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forum abclf » Écriture et langue française » Emploi littéraire du "que"

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Messages [ 17 ]

Sujet : Emploi littéraire du "que"

Bonjour à tous.
Pour un texte que je rédige, j'ai un doute quant à l'emploi littéraire du "que".

Je simplifie le contexte pour ne reproduire que le cœur du problème. Cette phrase vous semble-t-elle juste?


que ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité?

Faut-il bien garder le "NE" ?
Et ponctueriez-vous par l'exclamation ou l'interrogation?

A votre avis, est-ce là une utilisation similaire à celle donnée comme suit sur wiktionnaire :

(Littéraire) Efface une dislocation et réintègre un thème dans une phrase[2].
C’est une belle fleur que la rose. (← C’est une belle fleur, la rose.)
Qu’est-ce que c’est que la liberté ? (← Qu’est-ce que c’est, la liberté ?)


Merci à ceux qui, je l'espère, se passionnent pour une telle question.
jp.

2 Dernière modification par Ylou (29-10-2018 07:43:52)

Re : Emploi littéraire du "que"

Intéressante question.
Dans vos deux exemples :
C’est une belle fleur que la rose. ← C’est une belle fleur, la rose.
Qu’est-ce que c’est que la liberté ? ← Qu’est-ce que c’est, la liberté ?

le "que" introduit le sujet réel : la rose est une belle fleur  - qu'est la liberté/la liberté est quoi ?

si on enlève le sujet apparent le "que" disparaît. Je ne sais pas comment le nommer : explétif ?

Autre est le "que" de:que ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité?
cette phrase signifie : comment ne deviendrait-on pas malade...?.
"Que" est ici adverbe exclamatif ou interrogatif.
Il me semble d'ailleurs qu'il ne peut être employé ainsi qu'à la forme négative "que ne". Je peux me tromper mais je ne trouve pas d'exemple avec une forme affirmative.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Emploi littéraire du "que"

Le tour "Que ne..." avec le sens de "Pourquoi..." est une construction spéciale, qu'on trouve commentée sur divers forums de langue, ici ou ailleurs :
http://www.languefrancaise.net/forum/vi … hp?id=5252
https://www.etudes-litteraires.com/foru … us-p2.html
http://www.achyra.org/francais/viewtopic.php?t=5485

Pour ma part, je ne comprends pas bien la phrase proposée : que ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité?
Le sens de "pourquoi" pris en principe par "Que ne" ne me paraît pas bien convenir (à moins que le contexte, que nous ne connaissons pas, le justifie), d'autant que je ne crois pas usuel de faire suivre ce "que ne" d'un conditionnel. Et si vous voulez donner le sens de "comment" que suggère Ylou, je crois qu'il faut écrire... "comment" : Comment ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité?

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Re : Emploi littéraire du "que"

Moi je comprends bien le "que ne deviendrait-on malade..." même si je trouve la formulation un peu lourde. On ne le dirait pas cependant. On aurait aussi rarement l'occasion de l'écrire.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Emploi littéraire du "que"

Merci pour les commentaires intéressants.

Je suis désolé de compliquer encore l'étude de cas : j'avais composé une phrase de même structure pour simplifier, mais je me rends compte qu'elle enlève une part du sens (de regret, de vanité, d'irréel, en fait de flou...) justifiant peut-être en soi l'usage du "que ne".

Voici la phrase dans sa complexité :


Tel était le poids avec lequel il vivait, dans le secret de son âme et des couloirs ministériels, que ne deviendrait-on dépressif après la mort d'un ami qu'on n'avait plus vu depuis vingt-cinq ans?


Le "que ne" n'est pas seulement utilisé par préciosité : l'individu en question est dépressif mais cela ne fait pas vraiment sens qu'il le soit aux yeux des autres. C'est le "je" qui est dépressif, le "on" ne le reconnaîtrait pas. Dans cette forme impersonnelle "on", il y a bien sûr indirectement encore lui en tant qu'agent neutre. En tant qu'agent neutre, a-t-il vraiment le droit de posséder un "je"?

De plus, il ne serait pas possible de se décider entre le "pourquoi", le "comment", ou leurs formes négatives.  Comme si le "que ne" noyait toutes ces possibilités.

