BARBAQUE, subst. fém.
Arg. Viande de boucherie de mauvaise qualité. Synon. bidoche, carne :
1. − Ah ! les potes, hein, la barbaque qu'on nous a balancée hier, tu parles d'une pierre à couteaux ! (...) J'ai dit aux gars : « Attention, vous autres ! N'mâchez pas trop vite : vous vous casseriez les dominos ; des fois que l'bouif aurait oublié de r'tirer tous les clous ! » Barbusse, Le Feu, 1916, p. 26.
2. Nous possédions un fort réchaud à gaz lampant « Sulfridor », un peu explosif, dans l'arrière-boutique-gymnase... L'hiver, je mettais le pot-au-feu... C'est moi qui achetais la barbaque, la margarine et le frometon... Céline, Mort à crédit, 1936, p. 471.
3. [Cendrars à l'hôtelier :] − (...) Y a-t-il moyen d'avoir une belle poularde avec des champignons à la crème ? Oui ? Alors c'est parfait car, vous savez, nous l'avons plutôt sauté, en Afrique, de la barbaque de chameau, de la carne de singe et des conserves japonaises, on en a marre, Jicky et moi... Cendrars, L'Homme foudroyé, 1945, p. 56.
Rem. ,,À Paris, il semble que ce fût spécialement un mot des abattoirs (...) où l'on disait aussi « barbaquer », travailler dans la viande`` (A. Dauzat, L'Arg. de la guerre, 1918, p. 62).
− P. méton., péj. [En parlant d'une pers.]
Marchand de barbaque. ,,Proxénète qui se livre à la traite des blanches`` (Sandry-Carr. 1963).
À la barbaque! ,,À la viande!, commandement (du troupier) pour aller à l'assaut`` (Esn. Poilu 1919).
PRONONC. : [baʀbak].
ÉTYMOL. ET HIST. − 1873 arg. barbaque « sobriquet d'un boucher marron de la Chapelle » (Gazette des tribunaux, juin, d'apr. G. Esnault dans Mercure de France, 1932, t. 237, p. 705) ; 1877-80 « viande » (d'apr. G. Esnault, ibid.) ; 1894 (C. Virmaître, Dict. d'arg. fin-de-s., p. 25 : barbaque : Viande [argot des voleurs]). Orig. obsc. Peut-être empr. à l'esp. du Mexique barbacoa « sorte de gril servant à fumer la viande » attesté dep. 1518 (Colección de Documentos Inéditos del Archivo de Indias, Madrid 1864, I, 315 dans Fried., s.v. barbacoa) qui aurait été transposé à la viande fumée (FEW t. 21, 1, p. 468), lui-même prob. d'orig. arawak (Fried., loc. cit.). Cette hyp. convient bien du point de vue phonét. et sém., mais le cheminement géogr. du mot n'est pas élucidé, aucun texte ne confirmant que ce mot ait été rapporté par les soldats de l'expédition fr. au Mexique. Un empr. au roum. berbec « mouton » (Dauzat68 et Lar. Lang. fr.) convient moins bien du point de vue phonét. et n'est pas fondé historiquement.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 18.
BBG. − Sain. Lang. par. 1920, p. 107, 294, 531. (tlfi:barbaque)
Barbaque, usuel à l'école J.-B. Say, Paris, 1900-1901 ; a pour vraisemblable étymologie le roumain berbec, mouton, et daterait de 1855 ; nos soldats, occupant la Dobroudja, y mangèrent le mouton d'Orient ; le même traitement de -bec en -bac se retrouve dans morbaque (Esnault1919)
- Le mot signifie proprement viande de brebis (Berry : barbis : brebis). (SAINXIX)
- Provincialisme berrichon (barbi, brebis). (SAIN-TRANCH)
- Orig. incert., p.-ê. empr. à l'esp. du Mexique barbacoa « gril servant à fumer la viande » qui aurait pris le sens de « viande fumée » (→ Barbecue), ou roumain berbec « mouton » ; P. Guiraud préfère y voir une suffixation argotique de barbis, prononc. pop. de brebis. (GR)
- Démodé. (Agatha1915)
- Ancien terme de caserne et vieux mot d'argot parisien ; signalé depuis 1870 à l'armée, surtout semble-t-il dans garnisons du N. Pourrait venir du roumain berbec (mouton, prononcé barbec) et dater de la guerre de Crimée, hypothèse fortifiée par la variante barbèque parfois enregistrée dans dictionnaires ; par l'usure, a perdu sa valeur péj. originaire. (Dauzat1918)