GOUAPE, subst. fém.
Populaire
A. − Vieilli. Conduite de voyou, ,,vagabondage, fainéantise`` (Delvau 1883). C'est pas malheureux, un garçon de si bonne famille ! donner comme ça dans la gouape (Bruant1901, p. 162).
B. − P. méton.
1. Vieilli. Ivrogne (d'apr. France 1907).
2. Mauvais sujet, voyou. Sortant d'un bal à deux heures du matin et se défendant contre trois mauvaises gouapes (Zola, Assommoir, 1877, p. 627). Comment avait-elle pu, mille millions de tonnerres coucher avec cette gouape, ce petit maquereau entretenu par un vieux pédéraste cacochyme ? (Aymé, Travelingue, 1941, p. 246). La plupart des Français de la bourgeoisie croyaient de bonne foi que Briand était une gouape illettrée, condamnée pour attentat à la pudeur, et qui parlait le langage de la pègre (Mauriac, Journal, 1950, p. 227) :
Il est tout calamité ! Bon à rien ! Qu'à nous piller ! Nous rançonner ! Une infection ! Une infection ! Nous écharper sans merci !... (...) Hein dis-le encore ! Dis, cancre à poison ! Dis-le là tout de suite, que tu veux nous faire crever !... Crever de chagrin ! De misère ! Que je t'entende au moins avant que tu m'achèves ! Dis, gouape infecte ! Céline, Mort à crédit, 1936, p. 386.
− En appos. avec valeur d'adj. Nous ne connaissions pas cette coupe de cheveux à Toulouse, à mi-distance de la coupe artistique et de la coupe gouape (Abellio, Pacifiques, 1946, p. 28).
Prononc. : [gwap]. Étymol. et Hist. 1847 goîpe « viveur » (Féval, Fils du diable, VI, 33, d'apr. G. Esnault ds Fr. mod. t. 16, p. 298) ; 1840 gouape « monde des débauchés » (poissard ds Esn. : secrétaire de la gouape) ; 1861 gouape « débauché » (Larch.) ; 1866 « filou » (Delvau). Empr. à l'arg. esp.guapo « rufian, coupe-jarret », attesté dep. le xves. (statuts de la Guardugna [association de malfaiteurs esp.] d'apr. Dauzat Ling. fr. p. 283; le mot, devenu adj. en esp., a pris le sens « vaillant, élégant, beau »), lui-même prob. empr. au fr. région. du Nord : a. pic. vape, wape, gape « fade, insipide (en parlant d'aliments) », « affaibli (en parlant d'une personne) », « dérangé (en parlant de l'estomac) » (v. DEAF, s.v. gape et FEW t. 14, p. 168a ; wap comme terme d'injure en 1379 ds Du Cange), issu du lat. class. vappa, qui signifiait à la fois « vin éventé » et « vaurien »; un croisement avec un mot germ. pour expliquer le g initial (Cor., s.v. guapo ; FEW t. 14, pp. 168b-169) n'est pas nécessaire (cf. K. Baldinger ds Mél. Gossen, pp. 89-104). Fréq. abs. littér. : 25. Bbg. Baldensperger (F.). Notes lexicol. Fr. mod. 1938, t. 6, p. 254. - Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 290. - Reinh. 1963, p. 84. - Sain. Arg. 1972 [1907], p. 246, 264, 285. - Sain. Sources t. 1 1972 [1925], p. 160; pp. 342-343, t. 3 1972 [1930], p. 57, 69, 105, 363. (tlfi:gouape)
- On peut l'évaluer à 45000 hommes. (duCP, 740)
- Provençal mod. gouapo « gueux », de l'argot esp. guapo « brigand », probablt de l'anc. picard wape, gape, lat. vappa « vin éventé ; vaurien », d'orig. obscure. (GR)