissait du vaudeville de 1806. Je ne peux pas mettre sur le forum tout ce que je trouve.

En fait, je visais cette représentation :
https://dezede.org/evenements/?oeuvre=| … es_1=1817, avec trois courtes œuvres au programme :

1.     Philidor (Fr.-A.) [comp.], Quétant (Fr.-A.) [libr.], Le Maréchal ferrant, opéra-comique en deux actes
2.     Boieldieu (Fr.-A.) [comp.], Creuzé de Lesser (A.) et Favières (E. de) [libr.], Le Nouveau seigneur de village, opéra-comique en un acte
3.     Boieldieu (Fr.-A.) [comp.], Dupaty (E.) dit Mercier-Dupaty [libr.], Les Voitures versées, opéra-comique en deux actes

Les deux premières œuvres sont bien des opéras-comiques de Philidor et Boïeldieu, mais il semble bien que la troisième soit simplement le vaudeville de 1806 comme le suggère le texte de l'annonce.
https://dezede.org/sources/id/22533/
On en trouve confirmation dans les autres soirées du Théâtre des Arts à la même époque qui mêlent théâtre (comédie) et opéra :
https://dezede.org/dossiers/theatre-des … y=reversed

Re : Au clair de la lune...

Henri Irénée Marrou écrivait que la popularité de l'air ne s'est étendue que très progressivement des milieux lettrés (ceux qui avaient pondu la version libertine) aux couches profondes de la société (premier lien du message 13).

Il est possible que ce soit en 1820 que l'air est définitivement lancé et atteint enfin vraiment tout le monde. Dans la version que nous connaissons encore aujourd'hui.

Curieux quand même qu'il n'y ait pas moyen de trouver l'ombre d'une trace d'une citation d'un des trois autres couplets avant 1843 (j'ai essayé pas mal des vers suivants tout en n'étant pas certain d'avoir tout tenté). On serait tenté d'imaginer que Du Mersan les a inventés. Va falloir encore creuser.

Et la plume est toujours là.

27 Dernière modification par éponymie (11-10-2017 21:12:52)

Re : Au clair de la lune...

La genèse dans le Dictionnaire amoureux de la chanson française de Bertrand Dicale (je suppose que son savoir lui vient d'Henri Irénée Marrou).

L'air du gagne-petit en 1799 : https://books.google.it/books?id=hWJPAA … mp;f=false.

Les paroles, connues des milieux artistiques et lettrés, sont plusieurs fois cités et pastichés par les auteurs de spectacles (impossible de trouver deux versions identiques) jusqu'à l'année charnière, 1820, qui figera une version. Comment Du Mersan a-t-il bien pu connaitre le texte complet ? Dès 1798 (il est né en 1780), il travaille et écrit - intensément - pour le théâtre, c'est dans ce milieu qu'il aura connu le texte d'origine, il s'en sera souvenu 45 ans plus tard sans que le texte complet ait jamais été publié ou utilisé d'une manière ou d'une autre auparavant.

Je ne sais pas si c'est la bonne explication, elle me semble fort rationnelle (ce qui n'est en rien une garantie quant à sa véridicité).

Auquel cas, la plume a toujours été une plume et nous pouvons fermer notre porte. Et faire ce que nous voulons.

Re : Au clair de la lune...

Le genèse des Voitures versées opéra comique en 1808 (à partir de la page 44).

https://archive.org/stream/boieldieu00a … h/voitures

Malheureusement, si le texte permet de supposer que les variations sur Au clair de la lune n'a été introduit qu'en 1820, une place est cependant laissée au doute.

Re : Au clair de la lune...

Enfin notre premier couplet à une date antérieure à la version 1820 des Voitures versées, c'est dans Tous les vaudevilles ou chacun chez soi, présenté à Paris le 16 aout 1817.

https://img15.hostingpics.net/pics/2971921817Auclairdelalune.jpg
(source)

30 Dernière modification par éponymie (15-10-2017 18:53:37)

Re : Au clair de la lune...

