BRADER, verbe trans.
A.− [L'obj. désigne un produit]
1. Vx. Gaspiller :
1. − Prends de la farine, dit-elle, c'est tout de même. (...) C'est la provision de la semaine. − Ne la brade pas quand même ! ajoute la malheureuse. Bernanos, Nouv. Histoire de Mouchette, 1937, p. 1308.
2. Vendre (une marchandise) à vil prix. Vous ne vendez pas votre marchandise, vous la bradez (Lar. 19e).
− P. ext., fam. Se débarrasser de (quelque chose) à un prix très bas. Brader une vieille voiture (Lar. encyclop.), brader son ancien mobilier (Dub.).
− Emploi abs. Brader des marchandises à la braderie.
B.− Au fig. (ds le domaine pol.), fam. et péj. Brader l'Empire, les colonies (Rob.), brader un territoire (Lar. Lang. fr.) :
2. Et pourtant, il circule encore des tracts innommables, où l'on accuse, une fois de plus, Pierre Laval d'avoir vendu la France, bazardé la flotte, bradé l'aviation... L'OEuvre,12 févr. 1941.
− Emploi pronom., rare (cf. Caput 1969). Faire une mésalliance :
3. Quoiqu'elle ait une dot, elle ne se braderait pas en m'épousant ; je n'ai pas de fortune, mais j'ai un bon état. Lar. 19e, 1867.
PRONONC. : [bʀade], (je) brade [bʀad].
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1440 Flandre « griller les viandes » (D'apr. R. Marquant, La Vie économique à Lille sous Philippe le Bon, Paris, 1940, p. 149), sens demeuré dans le liég. (Glons) bradi « flamber » (Haust et Gesch.) ; 2. a) rouchi « gâter, ne pas tirer d'une chose tout le parti possible » (Hécart), wallon « gâter, gaspiller » (Grandg.) ; liég. « gaspiller, p. ex. le pain en le mangeant » (Gesch.) ; b) liég. « gaspiller la marchandise en la vendant à vil prix » (Haust), rouchi « vendre sa marchandise à vil prix » (Hécart), pic. « id. » (Jouanc.) ; d'où 1867 fr. brader (A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 2e éd. : Brader. Vendre à vil prix. Argot des marchands de bric-à-brac) ; 1867 (Lar. 19e). Empr. au m. néerl. braden « rôtir » (FEW t. 15, 1, p. 233 ; Dauzat 1968 ; Bl.-W.5 ; EWFS2) auquel se rattachent l'a. h. all. brātan, m. h. all. braten, ags. brāēdan (De Vries Nederl., s.v. braden ; Klüge20, s.v. braten). Le mot est parvenu en fr. à travers les dial. wallon et pic. Le sens de « gaspiller, gâcher » (d'où vendre à vil prix ») est issu de celui de « détruire, gâter par le feu » ; cf. le néerl. braderie « maison où l'on fait bombance » et le flam. bradeeren « gaspiller », cités par Gesch.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. − Quem. 2es. t. 1 1970, p. 9. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], p. 155. − Vaganay (L. J.). Notules. Neuphilol. Mitt. 1939, t. 40, pp. 374-375. (tlfi:brader)
- brader v. COMM. - TLF, 1867, Delv. ; FEW, ND1, PR[67], 1867.
- 1866 - «Brader, v. a. et n. Vendre à vil prix. Argot des marchands de bric-à-brac [...]» Delvau, Dict. de la langue verte (Paris, 2e éd.) - R.A. (bhvf:brader)
- DEL cite la braderie de Lille, très pittoresque.