greg a écrit:florentissime a écrit:La réalité extralinguistique (physique, chimique, énergétique, biologique, mathématique, géographique, historique, poétique, musicale, artistique, philosophique, intellectuelle, manuelle, littéraire, romanesque, pâtissière, industrielle, agricole, financière, vétérinaire, philatélique, sportive, introspective etc) n'a strictement aucun rapport avec l'aspect grammatical d'un verbe.
La réalité « extra-linguistique » n'aurait aucun rapport avec nos choix grammaticaux ?
Je ne puis évidemment partager ce genre de postulat...
Et puis il faudrait définir ce que tu entends par là. Est-ce une définition par la négative d'une fantasmée réalité intra-linguistique ?
Ne recommence pas à travestir. Relis plutôt le message 61.
Désolé, mais pour moi, un choix de conjugaison, comme entre le passé simple et l'imparfait, cela permet de moduler l'aspect grammatical. Je ne vois pas ce que je travestis en employant ce terme.
greg a écrit:L'existence des formes françaises marcher marchant marché / grandir grandissant grandi / lire lisant lu / venir venant venu / avoir ayant eu / être étant été etc n'a strictement aucun rapport avec les cycles de Kondratiev, la géométrie euclidienne, le beurre meunière, la clef de sol, la maladie de Carré, le matérialisme historique, l'horlogerie suisse, la linguistique guillaumienne, la météo, le fauvisme, la danse classique, la guerre de 1870, la tectonique des plaques, l'amour courtois, les Ch'tis à Ibiza, la psychologie, le polythéisme, la société de consommation, le tsar Nicolas II etc.
Et après, c'est toi qui m'accuse de travestissement ?
Encore désolé, mais je n'ai parlé que du flux du procès, c'est-à-dire une quantité élémentaire du procès rapportée à une quantité élémentaire de durée...
greg a écrit:L'existence d'un mode impersonnel à trois tiroirs n'a même aucun lien avec ce que nous, individus contemporains, disons, dirons ou avons dit. La trimorphie du temps in posse comme dirait l'autre — éventuellement réduite (à l'oral et à la liaison près) à une dimorphie pour l'écrasante majorité des verbes français — n'est pas un choix grammatical de Tartempion mais une caractéristique fondamentale de la langue française. Ce trait existait déjà à l'époque la plus reculée de l'ancien français. Il n'existera peut-être plus au XXXe siècle, ou pas — pareil pour notre langue : nous n'en savons rien.
Et alors ? Quel est le rapport avec la discussion ?
greg a écrit:Personne ne ne te demande de « partager ce postulat » et personne ne te demande de croire que la Terre tourne autour du Soleil.
Tu fais exactement ce que tu veux.
Par contre, je te demande encore une fois la définition du passé simple par la seule consécution.
Il suffit de lire les textes classiques pour s'en apercevoir.
Quant aux autres usages, ils sont subalternes.
greg a écrit:florentissime a écrit:- L'aspect sécant consiste à imager une infime partie du procès sur une infime partie du temps : c'est donc la définition même d'un flux.
Louis XIV régnait depuis 72 ans quand il mourut
Louis XIV devait régner 72 ans
C'est bien l'idée d'un flux, celui du règne, qui s'interrompt.
Pas le choix : C'est une simple règle de trois.
Si un procès P dure T,
un élément de procès dP est défini par :
dP = P/T dt
où dt est un élément de durée.
d'où dP/dt = P/T,
ce qui est la définition même du flux.
greg a écrit:florentissime a écrit:- L'aspect global consiste à imager l'intégralité du procès dans le temps : c'est, en terme mathématique, l'intégrale du flux du procès du début à la fin.
Pas du tout. Le « flux » et « l'intégrale du flux » n'ont aucun rapport avec l'aspect grammatical d'un signe linguistique verbal. La mathématisation numérique est inutile : c'est du cratylisme, le plus crasse qui soit. La topologie, à la rigueur, est un moyen plus astucieux de rendre compte des effets de l'aspect global. Peu importe le « flux » entre les bornes : ce qui importe, c'est précisément les bornes et elles seules. D'ailleurs les deux bornes — implicites ou explicites — sont éventuellement réduites à leur amalgame ; c'est l'effet ponctualisant du passé simple :
Louis XIV régna 72 ans
Louis XIV régna en despote
Louis XIV fit trembler l'Europe entière
Je te signale qu'une intégrale contient des bornes et que la théorie de l'intégration est très dépendante de la topologie...
Mais si tu veux prendre l'intégralité d'un procès dans la durée, pour être correct du point de vue de la dimension physique, il faut rapporter le procès à une durée. C'est pourquoi, une intégration dans le temps se fait sur le flux, qui est une quantité élémentaire de la grandeur considérée rapportée à sa durée élémentaire.
⌠ 72
⎮ d (Louis XIV règne)/dt . dt = Louis XIV régna pendant 72 ans.
⌡ 0
⎛ ⌠ 72 + dt ⎞ d (Louis XIV règne)
lim ⎜ ⎮ d(Louis XIV règne)/dt . dt ⎟ = Louis XIV régnait depuis 72 ans = ----------------------------(72)
dt -> ε ⎝ ⌡ 72 - dt ⎠ dt
Le flux du règne de Louis XIV fut interrompu après 72 ans par sa mort.
Louis XIV régnait depuis 72 ans quand il mourut.
Louis XIV flut par régner depuis 72 ans quand il mourut.
-> la nuance d'aspect introduit par le verbe fleuvoir rend l'imparfait inutile.
greg a écrit:florentissime a écrit:Si tu es courroucé, c'est bien que j'ai franchi une limite que tu répugnes à franchir...