La partition complète, qui serait la plus ancienne connue (1811)

https://img15.hostingpics.net/pics/6092181811partition.jpg

(source, après la page 380 commence la table alphabétique des airs, le nôtre est répertorié à la page 5)

La source de mon savoir, un vieille  discussion d'il y a 20 ans sur un forum anglophone, avec cette intervention de 2002 :

The first known printing of the melody is in the 1811 edition of La Clé du Caveau (Paris). p. 22; BN and JF. Adrien Boieldieu's Les Voitures Versées, performed in St. Petersburg on April 26, 1808, included this melody to other words; as far as is known, the opera was first published about 1820 by Boieldieu Jeune, Paris, the year of its performance in that city-copy at NYPL (melody at p. 185). Ignaz Moscheles' Fantaisie et Variations on the melody, op. 50, were published by Schlesinger, Berlin, in 1821-1822, at LC; and Camille Pleyel's Variations on this air "Chantée dans l'Opéra des Voitures Versées" were published by Ignace Pleyel & Fils, Paris, probably about the same time, at BN.
The first known printing of the words (and the melody) is in Chants et Chansons Populaires de la France, Deuxième Série ([Paris], 1843), on an unnumbered page, the 33rd of 42 songs; BN, BM, LC, NYPL and JF; the Introduction states that this is the first publication of Au Clair de la Lune. It is likely that this general collection was originally published in separate installments commencing about Feb. 26, 1842, and Au Clair de la Lune may have therefore been first published in an earlier installment, but no copy of any such earlier installment has been found. See the only located separate issue at BN (Vmh 2640), particularly the back cover.

(source)

La date de 1843 était déjà connue. Si j'ai bien compris, l'intervenant dit que les paroles sont de Boieldieu qui aurait reppris la mélodie en changeant les mots pour sa représentation du 26 avril 1808 à Saint-Petersbourg.

Seulement je trouve que notre fameux couplet ressemble furieusement à celui de La marchande de mode donné au théâtre du Vaudeville, à Paris, le 13 janvier de la même année. C'est dans le message 7 mais je le republie ici :

https://img11.hostingpics.net/pics/8654931808Auclairdelalune.jpg

Il s'agit effectivement du plus ancien  texte connu proche du nôtre. Que conclure ?

Je continue à chercher mais pour l'instant la plume et le mot ne sont documentés que pour les Voitures versées.

P.S.: j'en profite pour glisser le lien vers l'air de 1801 que j'avais oublié dans le message 10.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 … lune"

Re : Au clair de la lune...

La récolte de ce soir :

Une vulgate lettrée de la « tradition française »

Le XIXe siècle sera, certes, celui de la Clé du Caveau de Pierre Capelle. Mais retenons d’abord cette dynamique, déjà évoquée précédemment, d’archéologie et d’édification de monuments (le terme s’étend aux objets de littérature) qui s’amplifie dans le cours du siècle et travaillera sur le secteur de la chanson en offrant au genre l’honorabilité d’une cause littéraire, et l’hospitalité d’une histoire nationale. Des « archéologues », des savants, des lettrés vont fournir de la marge documentaire au genre « chanson », développer des catégories internes (« chansons populaires » et autres) en leur procurant des corpus de formats. Que l’on pense par exemple aux grands projets d’enquêtes à l’échelle locale ou nationale, de « chants et chansons populaires » et à ce qui deviendra à partir des années 1870 environ, le folklore et plus tard la « chanson traditionnelle » - le timbre y constituera un lieu de controverses.

Et ce même siècle, à partir des années 1840, va fixer comme une « vulgate lettrée » de la chanson de « tradition française » que l’on appelle alors « populaire » ou « nationale », en puisant chez les chansonniers vaudevillistes du siècle précédent ou chez leurs héritiers des premières décennies du XIXème ; on y mêle vaudevilles, complaintes et romances, noëls, chants à danser, chansons patriotiques ou militaires et autres. Ainsi ces nombreuses publications à l’usage des salons, avec illustrations et accompagnements de piano, intitulées Chants et chansons populaires de la France, Chansons nationales et populaires, Chansons et rondes enfantines, Rondes et chansons populaire illustrées, etc., dues pour un grand nombre d’entre elles aux Théophile Marion (1780-1849), dit Dumersan, numismate, archéologue, collectionneur, romancier, vaudevilliste, appelé parfois « le conservateur de la chanson française », Noël Ségur (les deux collaboreront), V. F. Verrimst, etc.

