ZUT, interj.
Fam. Synon. crotte (fam.), flûte1, mince, ; merde (trivial).
A. [Le locuteur s'adresse à un interlocuteur]
1. [Pour marquer l'irritation, l'exaspération, l'impatience, le désir d'en finir] Je ne l'ai pas dit, encore une fois ! Si, vous l'avez dit. Non ! Si ! Zut! Vous m'embêtez à la fin ! Vraiment on n'a pas idée de ça ! Vouloir me persuader que j'ai dit une chose quand je n'ai même pas ouvert la bouche (COURTELINE, Ronds-de-cuir, 1893, p. 179). Zut !... Flûte !... C'est trop embêtant aussi !... C'est toujours la même chose... On ne peut rien dire, rien faire sans être reçu comme un chien... (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 352).
2. [Pour marquer le mépris, l'indifférence] Presque tous les soirs (...) il fait à sa femme des scènes terribles ! Dame... franchement !... Et qu'est-ce que sa femme peut lui répondre ? Elle lui répond : zut ! dit Marianne (FEUILLET, Honn. d'artiste, 1890, pp. 56-57).
B. [Le locuteur réagit par rapport à lui-même ou à une situation qui le concerne de près ou de loin]
1. [Pour marquer la colère, l'irritation] La nuit tombait déjà, lorsque le 106e (...) put enfin s'installer, tellement il y avait eu de confusion dans le choix et dans la désignation des emplacements. Zut ! dit furieusement Chouteau, je ne mange pas, je dors ! C'était le cri de tous les hommes (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 136).
2. [Pour marquer le désir d'en finir une fois pour toutes, de ne plus évoquer tel problème, telle situation] Ah ! et puis zut, à la fin du compte ! Il est plus simple de ne point songer à tout cela (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 25).
Loc., vieilli. Zut et bran! Synon. zut et crotte ! V. bran C.
3. [Pour marquer le déplaisir causé par un contretemps, la contrariété devant une obligation] Il sonne à tour de bras. La sonnette ... se détache, tombe et roule au loin ... Consternation de Médard. Zut ! j'ai cassé la sonnette ! (COURTELINE, Conv. Alceste, Cochon de Médard, 1892, II, p. 53). C'est mon tour d'allumer le feu, zut ! Il va falloir casser du petit bois dans le hangar, et s'abîmer les mains, et porter des bûches (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 44).
Étymol. et Hist. 1813 z'ut (lang. poissard, s. réf. ds ESN.: Allons, z'ut pour les petits boyaux, Y faut m'régaler d'un pigeon) ; 1833 zuth (BOREL, Champavert, p. 177 : zuth et bran pour les Prussiens) ; 1837 zut (BALZAC, C. Birotteau, p. 318 : Tôt ou tard, zut ! l'usurier siffle son homme comme moi ce verre de vin). Mot issu de l'agglutination de deux élém., z- et -ut, dont le premier représente un -s final dans allons ou je te/lui dis; le z de liaison, motivé ou non, était caractéristique du genre poissard qui fleurissait au déb. du XIXe s. (cf. BRUNOT t. 10, p. 100 et p. 263) et a fourni notre attest. de 1813. Le deuxième élém., ut ou sa var. hut, apparaît dans un sens voisin de zut dans les textes suiv. : 1791 (Le Véritable P. Duchesne f., Grand compliment..., p. 3 ds QUEM. DDL t. 32: Allons, allons, hut ! pas de ça) ; 1797 (La Petite poste de Paris, no 32, 12 pluviôse an 5, p. 352, ibid. : et ut, j'ai bu ma goutte) ; 1804 (MARTAINVILLE, Une Demi-heure de cabaret, p. 11 [Barba], ibid. : qu'il aille à Charenton, et hut...) ; et en partic., dans une plaisanterie pop. fréq. au déb. du XIXe s. ca 1803 (AUBERT, Les Nouv. mots poissards [Daniel], ibid. : Sais-tu la musique ; allons, [...] ut (cité dans une éd. de 1816 