Il y a dans les raisonnements de Jeanneney une grave erreur, qui est facilement décelable par tous ceux qui pratiquent Google Livres (ce qui montre, a contrario, qu'il manque d'expérience directe) : Google Livres/Books ne pratique pas de choix raisonné parmi les livres à sa disposition. On constate très bien que ses principes de reproduction n'ont ni queue ni tête : parfois la machine n'a photographié que le tome III d'un ouvrage en cinq volumes, et parfois le même ouvrage, dans la même édition, est reproduit trois, quatre ou cinq fois pour la seule raison que trois, quatre ou cinq bibliothèques le possèdent...
Imagine-t-on d'ailleurs des représentants hautement qualifiés de Google (qui à ma connaissance n'existent pas), se relayant dans une bonne douzaine de bibliothèques du monde pour sélectionner des ouvrages dignes d'être reproduits et en rejetant d'autres ? Sur quels critères ? Dans quelle intention ? Comment sauraient-ils ce que ces livres contiennent ? La vitesse de reproduction des livres, qui n'est limitée que par le temps nécessaire pour tourner les pages, serait considérablement réduite par leur examen, plus encore par leur lecture.
Google, qu'il s'agisse du moteur de recherches ordinaire ou de Google Livres, ne lit pas ce qu'il reproduit. Voilà la meilleure garantie possible d'impartialité. Google est une machine. C'est à nous, humains, qu'il appartient de plonger dans la masse des textes et d'y faire nos propres sélections ; mais si Google n'existait pas, nous serions bien incapables de le faire.
Sauf empêchement majeur, je consulte Google Livres plusieurs fois par jour depuis plusieurs années. Je n'ai jamais, pas une seule fois, remarqué quoi que ce soit qui fasse supposer un choix partisan, impérialiste ou anglophone, comme le soupçonne bien à tort Jean-Noël Jeanneney, qui s'avère en l'occurrence être un auteur de biblio-fiction.