Ces anthologies, en produisant, reproduisant, éditant ou rééditant à l’usage des salons, des écoles et des enfants (elles sont abondamment illustrées) vont stabiliser un corpus de formats qui constituent désormais la base de nos florilèges de « la chanson française » : elles trient, fixent, édulcorent jusqu’à supprimer des couplets, remplacer des expressions ou des mots. Elles n’ont certes pas créé nos Cadet Roussel, Au clair de la lune, Le Roi Dagobert, Il était une bergère, J’ai du bon tabac, Malbrough, Giroflé-girofla, La Tour, prends garde, Sur le pont d’Avignon et tant d’autres, mais elles vont les faire expérimenter comme répertoires de salon à l’usage des familles, et les installer durablement dans le paysage des objets de patrimoine chansonnier à révérer et transmettre. Ces chansons sont aujourd’hui encore bien connues ; on les retrouve dans la plupart de nos paroliers de mouvements de jeunesse ou dans les livres pour enfant. Sans doute serait-on surpris, pour plus d’un exemple, du travail de « nettoyage » opéré par les Dumersan et autres ; notre célèbre Au clair de la lune n’était pas nécessairement la chanson sage que l’on connaît aujourd’hui

(source)

Le paragraphe suivant nous dit comment est né le guide la clé du caveau d'où est tirée notre partition de 1811 ainsi que l'importance qu'il a eu.

32 Dernière modification par éponymie (19-10-2017 23:03:56)

Re : Au clair de la lune...

Où en sommes-nous ? Voici les différents vers et leurs dates d'apparition dans les archives disponibles en ligne.

  1. Au clair de la lune : 1797 comme nom de l'air, mai 1806, comme premier vers

  2. Mon ami Pierrot : 1814

  3. Prête-moi ta plume : 1817

  4. Pour écrire un mot : 1817

  5. Ma chandelle est morte : janvier 1808

  6. Je n'ai plus de feu : janvier 1808 (version proche en 1817)

  7. Ouvre-moi ta porte : 1817 (versions proches en janvier 1808 et en 1809)

  8. Pour l'amour de Dieu : janvier 1808

Le premier couplet entier (datant, dans sa version moderne et en l'état actuel de nos  recherches, d'avril 1820) apparait dans un version extrèmement proche en 1817. Les  trois autres ne sont documentés qu'en 1843 (on ne peut guère citer que la brune du troisième couplet qui apparait – dans la même acception – dès 1801).

Pierrot (avec le feu et le sens coquin) apparait dans l'air pour la première fois en janvier 1809, Monsieur Chose ou la foire de Pantin.

https://img15.hostingpics.net/pics/9281271809auclairdelaluneMonsieurChose.jpg

et en 1814, dans L'ami des Bourbons ou le chansonnier des royalistes (il s'agit ici de l'édition de 1815), nos deux premiers vers sont cités dans un pot-pourri de chansons qui en compose une autre.

https://img15.hostingpics.net/pics/9884161814Lamichansonnier.jpg

Rappelons également qu'une version précoce du couplet écrite à Saint-Pétersbourg dès avril 1808 n'est pas du tout démontrée. La question est posée depuis longtemps : dans Le ménestrel (07/02/1864) l'auteur doute déjà que Boieldieu ait composé ses fameuses variations en Russie.

Rien de rien à la fin du XVIIIe.

33 Dernière modification par éponymie (19-10-2017 23:06:19)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Rien de rien à la fin du XVIIIe.

Enfin une trace plus ancienne de notre air, dans Le dentiste, vaudeville présenté le 23 janvier 1797

https://img4.hostingpics.net/pics/6710491797Auclairdelalune.jpg

34

Re : Au clair de la lune...

Les élisions sont intéressantes, car elles témoignent de la prononciation courante, du moins à Paris. Néanmoins, je m'interroge sur le pied manquant dans l'avant-dernier vers.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

Re : Au clair de la lune...

Je suppose qu'il y a diérèse  sur 'ia' dans "mariage".

36

Re : Au clair de la lune...

Je n'y avais pas pensé.

Caesarem legato alacrem, ille portavit assumpti Brutus.

Re : Au clair de la lune...

Je suis  en train de terminer un grand petit tour dans les comédies, comédies-parades, farces et vaudevilles des années 1790. Curieux de voir comme les airs étaient repris – avec des textes différents – d'une pièce à l'autre : on en mentionnait le premier vers d'origine (ou d'une version suivante comme pour notre chanson), ou le titre du vaudeville dont il était tiré, on précisait s'il était nouveau – en donnant ou non un titre – et pouvait alors inclure la partition. Des chansonniers (recueils d'airs) en livraient des recensions.

Le nôtre était très loin d'être parmi les plus utilisé pour citer des titres connus, Cadet Roussell, Il pleut bergère se rencontraient bien plus souvent), les tubes de l'époque étaient l'air de la Croisée, celui du vaudeville des Visitandines, celui de la pipe de tabac, de la soirée orageuse, de Joconde, etc.