Rassure-toi, tes invectives sont comme tes raisonnements : stériles.
Ya bien des limites que je répugne à franchir mais on doit pas parler des mêmes...
Quant à la fécondité des théories Guillaumienne, elle ne saute pas aux yeux.
greg a écrit:florentissime a écrit:L'itératif du passé simple est plutôt multiplicatif, en ce sens qu'il reste d'aspect global, avec un début et une fin, tandis que l'itératif à l'imparfait est d'aspect sécant, en ce qu'il peut se prolonger sans fin.
Alors, le passé simple, « plutôt multiplicatif » ou plutôt pas ?
Tu nous fait de la linguistique normande : p'têt ben qu'oui, p'têt ben qu'non.
Et là, ça se prolonge sans fin ou c'est « plutôt multiplicatif » ?
on frappait soudain trois coups à la porte
On dirait du Simenon... Un usage pittoresque de l'imparfait.
On frappa soudain trois coups à la porte fait l'affaire, c'est inutile de chercher à tout embrouiller.
greg a écrit:florentissime a écrit:Revenez à l'étymologie : une marche (une marque), c'est d'abord une frontière, une limite.
Marcher, c'est donc d'abord franchir une limite, et, par extension, une distance.
L'étymologie est tout à fait inutile en l'espèce.
Que marcher se dise glumpser ou lichouder, tu n'as pas répondu à l'objection faite message 64 :
ma montre est cassée, elle glumpse/marche/lichoude pas.
J'y ai très bien répondu, par l'étymologie.
Il y a une tendance générale à ce que des termes, qui qualifient au départ une étendue, finissent par qualifier un mouvement. C'est normal : Une étendue rapportée au temps, c'est un flux de distance, donc une vitesse, un mouvement.
Pour cette raison, le terme marcher est très polysémique, comme le terme passer.
Vous avez beau jeu de vous appuyer sur la polysémie du terme, mais c'est très petit, et cela montre combien vous êtes désespéré...
greg a écrit:florentissime a écrit:Que le terme marcher ait fini par rendre l'idée de mouvement montre précisément que c'est l'expression des réalités extra-linguistiques qui impose au locuteur d'imager le flux du procès dans certaines situations d'analyse. Dans l'exemple que vous citez, le terme marcher peut être pris comme synonyme de fleuvoir, et on pourrait donc écrire :
Ma montre est cassée, elle ne se fleut plus.
Absolument ! Tu as d'ailleurs été devancé par Peyo :
ma montre est schtroumpfée, elle schtroumpfe pas
Sauf que je t'ai précisément défini le terme fleuvoir : il saisit le flux du procès, c'est-à-dire un élément de procès rapporté à sa durée élémentaire. Tu es de mauvaise foi. Dans le genre travestissement...
greg a écrit:florentissime a écrit:Il n'y aurait que des mauvaises raisons de faire de la linguistique une chapelle repliée sur elle-même. Tant la linguistique que la physique se font avec la même intelligence. Or, en physique, pour analyser l'évolution d'un état dans le temps, il faut nécessairement en passer par son flux, sa densité temporelle.
C'est rigolo ce que tu viens d'écrire.
À propos de Guillaume :
Le théoricien préférait se référer à quelques grands savants chez qui les préoccupations théoriques n'étaient pas séparées de l'idée même qu'ils se faisaient de l'homme. Tel Leibniz proclamant que la langue est le miroir de l'entendement ou qu'« il faut qu'un écuyer tranchant sache les jointures », cité en exergue du dernier article ; ou H. Poincaré, précisant la marche de l'esprit vers une abstraction croissante et suggérant certaines comparaisons entre la langue et les mathématiques. Plus tard enfin, P. Teilhard de Chardin, épaulant par son concept d'« hominisation » l'idée de la portée anthropogénétique de la construction des langues. Il ne faudrait pas pour autant oublier le fonds plus ou moins anonyme de la grammaire comparative, à l'étude approfondie de laquelle s'était adonné le linguiste. Non plus qu'une formation scientifique, en particulier mathématique, qui l'amena toute sa vie à préférer s'entretenir avec des physiciens ou des ingénieurs qu'avec des littéraires ou des philosophes.
→ André Jacob, 1970
Ok, la langue reflète un entendement.
Mais un entendement, c'est une manière de comprendre.
Donc Guillaume explore une manière de comprendre, celle induite par la langue française.
Comme la mode début 20ème fut au matérialisme et au rationalisme à outrance, ce qui a porté à nombres de délires (1ère guerre mondiale, 2nde guerre mondiale), mais que cette mode est passée, Guillaume n'est plus à la mode...
C'est l'inconvénient de s'appuyer sur des modes passagères. On ne touche pas l'universel.
De plus, je trouve que les principes Guillaumien ne sont pas clairement exprimés. J'aime quand une théorie pose précisément les principes sur lesquels elle se fonde, afin qu'on puisse les jauger.
J'ai l'impression que Guillaume cherche à découvrir « l'intériorité » de l'homme par la grammaire. Mais, excusez-moi, je trouve cela débile. Le langage a pour finalité d'exprimer des réalités (intérieures ou extérieures), donc le travail du linguiste est de produire des concepts qui permettent au langage de parvenir à sa fin.
Un linguiste a pour finalité de concevoir les réalités internes et externes aux hommes pour produire grammaire et lexique, mais Guillaume semble chercher à analyser grammaire et lexique pour concevoir l'intériorité des hommes. Du coup, il ne fait qu'aboutir à découvrir l'entendement des linguistes qui sont passés avant lui. Quoiqu'il en soit, ce n'est pas un linguiste.