par R. DAGNEAUD, Les Éléments pop. dans le lex. de la Comédie Humaine de Balzac, p. 201)) ; 1808 (HAUTEL, s.v. ut: Sais-tu la musique ? Oui : Eh bien, Ut ! Quolibet qui, d'une farce comique, est passé parmi le peuple ; se dit à quelqu'un que l'on est ennuyé d'entendre, et équivaut à va te promener, retire toi) ; 1809 ([LECLAIR], Médit. hussard, p. 30 : sais-tu la musique ! eh bien ut...). La finale -ut est d'orig. obsc. et a reçu plusieurs explications: qq. dict. voient dans zut un croisement entre les interj. zest et flûte ; J. ORR ds Arch. ling. t. 1, pp. 60-65 considère -ut comme une atténuation euphémique de foutre par les intermédiaires : outre, out ; selon BOUTMY 1883, s.v. ut, zut serait une corruption de ut, formule de souhait dans l'arg. des typographes (GATTEL 1797 : Ut [...] C'est le premier mot du souhait que se faisoient en buvant les anciens imprimeurs [...] : Ut tibi prosit meri potio (Que grand bien vous fasse ce bon vin pur). Par abréviation l'on se contenta ensuite du mot ut) ; enfin, on pourrait voir dans ut l'onomat. d'un sifflement, accompagné ou non d'un geste de la main, marquant un mouvement rapide, un escamotage, la disparition de qqn ou de qqc., et p. ext., le désir de voir disparaître ou s'éloigner qqn ou qqc. ; en ce cas, ut serait à rapprocher de pf(t)* et ses var., en partic. uit chez A. Daudet (cf. BURNS 1916, p. 132). Bbg. DARM. 1877, p. 68. GEORGE (K.E.M.). Formules de nég. et de refus en fr. pop. et arg. Fr. mod. 1970, t. 38, p. 312. ORR (J). Qq. étymol. scabreuses. Archivum linguisticum. 1949, t. 1, pp. 60-65. (tlfi:zut)
- Parmi plusieurs étymologies, celle-ci : un maître de solfège tatillon persistait à reprendre une de ses élèves, qui montait la game, en lui râbachant : 'Ut, mademoiselle, dites : ut !'. Excédée la jeune fille finit par l'imiter en accentuant la liaison : 'Dites 'ut' ! Dites ut ! Z-ut [etc]. (cité dans AYN)
- D'abord avec une valeur voisine de vlan, ouste (Balzac, César Birotteau) ; p.-ê. du rad. onomat. zek-, de zest, et finale -ut, atténuation de foutre (d'où outre, out') ou empruntée à la finale de flûte. (GR)
- Mot issu de l'agglutination de deux élém., z- et -ut, dont le premier représente un -s final dans allons ou je te/lui dis; le z de liaison, motivé ou non, était caractéristique du genre poissard qui fleurissait au déb. du XIXe s. (cf. BRUNOT t. 10, p. 100 et p. 263) et a fourni l'attest. de 1813. La finale -ut est d'orig. obsc. et a reçu plusieurs explications : qq. dict. voient dans zut un croisement entre les interj. zest et flûte ; J. ORR ds Arch. ling. t. 1, pp. 60-65 considère -ut comme une atténuation euphémique de foutre par les intermédiaires : outre, out ; selon BOUTMY 1883, s.v. ut, zut serait une corruption de ut, formule de souhait dans l'arg. des typographes (GATTEL 1797 : Ut [...] C'est le premier mot du souhait que se faisoient en buvant les anciens imprimeurs [...] : Ut tibi prosit meri potio (Que grand bien vous fasse ce bon vin pur). Par abréviation l'on se contenta ensuite du mot ut) ; enfin, on pourrait voir dans ut l'onomat. d'un sifflement, accompagné ou non d'un geste de la main, marquant un mouvement rapide, un escamotage, la disparition de qqn ou de qqc., et p. ext., le désir de voir disparaître ou s'éloigner qqn ou qqc. ; en ce cas, ut serait à rapprocher de pf(t)* et ses var., en partic. uit chez A. Daudet (cf. BURNS 1916, p. 132). (TLFi)
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