Le voici en 1798 sous le titre En roulant ma brouette, nous l'avions déjà rencontré avec le titre Le gagne-petit en 1799 (cf. message 27). De 1790 à 1797, on n'en trouve pas trace dans Gallica.

https://img4.hostingpics.net/pics/5877551798Enroulantmabrouette.jpg
https://img4.hostingpics.net/pics/4064051798Enroulantmabrouette1.jpg

source

On rencontre infiniment plus souvent Arlequin, Colombine et Pierrot que Lubin. Voici justement une version de notre chanson sans l'aimable Lubin presque aussi ancienne que celle livrée par Du Mersan puisqu'elle date de 1846  :

https://img4.hostingpics.net/pics/6013841846Auclairdelalune.jpg

(source)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Je suis  en train de terminer un grand petit tour dans les comédies, comédies-parades, farces et vaudevilles des années 1790. Curieux de voir comme les airs étaient repris – avec des textes différents – d'une pièce à l'autre : on en mentionnait le premier vers d'origine (ou d'une version suivante comme pour notre chanson), ou le titre du vaudeville dont il était tiré, on précisait s'il était nouveau – en donnant ou non un titre – et pouvait alors inclure la partition. Des chansonniers (recueils d'airs) en livraient des recensions.

C'est la définition même du timbre :

2. Motif ou air connu sur lequel on ajoute un texte, pour créer une nouvelle chanson. Il trouvait des motifs d'un style franc, facile, naïf, que l'on a popularisés en en faisant des « timbres » (Pesquidoux, Livre raison, 1925, p. 127).Et voici que dans les voix qui grimpaient un peu fausses (...) Lamberdesc reconnut un timbre déjà connu (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 107).

En tout cas, c'est un voyage très  sympathique dans le temps et les chansons  que vous nous offrez. Merci.

39 Dernière modification par éponymie (22-10-2017 10:54:57)

Re : Au clair de la lune...

Oui, mais je me demande si à l'époque on ne parlait pas d'ariettes. Le TLF semble dire qu'il s'agissait d'un air non accompagné de paroles mais je doute un peu.

P.S.: illustration (il est rare de rencontrer le mot explicitement indiqué dans le texte)

https://img4.hostingpics.net/pics/6461621798ariette.jpg

(source)

40 Dernière modification par éponymie (22-10-2017 12:52:50)

Re : Au clair de la lune...

Bien, bien, bien : je  crois que je tiens l'origine de notre air.

En 1779, Pierre-Antoine-Augustin de Piis  (1745-1832) publia un recueil de contes en vers, Les augustins, contes nouveaux, parmi ceux-ci, La rémouleuse (intégralement cité en 1810, je ne trouve pas l'ouvrage d'origine mais seulement une citation partielle du conte en 1780)

https://img4.hostingpics.net/pics/6093911779Larmouleuse1.jpg
https://img4.hostingpics.net/pics/2048361779Larmouleuse2.jpg

(source)

C'est rémouleuse d'occasion était donc une fricoteuse. C'est charmant smile

Il se trouve que de Piis, avec Pierre-Yves Barré (1749-1832) a fondé en 1792 le théâtre du Vaudeville dont Barré fut directeur jusqu'en 1815, et écrivit avec lui nombre de vaudevilles. Que  Barré et de Piis aient un jour écrit une pièce et composé notre air sur un texte s'inspirant du conte – leur collabaration commença en 1776 - ne serait pas surprenant. D'où les titres La rémouleuse, En roulant ma brouette puis Le gagne-petit strictement liés au conte.

Et ce serait à une date antérieure à 1797 qu'un texte commençant par Au clair de la lune aurait été écrit sur cet air.

Malheureusement, seulement deux de leurs pièces – sur au moins une vingtaine - sont conservées dans Gallica, et nous n'en sommes pour l'instant réduit à ces  supputations.

P.S.: GL a un fonctionnement mystérieux, je viens de trouver l'original

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Oui, mais je me demande si à l'époque on ne parlait pas d'ariettes. Le TLF semble dire qu'il s'agissait d'un air non accompagné de paroles mais je doute un peu.