Mais c'est bien la question de la lourdeur invoquée par Ylou qui me fait hésiter.

Re : Emploi littéraire du "que"

Chantons les tendres souhaits

1er couplet
Que ne suis-je la fougère
Où, sur la fin d’un beau jour,
Se repose ma bergère
Sous la garde de l’amour ?
Que ne suis-je le zéphyre
Qui rafraîchit ses appas
L’air que sa bouche respire,
La fleur qui naît sous ses pas ?

2e couplet
Que ne suis-je l’onde pure
Qui la reçoit dans son sein ?
Que ne suis-je la parure
Qui la couvre après le bain ?
Que ne suis-je cette glace,
Où son minois répété
Offre à nos yeux une grâce
Qui sourit à la beauté ?

3e couplet
Que ne puis-je, par un songe,
Tenir son cœur enchanté ?
Que ne puis-je du mensonge
Passer à la vérité ?
Les dieux qui m’ont donné l’être
M’ont fait trop ambitieux,
Car enfin je voudrais être
Tout ce qui plaît à ses yeux !

Que ne a une valeur optative : irréel du présent (ici) ou du passé. En français contemporain : ah si...

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

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Re : Emploi littéraire du "que"

Ah, merci P'tit Prof. En effet, il y a une sorte de plainte dans le "que ne".

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

8

Re : Emploi littéraire du "que"

Mort de rire.
Je ne savais pas qu'il existait toute une discipline pour s'exercer au ridicule.

9

Re : Emploi littéraire du "que"

Orphalesegrammaire......

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

Re : Emploi littéraire du "que"

Chaoui a écrit:

Mort de rire.
Je ne savais pas qu'il existait toute une discipline pour s'exercer au ridicule.

Que ne l'aviez-vous su plus tôt !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

11

Re : Emploi littéraire du "que"

Pauvre Molière, lui qui croyait avoir écrit un chef-d'oeuvre !
Un maboul passe, et c'est tout le forum qui devient un asile. smile
Tiens, un petit résumé de "Les Précieuses ridicules", ça ne fait pas de mal de relire de temps en temps ses classiques.


La fille et la nièce d’un bon bourgeois, nommé M. Gorgibus, sont deux pédantes qui ne rêvent que de se voir entourées de beaux esprits, gens à la mode qui ne parlent que dans un style prétentieux ; elles ont changé leurs noms de Madelon et de Cathos pour les noms plus sonores d’Aminte et de Polixène et elles se posent en précieuses. Gorgibus, qui, avant tout, est un homme de gros bon sens, veut marier ces jeunes filles avec deux jeunes gens de bonne maison, nommés La Orange et du Croisy. Ces jeunes gens s’expriment avec simplicité et naturel, ce qui ne les recommande pas auprès de Cathos et de Madelon qui les éconduisent avec mépris. Les deux gentilshommes jurent de se venger et envoient chez elles, à cet effet, deux valets impudents, qui se donnent pour des hommes de qualité.

Nos deux sottes prennent les extravagances du marquis de Mascarille et du vicomte de Jodelet, puisque tels sont les noms qu’ils se sont donnés, pour la perfection de l’esprit et de la galanterie. Tout à coup, les maîtres arrivent, le bâton à la main, chercher leurs domestiques ; ils ne manquent pas de railler les coquettes sur le choix de leurs admirateurs et les laissent confondues et accablées de honte. Gorgibus les engage un peu rudement à profiter de la leçon et elles disparaissent devant cette apostrophe foudroyante : « Allez-vous cacher, vilaines, allez-vous cacher.

Re : Emploi littéraire du "que"

P'tit prof a écrit:

Que ne suis-je la fougère

Que ne a une valeur optative : irréel du présent (ici) ou du passé. En français contemporain : ah si...

Ylou a écrit:

Ah, merci P'tit Prof. En effet, il y a une sorte de plainte dans le "que ne".

Mais cette construction de "que ne" demande l'indicatif. Jamais le conditionnel, comme dans le tour proposé par 'antiphon77'.

Re : Emploi littéraire du "que"

deux jeunes gens de bonne maison, nommés La Orange et du Croisy.

La Grange !

