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Robert 2009 deux orthographes pour le prix d'une | 2008-02-10

Pour son édition 2009 Le Petit Robert valide 6000 variantes orthographiques ()

Le Robert bouscule l'orthographe

Propos recueillis par Charlotte Menegaux (Le Figaro)

ENTRETIEN - Dans la version 2009 du dictionnaire, quelque 6000 mots sont proposés avec deux orthographes différentes. La directrice éditoriale s'explique.

Le Robert innove. Le dictionnaire dépoussière l'orthographe traditionnelle en intégrant dans son édition 2009 de nombreux mots écrits de manières différentes. Exemple : on pourra désormais choisir entre «charriot» et «chariot». «Pizzéria» peut également s'écrire avec ou sans accent sur le «e» et «pop-corn» avec ou sans tiret. Au total, quelque 6.000 mots sur 60.000 répertoriés par le dictionnaire sont ainsi proposés avec deux orthographes possibles pour s'adapter aux nouveaux usages de la langue au quotidien. Le point avec Marie-Hélène Drivaud, directrice éditoriale du Petit Robert.

lefigaro.fr : Vous avez choisi de multiplier les orthographes acceptées pour un seul mot. Cela veut-il dire qu'on ne peut plus se fier au dictionnaire ?

Marie-Hélène Drivaud : Cette évolution est tout à fait naturelle, comme par exemple la possibilité d'écrire «clef» ou «clé», qui est très ancienne. Historiquement, l'orthographe bouge, et c'est très bien ainsi ! Il faut savoir que nous adaptons l'évolution des mots en fonction de leur usage.

C'est-à-dire ?

Des mots comme «pizzeria» ou «kebab» par exemple, qui sont employés très couramment, peuvent être francisés. On acceptera donc un accent sur le «e» de ces deux mots, dans cette optique. Ce qui ne sera pas le cas avec des mots latins employés par des spécialistes uniquement.

Il y a également une tendance à la soudure des mots composés ?

Oui car c'est une évolution naturelle. Qui se souvient que «gendarme» ou «vinaigre» s'écrivaient «gens d'arme» et «vin aigre» ? La soudure des mots composés se fait depuis longtemps. Dans un premier temps, elle co-existe avec une forme non-soudée, puis elle prend le pas sur elle. Au final, elle permet surtout de simplifier l'emploi du pluriel.

Si l'on vous suit, beaucoup d'orthographes pourraient changer. Comment fixer une limite ?

Chaque fois qu'une modification a paru excessive ou perturbante, elle n'a pas été retenue. Il y a des choses qui sont encore sensibles, pour lesquelles il est trop tôt. La suppression de l'accent circonflexe en est une, par exemple. Ou bien l'évolution du mot «sèche-cheveux», dont nous avons accepté l'occurrence sans le «x» quand il est employé au singulier. Nous avons simplement admis cette possibilité en «remarque», mais à terme, cette orthographe évoluera peut-être.

Votre démarche est donc de simplifier l'usage de la langue. Ne risquez-vous pas de céder à la facilité ?

Notre souci est de faire évoluer le dictionnaire de la même manière que la langue et l'orthographe changent. Beaucoup de gens s'imaginent que c'est gravé dans le marbre, mais si on reprend les mots du premier dictionnaire de l'académie, en 1694, plus de la moitié ne s'écrivent plus de la même manière ! Depuis 1993, où une grosse remise en question avait été faite sur l'orthographe, nous n'avons cessé de travailler. C'est une tâche compliquée, qui a des implications historiques et culturelles très importantes.


Le Robert 2009 préfère l'imbécilité

S.P. Le Nouvel Observateur (07-10-2008)

Les nouveaux crus des dictionnaires sont attendus avec autant d'impatience que la cuvée nouvelle du beaujolais. Pour juger du vin, il faudra attendre fin novembre, mais on peut d'ores et déjà consulter sans modération l'édition 2009 du Petit Robert qui sort en librairie.

Une édition qui marque un tournant en matière orthographique: 6.000 mots ont désormais droit à une double entrée, qui prend en compte une orthographe «réformée» et une orthographe «classique».

Cela concerne les mots d'origine étrangère comme pizzéria ou braséro, qui ont maintenant droit à un accent qui les francise définitivement. La marque du pluriel est aussi un autre indice de francisation (les tifosis).

Certains mots composés reliés par un trait d'union sont soudés, comme le popcorn, autostop ou parebrise. Marie-Hélène Drivaud, directrice éditoriale du Petit Robert, interrogée par le Figaro.fr, explique à ce propos: «C'est une évolution naturelle. Qui se souvient que gendarme ou vinaigre s'écrivaient gens d'arme et vin aigre?» D'autres mots composés perdent leur -s ou leur -x final (le bloc-note, essuie-verre, sèche-cheveu ou lance-flamme); d'autres encore le gagnent au pluriel (des cache-cœurs, des grille-pains). Dans le cas des exceptions orthographiques bien connues, le Robert signale qu'il faudrait mieux écrire charriot que chariot ou imbécilité plutôt qu'imbécillité. Les accents circonflexes n'ont pas disparu cette fois-ci.

Un chariot ou un charriot ?

Le Petit Robert poursuit sur sa lancée réformatrice : dès l'édition de 1993, où il avait déjà enregistré 1.500 rectifications, il mettait en application les recommandations du Conseil supérieur de la langue française en la matière. Mais le nombre des mots qui possèderont dorénavant deux graphies a fortement augmenté, puisque l'ancienne orthographe n'a pas disparu des notices du dictionnaire. Et Alain Rey, lexicologue du Robert, précise: «Chaque fois qu'une modification a paru excessive ou perturbante, elle n'a pas été retenue, car ce n'est pas au dictionnaire, tenu de refléter le bon usage, de jouer les réformateurs par principe, encore moins les révolutionnaires, ni de suivre les modes sans réflexion».

Malgré ses précautions, les réactions hostiles ne se sont pas fait attendre, comme on a pu le constater en lisant les commentaires des lecteurs du Figaro.fr. L'un d'eux déclare: «Le Robert rejoint donc ceux qui sans cesse depuis 1968 n'arrêtent pas de céder à la facilité.» Un autre propose d'échanger «deux dicos Robert contre Larousse... pour cause de trahison»; un autre encore traite Alain Rey de «gauchiste» et pense que l'entreprise du Robert cache «un plan d'abrutissement et d'analphabétisation des masses».

C'est sans doute excessif, mais cette orthographe à deux visages risque de poser quelques problèmes. Une pensée tout d'abord pour les joueurs de Scrabble et les cruciverbistes qui ne sauront plus à quelle graphie se vouer. Plus sérieusement, que feront les journaux et les éditeurs? Pourra-t-on trouver le même mot écrit de deux façons différentes dans le même journal sous prétexte que ni l'une ni l'autre forme n'est fautive? Rédacteurs et correcteurs iront-ils dans le sens du conservatisme ou dans celui de la réforme?

Et quand il s'agira de rééditer des ouvrages, faudra-t-il en «moderniser» l'orthographe?

Ce qui est sûr, c'est qu'on ne se débarrasse pas facilement de ses habitudes orthographiques et que les nouvelles graphies vont encore longtemps cohabiter avec les anciennes.

    Source : http://www.lefigaro.fr ; http://bibliobs.nouvelobs.com(valider les liens)
    Posté par gb