Non ariette et timbre sont deux choses très différentes, même si les timbres ont eu souvent comme genèse une ariette populaire.Le timbre vient d'un air qui est originellement accompagné de paroles (mais il pourrait -- rarement -- ne l'être pas) mais dont seule la musique sert ensuite de support à d'autres paroles.
Dans cette édition de 1809 de Le Caveau moderne ou Le Rocher de Cancale, notre Au Clair de la Lune est dans la liste des timbres.
https://img4.hostingpics.net/pics/537977Capture.png
et p.73 :
https://img4.hostingpics.net/pics/696344Capture.png

42 Dernière modification par Abel Boyer (22-10-2017 16:23:22)

Re : Au clair de la lune...

éponymie a écrit:

Bien, bien, bien : je  crois que je tiens l'origine de notre air.

En 1779, Pierre-Antoine-Augustin de Piis  (1745-1832) publia un recueil de contes en vers, Les augustins, contes nouveaux, parmi ceux-ci, La rémouleuse (intégralement cité en 1810, je ne trouve pas l'ouvrage d'origine mais seulement une citation partielle du conte en 1780)
[...]
P.S.: GL a un fonctionnement mystérieux, je viens de trouver l'original

Le conte était déjà publié en 1776 :
https://books.google.fr/books?id=SW1LAA … mp;f=false

Cela dit, je ne vois pas bien le rapport de ce conte avec notre air. Il faut supposer qu'il avait été fait aussi sur le même thème ou un thème semblable un vaudeville dont la prosodie était très différente. Avons-nous trace de celui-ci ?

Oui, c'est l'air du gagne-petit, ou roulant ma brouette, dont voici une mention de 1799 :
https://img4.hostingpics.net/pics/911165Capture.png
https://img4.hostingpics.net/pics/147602Capture1.png
Là, la prosodie convient parfaitement.

Ceci montre qu'il ne faut pas chercher une rémouleuse mais un rémouleur. On peut remonter le temps, avec l'air du rémouleur mentionné ici, en 1778 :
https://img4.hostingpics.net/pics/392613Capture.png
C'est la plus ancienne que j'ai trouvée sur Google Livres (je n'ai pas fouillé Gallica).
Avec l'air "roulant ma brouette", on a des dates contemporaines de celle-ci :
1780 Aristote amoureux
https://img4.hostingpics.net/pics/434107Capture.png
1783 (ou 1784) Léandre-Candide
https://img4.hostingpics.net/pics/553796Capture1.png
Cette dernière chansonnette est chantée par... Pierrot (entre autres) et l'auteur est ... Pierre-Antoine-Augustin de Piis.

43 Dernière modification par éponymie (22-10-2017 17:36:20)

Re : Au clair de la lune...

Et le premier vers d'un texte pouvait changer le nom du timbre, dès sa première édition la Clé du Caveau (cf. message 30) donne Place à l'équipage comme nom alternatif à Au clair de la lune, en voici l'origine en mai 1797 :

https://img4.hostingpics.net/pics/6366921797LeMariagedeScarron.jpg

(source)

Sur l'association de Piis, Barré, lire cet article.

Abel Boyer a écrit:

Cela dit, je ne vois pas bien le rapport de ce conte avec notre air. Il faut supposer qu'il avait été fait aussi sur le même thème ou un thème semblable un vaudeville dont la prosodie était très différente. Avons-nous trace de celui-ci ?

Bien entendu la prosodie est différente. Mais tous les éléments des différents titres de notre air - La rémouleuse, Le gagne-petit, En roulant ma brouette jusqu'au rémouleur - y sont. Quant à faire le lien entre le conte et une pièce encore à débusquer, c'est devenu un des objectifs secondaires de ce fil avec la découverte de la première pièce utilisant notre timbre avec un texte commençant par Au clair de la lune. Merci de participer smile

Nous voici donc avec un air du rémouleur (1778) de toute façon postérieur à la première édition connue du conte (1776), la thèse du conte à l'origine d'un premier vaudeville n'est donc pas encore démolie.

L'extrait de 1799 a déjà été cité (cf. message 27). Et ce n'est de toute façon pas le premier à utiliser notre timbre avec Roulant ma brouette en premier vers puisque nous l'avions déjà rencontré sous ce titre en 1798 (cf. message 37) et maintenant également en 1797.

P.S.: il existe des recueils des pièces de Barré et de Piis, je n'ai pas encore pris le temps de les explorer. J'avais déjà trouvé les pièces de 1780 et 1783, c'est par elles (et je sais quel détour tortueux de mes recherches) que je suis arrivé au conte.

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