... ne supra crepidam  sutor iudicaret. Pline l'Ancien

14 Dernière modification par Chaoui (30-10-2018 02:30:21)

Re : Emploi littéraire du "que"

C’est une belle fleur que la rose.
Qu’est-ce que c’est que la liberté ?

D’accord. Rien à dire.
Que ne suis-je la fougère
Où, sur la fin d’un beau jour,
Se repose ma bergère
Sous la garde de l’amour ?
………………
Que ne suis-je le zéphyre
………………….
Que ne suis-je l’onde pure

C’est très beau.
Mais écrire que ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité, quand on a sous la main le si simple  "comment", c’est écrire français en ourdou. Il n’y avait là rien à mâchonner ou à mâchouiller,  ou à traire sur un site de langue, il fallait le renvoyer comme tel.  Le beau est dans la simplicité et le naturel, pas dans les contorsions acrobatiques absconses prétendant à l'originalité, juste bonnes à irriter le lecteur.
Amen !

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Re : Emploi littéraire du "que"

Abel Boyer a écrit:
P'tit prof a écrit:

Que ne suis-je la fougère

Que ne a une valeur optative : irréel du présent (ici) ou du passé. En français contemporain : ah si...

Ylou a écrit:

Ah, merci P'tit Prof. En effet, il y a une sorte de plainte dans le "que ne".

Mais cette construction de "que ne" demande l'indicatif. Jamais le conditionnel, comme dans le tour proposé par 'antiphon77'.

Oui en effet.

Avec nos pensées nous créons le monde. Bouddha

16 Dernière modification par glop (30-10-2018 10:12:52)

Re : Emploi littéraire du "que"

Chaoui a écrit:

C’est une belle fleur que la rose.
Qu’est-ce que c’est que la liberté ?

D’accord. Rien à dire.
Que ne suis-je la fougère
Où, sur la fin d’un beau jour,
Se repose ma bergère
Sous la garde de l’amour ?
………………
Que ne suis-je le zéphyre
………………….
Que ne suis-je l’onde pure

C’est très beau.
Mais écrire que ne deviendrait-on malade après avoir mangé une telle quantité, quand on a sous la main le si simple  "comment", c’est écrire français en ourdou. Il n’y avait là rien à mâchonner ou à mâchouiller,  ou à traire sur un site de langue, il fallait le renvoyer comme tel.  Le beau est dans la simplicité et le naturel, pas dans les contorsions acrobatiques absconses prétendant à l'originalité, juste bonnes à irriter le lecteur.
Amen !

Je ne vous suis pas. Vouliez-vous écrire :"Que ne deviendrait-on pas malade..." Même dans ce cas la formule ne me semble pas très compréhensible.

En ce qui me concerne, si l'envie me prenait d'écrire "que ne suis-je en bonne santé", cela voudrait dire "Pourquoi ne suis-je pas en bonne santé" et j'exprimerais ainsi un souhait.
"Que ne suis-je" est une simplification poétique de "pourquoi ne suis-je pas" ou "Je regrette de ne pas être".

Nomina si nescis, perit cognitio rerum. Edward Coke

17 Dernière modification par Chaoui (30-10-2018 13:06:21)

Re : Emploi littéraire du "que"

glop a écrit:

Je ne vous suis pas. Vouliez-vous écrire :"Que ne deviendrait-on pas malade..." Même dans ce cas la formule ne me semble pas très compréhensible.

Mais non, je ne veux pas écrire cela,  j'ai dit que c'était de l'ourdou smile. J'ai dit qu'il fallait utiliser "comment" pour écrire tout simplement  comme tout le monde : "comment ne deviendrait-on pas malade après avoir mangé une telle quantité de..."

En ce qui me concerne, si l'envie me prenait d'écrire "que ne suis-je en bonne santé", cela voudrait dire "Pourquoi ne suis-je pas en bonne santé" et j'exprimerais ainsi un souhait.
"Que ne suis-je" est une simplification poétique de "pourquoi ne suis-je pas" ou "Je regrette de ne pas être".

Mais oui, bien sûr : "que ne suis-je en bonne santé" signifie hélas, dommage que je ne sois pas en bonne santé, comme j'aimerais, comme j'aurais aimé, comme j'aurais voulu être en bonne santé.
Ça ne peut pas signifier autre chose.

Messages [ 17 ]

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